Pour citer cet article : Vandevoorde J, et al. Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA). Presse Med. (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017 Presse Med. 2015; //: ///

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Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA) Jérémie Vandevoorde 1,2, Thierry Baudoin 2, Béatrice Chabert 2, Emmanuelle Baudoin 2, Ambre Sanchez Valero 2

Disponible sur internet le :

1. Université Paris Ouest-Nanterre, Laboratoire IPSé, 92000 Nanterre, France 2. Hôpital René-Dubos, accueil de psychiatrie, 6, avenue de l'Île-de-France, 95300 Cergy-Pontoise, France

Correspondance : Jérémie Vandevoorde, Hôpital René-Dubos, accueil de psychiatrie, 6, avenue de l'Île-de-France, 95300 Cergy-Pontoise, France. [email protected]

Points essentiels La littérature épidémiologique montre que la population passant par les urgences générales ou psychiatriques a un risque suicidaire élevé. Le suicide est classé comme une mortalité évitable par l'OMS. Le potentiel suicidaire doit être évalué à différentes étapes de l'hospitalisation : quand le patient arrive aux urgences, pendant l'hospitalisation, après l'hospitalisation dans le cadre de la prévention et régulièrement dans le suivi. Les auteurs présentent une démarche simple d'investigation de l'activité suicidaire par le biais d'un entretien clinique semi-structuré et proposent une grille de report rapide et pratique, expérimentée aux urgences psychiatriques. Un cas réel et concret illustre la méthode tandis que sont rappelés les signes d'alerte suicidaires et les indices de majoration du risque de passage à l'acte à l'hôpital.

Key points The suicide assessment in the psychiatric emergencies: A semi-structured interview The epidemiological literature shows that the population going through general or psychiatric emergencies indicates a high suicide risk. Suicide is classified as an avoidable mortality by the WHO. Therefore, suicidal potential must be assessed at different stages of hospitalization: when the patient comes to the emergency, during hospitalization, after hospitalization in the context of prevention and regularly monitoring.

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tome xx > n8x > xx 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017 © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Pour citer cet article : Vandevoorde J, et al. Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA). Presse Med. (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017

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J. Vandevoorde, T. Baudoin, B. Chabert, E. Baudoin, A. Sanchez Valero

The authors present a simple approach to the investigation of suicidal activity through a semistructured clinical interview and propose a fast and convenient grid report, experienced at psychiatric emergencies. A real and concrete case illustrates the method whereas are reminded the suicide warning signs and indices of increase about risk of acting out at the hospital.

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e phénomène suicidaire est un véritable problème de santé publique. Quelques chiffres suffisent à lui donner une envergure inquiétante :  le geste suicidaire provoque 1 million de morts dans le monde et un décès toutes les 40 secondes chaque année ;  le suicide est la 13e cause mondiale de décès ;  le geste suicidaire implique 20 millions de tentatives de suicide dans le monde. En 2004, le Dr Catherine Le Galès-Camus, sous-directrice générale de l'OMS chargée des maladies non transmissibles et de la santé mentale, déclarait : « chaque décès par suicide a des conséquences dévastatrices du point de vue affectif, social et économique pour d'innombrables familles et amis. Il s'agit d'un problème de santé publique mondial et tragique qui provoque plus de décès que les homicides et les guerres réunis. Il faut d'urgence intensifier et coordonner l'action au niveau mondial pour éviter ces morts inutiles ». En 2014, Le Dr Margaret Chan [1], directrice générale à l'OMS, décrète un « état d'urgence mondial » en matière de prévention du suicide. En France, 10 359 personnes sont mortes par suicide en 2011 (soit un taux de 16,4 pour 100 000 habitants) [2]. Après ajustement méthodologique, le taux de mortalité par autolyse serait sous-évalué de 10 % (soit environ 11 500 morts) [3]. On relève parmi ces suicidés environ 40 enfants de moins de 14 ans et 500 adolescents. De surcroît, le phénomène suicidaire ne s'arrête pas à la mort effective d'une personne et inclut une activité psychologique bien plus large. Des enquêtes rapportent que :  entre 5,5 % [4]1 et 8 % [5]2 de la population française interrogée déclarent avoir fait au moins une tentative de suicide (TS) dans sa vie ;  2 % de la population présenteraient un risque suicidaire élevé [5] ;  3,9 % des 15–85 ans ont pensé à se suicider dans l'année qui s'est écoulée [4] ;  5 % des personnes âgées de 40 à 59 ans déclarent avoir eu des idées suicidaires au cours de l'année écoulée3 [6].

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Échantillon de [15–85] ans. Échantillon d'adultes (18 ans ou plus). Année 2010.

