Article original

Me´decine et Sante´ Tropicales 2013 ; 23 : 427-432

L'envenimation ophidienne pédiatrique au centre hospitalier universitaire de Fès (Maroc) Snake bites in children at the Fez University Hospital in Morocco Berdai M.A., Labib S., Harandou M. CHU Hassan II, Service de Re´animation me`re et enfant, 30000 Fe`s, Maroc

doi: 10.1684/mst.2013.0258

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Article accepte´ le 08/9/2013

Re´sume´. Objectif. Le but de notre e´tude e´tait de de´crire les caracte´ristiques e´pide´miologiques, cliniques, biologiques et the´rapeutiques de l’envenimation ophidienne chez l’enfant au nord du Maroc. Mate´riel et me´thodes. Il s’agit d’une e´tude re´trospective re´alise´e dans le service de re´animation pe´diatrique du CHU Hassan II de Fe`s au Maroc entre avril 2011 et avril 2013. Ont e´te´ inclus les enfants ayant subi une morsure de serpent de´crite par le patient ou par son entourage et ceux pre´sentant les traces de crochets du serpent. Re´sultats. Douze enfants ont e´te´ inclus dans cette e´tude, L’aˆge moyen e´tait de 9,6  2,9 ans, toutes les envenimations survenaient le jour avec un de´lai d’admission de 8,8  5,6 h. Les signes locore´gionaux et l’œde`me e´taient constants, associe´s aux ecchymoses (58 %) et aux phlycte`nes (25 %). Les manifestations ge´ne´rales – incluant les signes gastro-intestinaux, cardio-vasculaires, neurologiques et he´morragiques – e´taient constate´es chez 83 % des enfants. Les anomalies biologiques de l’he´mostase e´taient pre´sentes chez 91 % des cas, la thrombope´nie e´tait profonde avec une moyenne de 27,7  30,7 G/L. Toutes les envenimations e´taient de grade 2 ou 3. L’analge´sie e´tait syste´matique, l’apone´vrotomie e´tait re´alise´e chez 25 % des cas et la transfusion de produits sanguins labiles chez 66 % des enfants ; deux patients ont rec¸u une immunothe´rapie antivenimeuse. Un quart des patients a ne´cessite´ une ventilation me´canique et deux de´ce`s (16 %) sont survenus. Conclusion. Cette se´rie se caracte´rise par la gravite´ du tableau clinique avec la pre´dominance des complications locore´gionales et des troubles de l’he´mostase, correspondant au syndrome vipe´rin, d’ou` l’inte´reˆt d’une immunothe´rapie disponible et adapte´e a` nos espe`ces afin d’ame´liorer le pronostic de ces envenimations.

Abstract. Aims. The objective of our study is to describe the epidemiological, clinical, biological, and therapeutic aspects of snake bites in children in northern Morocco. Methods. This retrospective study reviewed files of all children admitted to the pediatric intensive care unit of the Hasssan II University Hospital in Fez from April 2011 through April 2013. It includes all children reported by themselves or their family to have been bitten by a snake and all those with traces of snake fangs. Results. This study included 12 children, with a mean age of 9.6  2.9 years. In each case, admission took place the day the envenomation occurred, a mean of 8.8  5.6 hours after the bite. Locoregional signs and edema were seen in all cases, associated with bruising (58%) and blisters (25%). General events, including gastrointestinal, cardiovascular, neurologic, and hemorrhagic signs, affected 83% of the children. Hemostasis disorders occurred in 91% of patients, including profound thrombocytopenia (mean: 27.7  30.7 G/L. All envenomations were grade 2 or grade 3. Analgesia was administered systematically; a fasciotomy was performed in 25% of cases and transfusion of blood products in 66%. Three children (25%) were intubated and two children died (16%). Conclusion. This series is characterized by the severity of the clinical presentations, with a predominance of locoregional complications and hemostasis disorders corresponding to snake-bite syndrome. We conclude that immunotherapy adapted to the local species must be made available to improve the prognosis of this envenomation. Key words: ophidian envenomation, snake, anti venom, child, Morocco.

