Article original

Me´decine et Sante´ Tropicales 2015 ; 25 : 92-96

Résultats du traitement chirurgical de l'aspergillome pulmonaire à Dakar Results of surgical treatment for pulmonary aspergilloma Ba P.S., Ndiaye A., Diatta S., Ciss A.G., Dieng P.A., Gaye M., Fall M.L., Ndiaye M. Service de chirurgie cardiovasculaire et thoracique, hoˆpital Fann, BP 5035, Dakar, Se´ne´gal Article accepte´ le 02/9/2014

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Mots cle´s : aspergillome, tuberculose, he´moptysie, grelot, chirurgie pulmonaire.

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Correspondance : Ba PS

Abstract. Introduction: Aspergilloma results from the development, inside preexisting pulmonary cavities, of aspergillus spores. It is most commonly manifested by hemoptysis. The goal of this retrospective study is to report our surgical experience of this disease. Patients and methods: From January 2004 to December 2008, 35 patients underwent surgery at the same center for pulmonary aspergilloma. We examined the epidemiological, clinical, paraclinical, therapeutic, and outcome data. Results: The patients’ median age was 43.37 years (range: 20-70 years), 28 were male. The average time to consultation was 19.35 months (1-120 months), and all patients had a history of pulmonary tuberculosis. Hemoptysis was the symptom observed most often, in 54.3% of patients, followed by bronchorrhea. Aspergillus serology was positive for 22 patients. The standard radiological image was found in 20 patients. We performed 14 lobectomies, 1 bilobectomy, 1 segmentectomy, 1 bisegmentectomy, 3 lobectomies with segmentectomies, 1 bilobectomy with segmentectomy, and 14 pleuropneumonectomies. In one case, the pulmonary artery was damaged and repaired. The average duration of intensive care was 3.54 days (2-7 days) and of total hospitalization, 17.33 days (7-48). Complications were: empyema (3 cases), a large air leak (1 case), parietal suppuration (5 cases), and pleural effusion, which was drained (3 cases). There was no postoperative mortality. After 35 months (1-72), one case of recurrent hemoptysis by reinfestation was observed. Three patients died of respiratory failure, one at 6 months and the other two at 1 year after the surgery. Conclusion: Despite the associated morbidity, surgical treatment of pulmonary aspergilloma must be proposed systematically to these subjects presenting hemoptysis. Key words: aspergilloma, tuberculosis, hemoptysis, pulmonary surgery.

Pour citer cet article : Ba PS, Ciss AG, Dieng PA, Ndiaye A, Diatta S, Gaye M, Fall ML, Diarra O, Ndiaye M. Re´sultats du traitement chirurgical de l’aspergillome pulmonaire a` Dakar. Med Sante Trop 2015 ; 25 : 92-96. doi : 10.1684/mst.2014.0412

