Rec¸u le : 11 fe´vrier 2013 Accepte´ le : 9 janvier 2014 Disponible en ligne 19 fe´vrier 2014

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Cas clinique

Synovialosarcome primitif de la glande parotide Primary synovial sarcoma of the parotid gland Y. Ziania,*, L. Khalfia, F. Choumia, A. Boudhasb, A. Al bouzidib, A. Abouchadia, K. Elkhatiba a

Service de chirurgie plastique et chirurgie maxillofaciale, hoˆpital militaire d’instruction Mohamed V, Rabat, Maroc b Service d’anatomie pathologique, hoˆpital militaire d’instruction Mohamed V, Rabat, Maroc

Summary Introduction. Synovial sarcoma is a malignant soft tissue neoplasm which occurs most of the time in teenagers and young adults. Facial, and especially parotid gland localization, is very uncommon. Case report. A 15-year-old male patient, with no prior history, was hospitalized for swelling in the left parotid area noted 5 months before. The mass was painful and there was no facial paralysis. A CT scan revealed a tumoral process of mixed density in the left parotid gland. The thorax and abdominal CT scan was normal. The patient was initially treated by surgery and adjuvant chemotherapy. He died, 8 months after this multimodal therapy. Discussion. Five percent of salivary gland primitive tumors are of mesenchymatous origin, 0.3 to 1.5% of which are sarcomas. The diagnosis of parotid gland synovial sarcoma is confirmed by immunehistochemistry and cytogenetic tests. Surgery combined to radiotherapy seems to be the best treatment. ß 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Re´sume´ Introduction. Le synovialosarcome est une tumeur maligne des tissus mous qui survient surtout chez les adolescents et les jeunes adultes. Sa localisation a` la face, et surtout a` la glande parotide, est exceptionnelle. Observation. Un adolescent de 15 ans, sans ante´ce´dent, a e´te´ hospitalise´ pour une tume´faction parotidienne gauche, apparue cinq mois auparavant. La masse e´tait douloureuse, il n’y avait pas de paralysie faciale. La tumeur, au scanner, avait une densite´ mixte, elle occupait la parotide gauche. Le scanner thoraco-abdominal e´tait normal. Le traitement a associe´ l’exe´re`se chirurgicale de la tumeur et une chimiothe´rapie adjuvante. Le patient est de´ce´de´ 8 mois plus tard. Discussion. Cinq pour cent des tumeurs primitives des glandes salivaires sont d’origine me´senchymateuse, dont 0,3 a` 1,5 % sont des sarcomes. Le diagnostic de synovialosarcome de la glande parotide est immuno-histochimique et cytoge´ne´tique. La chirurgie, associe´e a` la radiothe´rapie, semble eˆtre le meilleur traitement. ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Keywords: Synovial sarcoma, Parotid gland, Surgery Mots cle´s : Synovialosarcome, Glande parotide, Chirurgie

Introduction Trois pour cent des tumeurs cervico-faciales sont des tumeurs de la glande parotide. Vingt pour cent d’entre elles sont des tumeurs malignes, essentiellement des ade´nocarcinomes et des carcinomes muco-e´pidermoı¨des. Le synovialosarcome (SS) est une tumeur maligne rare, environ 10 % de l’ensemble des sarcomes des tissus mous [1]. Il touche, le plus souvent, les

* Auteur correspondant. e-mail : [email protected] (Y. Ziani).

extre´mite´s des membres et atteint l’adolescent et l’adulte jeune avec une pre´dominance masculine [1]. La localisation cervico-faciale repre´sente seulement 0,7 a` 10 % de l’ensemble des synovialosarcomes, selon les e´tudes [1,2]. Nous pre´sentons un cas de synovialosarcome de la glande parotide avec une mise a` jour sur la prise en charge.

Cas clinique Un patient de 15 ans, sans ante´ce´dent, a consulte´ pour une tume´faction jugale gauche apparue cinq mois auparavant. Elle e´tait d’e´volution progressive, indolore, sans paralysie

2213-6533/$ - see front matter ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.revsto.2014.01.004 Rev Stomatol Chir Maxillofac Chir Orale 2014;115:124-127

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Synovialosarcome primitif de la glande parotideSynovialosarcome primitif de la glande parotide

Figure 3. Coloration e´osine he´mateine GX10 : glande salivaire : sie`ge d’une prolife´ration fusocellulaire monophasique faite de cellules fusiformes.