Mots cle´s : envenimation ophidienne, serpent, antivenin, enfant, Maroc. Correspondance : Berdai MA

Pour citer cet article : Berdai M, Labib S, Harandou M. L’envenimation ophidienne pe´diatrique au centre hospitalier universitaire de Fe`s (Maroc). Med Sante Trop 2013 ; 23 : 427-432. doi : 10.1684/mst.2013.0258

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M. BERDAI, ET AL.

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L’

envenimation ophidienne est responsable d’une morbidite´ et d’une mortalite´ e´leve´es, son incidence mondiale e´tant estime´e entre 421 000 et 1 841 000 par an, dont 20 000 a` 94 000 de´ce`s [1]. C’est un proble`me de sante´ publique qui a e´te´ longtemps ne´glige´, jusqu’en avril 2009, date a` laquelle l’Organisation mondiale de sante´ l’a conside´re´ comme une maladie tropicale ne´glige´e [2]. L’envenimation chez l’enfant semble eˆtre responsable de complications locales et syste´miques plus fre´quentes que chez l’adulte [3]. Au Maroc, on compte deux familles venimeuses (tableau 1) [4] : - une espe`ce d’E´lapide´s (responsable du syndrome cobraı¨que), dont la localisation ge´ographique est le sud du Maroc, loin de la re´gion de Fe`s, - sept espe`ces de la famille des Vipe´ride´s, qui entraıˆnent un syndrome vipe´rin dangereux pour la population pe´diatrique et qu’on rencontre dans les re´gions qui de´pendent de notre centre hospitalier. Le but de notre e´tude est de de´crire les caracte´ristiques e´pide´miologiques, cliniques, biologiques et the´rapeutiques de l’envenimation ophidienne de l’enfant dans un service de re´animation a` Fe`s, au nord du Maroc.

Patients et me´thodes C’est une e´tude re´trospective re´alise´e au service de re´animation pe´diatrique de l’hoˆpital Me`re-et-enfant, au CHU Hassan II de Fe`s, au Maroc, entre avril 2011 et avril 2013. E´taient inclus les enfants ayant subi une morsure de serpent, de´crite par le patient ou son entourage ou confirme´e par la pre´sence de traces de crochets du serpent. Les donne´es, collecte´es a` partir des dossiers me´dicaux des malades, e´taient les suivantes : donne´es de´mographiques (aˆge, sexe), circonstances de l’envenimation (date, heure, lieu, circonstances et localisation de la morsure, de´lai de prise en charge pre´hospitalie`re et d’admission), signes cliniques locaux (œde`me, ecchymose, phlycte`ne) et ge´ne´raux (fie`vre, sueurs, frissons, asthe´nie), signes digestifs (nause´es, vomissements, diarrhe´es et douleur abdominale), cardiocirculatoires (tachycardie, hypotension arte´rielle) et he´morragiques. Les parame`tres biologiques e´tudie´s e´taient : - le taux de plaquettes et le taux de prothrombine (TP) pendant toute l’hospitalisation, - le taux le plus e´leve´ de la troponine Ic, celui de la cre´atinine se´rique et celui des ASAT et ALAT, - le taux d’he´moglobine le plus bas.

Concernant la prise en charge the´rapeutique, les parame`tres collecte´s e´taient l’administration de l’immunothe´rapie, la transfusion de produits sanguins labiles, l’apone´vrotomie, l’antibiothe´rapie, l’apport de me´dicaments vasopresseurs et la ventilation me´canique. La gravite´ de l’envenimation e´tait e´value´e au moyen d’une graduation clinique et biologique (tableau 2) [5]. Enfin, l’e´volution e´tait note´e : mortalite´, se´quelles, dure´e de se´jour en re´animation. Les donne´es e´taient collige´es sur des fiches d’enqueˆte individuelles, puis saisies et traite´es par le logiciel de statistique Epi-Info dans sa version 3.5.4.