doi: 10.1684/mst.2014.0412

Re´sume´. Introduction : l’aspergillome est lie´ au de´veloppement, a` l’inte´rieur des cavite´s pulmonaires pre´existantes, de spores d’Aspergillus. Il se manifeste souvent par une he´moptysie. Le but de cette e´tude re´trospective e´tait de rapporter notre expe´rience chirurgicale. Patients et me´thodes : il s’agissait d’une e´tude re´trospective monocentrique a` propos de trente-cinq patients ope´re´s pour aspergillome pulmonaire entre janvier 2004 et de´cembre 2008. Ont e´te´ e´tudie´es : les donne´es e´pide´miologiques, cliniques, paracliniques et the´rapeutiques ainsi que les donne´es e´volutives. Re´sultats : l’aˆge moyen e´tait de 43,4 ans (20-70 ans) ; vingt-huit patients e´taient de sexe masculin. Le de´lai de consultation e´tait de 19,3 mois (1-120 mois) et tous les patients avaient un ante´ce´dent de tuberculose pulmonaire. L’he´moptysie de moyenne abondance e´tait le principal symptoˆme (54 %), suivie de la bronchorrhe´e. La se´rologie aspergillaire e´tait positive chez vingt-deux patients. L’image radiologique « en grelot » e´tait rapporte´e chez vingt patients. Nous avons proce´de´ a` quatorze lobectomies, une bilobectomie, une segmentectomie, une bisegmentectomie, trois lobectomies plus segmentectomie, une bilobectomie plus segmentectomie et quatorze pleuropneumonectomies. Les complications postope´ratoires ont e´te´ une plaie de l’arte`re pulmonaire (un cas), le pyothorax (trois cas), une fuite ae´rique importante (un cas), une suppuration parie´tale (cinq cas) et un e´panchement pleural draine´ (trois cas). Les dure´es moyennes du se´jour en re´animation et en hospitalisation e´taient respectivement de 3,54 jours (2-7 jours) et de 17,33 jours (7-48 jours). La mortalite´ pe´riope´ratoire e´tait nulle. Avec un recul moyen de trente-cinq mois (un a` soixante-douze mois), nous avons note´ un cas de re´cidive sous forme d’he´moptysie par re´infestation. Trois patients sont de´ce´de´s (taux de mortalite´ : 8 %), dont l’un a` six mois et les deux autres a` un an, du fait d’une insuffisance respiratoire. Conclusion : le traitement chirurgical de l’aspergillome pulmonaire doit eˆtre propose´ syste´matiquement chez les sujets pre´sentant une he´moptysie.

Traitement chirurgical de l’aspergillome pulmonaire

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aspergillome est lie´ au de´veloppement, a` l’inte´rieur de cavite´s pulmonaires pre´existantes, de spores d’Aspergillus organise´s en feutrage myce´lien dense [1]. Le signe clinique le plus fre´quent est l’he´moptysie, qui peut aller d’une forme mineure a` sa forme cataclysmique, sans valeur pre´dictive [2]. La strate´gie de prise en charge the´rapeutique de l’aspergillome pulmonaire n’est pas encore bien de´finie [3], mais la question centrale du de´bat est de de´cider si l’on re´serve une chirurgie d’exe´re`se uniquement aux cas symptomatiques, ou si au contraire il faut envisager une chirurgie « prophylactique » syste´matique afin d’e´viter les complications e´volutives [4]. Le but de notre e´tude e´tait d’e´valuer les re´sultats du traitement chirurgical des patients pre´sentant un aspergillome pulmonaire, afin de mieux affiner les indications the´rapeutiques.

Patients et me´thodes Il s’agit d’une e´tude re´trospective et monocentrique a` propos de trente-cinq patients ope´re´s pour aspergillome pulmonaire entre janvier 2004 et de´cembre 2008. Tous les patients non ope´re´s ont e´te´ exclus de l’e´tude. Ont e´te´ e´tudie´es : les donne´es e´pide´miologiques, cliniques, paracliniques et the´rapeutiques ainsi que les donne´es e´volutives. Le logiciel SPSS 17.0 nous a permis de faire une analyse multivarie´e. Le test statistique utilise´ est le Chi-carre´ pour les variables cate´gorielles. La comparaison des moyennes entre les patients a e´te´ faite a` l’aide du test t de Student. Un p infe´rieur a` 0,05 est conside´re´ comme significatif.

Re´sultats L’aˆge moyen de nos patients e´tait de 43,4 ans avec des extreˆmes de 20 et 70 ans ; vingt-huit e´taient de sexe masculin. Le de´lai moyen de consultation e´tait de 19,3 mois avec des extreˆmes de 1 et 120 mois. Tous les patients avaient un ante´ce´dent de tuberculose pulmonaire de´ja` traite´e jusqu’a` terme. Aucune autre pathologie pulmonaire n’a e´te´ identifie´e. L’he´moptysie re´cidivante de moyenne abondance e´tait le principal symptoˆme (54 % des cas), suivie de la bronchorrhe´e chronique. Les associations symptomatiques e´taient fre´quentes (tableau 1). Les le´sions radiologiques e´taient fre´quentes aux lobes supe´rieurs, plus particulie`rement au lobe supe´rieur droit (tableaux 2-3). L’image radiologique « en grelot » e´tait observe´e chez vingt patients (57 %), suivie de la caverne tuberculeuse (77 %), des le´sions de dilatation des bronches (63 %) et du Tableau 1. Symptoˆmes chez 35 patients pre´sentant un aspergillome pulmonaire. Table 1. Symptoms among 35 patients with pulmonary aspergilloma. Symptoˆmes He´moptysie petite abondance (< 50 mL) moyenne abondance (50 a` 200 mL) grande abondance (> 200 mL) Bronchorrhe´e Infections pulmonaires a` re´pe´tition Douleur thoracique Dyspne´e Toux