L'étude de la DREES [5] pour l'année 2002 estime que 195 000 TS font annuellement l'objet d'un contact avec le système de soins. Parmi elles, 162 000 passent par les urgences et 22 000 sont directement hospitalisées en service de médecine chirurgie obstétrique (MCO). Récemment, les données du réseau PMSI-MCO 2004–2011 et Oscour® 2007–2011 [7] estiment globalement que 63 % des passages aux urgences pour TS sont suivis d'une hospitalisation dont 9 % en psychiatrie et 54 % dans les unités médico-chirurgicales. En 2011, l'utilisation de l'hospitalisation en psychiatrie a augmenté de 9 à 12 %. La même étude estime que le nombre total de passages aux urgences hospitalières pour TS par an se situerait entre 176 000 et 200 000 (68 000 à 78 000 recours masculins, 108 000 à 120 000 recours féminins) avec une estimation à 95 000 hospitalisations par an en service de médecine chirurgie obstétrique pour un total de 70 000 personnes/an ; 90 % de ces hospitalisations durent moins de cinq jours et parmi elles, la moitié ne dure qu'un jour. Certaines de ces données sont toutefois sous-évaluées en raison de :  la non-prise en compte des suicidants non hospitalisés en MCO ;  des suicidants adressés directement aux urgences de psychiatrie, en unité de crise ou de suicidologie non classée MCO ;  des patients suicidants qui ne passent pas par l'hôpital. Rivallan [8] rappelle de même et à juste titre l'absence d'évaluation du rôle des CMP, de la psychiatrie de liaison et de l'utilisation en première intention du pôle de psychiatrie et de l'ensemble de ses interventions (prévention, réseaux, suivi ambulatoire, etc.). À cet égard, le geste suicidaire est le premier motif de sollicitation d'un médecin psychiatre par les somaticiens en SAU (36 % de demandes concernent les conduites suicidaires et 11 % les idées dépressives dans l'étude de Seletti et al. [9]). Les données sur le traitement de la problématique suicidaire aux urgences psychiatriques françaises sont peu nombreuses et aucune, à notre connaissance, ne rend compte d'un chiffre national. Dans son étude de l'année 2002, la DREES [5] estime le nombre final d'hospitalisations en psychiatrie pour tentative de suicide (y compris après passage en MCO) à 64 000 par an. L'étude de Moroge et al. (84 protocoles) [10], menée dans un hôpital marseillais, suggère que la population admise en service d'urgence du pôle de psychiatrie présente un risque suicidaire élevé (antécédent personnel de TS, score élevé à des questionnaires de risque). À la Salpêtrière, aux urgences de

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Pour citer cet article : Vandevoorde J, et al. Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA). Presse Med. (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017

Évaluation de l'activité suicidaire dans l'évaluation globale du risque suicidaire : motivation de la méthode Il existe un étrange paradoxe en suicidologie : on ne sait pas prédire scientifiquement le geste suicidaire et pourtant, on classe le suicide comme mortalité évitable. Plusieurs chercheurs ont proposé des méthodes d'évaluation pratiques et opérationnelles dans les services de santé. Séguin et al. [15,16] ont ainsi élaboré une méthode concrète connue dans le milieu suicidologique comme le modèle « RUD » :  « R » pour risque : l'évaluation consiste à recueillir les facteurs de risque ;  « U » pour urgence : l'évaluation consiste à évaluer l'imminence et la probabilité d'un passage à l'acte ;

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Pour l'année 2002.

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« D » pour danger : l'évaluation consiste à détecter la nature du scénario suicidaire et la dangerosité du mode opératoire choisi. D'un point de vue clinique, le risque suicidaire peut aussi être déterminé à partir de quatre grands axes psychopathologiques : les facteurs de risque, la pathologie psychiatrique, les processus psychologiques vulnérants et l'activité suicidaire en elle-même.

Facteurs de risque Après plusieurs années de recherche, la littérature scientifique a identifié de nombreux facteurs de risque du suicide. Rihmer [17] propose de différencier les facteurs de risque :  primaires : trouble psychiatrique, antécédent personnel ou familial de suicide, intention suicidaire communiquée, etc. ;  secondaires : isolement social, perte parentale précoce, événements de vie négatifs, etc. ;  tertiaires : sexe masculin, âge, etc. Morasz et Danet [18] classent ces facteurs en huit secteurs : les facteurs psychiatriques, psychologiques, sociaux, environnementaux, historiques, biologiques, conjoncturels et familiaux. En raison de leur complexité, l'évaluation d'une pathologie psychiatrique et celle des caractéristiques psychologiques méritent néanmoins de faire l'objet d'une démarche séparée. D'un point de vue épistémologique, les facteurs de risque établissent le danger suicidaire au niveau d'une population mais n'ont pas de pertinence au niveau individuel, sauf à considérer ce que Shea [19] appelle des prédicteurs de risque, c'est-à-dire les « caractéristiques d'un individu donné indiquant la vraisemblance de l'imminence d'un suicide chez ce même individu ». Autrement dit, des facteurs de risque personnalisés, « sur mesure » en quelque sorte. C'est d'autant plus vrai qu'il est actuellement impossible de prédire le geste suicidaire et qu'aucune de ces variables n'est nécessaire, suffisante, spécifique aux suicidaires ni suffisamment sensible au sens psychométrique du terme pour discriminer les futurs suicidants ou suicidés des autres [20]. L'annexe 2, disponible en version électronique, présente une grille de synthèse des principaux facteurs de risque, nommée grille SYFR (pour Synthèse des Facteurs de Risque).