Re´sultats Douze cas d’envenimations ophidiennes pe´diatriques pris en charge dans notre service e´taient inclus durant les deux anne´es de l’e´tude. L’aˆge moyen e´tait de 9,6  2,9 ans (extreˆmes : 4-13). Le sex-ratio garc¸on/fille e´tait de 3. La re´partition ge´ographique du lieu de l’envenimation e´tait tre`s variable et concernait cinq re´gions : quatre patients provenaient de la re´gion de Mekne`s Tafilalt, trois de la re´gion de Taza Hoceima, deux de la re´gion orientale, deux de la re´gion de Fe`s et un de la re´gion de Tanger. Toutes les envenimations e´taient survenues le jour, avec une nette pre´dominance matinale (huit cas entre 6 et 12 h et quatre entre 12 et 18 h). La plupart (dix cas) avaient eu lieu de juin a` septembre. Tous les patients avaient consulte´ a` la formation sanitaire locale et avaient e´te´ re´fe´re´s d’emble´e dans notre unite´, sauf un, qui avait be´ne´ficie´ d’une prise en charge initiale a` base de remplissage vasculaire et de me´dicaments vasopresseurs. Le de´lai me´dian entre l’admission et la morsure, 8,8  5,6 h, de´passait toujours 4 h. Le site de morsure e´tait toujours un membre : infe´rieur (MI) dans dix cas (83 %) et supe´rieur (MS) dans deux cas. Les signes locaux e´taient au premier plan du tableau clinique. La douleur e´tait pre´sente dans toutes les envenimations. L’œde`me e´tait constant, de´passant le segment du membre mordu chez tous les patients et l’ensemble du membre mordu dans quatre cas, dont deux avec une hydroce`le associe´e. Cet œde`me e´tait associe´ a` un aspect ecchymotique chez 58 % des patients et a` des phlycte`nes dans 25 % des cas. Deux patients ont de´veloppe´ une thrombose veineuse profonde des membres infe´rieurs. Un syndrome des loges e´tait suspecte´ chez six patients.

Tableau 1. Localisation, pre´sentation clinique et immunothe´rapie adapte´e des diffe´rentes espe`ces ophidiennes au Maroc [4]. Table 1. Location, clinical presentation and appropriate immunotherapy of different snake species in Morocco [4]. Espe`ces Cerastes cerastes Cerastes vipera Echis leucogaster Bitis arietans

Symptomatologie Syndrome vipe´rin Syndrome vipe´rin Syndrome vipe´rin Syndrome vipe´rin

Vipera latastei Vipera monticola Vipera mauritanica Naja haje

Syndrome Syndrome Syndrome Syndrome

Localisation Sahara, valle´e Moulaya Sahara Re´gion pre´de´sertique Sud-Ouest, valle´e du Souss

vipe´rin vipe´rin vipe´rin cobraı¨que

Rif et moyen Atlas Haut Atlas Tout le Maroc Sahara

Antivenin adapte´* Favirept1 Favirept1 Fav-Afrique1 Favirept1

Favirept1 Fav-Afrique1

*NB : l’Antirept1, antivenin cite´ dans la re´fe´rence [4], est actuellement retire´ du marche´.

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Envenimations ophidiennes pe´diatriques

Grade Grade 0 Grade 1

Syndrome local Douleur mode´re´e, traces de crochets, pas d’œde`me Douleur marque´e, œde`me ne de´passant pas le coude ou le genou

He´mostase Rien a` signaler Pas de saignement

Grade 2

Œde`me de´passant le coude ou le genou, ne´crose mineure

Grade 3

Œde`me atteignant ou de´passant la racine du membre, ne´crose e´tendue

Saignement mode´re´ de la morsure, des points de ponction, he´maturie, gingivorragies He´morragie grave e´pistaxis, he´moptysie, saignement digestif