Fre´quence 34 14 19 1 4 3 8 2 35

Pourcentage 97 40 54 3 11 9 23 6 100

Me´decine et Sante´ Tropicales, Vol. 25, N8 1 - janvier-fe´vrier-mars 2015

Tableau 2. Types d’images radiologiques Table 2. Features of radiologic images Images radiologiques Image en grelot Caverne tuberculeuse Dilatation des bronches Nodule pulmonaire Niveau hydroae´rique E´paississement pleural Calcifications nodulaires pulmonaires se´quellaires Poumon de´truit Bulles d’emphyse`me

Nombre 20 27 22 6 2 3 2 1 5

Pourcentage 57 77 63 16 6 9 6 3 14

nodule pulmonaire (16 %). Les autres images radiologiques e´taient un niveau hydroae´rique (6 %), un e´paississement pleural (9 %), des calcifications nodulaires pulmonaires se´quellaires (6 %), un poumon de´truit (3 %) et des bulles d’emphyse`me (14 %). La se´rologie aspergillaire e´tait positive chez vingt-deux patients (76 %), mais six patients (17 %) n’en ont pas be´ne´ficie´. Parmi les vingt-quatre patients (68 %) ayant eu une exploration fonctionnelle respiratoire (EFR) pre´ope´ratoire, 31 % avaient un trouble ventilatoire mixte, 20 % un trouble obstructif et 9 % un trouble restrictif. Tous nos patients pre´sentaient un aspergillome complexe selon la classification de Belcher et Plummer [5]. Diverses autres le´sions (tableau 4) ont e´te´ observe´es a` l’ouverture de la cavite´ pleurale par thoracotomie poste´rolate´rale au 5e espace intercostal. L’exe´re`se chirurgicale e´tait dicte´e par le bilan perope´ratoire des le´sions : quatorze lobectomies seules (40 %), une bilobectomie, une segmentectomie, une bisegmentectomie, trois lobectomies plus segmentectomie, une bilobectomie plus segmentectomie, quatorze pleuropneumonectomies (40 %) dont une totalisation apre`s une lobectomie supe´rieure droite. Tous les patients ont e´te´ transfuse´s, en moyenne de deux poches de sang total de 500 mL. La dure´e moyenne de l’intervention e´tait de 4 h (min = 2 h, max = 6 h). Les dure´es moyennes du se´jour en re´animation et en hospitalisation e´taient respectivement de 3,5 jours (min = 2 ; max = 7 jours) et 17,3 jours (min = 7 ; max = 48 jours). Les principales complications (tableau 5) ont e´te´ : une plaie de l’arte`re pulmonaire (un cas), un pyothorax (trois cas), une fuite ae´rique importante, qui a ne´cessite´ un drainage thoracique prolonge´ (quinze jours) (un cas), une suppuration parie´tale (cinq cas) et un e´panchement pleural du fait d’un retrait pre´coce du drain thoracique (trois cas) ayant ne´cessite´ un nouveau drainage. Parmi les patients ayant pre´sente´ un pyothorax, un patient avait be´ne´ficie´ d’une lobectomie et deux d’une pleuropneumonectomie, dont une totalisation pour une re´cidive de l’he´moptysie apre`s une lobectomie premie`re. Le pyothorax a e´te´ jugule´ par un drainage prolonge´ avec lavage pour un cas et par thoracoplastie apre`s drainage et lavage sans lambeau musculaire pour les deux autres cas (pleuropneumonectomie). La mortalite´ pe´riope´ratoire e´tait nulle. Avec un recul moyen de trente-cinq mois (un a` soixantedouze mois), nous avons note´ un cas de re´cidive sous forme d’he´moptysie par probable re´infestation (se´rologie aspergillaire positive). Trois de´ce`s ont e´te´ note´s (taux de mortalite´ = 8 % a` un