Pathologie psychiatrique La détection d'une pathologie psychiatrique et son rôle dans l'entretien de l'activité suicidaire est un axe important de l'élaboration du risque suicidaire. En effet, 90 % des suicidés souffriraient d'un trouble mental au moment de leur mort [21–24]. Les plus cités sont la dépression majeure, les troubles bipolaires, les troubles de personnalité antisociale et borderline, l'anxiété sociale, les états de stress post-traumatique, l'alcoolisme et les schizophrénies. Toutefois, comme le rappellent justement Wenzel et al. [25] : « virtuellement, toutes les maladies mentales peuvent être des facteurs de risque. » (traduction personnelle).

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psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent, les données de 1992 et 2002 placent l'état dépressif et les tentatives de suicide respectivement en deuxième (15,9 %) et troisième (11,8 %) motif de consultation après l'agressivité et l'agitation (28,3 %) [11]4. Mais le chiffre des TS est sous-représenté dans cette étude du fait de l'absence de prise en compte des patients pris en charge dans un premier temps à l'hôpital général. Il apparaît de surcroît que le risque de suicide à l'hôpital n'est pas négligeable. Martelli et al. [12] soulignent qu'entre 5 et 6,5 % des suicides sont commis à l'hôpital dont 3 à 5,5 % à l'hôpital psychiatrique et environ 2 % à l'hôpital général. D'après leur revue de littérature, le taux de suicide en milieu psychiatrique avoisine le chiffre de 250 pour 100 000 admissions. Il faut néanmoins noter qu'aucune de ces études ne concerne la France. En Angleterre, les services de santé mentale auraient un contact avec environ 26 % des personnes qui se suicident [13]. Par conséquent, plusieurs auteurs estiment que le dépistage du suicide est possible et nécessaire à l'hôpital [14] et recommandent avec légitimité, comme Martelli et al. [12], que l'évaluation du risque suicidaire « doit être réalisée de façon systématique lors des entretiens psychiatriques et infirmiers initiaux, puis de façon répétée [. . .]. Elle doit être consignée par écrit et transmise à l'ensemble des soignants. » C'est d'autant plus vrai qu'il n'est pas rare d'observer une différence entre le motif de consultation et le diagnostic final [11]. Aussi, quel que soit le stade de prise en charge du patient, une suspicion d'activité suicidaire devrait faire l'objet d'une évaluation :  quand le patient arrive aux urgences ;  pendant l'hospitalisation, quel que soit le service dans lequel le patient suicidaire se trouve ;  après l'hospitalisation, dans le cadre de la prévention ;  régulièrement au cours du suivi.

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Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA)

Pour citer cet article : Vandevoorde J, et al. Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA). Presse Med. (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017

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J. Vandevoorde, T. Baudoin, B. Chabert, E. Baudoin, A. Sanchez Valero

Processus psychologiques vulnérants Les processus psychologiques vulnérants désignent un ensemble d'altérations touchant le fonctionnement psychologique et la personnalité. On qualifie ces processus de « vulnérants » dans la mesure où ils provoquent, entretiennent ou amplifient la souffrance à l'origine de l'activité suicidaire et fragilisent, de fait, le sujet. La littérature scientifique a mis en évidence plusieurs caractéristiques psychologiques plus fréquentes chez les suicidants que dans les échantillons de toutvenants bien que non spécifiques à la suicidalité (voir la revue dans [20]). Afin de mieux les identifier, on peut les classer en différents secteurs (voir la revue complète dans [20,26,27]) :  l'altération de l'activité de conscience : épisodes dissociatifs, trouble du sentiment de présence ;  l'altération de la conceptualisation du soi : péjoration de soi, bilan pessimiste, dégoût de soi ;  l'altération de l'activité cognitive : distorsions cognitives, erreur de jugement, hyper-réflexivité, torche attentionnelle, mémoire sélective ;  l'altération des processus de l'action : aboulie, difficulté de résolutions de problèmes, passivité ;  l'altération de l'activité fantasmatique : hypertrophie des rêveries, infiltration morbide ;  l'altération des aspects relationnels : sentiment d'être un poids pour les autres, déconnection sociale, isolement, agressivité ;  l'altération de l'activité émotionnelle : peur, colère, tristesse, trouble de la régulation et de la modulation des émotions, sensibilité exacerbée ;  l'altération des mécanismes de contrôle : impulsivité, agitation ;  l'altération du comportement général : scarification, prise de drogue, intérêt pour les contenus morbides, conduite à risque ou dangereuse. . . Le repérage de ces processus psychologiques est d'un intérêt clinique considérable pour comprendre l'impasse psychologique dans laquelle se trouve le patient suicidaire et la dégradation du rapport qu'il entretient avec son environnement.