Les manifestations ge´ne´rales de l’envenimation e´taient pre´sentes chez dix patients ; les signes ge´ne´raux (fie`vre, sueurs, frissons, asthe´nie) e´taient retrouve´s chez six cas, dont trois pre´sentaient une hypersudation. Des signes digestifs (nause´es, vomissements, diarrhe´es et douleur abdominale) e´taient pre´sents chez huit cas et e´taient re´versibles, alors que les signes cardio-circulatoires (tachycardie, hypotension arte´rielle) e´taient retrouve´s chez six cas, dont deux pre´sentaient d’emble´e un e´tat de choc. Les signes he´morragiques e´taient pre´sents chez quatre enfants : l’un pre´sentait des he´maturies, des he´mate´me`ses et un saignement au site de la morsure avec une e´volution fatale, les trois autres avaient des gingivorragies et des e´pistaxis. Les complications neurologiques e´taient mineures et se re´sumaient a` deux cas d’agitations et un autre de somnolence. Sur le plan biologique, l’anomalie la plus fre´quente e´tait la pre´sence d’une thrombope´nie dans 91 % cas, avec un taux moyen de 27,7  30,7 G/L. L’analyse de l’e´volution du taux de plaquettes (figure 1) chez les enfants avec un taux infe´rieur a`

250 000

200 000

Re´sultats biologiques Normaux Troubles mineurs de l’he´mostase : 80 < plaquettes < 150 G/L 45 % < TP < 70 % 1 g/L < fibrinoge`ne < 2 g/L Coagulopathie : plaquettes < 80 G/L, TP < 45% - TCA  2, fibrinoge`ne < 1 g/L, cre´atinine > 120 mol/L Coagulopathie et Hb < 9 g/dL

100 G/L (dix cas) montrait la persistance d’une valeur me´diane basse de la thrombope´nie durant les cinq premiers jours avec un de´but d’ascension au septie`me jour d’hospitalisation. Le TP e´tait diminue´ dans sept cas, avec une valeur moyenne de 66  0,11 %, L’e´volution de la me´diane de ce taux chez tous les patients (figure 2) e´tait marque´e par une ascension de`s le premier jour, devenant plus accentue´e au troisie`me jour. Une ane´mie infe´rieure a` 10 g/dL e´tait pre´sente dans huit cas, le taux d’he´moglobine moyen e´tait de 7,5  2,7 g/dL. L’insuffisance re´nale e´tait retrouve´e chez trois patients (cre´atinine´mie entre 184 et 378 mmol/L) ; aucun patient n’a ne´cessite´ d’he´modialyse. La troponine Ic e´tait e´leve´e dans cinq cas, avec une valeur moyenne de 0,45 ng/mL (extreˆmes : 0,33 a` 0,55 ng/mL). La re´partition selon le grade d’envenimation ne trouvait pas de grade 0 ni 1 dans notre se´rie ; six patients pre´sentaient un grade 2, les six autres un grade 3. Concernant la prise en charge the´rapeutique, tous les patients ont be´ne´ficie´ de soins locaux, d’une antibioprophylaxie a` base d’amoxicilline et d’acide clavulanique. On a note´ un cas d’infection bacte´rienne des parties molles a` Acinetobacter baumanii traite´e avec succe`s par ceftazidime et le´vofloxacine. Quatre patients ont ne´cessite´ une apone´vrotomie et trois une ne´crosectomie. L’analge´sie e´tait multimodale, se basant dans tous les cas sur les analge´siques de palier 1, associe´s chez deux patients a` la morphine.

150 000 120 %

Taux de prothrombine

Taux de plaquettes en G/L

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Tableau 2. Gradation clinicobiologique des envenimations vipe´rines [5]. Table 2. Grades of snake bite envenomation based on clinical and laboratory findings [5].

100 000

50 000

100 % 80 % 60 % 40 % 20 % 0%

0 J0

J1

J3

J5

J7

J0

J9

Figure 1. E´volution du taux de plaquettes en fonction du temps. Figure 1. Evolution of platelet level over time.

