Gyne´cologie Obste´trique & Fertilite´ 41 (2013) 711–714

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Revue de la litte´rature

Quelle strate´gie pour ame´liorer le recrutement des donneurs de game`tes ?§ What strategy to improve the recruitment of gamete donors?§ D. Le Lannou Biologie de la reproduction-CECOS, CHU hoˆpital-Sud, 16, boulevard de Bulgarie, 35000 Rennes, France

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 24 juin 2013 Accepte´ le 16 octobre 2013 Disponible sur Internet le 21 novembre 2013

Face a` une tre`s forte demande de dons de game`tes, sperme et ovocytes, les centres sont souvent confronte´s aux difficulte´s pour recruter des donneurs en nombre suffisant. Pour de´velopper ce recrutement, il faut des moyens financiers et humains pour les accueillir dans de bonnes conditions, une information et une promotion forte pour motiver les de´marches de dons et diversifier les modes de recrutement. Le don en France vient de couples qui ont des enfants et il est gratuit. L’ouverture du don aux hommes et femmes sans enfant ainsi que la re´mune´ration de ces dons sont discute´s. ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Mots cle´s : Don de game`tes Recrutement de donneurs France Keywords: Gametes donation Donor recruitment France

A B S T R A C T

To a high demand for donated gametes, sperm and oocytes, centers often face difficulties in recruiting enough donors. To increase the number of donors are needed financial and human resources to accommodate them in good conditions, information and a strong promotion to motivate approaches donations, diversify recruitment methods. In France, the gametes donation comes from couples with children and is free. The opening of the gift for men and women without children and remuneration of these gifts are discussed. ß 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. Introduction Le don de game`tes est une me´thode commune´ment admise aujourd’hui pour pallier les diffe´rentes formes d’infertilite´. Pour re´pondre a` cette demande importante, il est ne´cessaire de disposer de nombreux donneur(se)s et ce recrutement a toujours e´te´ une pre´occupation majeure pour tous les centres qui prennent en charge ce type d’AMP, et quels que soient les pays et les le´gislations existantes. Le syste`me franc¸ais de « Don » pre´sente des particularite´s qui s’appuient sur quelques principes e´thiques fondateurs tels que l’anonymat, la gratuite´, l’exigence de paternite´ ou de maternite´ avant le don. L’acce`s au don de game`tes est re´serve´ aux couples pre´sentant une infertilite´ reconnue, ou` lorsque le couple risque de

§ Cet article a fait l’objet d’une communication lors des dix-huitie`mes Journe´es nationales de la Fe´de´ration franc¸aise d’e´tude de la reproduction (Rouen, 25– 27 septembre 2013). La re´daction pre´sente ses excuses a` l’auteur ainsi qu’a` la FFER ˆ a` un incident technique (Ndlr.). pour ce retard de publication du

Adresse e-mail : [email protected] 1297-9589/$ – see front matter ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2013.10.005

transmettre une maladie grave. La solidarite´ entre couples est donc au centre du processus du don. Pour favoriser le recrutement de ces donneur(se)s, il faut adopter une strate´gie qui va prendre en compte les diffe´rentes e´tapes du parcours de don, avec en premier lieu une information claire sur l’infertilite´ et les besoins en donneur(se)s, puis une promotion du don par une motivation adapte´e et une incitation forte, et enfin un accueil et un accompagnement psychologique et me´dical irre´prochable dans ce parcours difficile.

2. Situation actuelle 2.1. Le don de sperme De`s le de´but des anne´es 1970, les CECOS ont e´te´ confronte´s au proble`me de la me´connaissance totale de l’infertilite´ masculine ; par tradition l’infertilite´ du couple e´tait naturellement fe´minine, puisque l’homme avait un comportement sexuel normal. Il a donc fallu informer l’opinion publique sur l’infertilite´ masculine, pour pouvoir ensuite justifier le recours au don de sperme, et enfin