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P.S. BA, ET AL. Tableau 3. Localisation des le´sions radiologiques Table 3. Location of radiologic lesions Localisation

Lobe supe´rieur droit

Lobe moyen

Fowler droit

Fre´quence Pourcentage

21 60

4 11

6 17

Lobe infe´rieur droit sauf Fowler 2 6

Lobe supe´rieur gauche

Fowler gauche

17 49

1 3

Lobe infe´rieur gauche sauf Fowler 9 27

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Tableau 4. Le´sions de´couvertes a` l’ouverture de la cavite´ pleurale. Table 4. Lesions discovered on opening the pleural cavity. Le´sions ope´ratoires Fre´quence Pourcentage

Lobe supe´rieur droit de´truit 10 29

Truffe aspergillaire 8 23

Le´sions ope´ratoires Fre´quence Pourcentage

Adhe´rences parie´tales 13 37

Lobe supe´rieur gauche de´truit 4 11

Adhe´rences scissurales 2 6

an), l’un a` six mois et les deux autres a` un an postope´ratoire par insuffisance respiratoire. E´taient corre´le´es aux fuites ae´riennes persistantes : l’aˆge avance´ (plus de 66 ans p < 0,001), les le´sions du Fowler gauche (p < 0,001), la bronchorrhe´e chronique a` l’interrogatoire (p = 0,005). Aucun facteur pre´disposant au pyothorax postope´ratoire n’a e´te´ note´. L’examen anatomopathologique avait confirme´ le diagnostic chez vingt-deux patients (63 %), et dix patients (28 %) n’avaient pas be´ne´ficie´ de l’histologie, faute de moyens financiers. Les dix avaient tous une se´rologie aspergillaire positive.

Discussion L’aspergillome pulmonaire constitue la forme saprophyte de l’infestation par l’Aspergillus, a` coˆte´ des formes invasive et allergique [6]. Un individu peut pre´senter ces diffe´rentes formes dans son existence, selon son statut immunitaire [6]. Cette affection est grave, a` l’origine de difficulte´s ope´ratoires (he´morragies) et de complications postope´ratoires, et sa mortalite´ est e´leve´e [2, 4]. L’aspergillome pulmonaire se de´veloppe a` l’inte´rieur de cavite´s parenchymateuses ou pleurales pre´existantes, le plus souvent d’origine tuberculeuse [1, 8, 9]. Dans notre e´tude, tous nos patients avaient une e´tiologie tuberculeuse. C’est une pathologie rare dans les pays Tableau 5. Les complications postope´ratoires Table 5. Postoperative complications Complications Pyothorax Fuites ae´riques prolonge´es Suppuration parie´tale E´panchement pleural Total