J1

J3

J5

Journées d'hopitalisation

Journées d'hopitalisation

Figure 2. E´volution du taux de prothrombine en fonction du temps. Figure 2. Evolution of prothrombin index over time.

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M. BERDAI, ET AL.

La transfusion de produits labiles sanguins e´tait re´alise´e chez huit patients : cinq ont rec¸u des concentre´s de culots globulaires (en moyenne, 2,6 par patient), quatre du plasma frais congele´ (2 poches en moyenne par patient) et cinq des concentre´s plaquettaires (en moyenne, 7,8 par patient). Les patients transfuse´s par les concentre´s plaquettaires avaient un taux de plaquettes moyen de 17  13,8 G/L, controˆle´ apre`s transfusion a` 19,2  10,8 G/L, ceux transfuse´s par des poches de plasma frais congele´ avaient une moyenne de TP a` 60  5 %, passe´, apre`s transfusion, a` 62  6 %. Trois patients ont ne´cessite´ une intubation avec ventilation me´canique, l’un suite a` un œde`me aigu du poumon le´sionnel et les deux autres apre`s l’installation d’un e´tat de choc. Les me´dicaments vasopresseurs ont e´te´ utilise´s chez cinq patients. L’immunothe´rapie antivenimeuse (Fav-Afrique1), non disponible initialement pour les dix premiers cas, a e´te´ administre´e chez deux patients sans identification possible du serpent, avec une gue´rison sans se´quelles chez l’un et un de´ce`s chez l’autre. La dure´e moyenne de se´jour e´tait de 8,5  8,3 jours (extreˆmes : 1-39). L’e´volution e´tait marque´e par le de´ce`s de deux patients (16 %), l’un suite a` un e´tat de choc re´fractaire aux me´dicaments vasopresseurs, l’autre conse´quence d’un choc he´morragique (he´mate´me`se, he´maturie, saignement au niveau du site de la morsure). Les se´quelles e´taient essentiellement locales : on notait deux cas d’amputations d’orteils et de doigts, avec des cicatrices d’apone´vrotomie ou de ne´crosectomie chez six patients.

Discussion Au Maroc, le centre antipoison a recense´ 1 761 de´clarations de morsures de serpents de 1980 a` 2008, soit 2,06 % de l’ensemble des intoxications, l’incidence e´tant de 0,2 pour 100 000 habitants par an. Les enfants de moins 15 ans repre´sentent 31 % des cas [6]. Ces chiffres sous-estiment probablement l’incidence re´elle des envenimations ophidiennes au Maroc, du fait de la sous-notification globale des intoxications par les me´decins. Dans notre contexte marocain, 98 % des morsures sont dues a` des vipe`res, elles touchent volontiers des sujets masculins jeunes, pendant l’activite´ agricole en milieu rural, d’avril a` septembre, avec un pic en juillet [7]. Cette re´partition saisonnie`re est retrouve´e dans notre se´rie : l’incidence est maximale pendant la pe´riode allant de juin a` septembre (83 % des cas), elle est concomitante avec une activite´ vipe´rine plus intense dans cette pe´riode de l’anne´e. La pre´dominance masculine, fre´quemment constate´e [8, 9], e´tait retrouve´e dans notre se´rie. Le de´lai de consultation reste un proble`me majeur. Dans notre e´tude, il de´passait toujours 4 h, notre structure e´tant la formation sanitaire de re´fe´rence pour une vaste re´gion avec une ge´ographie montagneuse difficile d’acce`s. Ce de´lai peut expliquer la gravite´ de la pre´sentation clinique, la plupart des patients e´tant re´fe´re´s d’emble´e a` partir de structures sanitaires non adapte´es au traitement d’une envenimation grave. Il existe une plus grande fre´quence d’envenimations de grade 3 chez l’enfant, jusqu’a` 24 % d’entre eux, pour 5 a` 10 % chez l’adulte [10]. Toutes les envenimations hospitalise´es dans notre unite´ de soins intensifs pe´diatriques e´taient des envenimations graves, 50 % e´taient de grade 2 et l’autre moitie´ de grade 3.