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montrer la ne´cessite´ de ce don de sperme. « La ste´rilite´ masculine existe aussi » e´tait le premier message a` faire passer dans le public. La demande de don de sperme a augmente´ de manie`re tre`s importante dans les anne´es 1970–1980 et les CECOS ont e´labore´ des campagnes de communication pour augmenter le recrutement des donneurs. De 1971 a` 1984, plus de 3000 donneurs se sont pre´sente´s dans les CECOS et 10 000 enfants sont ne´s de l’IAD. Une premie`re campagne nationale a e´te´ lance´e en 1984, qui a e´te´ reprise par de tre`s nombreux me´dias. L’impact sur les donneurs qui se sont pre´sente´s spontane´ment dans les centres a e´te´ significatif, avec une augmentation de plus de 30 % entre 83 et 84, mais qui est retombe´ a` son niveau ante´rieur l’anne´e suivante. Ceci nous a montre´ que les campagnes d’information devaient eˆtre renouvele´es re´gulie`rement. L’apparition des techniques de fe´condation in vitro et de micro-injection en 1993 a permis une prise en charge re´ellement efficace de l’infertilite´ masculine, avec pour conse´quence une diminution importante des demandes d’IAD (de pre`s de 50 %). De plus, les prouesses techniques de ces nouvelles me´thodes d’AMP et leur me´diatisation excessive ont pu faire croire que tous les proble`mes d’infertilite´ pourraient eˆtre re´solus par la science. L’inse´mination artificielle avec don de sperme apparaıˆt alors, pour certains, comme une me´thode ancienne et « de´mode´e », elle reste cependant pour de nombreux couples leur seul recours. Malgre´ ces difficulte´s, le syste`me franc¸ais, qui s’appuie sur le re´seau parfaitement identifie´ des CECOS, a fait preuve de son efficacite´ en matie`re de recrutement des donneurs de sperme depuis plus de 35 ans. Les donne´es recueillis par la fe´de´ration des CECOS entre 1973 et 2006 font e´tat de plus de 10 000 donneurs de sperme et de plus de 45 000 enfants ne´s de ces dons [1]. Globalement, en France les CECOS couvrent toute la demande de don de sperme des couples infertiles. Il ne manque pas de donneurs, mais on a toujours besoin de nouveaux donneurs. 2.2. Le don d’ovocytes Le don d’ovocytes a connu une e´volution tre`s diffe´rente. D’apparition plus re´cente (premie`re naissance en France en 1985), il est reste´ longtemps une activite´ marginale re´serve´e a` quelques patientes pre´sentant une dysge´ne´sie gonadique ou une insuffisance ovarienne pre´mature´e. Depuis quelques anne´es, les indications du don d’ovocytes se sont e´largies aux insuffisances ovariennes de´butantes ou aux e´checs de fe´condation, qui concernent majoritairement des femmes de plus de 38 ans. Les centres ont alors e´te´ tre`s rapidement submerge´s par les demandes et n’ont pas pu y faire face. Un tourisme procre´atif vers l’e´tranger (l’Espagne, la Gre`ce, les pays de l’est) s’est ainsi mis en place. Concernant les donneuses d’ovocytes, l’analyse de l’activite´ en France est a` l’e´vidence moins satisfaisante que pour le don de sperme et le manque de donneuses reste un proble`me pre´occupant. Ainsi en 2011, nous avons rec¸u 544 candidates donneuses dans les CECOS et 293 ont e´te´ ponctionne´es. En fonction des indications, on sait qu’il faudrait au minimum 750 ponctions et probablement le double pour satisfaire toutes nos demandes. 3. Nouvelles strate´gies A` l’e´vidence, si l’activite´ de don de sperme dans les CECOS pre´sente globalement un bilan positif, meˆme si les de´lais d’attente sont encore trop longs, il n’en est pas de meˆme pour l’activite´ de don d’ovocytes et nous avons de´ja` de´nonce´ cette situation catastrophique depuis plusieurs anne´es [2]. Les raisons de ces difficulte´s dans le recrutement des donneuses d’ovocytes sont nombreuses et bien identifie´es : c’est le manque de moyens financiers et humains attribue´s au e´quipes prenant en charge ce don ; c’est le manque de visibilite´ du re´seau franc¸ais qui s’appuie sur plusieurs structures non coordonne´es publiques mais