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Nombre 3 1 5 3 12

Pourcentage 8,5 3 14 8,5 34

Poumon gauche de´truit 3 8

Packypleurite 14 40

Le´sions de dilatation des bronches 1 3

Le´sion au lobe moyen 2 6

Bulle 2 6

Destruction du segment de Fowler 5 14,3

occidentaux : douze cas en cinq ans pour Chatzilichalis et vingtquatre cas en quatorze ans pour Okubo [10, 11]. Elle est en revanche toujours d’actualite´ en Afrique : 206 cas en dix-huit ans pour Kabiri et trente-cinq cas en quatre ans dans notre e´tude [1]. Sur le plan clinique, tous nos patients e´taient symptomatiques avec une he´moptysie dans 92,2 % des cas, valeur comparable aux diverses donne´es rapporte´es dans la litte´rature : 92 % [1], 83 % [12], 66 % [6] et 48 % [13]. L’aspect radiologique est tre`s variable, allant de l’image tre`s e´vocatrice, « en grelot », a` l’aspect de poumon de´truit aspergillaire. Dans notre e´tude, l’image classique en grelot a e´te´ note´e chez vingt patients (57 %). Les le´sions radiologiques e´taient pre´dominantes aux lobes supe´rieurs, et plus particulie`rement a` droite, ce qui est habituellement de´crit [6, 14, 15]. Il faut pre´ciser que la taille de l’aspergillome sur les radiographies n’est pas proportionnelle a` la se´ve´rite´ de l’he´moptysie [2]. La tomodensitome´trie (TDM) semble beaucoup plus performante dans le diagnostic de l’aspergillome pulmonaire, en particulier dans les formes de´butantes [16]. Elle permet un bilan pre´cis des le´sions en appre´ciant le nombre, la localisation, le degre´ d’extension (me´diastin) et le risque d’atteinte vasculaire. Cependant, elle est surtout inte´ressante pour les techniques de drainage percutane´ radioguide´, afin d’e´viter les complications perope´ratoires en e´tudiant l’environnement vasculaire, parie´tal et parenchymateux de la cavite´ a` injecter. L’endoscopie bronchique est ne´cessaire en cas d’aspergillome bronchopulmonaire ; elle permet d’e´liminer certains diagnostics, notamment les tumeurs bronchiques. Elle occupe une place pre´ponde´rante en cas d’he´moptysie, en permettant de localiser l’origine de saignement [17]. La se´rologie aspergillaire a une valeur diagnostique importante en pre´sence d’au moins quatre arcs de pre´cipitation en immunoe´lectrophore`se, mais elle peut rester ne´gative chez 5 a` 10 % des patients porteurs d’un aspergillome pulmonaire [18]. Elle n’e´tait positive que chez 63 % de nos patients, pour des Me´decine et Sante´ Tropicales, Vol. 25, N8 1 - janvier-fe´vrier-mars 2015

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Traitement chirurgical de l’aspergillome pulmonaire

valeurs rapporte´es dans la litte´rature de 25 et 50 % [11, 19]. En somme, le diagnostic positif de l’aspergillome pulmonaire repose sur un faisceau d’arguments, cliniques et paracliniques. L’indication chirurgicale, dans notre se´rie, e´tait la re´cidive des he´moptysies, dont le risque e´volutif demeure l’he´moptysie cataclysmique, qui est impre´visible. L’e´volution spontane´e de l’aspergillome pulmonaire peut eˆtre marque´e par une augmentation progressive du risque d’he´moptysie, passant de formes minimes a` des formes graves, mettant en jeu le pronostic vital quand l’he´moptysie est supe´rieure a` 150 mL [2]. Elle peut e´voluer vers les autres formes, notamment invasives et bronchopulmonaires allergiques [7]. Dans les formes symptomatiques et inope´rables, l’embolisation des arte`res bronchiques peut eˆtre propose´e. Elle n’est pas toujours efficace pour controˆler les he´moptysies massives a` cause de l’importance de la circulation collate´rale, parie´tale, intercostale et transpleurale. Ne´anmoins, elle peut pre´parer la chirurgie [20]. Le but du traitement chirurgical est de re´se´quer des cavite´s proches des vaisseaux pulmonaires et de pre´venir une he´moptysie fatale, en limitant le plus possible la re´section parenchymateuse, pour ne pas alte´rer la fonction respiratoire postope´ratoire [6]. C’est dans ce sens que nous avons re´alise´ vingt et une lobectomies (60 %), qui sont l’intervention la plus pratique´e dans la plupart des e´tudes [1, 21, 22]. Notre voie d’abord pre´fe´rentielle e´tait une thoracotomie poste´rolate´rale comme celle pre´conise´e par Massard [4]. La pachypleurite parie´tale importante post-tuberculeuse a rendu tre`s difficile l’acce`s du poumon. Les adhe´rences scissurales assez fre´quentes ont rendu difficiles certaines lobectomies. Nous avons proce´de´ syste´matiquement a` la cre´ation d’un pneumope´ritoine apre`s une lobectomie, pour aider le parenchyme pulmonaire restant (qui n’e´tait pas souple), a` coloniser la cavite´ thoracique. Chatzimichalis pre´conise la confection d’un pneumope´ritoine de 1,5 L dans ces cas [11]. Nous mettons en place au moins deux drains, apical et basal, apre`s la re´alisation d’une re´section partielle du poumon. Nous avions re´alise´ quatorze (40 %) pleuropneumonectomies, du fait de la destruction du poumon concerne´. Notre dissection est, dans la plupart des cas, extrapleurale, pour e´viter d’ouvrir une poche pleurale source d’infection [15]. La ne´ovascularisation d’origine syste´mique, surtout a` l’apex du poumon, fait que ce de´collement entraıˆne beaucoup de saignement, ce qui rend cette chirurgie tre`s he´morragique [23]. Selon l’e´tude de Massard, c’est la pre´sence de se´quelles tuberculeuses pulmonaires, plutoˆt que l’aspergillome pulmonaire, qui accentue le saignement perope´ratoire [23]. Apre`s une pneumonectomie, nous laissons en place un drain thoracique clampe´ par intermittence jusqu’a` l’e´claircissement du liquide pleural (deux a` trois jours). Chez les patients a` haut risque ope´ratoire, la cavernostomie (marsupialisation de la caverne infeste´e a` la peau) apre`s instillation de produit antifungique peut eˆtre indique´e [24]. Les complications de la chirurgie de l’aspergillome pulmonaire sont fre´quentes et sont domine´es par les he´morragies, les fistules bronchopleurales et le pyothorax. Massard pre´conise la prise en charge du pyothorax postope´ratoire par un drainage-lavage a` l’aide d’un drain thoracique, suivie de la confection d’une thoracoplastie quand l’infection persiste [23]. Nous avons adopte´ ce meˆme proce´de´ pour nos trois cas de pyothorax postope´ratoire. La litte´rature rapporte des pourcentages plus e´leve´ de pyothorax