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La pre´sentation clinique dans notre se´rie e´tait marque´e par la gravite´ de l’atteinte locore´gionale, un œde`me rapidement progressif, de´passant toujours le segment mordu et s’e´tendant au-dela` du membre dans un tiers des cas. En l’absence d’antivenins, des se´quelles a` type de ne´crose locale ou de trouble trophique du membre mordu sont de´crites [11]. Le syndrome des loges, complication grave de cette envenimation, e´tait suspecte´ cliniquement dans 50 % cas sans confirmation possible par la mesure de la pression compartimentale. C’est une cause fre´quente d’amputation chez les enfants dans de nombreuses re´gions d’Afrique [12]. Le diagnostic du syndrome des loges ne´cessite une mesure de la pression intratissulaire [13], quand cette technique est disponible, ce qui n’e´tait pas le cas dans notre service. En effet, l’occlusion capillaire peut se produire a` une pression infe´rieure a` celle de l’arte`re axiale, entraıˆnant une fausse se´curite´ en cas de pouls palpable. L’enfant est plus a` risque de faire cette complication, un arreˆt de la microcirculation conse´cutif a` une baisse de la pression arte´rielle pouvant se produire a` des seuils de pression compartimentale supe´rieurs a` ceux observe´s chez l’adulte [12]. Les signes gastro-intestinaux et cardio-vasculaires sont les manifestations syste´miques les plus fre´quentes, seuls deux patients pre´sentent un e´tat de choc relevant directement de l’action toxique du venin sans manifestations allergiques associe´es. Les complications he´morragiques cliniques sont pre´sentes dans quatre cas, et responsables du de´ce`s d’un patient. Ces troubles de l’he´mostase sont dus a` une coagulopathie de consommation induite par le venin dont le me´canisme est a` distinguer de la ve´ritable CIVD due a` une activation en cascade de la coagulation. Dans le cas d’envenimation, les diffe´rents enzymes du venin interagissent avec chaque e´tape de l’he´mostase [14]. Les anomalies biologiques de l’he´mostase e´taient retrouve´es dans 91 % des cas. La thrombope´nie e´tait infe´rieure a` 100 G/L, dans 83 % des cas, avec une stagnation du taux de plaquettes durant les cinq premiers jours puis une ascension progressive. Le TP est abaisse´ chez 58 % des patients, avec une correction lente de`s le premier jour d’hospitalisation. La pre´sentation clinique et biologique de nos patients correspond au syndrome vipe´rin qui est un toxidrome associant trouble de l’he´mostase et atteinte locale avec douleur intense et œde`me, ce syndrome est essentiellement l’apanage des vipe´ride´s [15]. Les venins de Vipe´ride´s sont riches en enzymes de spe´cificite´ variable ; certaines de´truisent les tissus autour de la morsure et provoquent des ne´croses se´ve`res, d’autres agissent sur les diffe´rentes e´tapes de l’he´mostase, en particulier sur la coagulation sanguine, le plus souvent en se substituant aux enzymes physiologiques. La coagulation sanguine et la fibrinolyse sont active´es a` plusieurs niveaux (complexe prothrombinase et fibrinoformation en particulier). Il en re´sulte une coagulopathie lie´e a` l’activation et la consommation de ces facteurs, mais e´galement a` la consommation de plaquettes [16]. Par ailleurs, on n’a pas note´ de syndrome cobraı¨que, qui consiste essentiellement en une paralysie des muscles respiratoires et des muscles strie´s. Ce constat est concordant avec la re´partition des espe`ces ophidiennes au Maroc [6]. L’immunothe´rapie antivenimeuse reste le seul traitement spe´cifique de l’envenimation ophidienne grave. Elle permet de neutraliser les composants toxiques en circulation dans l’organisme par des anticorps he´te´rologues, pre´pare´s a` partir de

