Annales de dermatologie et de vénéréologie (2013) 140, 753—754

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ÉDITORIAL

Le xxie siècle sera religieux ou ne sera pas The twenty-first century will be religious or it will not be

« Le xxie siècle sera religieux ou ne sera pas » aurait déclaré André Malraux. Cette formule qui a parfois été retranscrite en « le xxie siècle sera spirituel ou ne sera pas » montre que le célèbre ministre de la culture du Général de Gaulle avait prévu ce nouveau sursaut de religiosité auquel nous assistons en France mais aussi dans le monde entier. Dans ce contexte, il est important que les dermatologues prennent en compte dans leur pratique quotidienne les relations qui existent entre les rites, les rituels, les cérémonies ou les célébrations de ceux qui pratiquent une religion et les dermatoses. Les affections dermatologiques particulières dues aux pratiques religieuses ont longtemps été quasi ignorées des dermatologues qui ne les connaissaient qu’à partir de cas cliniques succincts considérés comme des « curiosités amusantes » ou des « raroses ». Grâce à Nicolas Kluger qui a fait preuve d’une curiosité intellectuelle exceptionnelle, les « dermatoses dévotionnelles » ou « dermatoses du dévot » sont aujourd’hui mieux connues par les dermatologues franc ¸ais. Il a eu le mérite d’en réaliser une classification non pas par religion mais en fonction du type de complications occasionné par les pratiques : dermatoses physiques et traumatiques, liées à la répétition quotidienne d’un geste particulier ; en rapport avec des impératifs vestimentaires (turban, foulards. . .) ; des brûlures religieuses accidentelles ou volontaires ; dermatoses allergiques et irritatives par application directe ou indirecte de produits sur la peau ; dermatoses infectieuses liées à la promiscuité interhumaine, à un contact animal ou via l’environnement et enfin les rares situations de dermatoses induites dans un contexte de délire mystique ou l’interprétation religieuse de symptômes cutanés surprenants [1]. Un certain nombre d’interrogations subsistent. Il est impossible de déterminer la prévalence des différentes « dermatoses dévotionnelles » faute d’études épidémiologiques et surtout de statistiques publiques recensant l’appartenance religieuse des Franc ¸ais (le dernier recensement officiel date de 1872). Mais surtout, bon nombre de « dermatoses dévotionnelles » restent à identifier. Ce numéro des Annales de Dermatologie comporte trois articles qui enrichissent considérablement notre connaissance sur les « dermatoses dévotionnelles » mais surtout notre culture générale sur les pratiques religieuses. Le premier écrit par Nicolas Kluger et al. consacré à l’hyperpigmentation du front consécutive à une réaction phototoxique après l’application d’une huile chrismale a le mérite de nous rappeler l’existence de cette entité clinique qui reste exceptionnelle étant donné les millions d’individus qui rec ¸oivent un sacrement en période estivale ou printanière [2]. Le second écrit par Nicolas Kluger et al. a l’avantage de faire le point sur les stigmates et les

0151-9638/$ — see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2013.09.165

754 stigmatisés dont il en a été recensé plus de 300 depuis Saint-Franc ¸ois d’Assise en tenant compte des connaissances médicales les plus récentes [3]. Après la lecture de cet article richement documenté, les stigmates doivent plus être considérés comme un mystère médiéval mais plutôt comme des affections « médicales organiques, psychiatriques » ou authentiquement « psycho-somatiques ». Le troisième article écrit par Jean-Noël Dauendorffer et al. est une excellente mise à jour des connaissances sur la circoncision qui est l’intervention chirurgicale la plus controversée mais aussi la plus répandue puisqu’elle est réalisée selon l’Organisation mondiale de la santé chez 30 % des hommes de plus de 15 ans dans le monde [4]. Cette intervention intéresse d’autant plus les dermatologues que ceux-ci sont confrontés à de nombreuses questions de la part de leurs patients sur son intérêt dans la prévention des IST et de l’infection à VIH. Mais surtout les dermatologues sont amenés à poser l’indication de la réalisation de la circoncision dans certaines dermatoses génitales et à prendre en charge les complications dermatologiques rares mais possibles de cette intervention. Ces trois articles dans ce numéro des Annales de Dermatologie ont l’avantage de nous permettre d’enrichir notre culture générale et d’apporter des connaissances supplémentaires sur la place de la peau

Éditorial dans la religion et les représentations de la peau par les patients qui en découlent.

Références [1] Kluger N. Les dermatoses dévotionnelles. Ann Dermatol Venereol 2012;139:309—20. [2] Kluger N, Le Gallic G. Hyperpigmentation du front après un baptême : une réaction phototoxique due à l’huile chrismale. Ann Dermatol Venereol 2013, http://dx.doi.org/10.1016/j.annder. 2013.07.011. [3] Kluger N, Cribier B. Les stigmates : de Saint-Franc ¸ois d’Assise à l’hématidrose idiopathique. Ann Dermatol Venereol 2013, http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2013.07.021. [4] Dauendorffer JN, Cavelier-Balloy B, Renaud-Vilmer C. Circoncision et dermatologie. Ann Dermatol Venereol 2013, http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2013.06.008.

B. Halioua Service de dermatologie, institut Alfred-Fournier, 25, boulevard Saint-Jacques, 75014 Paris, France Adresse e-mail : [email protected] Disponible sur Internet le 21 octobre 2013

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