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Rec¸u le : 16 mai 2013 Accepte´ le : 20 septembre 2013

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Fait clinique

Me´ningite a` Salmonelle chez un nourrisson due a` une tortue domestique Salmonella meningitis in an infant due to a pet turtle C. Ricarda,*, J. Mellentina, R. Ben Abdallah Chabchoubb, P. Kingbedeb, T. Heuclinb, A. Ramdamec, A. Bouqueta, F. Couttenierb, S. Hendricxa a

Laboratoire de bacte´riologie, centre hospitalier de Douai, route de Cambrai, 59507 Douai, France b Service de me´decine et chirurgie de l’enfant, centre hospitalier de Douai, route de Cambrai, 59507 Douai, France c Service d’imagerie me´dicale, centre hospitalier de Douai, route de Cambrai, 59507 Douai, France

Summary

Re´sume´

In humans, Salmonella most often causes self-limiting gastroenteritis, but more severe symptoms such as sepsis and meningitis can also occur and can sometimes have a fatal outcome. Even if the meningitis is not fatal, sequelae such as epilepsy, cranial nerve palsies, and hydrocephalus can occur. In the United States, it has been estimated that approximately 6% of the human cases of salmonellosis can be attributed to contact with reptiles or amphibians. The infection may take place by direct contact between reptile and human or indirectly via contact with an environment contaminated with Salmonella from a reptile. Salmonella enterica subsp. enterica serotype Vitkin is a common gut inhabitant of reptiles. Though human cases due to this organism are exceedingly rare, it may infect young infants and immunocompromised individuals with a history of intimate associations with reptiles. Gastroenteritis is the most common presentation ; others include peritonitis, meningitis and bacteremia. We report a case of meningitis caused by S. enterica subsp. enterica serotype Vitkin in a 1-month-old child due to a pet turtle. ß 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Bien que la majorite´ des infections a` Salmonelles non typhiques soit d’origine alimentaire et se manifeste par des troubles digestifs, il existe d’autres sources de contamination telles que les reptiles, un des re´servoirs naturels de la bacte´rie. Une contamination de l’homme est alors possible par contact direct avec l’animal ou son environnement. Les jeunes enfants, en particulier ceux aˆge´s de moins de 5 ans, sont tre`s vulne´rables aux infections a` Salmonella. Les formes graves sont l’apanage de nourrissons en particulier avant 3 mois ou lorsqu’ils sont atteints de dre´panocytose ou d’immunode´ficience. Nous rapportons le cas d’une me´ningite a` Salmonella enterica subsp. enterica se´rotype Vitkin chez un nourrisson de 1 mois et demi contamine´ par une tortue. ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

1. Introduction

pre´coces ainsi que les abce`s ce´re´braux ne sont pas rares [1]. Nous rapportons un cas de me´ningite a` Salmonella enterica subsp. enterica se´rotype Vitkin chez un nourrisson.

Les infections a` Salmonelles sont un proble`me de sante´ publique. Elles peuvent eˆtre graves chez les nourrissons chez qui elles peuvent se compliquer de me´ningites. Dans ces atteintes me´ninge´es, la mortalite´ de´passe 50 % et les rechutes * Auteur correspondant. Laboratoire de bacte´riologie, centre hospitalier de Douai, route de Cambrai, 59507 Douai, France. e-mail : [email protected] (C. Ricard)

2. Observation Ce nourrisson aˆge´ de un mois et demi, avait e´te´ amene´ par ses parents au service d’accueil des urgences pe´diatriques du centre hospitalier ge´ne´ral (CHG) de proximite´ pour fie`vre a` 38,6 8C e´voluant depuis 12 h. A` l’interrogatoire, on n’avait pas

0929-693X/$ - see front matter ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.arcped.2013.09.019 Archives de Pe´diatrie 2013;xxx:1-3

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C. Ricard et al.

note´ d’ante´ce´dents particuliers. L’enfant e´tait ne´ a` terme avec un poids de 3,3 kg, sans contexte infectieux. La sœur aıˆne´e avait pre´sente´ une infection virale re´cente. A` l’admission, l’enfant e´tait en bon e´tat ge´ne´ral, sans frissons, avec une pression arte´rielle normale et un examen neurologique normal. Le bilan biologique avait montre´ une prote´ine C-re´active plasmatique (CRP) < 5 mg/L, une procalcitonine basse a` 0,13 ng/mL, un ionogramme normal, une he´moglobine a` 8,9 g/dL avec des leucocytes a` 15 900/mm3 et des plaquettes a` 525 000/mm3. La radiographie de thorax e´tait normale. Apre`s une nuit d’observation sans complication, le retour a` domicile avait e´te´ autorise´ avec des consignes de surveillance et la poursuite d’un traitement par parace´tamol. Le lendemain, devant la persistance de la fie`vre et la survenue de douleurs, le nourrisson avait e´te´ amene´ par ses parents au service des urgences pe´diatriques du centre hospitalier re´gional. L’examen clinique et le bilan biologique n’avaient toujours pas identifie´ de cause infectieuse. La radiologie pulmonaire e´tait e´galement sans particularite´. Une se´rie d’he´mocultures et un examen cytobacte´riologique des urines (ECBU) avaient e´te´ re´alise´s et l’enfant avait e´te´ retransfe´re´ au CHG. A` son arrive´e, une ponction lombaire avait e´te´ re´alise´e et l’examen cytologique du liquide ce´phalo-rachidien (LCR) avait montre´ la pre´sence de 1200 leucocytes/mm3 dont 37 % de polynucle´aires neutrophiles, 27 % de lymphocytes et 36 % de monocytes-macrophages. La coloration de Gram avait mis en e´vidence des bacilles gram ne´gatif (fig. 1). Sur le plan biochimique, il existait une hypoglycorachie a` 0,01 g/L associe´e a` une e´le´vation de la prote´inorachie a` 3,41 g/L. Le bilan biologique avait montre´ un syndrome inflammatoire avec une CRP a` 128 mg/L et une procalcitonine plasmatique a` 0,760 ng/mL. Une antibiothe´rapie probabiliste par Roce´phineW avait alors e´te´ instaure´e, associe´e a` une injection unique de 0,8 mg de be´tame´thasone. La culture du LCR avait permis d’identifier une Salmonella sp. de phe´notype sauvage. L’interrogatoire des

