Ne´phrologie & The´rapeutique 10 (2014) 121–131

Expertise me´dicale continue en ne´phrologie

Insuffisance et agression re´nales aigue¨s pe´riope´ratoires§ Perioperative acute kidney injury and failure Vibol Chhor a,b, Didier Journois a,*,b a b

Service d’anesthe´sie-re´animation chirurgicale, hoˆpital europe´en Georges Pompidou, AP–HP, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France Universite´ Paris Descartes, 75015 Paris, France

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Mots cle´s : Insuffisance re´nale aigue¨ E´puration extrare´nale Optimisation he´modynamique Iatroge´nie Diure´tiques Furose´mide Oligurie Anurie

La pe´riode pe´riope´ratoire est particulie`rement a` risque d’insuffisance re´nale aigue¨ car l’anesthe´sie (ge´ne´rale ou pe´rime´dullaire) et la chirurgie sont elles-meˆmes sources d’agression re´nale. La de´finition de l’insuffisance re´nale aigue¨ repose le plus souvent sur la cre´atinine´mie que l’on sait imparfaite en pe´riode per- et postope´ratoire. De plus, cette de´finition est tre`s variable d’une e´tude a` l’autre, de sorte que leurs re´sultats ne sont que difficilement comparables. La classification risk, injury, failure, loss, end stage kidney disease (RIFLE) permet d’homoge´ne´iser les de´finitions de l’insuffisance re´nale aigue¨ et de de´tecter les patients a` une phase pre´coce de de´faillance re´nale en substituant a` l’insuffisance re´nale la notion d’agression re´nale aigue¨. Par ailleurs, l’insuffisance re´nale aigue¨ pe´riope´ratoire est souvent d’origine multifactorielle associant des facteurs iatroge`nes, he´modynamiques et chirurgicaux. Elle est probablement responsable d’une morbi-mortalite´ qui lui est directement imputable. La pre´vention de celle-ci repose sur l’optimisation he´modynamique (retour veineux, de´bit cardiaque, re´sistances vasculaires), l’e´viction de me´dicaments ne´phrotoxiques mais e´galement sur une connaissance des temps chirurgicaux pour anticiper une e´ventuelle de´gradation de l’he´modynamique re´nale. Les diure´tiques ne pre´viennent pas la survenue d’une insuffisance re´nale aigue¨ mais peuvent, au contraire, la favoriser surtout dans la pe´riode pe´riope´ratoire, particulie`rement sujette a` la re´duction du retour veineux. En pe´riode postope´ratoire, il faut garder a` l’esprit qu’une e´ventuelle prise de poids ou la pre´sence d’œde`mes pe´riphe´riques meˆme importants ne refle`tent pas l’e´tat de re´ple´tion du compartiment vasculaire et encore moins l’he´ modynamique re´nale. Les principes du traitement de l’insuffisance re´nale aigue¨ pe´riope´ratoire ne diffe`rent pas des autres types d’insuffisance re´nale aigue¨. Le recours aux techniques d’e´puration extrare´nale doit eˆtre parfaitement maıˆtrise´ pour ne pas faire courir de risques surajoute´s au patient, notamment en termes de stabilite´ he´modynamique ou d’e´quilibre hydroe´lectrolytique. ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. A B S T R A C T

Keywords: Acute renal failure Renal replacement therapy Hemodynamic optimization Iatrogenia Diuretics Furosemide Oliguria Anuria

Perioperative period is very likely to lead to acute renal failure because of anesthesia (general or perimedullary) and/or surgery which can cause acute kidney injury. Characterization of acute renal failure is based on serum creatinine level which is imprecise during and following surgery. Studies are based on various definitions of acute renal failure with different thresholds which skewed their comparisons. The RIFLE classification (risk, injury, failure, loss, end stage kidney disease) allows clinicians to distinguish in a similar manner between different stages of acute kidney injury rather than using a unique definition of acute renal failure. Acute renal failure during the perioperative period can mainly be explained by iatrogenic, hemodynamic or surgical causes and can result in an increased morbi-mortality. Prevention of this complication requires hemodynamic optimization (venous return, cardiac output, vascular resistance), discontinuation of nephrotoxic drugs but also knowledge of the different steps of the surgery to avoid further degradation of renal perfusion. Diuretics do not prevent acute renal failure and may even push it forward especially during the