Figure 1. Imagerie par re´sonance magne´tique du massif facial en coupe transversale : la tumeur parotidienne gauche pre´sente des zones en hypersignal en T2.

faciale, ni de limitation d’ouverture buccale. La tume´faction e´tait de 5 cm de grand axe, mal limite´e, de consistance ferme, douloureuse, mobile par rapport au plan superficiel et sans ade´nopathie satellite. L’examen buccal e´tait normal. Au scanner, il y avait une hypertrophie diffuse d’aspect he´te´roge`ne, pre´dominante sur le prolongement masse´terin de la glande

parotide gauche. A` l’IRM, une masse parotidienne gauche de 10 cm de grand axe, bien limite´e, en hyposignal en T1, hypersignal en T2 se rehaussait de fac¸on he´te´roge`ne apre`s injection et englobait le ramus mandibulaire et le muscle masse´ter (fig. 1 et 2). Le scanner thoraco-abdominal et la scintigraphie osseuse e´taient normaux. La biopsie de la masse tumorale a e´te´ en faveur d’une tumeur maligne d’origine me´senchymateuse. Le traitement a e´te´ une re´section chirurgicale large de la tumeur emportant la parotide (avec sacrifice du nerf), le muscle masse´ter et le pte´rygoı¨dien externe, sans mandibulectomie (pas d’atteinte mandibulaire) et sans re´paration du nerf facial. L’analyse anatomopathologique et immuno-histochimique ont conclu a` une tumeur monophasique type synovialosarcome (fig. 3), et limites d’exe´re`se difficiles a` pre´ciser vue la fragmentation de la tumeur a` proximite´ des vaisseaux. Le patient a be´ne´ficie´ de 3 cures de chimiothe´rapie type API (A : doxorubicine/P : cis platinum/I : ifosfamide) et a refuse´ la radiothe´rapie externe. L’e´volution a e´te´ marque´e par une re´cidive locale avec extension vers la fosse infratemporale et le patient est de´ce´de´ huit mois plus tard.

Discussion

Figure 2. IRM en coupe coronale T2 : la masse parotidienne englobe le ramus mandibulaire et le muscle masse´ter.

La localisation parotidienne primitive du synovialosarcome est excessivement rare, avec quelques cas rapporte´s dans la litte´rature. Ces SS s’observent chez l’adulte jeune d’un aˆge moyen de 20 a` 34 ans avec pre´dominance masculine [3]. Leur origine n’est pas bien de´finie et il semble qu’ils se de´veloppent a` partir d’une cellule me´senchymateuse pluripotente [4]. Ceci explique leur survenue dans des re´gions de´pourvues de tissu synovial normal comme la re´gion parotidienne [4]. Ses facteurs de risques ne sont pas clairement e´tablis.

