Gyne´cologie Obste´trique & Fertilite´ 42 (2014) 622–625

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Cas clinique

Me´tastase vaginale re´ve´latrice d’un ade´nocarcinome du coˆlon transverse Vaginal metastasis revealing an adenocarcinoma of the transverse colon D. Quaranta a,*, J. Delotte a, A. Bongain a, E´. Franc¸ois b,c, J.-M. Bereder d, J.-L. Bernard d a Service de gyne´cologie, obste´trique, reproduction et de me´decine fœtale, hoˆpital Archet II, centre hospitalier universitaire de Nice, 151, route de SaintAntoine de Ginestie`re, BP 3079, 06202 Nice cedex 3, France b Service de cance´rologie digestive, centre Antoine-Lacassagne, 33 avenue de Valombrose, 06189 Nice cedex 2, France c Service de chirurgie, centre Antoine-Lacassagne, 33, avenue de Valombrose, 06189 Nice cedex 2, France d Service de chirurgie ge´ne´rale et cance´rologie digestive, centre hospitalier universitaire de Nice, 151, route de Saint-Antoine-de-Ginestie`re, BP 3079, 06202 Nice cedex 3, France

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 26 novembre 2013 Accepte´ le 11 fe´vrier 2014 ˆ t 2014 Disponible sur Internet le 19 aou

Les localisations vaginales secondaires ont un pronostic sombre, sugge´rant une maladie disse´mine´e d’emble´e. Nous rapportons le cas d’une me´tastase vaginale pre´valente d’un ade´nocarcinome du coˆlon transverse. Une patiente de 65 ans consultait pour une masse vaginale. Apre`s 1 an d’errance diagnostique, la maladie e´tait me´tastatique avec une carcinose pe´ritone´ale. Apre`s chimiothe´rapie ne´oadjuvante, la prise en charge consistait en une chirurgie de cytore´duction avec chimiothe´rapie hyperthermie intra-pe´ritone´ale puis une radiothe´rapie adjuvante vaginale, sans re´cidive a` un an. Les me´tastases vaginales de cancer du coˆlon sont rares. Leur pronostic sombre justifierait un examen gyne´cologique syste´matique chez les patientes atteintes d’un cancer colo-rectal. ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Mots cle´s : Me´tastase vaginale Ade´nocarcinome colique Chimiothe´rapie ne´o-adjuvante Chimiothe´rapie hyperthermie intrape´ritone´ale

A B S T R A C T

Keywords: Vaginal metastasis Colon adenocarcinoma Neo-adjuvante chemotherapy Intra-peritoneal hyperthermic chemotherapy

Secondary localization to vagina had a severe prognosis, suggesting a disseminated metatastic disease. We report the case of prevalent vaginal metastasis of adenocarcinoma of the transverse colon. A 65 years old patient has consulted for vaginal mass. After delayed diagnosis, she presented with disseminated metastatic disease with peritoneal carcinomatosis. After neoadjuvant chemotherapy, the following treatment consisted of complete cytoreductive surgery combined with hyperthermic intraperitoneal chemotherapy and vaginal adjuvant radiotherapy. No recurrence occurred after one year. Vaginal metastasis of colon cancer are rare. The dark prognosis might justify a systematic gynecological examination of women presenting colorectal neoplasy. ß 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. Introduction Le cancer colorectal est au troisie`me rang des cancers les plus fre´quents avec 40 500 nouveaux cas par an en France (Institut national du cancer). La carcinose pe´ritone´ale en est un mode de disse´mination fre´quent, distinct des processus me´tastatiques vasculaires ou lymphatiques [1]. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Quaranta). http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2014.07.019 1297-9589/ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Les carcinomes vaginaux sont rares (1–2 % des cancers ge´nitaux) et touchent le plus souvent la femme me´nopause´e autour de 60 ans. Les localisations vaginales secondaires sont plus fre´quentes que les tumeurs primitives. Leur diagnostic se fait graˆce a` la biopsie. Le pronostic des tumeurs secondaires du vagin est sombre, sugge´rant une maladie me´tastatique disse´mine´e d’emble´e. Nous rapportons le cas d’une me´tastase vaginale re´ve´latrice d’un cancer du coˆlon transverse chez une patiente sexage´naire sans aucune symptomatologie digestive.