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Envenimations ophidiennes pe´diatriques

se´rums d’animaux. Les principales ame´liorations apporte´es sont la fragmentation des immunoglobulines et leur purification confe´rant une excellente tole´rance [5]. Seuls les antivenins spe´cifiques permettront de neutraliser les effets toxiques du venin [17]. L’immunothe´rapie est indique´e dans les grades 2 et 3 [18] et dans les situations suivantes de grade 1 : grossesse (passage de venin transplacentaire et saignement potentiel du fœtus), suspicion de le´sions internes potentiellement he´morragiques (ulce`re digestif), morsure au visage ou au cou, aˆges extreˆmes ou poids infe´rieur a` 25 kg [5]. Le Fav-Afrique1 a e´te´ re´cemment introduit au Maroc. C’est un antivenin polyvalent qui serait efficace contre certaines espe`ces marocaines : Bitis arietans, Echis leucogaster et Naja haje d’ou` l’inte´reˆt du contexte ge´ographique et de l’identification de l’espe`ce [19]. Cependant, ce se´rum n’est pas efficace pour Cerates cerastes et Daboia mauritanica, pourtant pre´sents dans une large partie du Maroc. Il aurait fallu disposer en plus du Favirept1, antivenin polyvalent dirige´ contre les venins de Cerates cerastes et des trois autres espe`ces sus-cite´es couverts par le Fav-Afrique1 (tableau 1) [4]. Pour le Maroc, l’antivenin le plus adapte´ semble eˆtre le Favirept1, malheureusement, ce se´rum n’est pas encore disponible et on ne dispose que du FAV-Afrique1. La posologie est identique chez l’enfant et l’adulte, mais la quantite´ de liquide vecteur doit eˆtre adapte´e au poids de l’enfant. L’immunothe´rapie doit eˆtre poursuivie tant que persistent des troubles neurologiques, un saignement ou une coagulopathie (fibrinoge`ne < 1 g/L, TP < 50 %, plaquettes < 50 G/L), en fonction d’une surveillance clinique et biologique toutes les 4 h pendant au moins 24 h [20]. Le Fav-Afrique1 vient d’eˆtre introduit dans notre formation, il a e´te´ utilise´ chez deux malades. L’e´volution est favorable chez le premier, avec la normalisation du bilan biologique et la re´gression des signes locaux apre`s 48 h. Le deuxie`me cas pre´sentait un e´tat de choc initial, re´fractaire aux me´dicaments vasopresseurs et non re´versible malgre´ l’immunothe´rapie instaure´e 12 h apre`s la morsure. Cet e´chec peut eˆtre explique´ par un de´lai d’admission trop important ou plus probablement par la morsure d’un serpent non couvert par l’antivenin disponible. La chirurgie est d’indication plus discutable, d’autant plus que le risque he´morragique est important. Elle s’expose a` eˆtre ite´rative, de´labrante et sans efficacite´ sur le re´sultat final. L’ide´al est d’attendre la stabilisation des le´sions et la restauration des facteurs de la coagulation pour entreprendre un parage a` vise´e fonctionnelle ou esthe´tique. Une exception notable est la compression vasculaire confirme´e par une mesure des pressions intracompartimentales [21]. L’apone´vrotomie est indique´e en cas de diffe´rence entre la pression compartimentale et la pression arte´rielle moyenne de moins de 30 mmHg [22], mais l’expansion vole´mique et l’optimisation he´modynamique permettent dans plusieurs cas d’e´viter ce geste chirurgical. Le diagnostic du syndrome des loges, dans notre se´rie, se base sur une suspicion clinique, non confirme´e en l’absence de mesure des pressions compartimentales. Quatre patients ont eu cependant une apone´vrotomie, essentiellement au de´but de la pe´riode de l’e´tude, car une attitude plus conservatrice a e´te´ adopte´e par la suite.Les infections des parties molles sont des complications majeures des morsures de serpents : les proprie´te´s prote´olytiques du venin entraıˆnent la destruction