L'activité suicidaire en elle-même

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La partie exploratoire la plus fondamentale dans l'élaboration clinique du risque suicidaire réside dans la recherche de l'activité suicidaire en elle-même. Il faut noter ici que l'activité suicidaire ne se résume pas au passage à l'acte, bien que ce dernier en constitue la manifestation paroxystique et naturellement la plus grave. À vrai dire, la présence d'une idéation suicidaire est déjà en elle-même un signe de souffrance psychologique quand bien même le sujet ne passerait jamais à l'acte et nécessite, à ce titre, de proposer au patient un protocole de soins. Cette activité suicidaire est complexe et se décline en plusieurs éléments cliniques qui vont précisément être détaillés dans l'entretien SE-EC et la grille ASA présentés ci-dessous : planification de

l'acte, dynamique de l'idéation suicidaire, critique du geste, représentation de la mort, facteur de protection et freins mentaux au suicide, etc. Même sans passage à l'acte, la pensée suicidaire constitue souvent une dramatique charge psychologique négative et fait, dans de nombreux cas, l'objet d'une lutte cognitive et émotionnelle intense tourmentant le sujet.

Structure et principe de la sonde exploratoire par entretien clinique La SE-EC (Sonde Exploratoire par Entretien Clinique) est une méthode d'entretien semi-structuré, destinée à détecter l'activité suicidaire d'un patient pour lequel le clinicien suspecterait une telle activité ou voudrait en explorer les composantes et la dynamique exactes (disponible en version électronique). Elle s'appuie et s'inspire de la méthode ECES de Shea [19] et ses propositions en matière de conduite de l'entretien clinique. Il s'agit de la version enrichie, reformulée, augmentée et adaptée à la pratique quotidienne de la MEPS [28,29] et qui en respecte le principe de base : reconstituer à rebours et étape par étape l'activité suicidaire d'un patient. Elle s'accompagne d'une nouvelle grille de report, la grille ASA (activité suicidaire actuelle), plus rapide et plus pratique à remplir qu'un compte rendu rédigé dont on sait le temps qu'il prend (ce temps étant précieux dans un service d'urgences). Cette évaluation suit une logique clinique pragmatique et propose un circuit d'exploration précis :  explorer les cognitions suicidaires : mise à jour de l'idéation suicidaire, mise à jour du mode opératoire envisagé, valence émotionnelle liée aux pensées suicidaires, accès aux moyens létaux ;  explorer la planification suicidaire et le mode opératoire : préparation du moyen létal, simulation pré-passage à l'acte, prise de renseignement sur internet, écriture de lettre ou prise de disposition administrative (testament. . .), annonce à une autre personne, augmentation des situations d'amorçage du passage à l'acte, préméditation concrète, estimation par le patient de la létalité potentielle de son mode opératoire et prise de précaution pour ne pas être sauvé ;  explorer les conations suicidaires : motifs suicidaires, représentation de la mort, peur de la mort, freins au passage à l'acte et facteurs de protection ;  explorer l'anamnèse suicidaire : antécédent d'activité suicidaire ou de tentative de suicide, mode opératoire précédemment utilisé, tentatives de suicide les plus graves ;  explorer l'état clinique immédiat : présence de processus prépassage à l'acte immédiat, nature des émotions, critique du geste, espoir, stratégies pour faire face aux idées suicidaires. Tous ces composants cliniques forment la carte de l'activité suicidaire du patient et permettent d'en retracer le dynamisme et l'évolution. On peut en outre en estimer la maturation et l'intensité. Naturellement, la démarche chronologique est utilisée pour donner une architecture à l'entretien mais la singularité de chaque rencontre permet rarement d'avoir un

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Pour citer cet article : Vandevoorde J, et al. Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA). Presse Med. (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017