aussi prive´es et sur une opacite´ des re´sultats ; c’est l’insuffisance de promotion du don d’ovocytes. 3.1. Valoriser l’activite´ de Don d’ovocytes En France, aucun budget n’e´tait alloue´ aux centres pour faire fonctionner le don d’ovocytes, alors que ces centres sont de´ja` surcharge´s par leur activite´ d’AMP classique. Or, il est ne´cessaire de disposer d’e´quipes pluridisciplinaires suffisamment e´toffe´es, en me´decins, biologistes, psychologues, secre´taires, techniciens, infirmie`res et/ou sages-femmes, pour assurer une activite´ qui demande beaucoup de pre´sence aupre`s des donneuses et des receveuses. En effet, la prise en charge des donneuses requiert avant tout une grande disponibilite´ de l’e´quipe me´dicale pour re´pondre a` leur demande si l’on ne veut pas voir les candidates se de´courager devant un de´lai trop long. Si le principe de gratuite´ est maintenu pour les donneuses, cela ne signifie pas qu’elles doivent supporter tout ou partie des frais occasionne´s par ce don. Elles doivent eˆtre indemnise´es e´quitableˆ ts re´els ge´ne´re´s par ment sur la base d’un remboursement des cou leur de´marche. Depuis 3 ans, des contacts ont e´te´ pris aupre`s des ministe`res de tutelle, de l’IGAS et un travail collaboratif entre les professionnels, la DGOS et l’ABM a permis d’aboutir re´cemment a` la mise en place d’une MIG don d’ovocytes [3]. On peut espe´rer que ce financement cible´ vienne aplanir les difficulte´s mate´rielles que connaissent tous les centres, mais il n’en demeure pas moins que la re´ussite de ce programme est lie´e a` la motivation des personnels de´die´s a` cette activite´ et a` leur adhe´sion aux principes qui re´gissent le don. 3.2. Ame´liorer l’accueil Le don de game`tes est une de´marche contraignante qui demande une forte motivation et une certaine disponibilite´, et ceci est particulie`rement e´vident pour le don d’ovocyte. Et si certaines de ces contraintes sont ine´vitables, telles que les de´placements au centre, les injections d’hormones ou la ponction d’ovocytes, d’autres peuvent eˆtre grandement minimise´es par une e´quipe me´dicale disponible. Ainsi, Bari a observe´ chez les donneuses d’ovocytes que le reproche le plus fre´quent e´tait l’attente dans la clinique pour les rendez-vous de consultation et les e´chographies [4]. L’e´quipe me´dicale doit donc eˆtre parfaitement motive´e et totalement disponible pour accueillir les donneur (se)s dans de bonnes conditions. Le donneur(se) n’est pas dans une demande mais dans une offre de service. C’est a` l’e´quipe me´dicale de se mettre a` la disposition du donneur(se) et non l’inverse. Les donneur(se)s doivent eˆtre prioritaires dans le service. 3.3. Information, promotion du don Il faut une information ge´ne´rale sur le don de game`tes : il n’est pas rare d’entendre des donneuses potentielles penser que le don d’ovocytes n’existait pas en France. Des campagnes d’informations doivent donc eˆtre organise´es au niveau national. L’Agence de biome´decine a un roˆle important a` jouer puisque c’est elle qui est mandate´e officiellement pour faire la promotion du don. Cependant, l’expe´rience montre que ce sont surtout les campagnes de proximite´ via les me´dias qui semblent eˆtre les plus efficaces. L’accent doit eˆtre mis sur les besoins importants que nous avons en matie`re de donneur(se)s, mais sans tomber dans le discours ne´gatif de la pe´nurie de donneur(se)s. Les individus peuvent adhe´rer a` un syste`me qui fonctionne bien et veulent y apporter leur contribution, mais seront moins motive´s pour participer a` un syste`me qui fonctionne mal. Sensibiliser les couples fertiles aux dons de