[(Figure_1)TD$IG]

[(Figure_2)TD$IG]

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Figure 2. Tomodensitome´trie ce´re´brale : prise de contraste a` la tomodensitome´trie ce´re´brale.

parents avait alors re´ve´le´ la pre´sence d’une tortue aquatique au domicile familial, manipule´e par la me`re. La souche de Salmonella a e´te´ envoye´e au Centre national de re´fe´rence (CNR) Escherichia coli, Shigella et Salmonella de l’Institut Pasteur de Paris et s’est ave´re´e eˆtre une S. enterica subsp. enterica se´rotype Vitkin. Elle n’avait pas e´te´ retrouve´e a` la coproculture. Ce se´rotype, comme S. enterica subsp. arizonae, est pre´sent chez les reptiles, notamment les serpents et les tortues, qui sont un re´servoir naturel. Le traitement initial avait e´te´ une antibiothe´rapie associant l’amikacine a` la ceftriaxone durant une journe´e puis remplace´e par la ciprofloxacine pendant 15 jours apre`s l’identification de la souche. Sur le plan radiologique, la tomodensitome´trie ce´re´brale avait montre´ des prises de contraste (signe de souffrance) sans abce`s (fig. 2) qui s’e´taient normalise´es 72 h plus tard. L’e´volution sur le plan neurologique avait e´te´ favorable. L’examen clinique 1 mois apre`s la sortie e´tait normal.

3. Discussion

Figure 1. Examen direct du liquide ce´phalo-rachidien : coloration de Gram montrant des bacilles gram ne´gatif.

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Les me´ningites a` Salmonelle sont rares en France ou` elles repre´sentent environ 0,2 % des me´ningites bacte´riennes chez l’enfant. En revanche, leur pre´valence est plus e´leve´e en Afrique ou en Asie ou` elles repre´sentent entre 1 et 10 % des me´ningites bacte´riennes [1]. Les cas de´crits dans la litte´rature concernent principalement des nouveau-ne´s et des nourrissons s’e´tant contamine´s ge´ne´ralement au sein du cercle familial [2]. Aux E´tats-Unis, on compte environ 1,4 million de cas d’infections a` Salmonella par an et 400 de´ce`s [3]. Parmi ces cas, 6 % sont attribue´s a` des contacts avec des reptiles [4]. Ainsi, de`s 1975, la US Food et la Food and Drug Administration (FDA) avaient interdit la vente des petites tortues (dont la carapace mesure moins de 10 cm de diame`tre) pour diminuer les infections a` Salmonelles associe´es aux

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Salmonelle et tortue domestique