Exemple d'utilisation : le cas de Mme A.5 Mme A. est une femme de 44 ans, mariée, mère de deux enfants de 19 et 12 ans. Elle se présente un jour spontanément aux services d'urgences après avoir appelé les pompiers pour idées suicidaires. Le premier entretien psychiatrique nous apprend qu'elle a un antécédent de tentative de suicide par ingestion médicamenteuse volontaire (IMV) et qu'elle a été suivie pendant plusieurs années par une psychologue. Le médecin relève la recrudescence d'idée suicidaire depuis deux ans dans un contexte de conjugopathie. Elle présente une sémiologie dépressive sur un terrain de trouble de personnalité borderline. Elle consomme quotidiennement de l'alcool et du cannabis. Le contexte familial est complexe, avec une mère suicidante et un père incestueux contre lequel elle a attenté un procès à l'aube de sa majorité. Après cette première évaluation le médecin psychiatre décide d'une hospitalisation et demande une investigation approfondie du potentiel suicidaire. La deuxième évaluation sera effectuée avec la SE-EC dont le déroulement est résumé ci-dessous6 (en gras, le clinicien) : Bonjour Mme A. [. . . ] [formalité d'usage et présentation du cadre de la rencontre], qu'est-ce qui vous a amené à vous rendre aux urgences ? J'ai appelé les pompiers parce que ça n'allait pas. J'allais faire une bêtise [. . .]. J'avais envie de prendre des médicaments. Depuis combien de temps avez-vous des idées suicidaires ? Depuis l'adolescence en fait. . . Au début de l'adolescence. Il faut que vous sachiez que j'ai subi un inceste [la patiente pleure très rapidement]. Des viols de 11 à 15 ans. . . Il y a eu un procès, il a été emprisonné 10 ans, il est sorti depuis [. . .]. J'ai parlé de cet inceste à 19 ans, jamais avant. D'après elle, ma mère n'était pas au courant, ils sont toujours ensemble [. . .]. J'ai toujours eu du mal à comprendre. Mon mari ne comprend pas pourquoi je revois mes parents. Il me vole ma place de victime [. . .] [exploration de la vie familiale et conjugale]. Mon couple va super mal, mon mari a des problèmes de santé [. . .], il a fait une dépression, il a perdu son emploi. Il y a quelques années, il a eu un accident. . . il fume du cannabis. Et vous, le cannabis ? Je m'y suis remise avec lui. Combien de joints par jour fumez-vous ? 5–6, une dizaine7 ? Non, je dirais un à deux joints par jour. Et l'alcool ?

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Cas restitué avec le consentement éclairé signé de la patiente. Entretien d'une heure copié par écrit. Pour des raisons d'espaces, maintes parties ont été supprimées ou raccourcies. Seules les questions liées au potentiel suicidaire ont été retranscrites ici. 7 Technique d'amplification de symptômes [19]. 6

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Oh, 2 à 3 pintes par jour. Mais je ne suis pas alcoolique. J'ai rencontré mon mari à 17 ans. . . [. . .]. Je comprends bien votre situation, Madame A. et, si vous le voulez bien, nous serons amenés à en reparler tout à l'heure. J'aimerais que nous revenions toutefois à vos idées suicidaires. Vous me disiez que vous aviez envie de vous blesser ou de vous tuer, c'est bien cela ? Je voulais trouver une solution. Je n'en peux plus. Hier soir, on s'est disputé avec mon mari. Donc j'ai appelé les pompiers. Mais c'est depuis le mois d'avril que je ne suis vraiment pas bien. Qu'est-ce que vous avez envisagé pour vous tuer ? Oh c'est simple, deux boîtes de paracétamol. Il paraît que c'est dangereux le paracétamol. . . C'est facile à trouver et ça ne coûte pas cher. Avez-vous ces boîtes chez vous ou d'autres médicaments que vous auriez stockés ou gardés dans ce but ? Non. Je n'ai pas de stock. Mais c'est facile à trouver. Vous arrive-t-il parfois de surdoser certains de vos médicaments, pour voir l'effet par exemple ? Non. Ou bien de lire les notices ou de vous renseigner sur le suicide sur Internet ? Oui, je suis allé sur Internet, en tapant « suicide ». Des fois quand j'ai bu. Mais après, l'alcool me fait arrêter de penser. Vous avez l'impression de trop penser, d'avoir trop de choses dans la tête ? Oui, c'est exactement ça. Vous me dites que vous avez songé à prendre des médicaments, à quelle autre méthode avez-vous pensé ? Oh les produits ménagers par exemple. Vous prenez de la javel et du détergent et ça fait du chlore. Quand ces idées de suicide vous viennent à l'esprit, est-ce plutôt agréable, désagréable ou les deux à la fois ? Non, c'est déplaisant. Et comment ont évolué vos idées de suicide ces derniers jours ? Avez-vous eu l'impression qu'elles devenaient plus fortes ou plus faibles par exemple ? Non, c'était stable. Pour que je me fasse un peu une idée, pouvez-vous évaluer, en plaçant le curseur sur cette échelle (EVA), la force, l'intensité de ce scénario ? Je dirai là à peu près (5/10). Qu'est-ce que représente la mort pour vous ? La fin. La fin des souffrances. . . Une sorte de paix ou de soulagement ? Oui c'est exactement ça. J'aimerais toutefois vous demander ce qui pourrait vous retenir ? Qu'est-ce qui pourrait-vous empêcher de vous tuer ou de vous faire du mal ? J'ai peur de souffrir si ça se passe mal. . . Oui, quoi d'autres ? Mon mari, et les enfants aussi. . .