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game`tes ne´cessite une information sur la ste´rilite´ et ses conse´quences pour le couple. Les modalite´s pratiques du don de game`tes doivent eˆtre bien comprises. C’est e´vident en particulier pour les ovocytes pour lesquelles la proce´dure du don est lourde et contraignante. Il faut aussi promouvoir le don de game`tes par des campagnes « publicitaires », telles que des publicite´s re´dactionnelles dans des journaux nationaux comportant une e´dition re´gionale. Faire prendre conscience aux couples qui ont le bonheur d’avoir des enfants de la de´tresse de ceux qui en sont prive´s. 3.4. Diversifier les modes de recrutement Un couple motive´ pour donner ses game`tes est un couple qui a e´te´ sensibilise´, de pre`s ou de loin a` la de´tresse de l’infertilite´ : ce peut eˆtre une histoire personnelle, l’histoire d’un proche ou de la famille, ou une histoire plus ge´ne´rale. En pratique aujourd’hui, on note plusieurs modes de recrutement pour initier une de´marche chez les donneur(se)s de game`tes, qui agissent toujours par altruisme et solidarite´, vis-a`-vis des couples infertiles. Ce peut eˆtre des donneur(se)s spontane´s, qui ont rec¸u une information par les diffe´rents me´dias : ces patients ont le bonheur d’avoir des enfants, et souhaitent, par solidarite´, faire partager ce bonheur a` ceux qui en sont prive´s. Ce sont souvent de´ja` des donneurs de sang, de moelle. Mais ce souhait de donner ses game`tes fait aussi souvent e´cho a` une difficulte´ personnelle que le couple a ve´cu, ils ont eu a` un moment donne´ un doute sur leur propre possibilite´ d’avoir des enfants, ce qui les a sensibilise´ a` la de´tresse des couples infertiles. Les campagnes d’information et de promotion re´alise´e par l’Agence de biome´decine doivent permettre d’augmenter ce mode de recrutement. Certains donneur(se)s sont dits relationnels : ils ont e´te´ sensibilise´s au don de game`tes par leur entourage, la famille, des amis, qui sont confronte´s a` l’infertilite´ et en attente de dons : les donneurs oriente´s par les couples receveurs dans le programme sont intervertis et leurs game`tes sont dirige´s anonymement vers d’autres receveurs. Ce syste`me est efficace mais n’est pas suffisant, en effet, tous les couples receveurs ne peuvent pas motiver une donneuse ; dans notre expe´rience, c’est de 30 a` 50 % des couples en demandes de don qui nous adressent une donneur(se). De plus, ce syste`me peut eˆtre a` l’origine de pressions psychologiques trop importantes de la part des couples demandeurs vis-a`-vis de leur entourage proche, entravant la liberte´ individuelle dans la de´cision du don et cre´ant une obligation morale contre nature. En France, ce mode de recrutement a repre´sente´ pendant longtemps le mode principal de recrutement de donneuses (plus de 70 %). Enfin, certaines donneur(se)s font un don par re´ciprocite´. Ce sont des couples qui, ayant be´ne´ficie´ d’un don de sperme pour une infertilite´ masculine, ou d’un don d’ovocyte pour une infertilite´ fe´minine, apre`s la naissance de leur(s) enfant(s), souhaitent en retour aider d’autres couples a` avoir un enfant en donnant leurs game`tes. L’adhe´sion des couples a` ce syste`me de re´ciprocite´ est en ge´ne´ral excellent puisque ce sont des couples qui ont de´ja` accepte´s psychologiquement la notion de don de game`tes pour eux-meˆmes, la de´marche inverse de donner devient alors assez naturelle. Ces diffe´rents modes de recrutement sont de´ja` largement utilise´s en France, mais puisque notre objectif doit eˆtre d’augmenter le nombre de donneur(se)s, il faut imaginer d’autres mode`les possibles : le partage d’ovocytes ou Egg Sharing. Dans cette proce´dure, les donneuses d’ovocytes sont des patientes de´ja` en cours de fe´condation in vitro pour elles-meˆmes. Si de nombreux ovocytes sont recueillis, la patiente peut accepter qu’une partie d’entre-eux soit donne´e pour un autre couple. C’est le partage d’ovocytes. Ce syste`me a l’avantage de ne pas faire courir de risques supple´mentaires a` la donneuse, puisque qu’elle suit le