§ Cet article est paru initialement dans EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Ne´phrologie 18-059-B-10, 2011. Nous remercions la re´daction d’EMC-Ne´phrologie pour son aimable autorisation de reproduction. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Journois).

1769-7255/$ – see front matter ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2013.11.007

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perioperative period when venous retourn is already reduced. Edema or weight gain following surgery are not correlated with the vascular compartment volume, much less with renal perfusion. Treatment of perioperative acute renal failure is similar to other acute renal failure. Renal replacement therapy must be mastered to prevent any additional risk of hemodynamic instability or hydro-electrolytic imbalance. ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. De´finition de l’insuffisance re´nale aigue¨ L’insuffisance re´nale aigue¨ pe´riope´ratoire pose le proble`me meˆme de sa de´finition. Dans leur analyse de la litte´rature de 1993 visant a` cerner le pronostic des patients atteints d’insuffisance re´nale aigue¨, Chew et al. ont e´te´ confronte´s a` une dizaine de de´finitions diffe´rentes, alors que Novis et al. en ont rapporte´es jusqu’a` 28 dans leur analyse de 1994 [1,2]. En effet, suivant les e´tudes, les de´finitions de l’insuffisance re´nale aigue¨ diffe`rent, certains l’identifiant au-dela` d’un seuil de cre´atinine´mie, d’autres a` partir d’une augmentation de sa valeur pre´ope´ratoire et a` l’extreˆme, en ne prenant en compte que les patients ayant recours a` une e´puration extrare´nale. Il est bien e´vident qu’en fonction, d’une part, de l’importance des seuils et, d’autre part, de la de´finition retenue pour qualifier l’agression re´nale, l’incidence de ces complications varie conside´rablement. McCullough et al. ont, par exemple, retrouve´ une incidence de 1,3 % a` 15,5 % d’insuffisance re´nale aigue¨ apre`s chirurgie coronarienne en conside´rant diffe´rents seuils retrouve´s dans la litte´rature [3]. De plus, le de´lai de survenue de l’insuffisance re´nale aigue¨ pour la qualifier de « postope´ratoire » n’est pas clairement authentifie´ et varie logiquement en fonction du crite`re retenu pour de´finir l’insuffisance re´nale aigue¨. En ge´ne´ral, lorsqu’il s’agit de la cre´atinine´mie, la litte´rature se concentre sur ses variations au cours des 48 a` 72 premie`res heures postope´ratoires. 1.1. Cre´atinine plasmatique Par ailleurs, la de´finition de l’insuffisance re´nale aigue¨ est presque exclusivement centre´e sur le dosage de la cre´atinine´mie. Or, la fonction re´nale y est a` tort fre´quemment assimile´e. Cette approximation conduit re´gulie`rement a` sous-estimer ou a` ne´gliger une atteinte re´nale patente. Plusieurs facteurs contribuent a` cette importante limitation de l’indice biologique qu’est la cre´atinine plasmatique. La premie`re rele`ve de la physiologie : a` fonction re´nale stable, la cre´atinine plasmatique ne s’e´le`ve que lorsque 25 % des ne´phrons sont le´se´s, que ce soit de fac¸on temporaire ou de´finitive [4]. Il est vrai que l’ensemble du capital ne´phronique n’est pas requis pour vivre normalement mais cette double tole´rance fait que la cre´atinine plasmatique n’a pas une valeur pre´dictive positive suffisante. Les autres limitations de cet indice tiennent a` sa cine´tique. 1.1.1. Vitesse de production de la cre´atinine Le de´bit de production de la cre´atinine de´pend de la masse musculaire. Il est de l’ordre de 0,2 mmol/kg/j. La cre´atinine se distribue dans l’ensemble du compartiment hydrique du secteur extracellulaire, soit 60 % du poids du corps chez un sujet normal. Cette dilution, a` taux de production musculaire constant et meˆme re´duit chez le patient dont le se´jour en re´animation est prolonge´, impose donc un certain de´lai pour que la concentration plasmatique de cre´atinine s’accroisse, meˆme si la filtration glome´rulaire est se´ve`rement atteinte. L’e´le´vation the´orique maximale de la cre´atinine (patient fonctionnellement bine´phrectomise´) n’est donc que de 330 mmol pour 70 kg en 24 heures.