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2. Cas clinique Une patiente de 65 ans a consulte´ a` plusieurs reprises pour une masse de la face ante´rieure du tiers infe´rieur du vagin, de´couverte a` l’autopalpation. Elle ne pre´sentait pas d’ante´ce´dent particulier en dehors d’une dysplasie cervicale traite´e par conisation. Apre`s 1 an d’errance diagnostique et devant l’augmentation de volume, une biopsie e´tait re´alise´e, concluant a` un ade´nocarcinome Lieberkhu¨nien (immunophe´notypage CK20+/CK7 ) (Fig. 1). Une coloscopie identifiait la le´sion primitive localise´e au coˆlon transverse. Le bilan d’extension concluait au caracte`re me´tastatique d’emble´e : la tomographie par e´mission de positons (Fig. 2a, b et c) montrait une le´sion tissulaire hyper-me´tabolique intense de l’angle colique gauche avec diffusion pe´ritone´ale pe´ri-le´sionnelle, une localisation vaginale et 2 le´sions he´patiques droites synchrones. La patiente e´tait incluse dans l’essai randomise´ de phase III, PRODIGE 9, comparant l’efficacite´ de se´quences the´rapeutiques FOLFIRI/bevacizumab associe´es ou non au maintien du bevacizumab dans le cancer colorectal me´tastatique. Apre`s 8 cycles sans maintien (bras B), l’examen gyne´cologique mettait en e´vidence une re´gression comple`te de la me´tastase vaginale. Le scanner thoraco-abdominopelvien (TAP) montrait la disparition d’une le´sion he´patique secondaire droite, mais la persistance d’une le´sion hypodense du segment VI stable (14 mm), un e´paississement parie´tal de l’angle colique gauche et une discre`te infiltration pe´ri-le´sionnelle avec un ganglion satellite de 7 mm. Le dossier e´tait pre´sente´ en re´union de concertation pluridisciplinaire (RCP) : une prise en charge chirurgicale colique et he´patique e´tait envisage´e apre`s 3 cycles supple´mentaires. Le bevacizumab e´tait suspendu pour les 2 derniers cycles en pre´vision du geste chirurgical. Le scanner TAP de fin de

Fig. 1. Immunophe´notypage CK20+/CK7

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traitement confirmait la stabilite´ le´sionnelle et l’absence de nouvelle localisation : la strate´gie chirurgicale e´tait donc maintenue. L’intervention a consiste´ en une ile´o-colectomie droite e´largie au coˆlon transverse avec omentectomie, annexectomie bilate´rale, chole´cystectomie et me´tastasectomie du segment VI. Apre`s cytore´duction comple`te (index de carcinose pe´ritone´ale a` 4, score de cytore´duction a` 0), la patiente be´ne´ficiait dans le meˆme temps d’une chimiothe´rapie hyperthermique intra-pe´ritone´ale (CHIP) a` base de Mitomycine C1. Les suites ope´ratoires e´taient simples. Les re´sultats anatomopathologiques confirmaient un ade´nocarcinome Lieberkhu¨nien de 3 cm, pT3N0M1, et retrouvait la me´tastase he´patique. Une nouvelle RCP concluait en la ne´cessite´ d’effectuer une radiothe´rapie adjuvante a` vise´e prophylactique en regard de l’ancienne me´tastase vaginale. Un an apre`s la fin du traitement, il n’y avait pas de re´cidive chez notre patiente. 3. Discussion Les carcinomes primitifs du vagin sont rares. Ils sont le plus souvent de type cellulaire squameux (86 %), tre`s rarement de type ade´nocarcinome (8 %) [2]. Les ade´nocarcinomes vaginaux sont le plus souvent secondaires a` un ade´nocarcinome primitif ute´rin, rarement a` d’autres tumeurs (rein, sein, pancre´as). Elles sont souvent re´ve´le´es par des saignements post-coı¨taux ou post-me´nopausiques [3]. Quatrevingt dix pour cent des le´sions du tiers infe´rieur et de la paroi poste´rieure proviennent du tractus gastro-intestinal ; 92,5 % des le´sions du tiers supe´rieur et de la paroi ante´rieure proviennent du tractus ge´nital supe´rieur [4]. Les me´tastases vaginales de cancers

: a : immunomarquage CK20 (grossissement 100 et 20) ; b : immunomarquage CK7 (grossissement 100 et 20).

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Fig. 2. Tomographie par e´mission de positons : a : hyperfixation tumorale vaginale ; b : hyperfixation colique ; c : hyperfixation tumorale he´patique.