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déroulement aussi complet et linéaire. Comme tout entretien clinique en médecine et en psychologie, une certaine part d'improvisation et d'adaptation est inéluctable.

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Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA)

Pour citer cet article : Vandevoorde J, et al. Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA). Presse Med. (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017

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J. Vandevoorde, T. Baudoin, B. Chabert, E. Baudoin, A. Sanchez Valero

Vous avez des projets, une vie professionnelle ? Oui, y'a mon travail. Je suis [. . .] Mes collègues sont sympas. Parfois les idées de suicide sont liées à de très fortes émotions. Quelles émotions éprouvez-vous en ce moment ? C'est assez le bazar. De la colère, mais je la retourne contre moi. Avec mon mari. J'aime pas qu'on fasse les choses à ma place [. . .] J'aspire à un peu de liberté. Me réapproprier ma vie. Ces derniers temps, je me suis désinvestie de tout. À part faire les courses. Mais je ne fais plus rien. Je suis en arrêt maladie depuis un an et demi. Et mon mari pareil, il est à la maison. Quelle est votre relation avec votre mari ? Difficile. J'ai cru comprendre que vous vous disputiez souvent. Est-ce que cela peut en arriver à des insultes ou des coups ? Des insultes oui, mais, non, pas des coups. En réalité, on est très fusionnels. [. . .] [S'ensuit une description de la conjugopathie]. Quand elles vont mal, il arrive que certaines personnes se sentent anormales, ou ne se reconnaissent pas ? Avez-vous cette impression en ce moment ? Non, pas trop. Le clinicien propose alors une checklist d'expérience dissociative et en profite pour investiguer les processus pré-passage à l'acte. . . . Oui, ça m'arrive souvent d'avoir le regard dans le vide. Je m'étonne surtout de pas trouver de solution, de ne pas y arriver. [. . .] On a aussi des problèmes d'argent. [. . .] Et puis mes filles. . . Comment sont vos filles ? B. est suivie par le CMP. Elle est très introvertie. Elle est précoce, elle a capté plein de trucs. Mon mari, il pense qu'il est « Asperger » [syndrome]. Qu'il est très intelligent et qu'il a un problème social. On avait commencé une thérapie de couple [. . .]. Qu'en est-il du passé ? J'ai cru comprendre que vous aviez déjà fait une ou plusieurs tentatives de suicide ? Oui, en. . . [date]. . . j'avais pris un tube de Lexomil. Quel âge aviez-vous ? . . .42 ans. . . Pouvez-me dire ce qu'il s'est passé ? [. . .] je n'avais prévenu personne. J'étais dans ma voiture. Mais j'avais redémarré ma voiture et j'avais embouti quelqu'un. Je n'avais pas pris mon téléphone. J'aurais même pu blesser quelqu'un. J'ai été hospitalisée. Sans coma. Et sans séquelle. C'était la date du jour d'anniversaire de mes parents. Comme une sorte de malédiction [. . .] Nous avons rapidement évoqué ce que vous a fait votre père tout à l'heure, existe-t-il d'autres événements qui auraient pu vous fragiliser ? J'ai subi des railleries pendant toute mon enfance. . . J'étais pas une enfant désirée de toute façon. . . regardez mon prénom (la patiente porte un prénom masculin). J'ai l'impression que vous décrivez le sentiment d'être entre trop, comme un poids pour les autres ? J'étais la bonne à tout faire. J'ai dû m'oublier. Vous parleriez d'une sorte de sacrifice ?