postope´ratoire : 8 % [1], 11 % [22] et 7,8 % [8]. Dans notre e´tude, le proble`me de l’espace pleural re´siduel e´tait minime. Il serait duˆ au respect de certains crite`res dont : – la libe´ration comple`te du poumon, notamment du ligament triangulaire, – une bonne he´mostase, – une dissection prudente du nerf phre´nique pour e´viter son traumatisme, source de pare´sie diaphragmatique, – la re´section pulmonaire en zone saine, – une kine´sithe´rapie respiratoire postope´ratoire rigoureuse, – une aspiration continue pour maintenir la re´expansion pulmonaire. La mortalite´ pre´coce apre`s le traitement chirurgical de l’aspergillome pulmonaire est tre`s variable selon les se´ries : 9,5 % pour Attila [22], 6,4 % pour Kabiri [1], 8 % pour Massard [23] et 3,3 % pour Brik [12]. Des progre`s ont e´te´ re´alise´s dans notre service quant a` la prise en charge, car la mortalite´ pre´coce est passe´e de 20 % en 1998 [25] a` 0 % en 2008. La re´cidive de l’he´moptysie a` long terme est le plus souvent due a` la re´infestatation par l’Aspergillus. Cela est confirme´ par Young [14] ainsi que par notre e´tude. Le traitement utilisant les antifungiques par voie syste´mique est de´cevant ; peuvent ne´anmoins en be´ne´ficier les patients qui ont une contreindication a` la chirurgie ou qui refusent l’intervention chirurgicale [26].

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Conclusion L’histoire naturelle de l’aspergillome pulmonaire n’est pas encore bien de´crite et la strate´gie de sa prise en charge n’est pas encore bien de´finie [3,9]. Nous pre´conisons, comme la majorite´ des auteurs, un traitement chirurgical syste´matique, quelle que soit la gravite´ de l’he´moptysie majeure. Conflits d’inte´reˆt : aucun.

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Dittilou, Djibouti # A. Trignol

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Me´decine et Sante´ Tropicales, Vol. 25, N8 1 - janvier-fe´vrier-mars 2015

[Results of surgical treatment for pulmonary aspergilloma].

Aspergilloma results from the development, inside preexisting pulmonary cavities, of aspergillus spores. It is most commonly manifested by hemoptysis...
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