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traitement pour elle-meˆme. Mais l’inconve´nient est de diminuer les chances de grossesses (en termes de taux cumule´s de grossesses frais + congele´s par ponction) de la donneuse. En France, quelques e´quipes ont propose´ ce syste`me mais les re´sultats sont tre`s de´cevants : le partage d’ovocyte repre´sente moins de 5 % des donneuses. Au Royaume-Uni, ce syste`me est parfaitement organise´ depuis de nombreuses anne´es, sous le controˆle de la HFEA et il repre´sente la majeure partie du recrutement des donneuses [5]. Mais pour motiver les couples dans ce partage d’ovocytes, ils be´ne´ficient d’une forte re´duction des frais du traitement de FIV. Une autre approche serait d’envisager un partage d’ovocytes apre`s vitrification. Aujourd’hui, chez les patientes en cours de FIV qui ont une re´ponse multi-folliculaire, la solution consiste a` mettre tous ces ovocytes en FIV, puis a` congeler les embryons obtenus, parfois tre`s nombreux. Les grossesses et naissances survenant plus facilement chez ces patientes, un certain nombre de ces embryons risque de se retrouver « abandonne´s », hors projet parental, avec les conse´quences e´thiques et psychologiques souvent dramatiques. La vitrification ovocytaire nous permet d’avoir une alternative : ne mettre en FIV que quelques ovocytes frais et vitrifier les autres, ce qui permettrait, en cas d’e´chec de poursuivre les tentatives avec les ovocytes de´vitrifie´s sans diminuer les chances de grossesses de ces couples, et en cas de grossesse d’orienter ulte´rieurement apre`s la naissance ces ovocytes vers le don si le couple le souhaitait. Ce syste`me a e´te´ mise en place avec succe`s en Chine ou` le don d’ovocytes est tre`s controˆle´ et ou` seules les patientes en cours de FIV peuvent eˆtre donneuses [6]. Dans toutes les situations de re´ponse multi-folliculaire en FIV, le de´veloppement de la vitrification des ovocytes pourrait eˆtre potentiellement a` terme un mode de recrutement efficace. 3.4.1. Faciliter l’acce`s au don, en s’appuyant sur les structures prive´es Seuls les centres publics peuvent eˆtre agre´e´s pour effectuer la gestion du don de game`tes. C’est le cas pour le don de sperme qui s’appuie sur un re´seau de centres publics les CECOS, re´unis au sein d’une fe´de´ration nationale. Un seul centre par re´gion (excepte´ Paris – ˆIle-de-France) facilite la visibilite´ de cette activite´ sur le territoire national. On peut regretter qu’il n’y ait pas la meˆme visibilite´ pour le don d’ovocytes, ce qui est probablement un frein au don, les donneuses potentielles ne sachant pas tre`s bien ou` s’adresser. Concentrer tout le don de game`tes sur un seul centre re´gional permet de plus d’atteindre un niveau d’activite´ suffisant garantissant l’efficacite´ des proce´dures, et facilitant la gestion de la liste d’attente et des appariements entre donneur(se)s et couples receveurs. Cependant, on ne peut ignorer que plus de la moitie´ de l’activite´ d’AMP en France est re´alise´e dans les centres prive´s. Concernant le don de sperme, si la gestion du don est confie´e au CECOS, les cycles d’AMP avec don de sperme (IAD, FIVD) sont re´alise´s dans les centres publics ou prive´s. Avec les possibilite´s de vitrification ovocytaire, on peut imaginer une meˆme collaboration, avec un centre publique re´gional qui assure la gestion du don, mais qui s’appuie sur des structures publiques ou prive´es. Le partage d’ovocytes apre`s vitrification serait une premie`re e´tape vers cette collaboration public-prive´ L’IGAS dans son rapport de 2010, l’avait ainsi propose´ : « Dans cet esprit, comme pour les paillettes de sperme, les ovocytes congele´s recueillis ou ayant fait l’objet d’un don au de´cours d’une AMP, devraient eˆtre ge´re´s par des banques publiques. Les ovocytes congele´s pourraient eˆtre attribue´s par ces banques a` des centres publics ou prive´s qui re´aliseront les phases de fe´condation et de re´implantation de l’embryon, comme elles le font de´ja` pour les FIV intraconjugales avec don de sperme. Recommandation no 15 : le de´veloppement de banques d’ovocytes issus du don doit rester dans le champ des