Oui, c'est tout à fait ça. À cause de mon père et de ce qu'il m'a fait, j'ai devais me taire et être discrète. Faire des faux sourires. . . [. . .] Déjà toute petite, j'ai été placée en nourrice. C'est pas ma mère qui m'a élevée. Elle a fait des tentatives de suicide quand elle était enceinte de moi [. . .] Combien de TS a fait votre mère ? Plusieurs ! Au moins 6. Elle en a fait une quand elle était enceinte de moi. Et une autre aussi, elle avait fait un coma éthylique quand je suis allée porter plainte contre mon père pour viols [. . .]. Personne ne m'a jamais protégé. J'ai dû tout le temps être forte et me taire. Dans quelle mesure ce que vous a fait votre père est encore présent dans votre esprit, vous arrive-t-il par exemple d'entrevoir des flashs de ces scènes ? Oui, c'est ça [. . .]. Je revois les repas de famille. Les enfants étaient accusés comme dans un tribunal. Y a-t-il eu des dépressions ou des gestes suicidaires dans votre famille élargie ? Mon arrière-grand-père s'est suicidé. Il s'est jeté dans la Seine [. . .]. Quelles sont les personnes proches de vous ou sur lesquelles vous pouvez compter ? Etc. Au total, que pensez-vous de vos idées de suicide ? Rien. C'est juste que j'en ai marre. [. . .] La suite de l'entretien approfondira certains points de la vie de la patiente (histoire familiale, relation conjugale, loisirs. . .) et retracera certains points de sémiologie. La patiente présente en outre une trichotillomanie, une hypersomnie, une aprosexie modérée, une dysrégulation des émotions, des épisodes occasionnels de dépersonnalisation, des flashs de type traumatiques, des crises impulsives.

Discussion : la grille de report (grille ASA) Comme on peut le constater, l'entretien est souple et se négocie au fur et à mesure, alternant les questions d'investigation pure et l'écoute de l'histoire idiosyncrasique du patient. En un, deux ou trois entretiens (parfois avec plusieurs intervenants en pluridisciplinarité, psychiatre, psychologues, infirmiers), il est ainsi possible d'obtenir une première évaluation du potentiel suicidaire. Concernant Mme A., l'évaluation des facteurs de risque indiquait des antécédents d'activité suicidaire et de tentative de suicide, des antécédents de victime de violences sexuelles, des événements traumatiques dans l'enfance (inceste), une rupture familiale avec l'éducation par la nourrice, un isolement relatif, des antécédents familiaux de geste suicidaire dont un suicide réussi de l'arrière-grand-père et une mère suicidante, la présence probable de troubles mentaux dans la famille, une conjugopathie, des conflits avec les proches, des violences familiales psychologiques, une période de vulnérabilité. Les cliniciens se sont accordés sur un état de stress post-traumatique (ESPT) de

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Pour citer cet article : Vandevoorde J, et al. Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA). Presse Med. (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017

L'évaluation du potentiel suicidaire à l'hôpital : critique et décision À ce jour, aucune étude n'a réussi à prédire le geste suicidaire [20]. De même l'évaluation du risque suicidaire est soumise à de nombreuses difficultés :  la révélation d'éléments suicidaires dépend de la formulation des questions et de la forme de l'investigation ;  l'intention suicidaire ne prédit pas le suicide ni le nombre de geste suicidaire ;

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quelle que soit la forme de l'évaluation, le nombre de faux positifs ou de faux négatifs reste très élevé ;  il existe différents types de tentatives de suicide et différents types de crise suicidaire ;  le risque suicidaire n'est pas une donnée statique. Il varie et oscille continuellement, de telle sorte que les instruments et les évaluations cliniques ne capturent pas toujours les pics paroxystiques du processus selon le moment auquel ils sont passés. De surcroît, l'évaluation du potentiel suicidaire est biaisée :  dans le cas des certaines tentatives difficilement prévisibles (états psychologiques kinesthésiques [30]) ;  si le patient a un état de « faux calme » avec une amélioration symptomatique trompeuse ;  si le discours du patient est trop succinct, non élaboré, s'il ne veut pas parler ;  si le patient ment, manipule, simule ou nie son activité psychologique suicidaire ;  si nous sommes confrontés à des amnésies simulées ou réelles Les signes d'alerte (« Warnings signs ») identifiés dans la littérature sont classiquement :  une menace directe de passage à l'acte ou une annonce d'immédiateté ;  une activité suicidaire délirante ou hallucinée ;  un antécédent suicidaire grave ;  la présence d'un plan clair et défini ;  une recherche active de moyens autolytiques ;  un état de grande agitation ou d'inertie complète ;  une faible réceptivité au protocole de désamorçage de crise ;  une suspicion de dissimulation volontaire d'informations. À l'hôpital, ce risque est majoré par d'autres variables rapportées dans l'étude de Martelli et al. [12] : une amélioration clinique trompeuse, l'absence de résolution des problèmes psychosociaux ayant contribué à l'hospitalisation, un comportement ressenti comme manipulateur, un rejet de l'équipe soignante, un faible moral de l'équipe soignante, un niveau insuffisant de qualification de l'équipe soignante, le début d'hospitalisation, la période précédant immédiatement la sortie, la survenue de fugues et la survenue récente de suicide dans l'établissement. D'après la même étude, en plus des facteurs de risque issus de l'activité suicidaire en elle-même du patient, les variables impliquées dans le risque de suicide en milieu hospitalier sont l'existence de moyens suicidaires facilement accessibles, une surveillance inadéquate, l'absence d'unité de soins intensifs, la sous-estimation du risque suicidaire et l'insuffisance de communication entre médecin et infirmières [12].