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Elle se manifeste par une tume´faction parotidienne parfois douloureuse e´voluant lentement sur plusieurs mois, pouvant s’accompagner d’une paralysie faciale, d’une fixite´ tumorale et d’ade´nopathies parotidiennes et cervicales. L’imagerie me´dicale (TDM et IRM) permet de confirmer la nature tumorale de la le´sion et d’e´tudier ses limites et ses rapports avec les structures de voisinage. La TDM est plus inte´ressante pour pre´ciser l’e´rosion osseuse et les calcifications intratumorales, alors que l’IRM pre´cise au mieux l’extension tumorale, l’invasion vasculaire et les he´morragies intratumorales [4]. Le SS se pre´sente macroscopiquement comme une masse arrondie, bien limite´e, pseudo-encapsule´e, lobule´e ou plurinodulaire, avec parfois des foyers kystiques et he´morragiques a` la tranche de section [1–3]. Sa taille qui varie de 2 a` 10 cm de´pend essentiellement de sa localisation anatomique. Des micro-calcifications sont pre´sentes dans 15 a` 60 % des cas. Sur le plan histologique, le synovialosarcome est constitue´ de cellules e´pithe´liales et fusiformes en proportion variable, monophasique ou biphasique. Son diagnostic histologique difficile est responsable d’erreurs, surtout pour les tumeurs monophasiques dont les diagnostics diffe´rentiels sont le fibrosarcome, le schwannome malin, l’he´mangiope´ricytome et le´iomyosarcome. En immunohistochimie, le SS se distingue principalement par la co-expression des marqueurs me´senchymateux (vimentine) et e´pithe´liaux (EMA, cytoke´ratine) [3,4]. Quel que soit leur type, la plupart des SS pre´sentent la translocation t (x18) (p11.2 ; q11.2) [3,4]. Il n’y a pas de corre´lation entre le type histologique de la tumeur et son expression clinique [1]. Vu la rarete´ des synovialosarcomes de la parotide il n’existe pas de standard the´rapeutique. Le traitement de choix des SS repose sur une exe´re`se passant au-dela` des limites palpables de la tumeur ne´cessitant parfois un sacrifice osseux ou nerveux [1–3]. Dans la re´gion cervico-faciale, cette exe´re`se large est souvent difficile compte tenu des conside´rations anatomiques et du caracte`re he´morragique de la tumeur [1,5]. Plusieurs se´ries [5,6] pre´conisent une radiothe´rapie postope´ratoire syste´matique. Cadman et al. [1], dans leur se´rie, ne montrent pas de modification de la mortalite´ chez les patients ayant rec¸u une radiothe´rapie postope´ratoire, mais une diminution des re´cidives locales, cela pour l’ensemble des localisations des synovialosarcomes. Amble et al. recommandent une exe´re`se large tout en s’assurant de la ne´gativite´ des marges et une radiothe´rapie adjuvante syste´matique a` 65 Gy ou plus [7]. La valeur de la chimiothe´rapie n’est pas encore bien de´finie, mais elle semble the´oriquement re´duire ou retarder l’apparition de me´tastases a` distance [4]. Les sche´mas the´rapeutiques adjuvants les plus utilise´s sont la doxorubicine seule (A) ou en association avec l’ifosfamide (AI). La chimiothe´rapie adjuvante a` base d’ifosfamide est souvent utilise´e en cas de SS de l’hypopharynx et du larynx car

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l’exe´re`se chirurgicale comple`te de ces tumeurs a` ce niveau est parfois impossible [8]. Une me´ta-analyse comprenant tous les sarcomes re´se´cables (dont 10 % de synovialosarcomes) apporte la preuve significative que la chimiothe´rapie a` base de doxorubicine retarde l’apparition de re´cidive locale, de me´tastase a` distance et diminue les re´cidives locales, sans augmentation de la survie globale [9]. Notre patient a pre´sente´ une re´cidive locale 6 mois apre`s sa cure de chimiothe´rapie type API (doxorubicine/cis platinum/ifosfamide). Re´cemment, certains auteurs ont sugge´re´ le roˆle possible du facteur epidermal growth factor receptor (EGFR) et human epithelial growth factor receptor 2 (Her-2/neu) dans la cance´roge´ne`se du SS [10] ce qui sugge`re que l’anticorps monoclonal anti-EGFR peut avoir un roˆle dans l’approche the´rapeutique. Compte tenu de la translocation spe´cifique t(X ; 18) soustendant la tumorogene`se des SS, le pronostic et le traitement de ces derniers seront certainement transforme´s dans les anne´es a` venir par des the´rapeutiques cible´es sur des anomalies biomole´culaires conse´cutives a` cette translocation. Le taux de survie globale dans les synovialosarcomes cervicofaciaux est d’environ 40 a` 60 % a` cinq ans [3–7] et le de´ce`s peut survenir au-dela` de 5 ans voire 15 ans apre`s le diagnostic, ce qui justifie une surveillance prolonge´e [3,4]. Les re´cidives locales s’observent dans 50 a` 90 % des cas et surtout dans les 2 premie`res anne´es [4], les me´tastases ganglionnaires surviennent dans 10 a` 20 % des cas [3,4]. Les me´tastases a` distance se voient dans 30 a` 42 % des cas et sont surtout pulmonaires [3] avec parfois des me´tastases survenant tardivement [2–6]. Le pronostic est ge´ne´ralement mauvais, et seuls un diagnostic et une chirurgie pre´coce suivie d’une radiothe´rapie adjuvante meˆme en cas de marges saines, peuvent faire espe´rer une gue´rison.

De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

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[Primary synovial sarcoma of the parotid gland].

Synovial sarcoma is a malignant soft tissue neoplasm which occurs most of the time in teenagers and young adults. Facial, and especially parotid gland...
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