reptiles [4]. Les Salmonelles ont d’abord e´te´ isole´es chez les serpents, les tortues et les le´zards dans les anne´es 1940. De re´centes e´tudes ont montre´ qu’aujourd’hui plus de 50 a` 90 % de ces animaux en sont porteurs. On trouve ces bacte´ries dans le tractus gastro-intestinal, au niveau du cloaque, de la peau ainsi que dans leur milieu aquatique [3]. Dans notre observation, la recherche du portage par la tortue n’a pas pu eˆtre re´alise´e car la famille s’e´tait se´pare´e de l’animal peu de temps apre`s l’identification de la souche. Le se´rotype Vitkin a e´te´ pour la premie`re fois de´crit en 1956 pour une souche isole´e de tortues en Israe ¨l. Le nom de ce se´rotype vient de ‘‘Kfar Vitkin’’, une ville d’Israe ¨l. Tre`s peu de cas ont e´te´ de´crits dans la litte´rature. En France, le CNR rec¸oit en moyenne une souche de Salmonella de se´rotype Vitkin par an, provenant en majeure partie d’enfants de moins de 5 ans. Ce se´rotype posse`de les antige`nes suivants : O : 28 ; H phase 1 : l, v ; H phase 2 : e, n, x. Concernant la sous-espe`ce S. enterica subsp. arizonae, elle a e´te´ trouve´e pour la premie`re fois en 1939 chez des serpents, des le´zards et des tortues. Sa pre´valence semble plus e´leve´e chez les serpents puisque que 78 % en sont porteurs. Les reptiles se contaminent essentiellement par l’eau et la nourriture. Les premiers cas chez l’homme d’infections dues a` cette bacte´rie ont e´te´ de´crits en 1944. Les symptoˆmes les plus classiques sont ceux d’une gastroente´rite et 73 % des infections surviennent dans les trois premiers mois d’exposition a` un reptile [5]. Les me´ningites a` Salmonella e´taient classiquement associe´es a` des taux de mortalite´ e´leve´s (> 50 %). Cependant, l’utilisation re´cente des fluoroquinolones semble diminuer la mortalite´, le risque de rechute et les complications [1,6]. En France, l’utilisation des fluoroquinolones chez les enfants doit suivre les re´glementations officielles en vigueur. Le traitement doit eˆtre exclusivement instaure´ par des me´decins expe´rimente´s dans le traitement des infections se´ve`res de l’enfant et de l’adolescent. Certaines indications ont e´te´ de´finies par la commission des pe´diatres de l’International Society of Chemotherapy et par le comite´ des maladies infectieuses de l’American Academy of Pediatrics. Ainsi, l’usage de ces mole´cules peut eˆtre justifie´ dans les infections mettant en jeu le pronostic vital de l’enfant. De ce fait, compte tenu de leurs excellentes pe´ne´trations me´ninge´e et intracellulaire, elles peuvent eˆtre utilise´es dans les me´ningites ne´onatales a` Salmonelle en association a` un autre antibiotique [7,8].

 la Convention de Washington qui a pour but d’instaurer des re`gles internationales pour le commerce des animaux sauvages ;  la re ´ glementation europe´enne ;  l’arre ˆ te´ du 19 novembre 2007 qui fixe la liste des amphibiens et des reptiles prote´ge´s sur l’ensemble du territoire franc¸ais et les modalite´s de leur protection. La pre´vention primaire passe par le respect des recommandations relatives a` la pre´vention de la transmission de Salmonelles des reptiles a` l’homme e´labore´e par le Centers of Disease Control and Prevention [9]. Les proprie´taires de reptiles doivent respecter des re`gles d’hygie`ne strictes notamment lors de la manipulation des animaux. Lors de la vente de ces reptiles, il est d’ailleurs primordial que les clients soient informe´s de ces re`gles ainsi que des risques infectieux encourus, en particulier la contamination possible par les Salmonelles. Le CNR des Salmonelles de l’Institut Pasteur a` Paris met e´galement ces recommandations a` la disposition du personnel me´dical pour qu’il puisse sensibiliser leurs patients.

De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

Re´fe´rences [1]

[2]

[3]

[4]

[5]

[6] [7]

4. Conclusions

[8]

Toute manifestation septique chez un enfant en contact avec des reptiles ou ayant consomme´ des produits de´rive´s doit faire e´voquer une infection a` Salmonella. La le´gislation concernant le commerce des reptiles est re´glemente´e par 3 textes :

[9]

Guillaumat C, Dang-Duy TL, Levy C, et al. Me´ningites a` salmonelles du nouveau-ne´ et du nourrisson. Inte´reˆt des fluoroquinolones. Arch Pediatr 2008;15(Suppl 3):161–6. Van Meervenne E, Botteldoorn N, Lokietek S, et al. Turtleassociated Salmonella septicaemia and meningitis in a 2month-old baby. J Med Microbiol 2009;58:1379–81. De Jong B, Andersson Y, Ekdahl K. Effect of regulation and education on reptile-associated salmonellosis. Emerging Infect Dis 2005;11:398–403. Harris JR, Bergmire-Sweat D, Schlegel JH, et al. Multistate outbreak of Salmonella infections associated with small turtle exposure, 2007-2008. Pediatrics 2009;124:1388–94. Mahajan RK, Khan SA, Chandel DS, et al. Fatal case of Salmonella enterica subsp. arizonae gastroenteritis in an infant with microcephaly. J Clin Microbiol 2003;41:5830–2. Price EH, De Louvois J, Workman MR. Antibiotics for Salmonella meningitis in children. J Antimicrob Chemother 2000;46:653–5. Gendrel D. Les fluoroquinolones chez l’enfant. Med Trop (Mars) 2002;62:185–92. Sarlangue J, Castella C, Lehours P. Modalite´s de l’antibiothe´rapie (initiale et ulte´rieure) chez l’enfant d’un a` trois mois et plus de trois mois (examen direct positif et examen direct ne´gatif). Med Mal Infect 2009;39:521–30. Centers for Disease Control Prevention. Reptile-associated salmonellosis-selected states, 1998–2002. MMWR Morb Mortal Wkly Rep 2003;52:1206–9.

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[Salmonella meningitis in an infant due to a pet turtle].

In humans, Salmonella most often causes self-limiting gastroenteritis, but more severe symptoms such as sepsis and meningitis can also occur and can s...
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