Conclusion Les principaux freins à l'évaluation de l'activité suicidaire en milieu hospitalier et notamment en service d'urgences sont :  la charge de travail et la fatigue ;

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l'enfance dissimulé par un faux self qui a évolué vers un épisode dépressif avec crise suicidaire sur un trouble de personnalité borderline. Bien que l'évaluation des processus psychologiques soit souvent plus longue, elle montre déjà en première analyse des épisodes dissociatifs, de l'impulsivité, un trouble de l'image de soi, des oscillations narcissiques, une hyper-réflexivité, des rationalisations morbides, l'occurrence d'agressivité, une sensibilité extrême, un sentiment de solitude, un sentiment de vulnérabilité et d'hostilité relationnelle, des recherches de domination ou de contrôle par l'agressivité ou les crises clastiques, des fluctuations émotionnelles fortes avec une tendance à l'irritabilité et l'angoisse, des défaillances dans les résolutions de problèmes, une insatisfaction générale de sa propre valeur et de ses propres actions, des conduites de dépendance et d'opposition. Ces trois premiers axes viennent compléter l'évaluation de l'activité suicidaire reportée ici dans la grille ASA (Annexe 3, disponible en version électronique). Ici, Mme A. présente quelques indices de planification (s'est renseignée sur Internet, a alerté les pompiers), des idées suicidaires déplaisantes, d'une intensité estimée à 5/10 à évolution stable. Le scénario est de deux ordres : une ingestion de médicaments et l'ingestion de produits ménagers. Elle a accès au moyen et a un début d'activité de planification mais n'a pas prémédité son geste. Le contexte est celui d'une crise conjugopathique aiguë, le motif suicidaire étant le soulagement immédiat de la tension relationnelle et émotionnelle. Plusieurs facteurs de protection sont présents (peur d'avoir mal, projet professionnel, pensée de ses filles). La souffrance subjective est estimée moyenne par le clinicien tout comme l'intensité de la crise. L'état émotionnel est déréglé mais il n'y a pas de véritables phénomènes de mise en état pré-passage à l'acte. La colère est l'une des principales émotions qu'il faudra gérer. Elle connaît toutefois la dangerosité des modes opératoires et n'avait prévenu personne lors de sa dernière TS bien qu'elle ait embouti une voiture. Il y a peu, voire aucune critique de ses idées suicidaires ni de la notion de suicide au moment de l'évaluation. L'état général est négatif. Le clinicien note une bonne coopération thérapeutique. Il ajoutera en commentaire que l'état est stable et que les stresseurs environnementaux sont inchangés. Il n'y a pas de signes d'alerte imminents. Devant ce tableau, la patiente sera maintenue en hospitalisation quelques jours avant une nouvelle évaluation.

PSYCHIATRIE

Mise au point

Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA)

Pour citer cet article : Vandevoorde J, et al. Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA). Presse Med. (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017

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J. Vandevoorde, T. Baudoin, B. Chabert, E. Baudoin, A. Sanchez Valero



le manque de temps ; l'état du patient lorsqu'il est en phase aiguë (agressivité, agitation, effondrement dépressif intense, état délirant. . .) ;  la réticence de l'équipe soignante à utiliser des outils ou techniques d'évaluation ;  l'absence de formation sur la suicidologie et sur la conduite d'entretien. L'évaluation du risque suicidaire est une démarche clinique complexe qui n'est pas exempte des risques d'erreur liés aux taux élevés de faux positifs ou de faux négatifs. Elle est 

néanmoins indispensable pour évaluer l'activité suicidaire d'un patient quand bien même ce dernier ne passerait pas à l'acte. Malgré ces freins, il est possible d'employer une méthode d'entretien semi-structuré et une grille de report rapide fondée sur les connaissances scientifiques suicidologiques actuelles. Avec la formation adéquate, cette démarche clinique s'avère adaptée et utilisable en service d'urgence et à l'hôpital. Déclaration d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cet article.

Matériel complémentaire Complément électronique disponible sur le site Internet de La Presse Médicale (http://www.em-consulte. com/revue/LPM et http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2015.01.017) Annexe 1 : Sonde Exploratoire par Entretien Clinique (SE-EC) Annexe 2 : Synthèse des Facteurs de Risque – SYFR Annexe 3 : évaluation de l'activité suicidaire de Mme A. ASA (Activité Suicidaire Actuelle).

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Évaluation de l'activité suicidaire aux urgences psychiatriques : un entretien d'exploration (SE-EC) et sa grille de report (ASA)

[The suicide assessment in the psychiatric emergencies: A semi-structured interview].

The epidemiological literature shows that the population going through general or psychiatric emergencies indicates a high suicide risk. Suicide is cl...
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