colorectaux sont rares et peu rapporte´es dans la litte´rature ; ces derniers pre´sentant un tropisme pre´fe´rentiel pour des organes tels que le foie et les poumons. Du fait de leur rarete´, elles peuvent faire l’objet d’une erreur diagnostique avec, pour conse´quence, un retard de prise en charge de la tumeur primitive. Quatre hypothe`ses peuvent expliquer la disse´mination du carcinome colique au vagin [2]. La premie`re est une extension directe par l’ouverture du cul de sac pe´ritone´al au cours d’une hyste´rectomie, facilitant ainsi la diffusion des cancers de la charnie`re recto-sigmoı¨dienne (la propagation a` partir de sites plus e´loigne´s e´tant impossible). La deuxie`me pourrait eˆtre un flux re´trograde a` travers les canaux lymphatiques, mais certains cas rapporte´s de tumeurs du sigmoı¨de se font sans envahissement ganglionnaire. La troisie`me voie, au travers du tractus ge´nital (via trompes et ute´rus), est un envahissement de la muqueuse vaginale, apre`s effraction de la se´reuse colique. Cependant, le fait que certaines de ces femmes aient subi une hyste´rectomie auparavant, pour une pathologie ute´rine be´nigne, remet en question cette voie de propagation. Enfin, la dernie`re voie qui semble la plus probable correspond a` une disse´mination sanguine, en permettant aux cellules tumorales du coˆlon de gagner les plexus ovariens ou les veines parame´triales, puis les veines vaginales. L’utilisation des techniques immuno-histochimiques permettant la mise en e´vidence de cytoke´ratines (CK), en particulier CK7 et CK20, constitue une aide pre´cieuse. Elle permet d’e´tablir l’origine des ade´nocarcinomes me´tastatiques dont le site primaire est inconnu. Les CK sont une famille de 20 filaments interme´diaires cytoplasmiques antige´niquement distincts trouve´s le plus souvent dans les cellules d’origine e´pithe´liale. CK7 est constamment pre´sente dans certains tissus : poumon, sein, vagin et ovaire, mais ge´ne´ralement absente du coˆlon. A` l’inverse, CK20 est mise en e´vidence presque exclusivement dans le tractus gastro-intestinal et semble eˆtre un marqueur utile et spe´cifique permettant de

distinguer les ade´nocarcinomes gastro-intestinaux d’autres localisations tumorales primitives. Par conse´quent, les carcinomes coliques ont un phe´notype CK7 /CK20+, a` l’inverse de nombreux autres carcinomes, dont le carcinome vaginal, ayant pre´fe´rentiellement un profil CK7+/CK20 , a` confronter a` une enqueˆte e´tiologique approfondie [2]. Quel que soit le site, lorsque des me´tastases surviennent dans le tractus ge´nital fe´minin, la survie est ge´ne´ralement faible en raison de l’association fre´quente a` une maladie me´tastatique disse´mine´e. En cas de carcinose pe´ritone´ale, une chirurgie radicale de cytore´duction associe´e a` une CHIP semble eˆtre la meilleure attitude the´rapeutique. Les re´sultats publie´s montrent une survie me´diane d’environ 30 mois [5,6]. La cytore´duction chirurgicale traite la maladie macroscopique. Elle consiste, en plus de la colectomie, en une omentectomie, chole´cystectomie et hyste´rectomie totale avec annexectomie bilate´rale, du fait de me´tastases ovariennes fre´quentes. Les pe´ritonectomies et l’e´lectro-e´vaporation des nodules de carcinose pe´ritone´ale sont re´alise´es au cas par cas. Si des reconstructions et anastomoses sont ne´cessaires, elles sont re´alise´es apre`s le bain de chimio-hyperthermie pour permettre aux tranches de section de tremper dans les produits cytotoxiques. Il n’existe aucun traitement standard pour les me´tastases vaginales [7]. Il y a 2 fac¸ons de prendre en charge ces le´sions. La premie`re et la plus fre´quemment utilise´e consiste en les traiter comme une tumeur vaginale primitive en associant radiothe´rapie externe et curiethe´rapie [8]. La seconde consiste en la traiter comme une me´tastase re´se´cable et en faire l’exe´re`se chirurgicale [9]. 4. Conclusion Les me´tastases vaginales de cancers colorectaux sont rares, mais leur pronostic est sombre, justifiant un examen gyne´cologique

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syste´matique chez les patientes atteintes. La re´alisation de biopsies vaginales semble indispensable devant toute le´sion suspecte afin d’en pre´ciser le type histologique et le caracte`re primitif ou secondaire. Leur prise en charge pre´coce et le de´ploiement d’un arsenal the´rapeutique ade´quat avec chimiothe´rapie ne´oadjuvante, the´rapies cible´es et chirurgie cytore´ductrice devraient permettre d’en ame´liorer le pronostic. ˆ ts De´claration d’inte´re Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Sadeghi B, Arvieux C, Glehen O, Beaujard AC, Rivoire M, Baulieux J, et al. Peritoneal carcinomatosis from non-gynecologic malignancies: Results of EVOCAPE 1 multicentric prospective study. Cancer 2000;88:358–63.

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[Vaginal metastasis revealing an adenocarcinoma of the transverse colon].

Secondary localization to vagina had a severe prognosis, suggesting a disseminated metatastic disease. We report the case of prevalent vaginal metasta...
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