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centres publics et s’appuyer sur l’expertise du re´seau des CECOS en la matie`re ». 3.5. E´largir le recrutement: don sans enfant Traditionnellement en France, les donneurs de game`tes sont issus de couples fertiles qui ont eu des enfants. Georges David avait propose´ de`s l’origine des CECOS ce principe qui se re´sumait dans cette affirmation : « Le don de game`tes est le don d’un couple qui a des enfants a` un couple qui en de´sire ». C’est dans la prise de conscience de l’injustice entre le bonheur d’eˆtre parent et la de´tresse lie´e a` la ste´rilite´ que va apparaıˆtre le de´sir et la volonte´ d’aider les autres. Ce syste`me solidaire, altruiste, est parfaitement cohe´rent avec l’ide´e fondamentale du don : Donner est un acte de ge´ne´rosite´ base´ sur un altruisme volontaire. Le donneur ne tire aucun profit de son acte, il ne peut pas eˆtre re´tribue´. La gratuite´ est absolue. Afin d’augmenter le recrutement, il serait possible d’ouvrir le don aux individus sans enfant, et de fait la loi de bioe´thique de juillet 2011 a pre´vu cette possibilite´ (Article 29 : Lorsqu’il est majeur, le donneur peut ne pas avoir procre´e´. Il se voit alors proposer le recueil et la conservation d’une partie de ses game`tes. . .). Cet article n’est toujours pas applique´, faute de de´cret, et il est curieux de constater que le le´gislateur a pense´ ne´cessaire de proposer un contre don dans ce cas particulier – conserver une partie de ses ovocytes – comme si la motivation des donneuses sans enfant ne serait pas suffisante. Et de fait si les donneurs sans enfant sont autorise´s dans tous les autres pays qui pratiquent le don de game`tes, c’est le plus souvent associe´ a` une re´mune´ration (indemnisation. . .). Et les e´tudes re´alise´es dans ces pays sur la motivation des donneur(se)s ont montre´ qu’ il peut y avoir deux motivations, altruiste ou financie`re pour initier une de´marche de dons, qui coexistent chez de nombreux donneurs. Et c’est leur situation socioprofessionnelle qui influence directement leur motivation : soit ce sont de jeunes individus ce´libataires sans enfant et leur motivation premie`re est alors financie`re, soit ce sont des individus vivant en couple avec des enfants et leur motivation est alors d’abord altruiste [7–9]. La motivation financie`re peut eˆtre tre`s forte, puisque de tre`s nombreux donneurs sans enfant ne donneraient pas s’ils n’e´taient pas re´tribue´s. 3.6. Re´mune´rer les donneuses La gratuite´ du don de game`tes est obligatoire dans tous les pays europe´ens. Un donneur de game`tes ne peut pas eˆtre re´tribue´ financie`rement pour son acte. Cependant, ceci n’exclu pas une indemnisation des frais occasionne´s par le don. Et tout le monde s’accorde pour reconnaıˆtre cette indemnisation comme e´tant parfaitement justifie´e et indiscutable. Mais c’est sur l’interpre´tation de cette notion d’indemnisation que de grandes divergences apparaissent d’un pays a` l’autre. A` l’origine, l’indemnisation ne concerne que les frais re´els occasionne´s par le don : on conc¸oit aise´ment que tous les frais me´dicaux soient pris en charge par l’organisme qui ge`re le don d’ovocyte. Il est e´galement ne´cessaire que les frais annexes (frais de de´placement, perte de salaire pour les dons de sperme ou d’ovocyte) soient e´galement pris en charge. Mais il s’agit bien ici de frais re´els, effectivement de´bourse´s par le donneur(se), et qui par de´finition seront tre`s variables d’un donneur a` l’autre. C’est ce syste`me qui est propose´ en France : la mise en place du budget MIGAC pour le don d’ovocytes est fait pour couvrir ces frais. En aucun cas, le donneur(se) ne pourra tirer un be´ne´fice financier de son don.