1.1.2. Volume de distribution de la cre´atinine Le volume de distribution est sujet a` de nombreuses variations en pe´riode pe´riope´ratoire, notamment apre`s certaines chirurgies ou` peuvent apparaıˆtre des syndromes de re´ponse inflammatoire syste´mique (SRIS), responsables d’une augmentation de la perme´abilite´ capillaire et d’un accroissement du volume de distribution. Par ailleurs, cette e´le´vation peut eˆtre e´galement retarde´e par l’anurie (ou tout autre cause de re´tention liquidienne) qui augmente l’espace de diffusion hydrique, ou par un remplissage vasculaire abondant afin de pre´server la perfusion re´nale, lequel s’accompagne souvent d’une hyperhydratation secondaire. Il en re´sulte que la mesure de la cre´atinine plasmatique, de´ja` connue pour eˆtre moins sensible que la clairance de la cre´atinine, peut dans les circonstances de re´animation ne plus e´voluer de fac¸on paralle`le a` la fonction re´nale [5]. Une formule pour corriger l’e´le´vation de la cre´atinine, en fonction de la prise de poids, peut eˆtre employe´e :   DP P creatinine ¼ P  1 þ ´ ´ ´ ´ corrige creatinine mesuree 0; 60  poids

1.1.3. Cre´atinine plasmatique et filtration glome´rulaire La relation entre la cre´atinine plasmatique et la filtration glome´rulaire n’est pas line´aire mais hyperbolique, comme en te´moigne la Fig. 1 [6]. Diffe´rents mode`les ont e´te´ propose´s pour estimer le de´bit de filtration glome´rulaire (DFG) d’apre`s la valeur de la cre´atinine´mie plasmatique et en inte´grant d’autres variables de´terminantes. La plus connue de ces formules est certainement celle de Cockcroft et Gault [7] : poidsðkg Þ DFGestime´ ¼ að140  aˆ geÞ  ´ ½creatinine ðmmol=lÞ

[(Fig._1)TD$IG] avec a = 1,05 chez la femme et a = 1,25 chez l’homme.

Fig. 1. Relation entre le de´bit de filtration glome´rulaire (DFG) et la concentration de la cre´atinine plasmatique. D’apre`s [6].