extensive des tissus et la de´vitalisation, cela pre´disposant a` une infection bacte´rienne issue de la flore buccale du serpent [23]. Le roˆle de l’antibioprophylaxie est discutable ; elle n’est pas syste´matiquement recommande´e, et un essai mene´ sur ce point n’a pas montre´ d’inte´reˆt particulier [24]. Cependant, nos patients ont rec¸u une antibiothe´rapie pre´ventive a` base d’association amoxicilline-acide clavulanique, indique´e par une souillure de la morsure ou un retard de prise en charge sans soins locaux. Un traitement symptomatique doit ne´cessairement accompagner la se´rothe´rapie. Face a` la douleur intense du syndrome vipe´rin, l’analge´sie multimodale est inte´ressante, tout en e´vitant les mole´cules dont les effets secondaires pourraient renforcer l’action du venin, notamment les antiinflammatoires non ste´roı¨diens. L’he´parine est contre-indique´e a` la phase aigue¨ de l’envenimation ; elle est inactive contre les enzymes qui perturbent l’he´mostase et elle augmente la dure´e d’hospitalisation. Les corticoı¨des ont un inte´reˆt uniquement dans le cadre d’une anaphylaxie [25]. Plusieurs cas de te´tanos ayant e´te´ de´crits apre`s morsure de serpent [26], un tel accident est une occasion pour ve´rifier ou comple´ter la couverture vaccinale antite´tanique. La transfusion de produits labiles sanguins a un inte´reˆt limite´ : ils sont consomme´s par les enzymes du venin qui restent actives pendant plusieurs jours dans la circulation. En effet, en cas de syndrome he´morragique, l’apport de plasma frais congele´ ou de fibrinoge`ne est inefficace, sauf en cas d’administration pre´alable de se´rum antivenimeux [27], dans ce cas-la`, un apport pre´coce de facteurs de coagulation est associe´ a` une ame´lioration plus rapide de la fonction de la coagulation [28]. En l’absence d’immunothe´rapie, on a eu recours, chez 66 % des enfants, a` la transfusion de produits sanguins labiles, souvent de fac¸on re´pe´titive dans un but d’obtenir un de´lai supple´mentaire avant l’e´limination du venin, mais l’analyse du taux de plaquettes et du TP avant et apre`s l’administration de produits sanguins labiles a montre´ l’inefficacite´ de la transfusion en l’absence de l’immunothe´rapie. Tous nos patients pre´sentaient des envenimations graves, avec deux de´ce`s, explique´s par la non-disponibilite´ de l’immunothe´rapie et le retard de la prise en charge. Le taux de mortalite´ dans les pays tropicaux avoisine 5 % des envenimations et 3 % des morsures [29]. Pour les patients survivants, les se´quelles e´taient surtout motrices avec deux cas d’amputations. Ces envenimations sont associe´es a` des se´quelles graves, concernant essentiellement l’appareil locomoteur, et seraient responsables d’environ 400 000 amputations cas chaque anne´e [30].

Conclusion Tout enfant mordu doit eˆtre hospitalise´ pour l’e´valuation de la gravite´ et la mise en place du traitement spe´cifique. Notre se´rie montre la gravite´ du tableau clinique initial dans notre contexte, avec une pre´dominance des complications locore´gionales et des troubles de l’he´mostase. L’inte´reˆt de l’immunothe´rapie dans l’atte´nuation de la gravite´ de ces envenimations et l’ame´lioration du pronostic n’est plus a` prouver, mais elle devra eˆtre confirme´e dans notre contexte par une e´tude ulte´rieure. Conflits d’inte´reˆt : aucun.

Me´decine et Sante´ Tropicales, Vol. 23, N8 4 - octobre-novembre-de´cembre 2013

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M. BERDAI, ET AL.

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Me´decine et Sante´ Tropicales, Vol. 23, N8 4 - octobre-novembre-de´cembre 2013

[Snake bites in children at the Fez University Hospital in Morocco].

The objective of our study is to describe the epidemiological, clinical, biological, and therapeutic aspects of snake bites in children in northern Mo...
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