Cependant, devant les difficulte´s pour recruter les donneurs, leur re´tribution financie`re peut paraıˆtre une solution pragmatique, efficace qui cre´e une forte incitation pour de nombreux individus dans leur prise de de´cision. Cette re´tribution e´tant interdite par les lois, la plupart des pays contournent celles-ci en proposant une indemnisation forfaitaire, une compensation : c’est par exemple le cas de l’Espagne ou chaque donneuse d’ovocyte rec¸oit 900 euros, et chaque donneur de sperme rec¸oit 45 euros par e´jaculat, quels que soient les frais re´ellement engage´s pour son don. Le donneur(se) dans ces cas en retire un ve´ritable be´ne´fice financier. Auparavant, les donneurs e´taient surtout des e´tudiants. Mais, avec la crise e´conomique, le profil des donneurs a change´. Ainsi, Josep Barrado, responsable d’une clinique de Barcelone, estime qu’entre 80 et 90 % des hommes et entre 60 et 70 % des femmes candidats au don dans sa clinique sont de´sormais des adultes au choˆmage. La motivation principale du don devient a` l’e´vidence financie`re et le risque est l’apparition de donneurs professionnels. Ce syste`me est tre`s efficace, mais implique un renoncement a` un principe e´thique fondamental, adopte´ en France comme dans la plupart des pays europe´ens : la non-commercialisation du corps humain. Le corps humain ou tout produit du corps humain est hors-commerce, on ne peut le vendre on ne peut l’acheter. C’est le respect de la dignite´ de l’eˆtre humain et de son droit a` la liberte´ de de´cision qui impose ce principe reconnu par tous. La gratuite´ du don laisse a` chaque personne sa pleine liberte´ de de´cision, sans pression ni contrainte. 4. Conclusion Plusieurs possibilite´s existent pour sensibiliser les hommes et les femmes a` donner leurs game`tes et il est important de promouvoir ces diffe´rents modes de recrutement. La notion de don et donc de gratuite´ doit rester un principe absolu, qui permet le respect de la liberte´ individuelle de donner ou de ne pas donner. La de´marche altruiste du donneur de game`tes ne´cessite une prise de conscience de la signification de ce don, permettre a` un autre couple d’avoir un enfant, et ceci ne peut se re´aliser pleinement que chez les couples qui ont de´ja` le bonheur d’avoir des enfants. ˆ ts De´claration d’inte´re Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Hennebicq S, Juillard JC, Le Lannou D, Fe´de´ration Franc¸aise des CECOS. Donne´es descriptives de l’activite´ d’assistance me´dicale a` la procre´ation avec don de spermatozoı¨des au sein des CECOS de 1973 a` 2006 en France. In: Jouannet, Mieusset, editors. Donner et apre`s. Paris: Springer eds; 2010. p. 3–15. [2] Le Lannou D, Griveau JF, Veron E, et al. Pour un don d’ovocytes a` la Franc¸aise. Gynecol Obstet Fertil 2010;38:23–9. [3] La circulaire campagne ARS 2013: (Annexe IV: Dotations MIGAC-MERRI – 3 : La MIG AMP) Guide MIG 2013 – p. 169. [4] Barri P. Indications et re´sultats du don d’ovocytes en Espagne. J Gynecol Obstet Biol Reprod 2005;34:45–7. [5] Ahuja KJ. China’s model of egg donation is a policy lesson for Britain. Reprod Biomed Online 2012;24:257–60. [6] Cai LB, Qian XQ, Wang W, et al. Oocyte vitrification technology has made eggsharing donation easier in China. Reprod Biomed Online 2012;24:186–90. [7] Daniels K, Feyles V, Nisker J, et al. Semen donation: implications of Canada’s Assisted Human Reproduction Act 2004 for recipients, donors, health professionals, and institutions. J Obstet Gynaecol Can 2006;28:608–15. [8] Purewal S, Van den Akker O. Systematic review of oocyte donation: investigating attitudes, motivations and experiences. Hum Reprod Update 2009;15:499– 515. [9] Yee S. ‘‘Gift without a price tag’’: altruism in anonymous semen donation. Hum Reprod 2009;24:3–13 [p. 608–15].

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