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Cette formule, e´tablie en 1976 sur la base d’un collectif de 279 patients, a eu le me´rite d’introduire les notions d’aˆge, de sexe et de corpulence dans l’estimation de la clairance de la cre´atinine et donc du de´bit de filtration glome´rulaire mais ne´glige, du fait de l’e´chantillon e´tudie´, d’autres facteurs propres a` la re´animation (inflation hydrique en particulier). Ainsi des erreurs importantes et fre´quentes de´coulent de son emploi en re´animation [8]. Elle reste ne´anmoins approprie´e chez la plupart des patients en pe´riode pre´ope´ratoire de chirurgie re´gle´e (par exemple au cours de la consultation d’anesthe´sie). D’autres mode`les propose´s ne sont pas davantage approprie´s aux patients de re´animation pour des raisons identiques. Ainsi le modification of diet in renal disease (MDRD) dans sa forme originale ou simplifie´e, de´veloppe´ chez les patients en e´tat stable conduit a` des calculs errone´s chez les patients en pe´riode pe´riope´ratoire [8]. 1.2. Autres biomarqueurs Le dosage de la cystatine C a e´te´ propose´ comme solution de remplacement a` la mesure de la cre´atinine plasmatique du fait de caracte´ristiques me´taboliques la rendant plus propice a` repre´senter la filtration glome´rulaire. Ces conside´rations sont justifie´es au plan de l’exploration fonctionnelle physiologique mais son dosage semble ne pas apporter d’argument supple´mentaire dans le cadre des patients de re´animation en e´tat stationnaire. En revanche, son inte´reˆt pourrait eˆtre la pre´cocite´ de son alte´ration en comparaison avec celle de la cre´atinine plasmatique telle qu’elle est e´voque´e dans l’e´tude rapporte´e par Herget-Rosenthal et al. ou` le diagnostic de de´faillance re´nale a e´te´ re´alise´ 48 heures plus toˆt avec la cystatine C qu’avec la cre´atinine plasmatique [9]. Plusieurs nouveaux biomarqueurs ont e´te´ propose´s au cours des dernie`res anne´es dans l’espoir de caracte´riser de fac¸on pre´coce l’e´mergence d’une atteinte re´nale [10]. La plupart d’entre eux sont des substances produites a` l’issue d’une expression ge´nique spe´cifique des situations de stress re´nal. Elles correspondent a` des facteurs de re´ge´ne´ration ou d’entretien du parenchyme re´nal. Parmi elles, l’accroissement de la concentration plasmatique et urinaire de la neutrophil gelatinase-associated lipocalin (NGAL) semble dote´ d’une sensibilite´ importante pour de´tecter une agression re´nale aigue¨ apre`s chirurgie cardiaque chez l’enfant [11]. Le principal inte´reˆt clinique de ces biomarqueurs serait donc de permettre la de´tection d’une atteinte re´nale non attendue, comme le dosage de la troponine permet de suspecter l’e´mergence d’une souffrance myocardique. A` l’oppose´, la normalisation de ces marqueurs pourrait e´voquer l’obtention de la re´ge´ne´ration re´nale attendue (transplantation re´nale et autres ische´mies aigue¨s). Ces facteurs permettent de clairement distinguer les situations d’agression re´nale aigue¨, qui ne pouvaient jusque-la` eˆtre e´voque´es que par la seule clinique, des situations d’insuffisance re´nale aigue¨, qui ne pouvaient eˆtre e´voque´es que par une alte´ration d’un marqueur de filtration glome´rulaire. D’autres marqueurs semblent prometteurs, notamment l’isoforme 3 de la prote´ine urinaire Na+/H+ (NHE3) implique´e dans la re´absorption de NaCl au niveau du tubule proximal qui pourrait eˆtre un marqueur de souffrance tubulaire pre´coce bien que son dosage biochimique soit inadapte´ a` l’heure actuelle pour la pratique clinique [12]. La prote´ine kidney injury molecule-1 (KIM-1) semble e´galement un marqueur pre´coce d’agression re´nale aigue¨ d’origine tubulaire, meilleure que le NGAL chez des enfants apre`s circulation extracorporelle [13]. Il semble que, plus qu’un seul marqueur, ce soit la combinaison de plusieurs marqueurs de souffrance tubulaire re´nale qui permette de diagnostiquer pre´cocement et de fac¸on fiable l’agression re´nale aigue¨ en re´animation car la ne´crose tubulaire aigue¨ reste la principale e´tiologie dans ce contexte.

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2. Classification des insuffisances re´nales aigue¨s par le score RIFLE A` une e´poque ou` les de´finitions de l’insuffisance re´nale aigue¨ sont aussi variables que nombreuses dans les e´tudes, la classification Risk, Injury, Failure, Loss, End stage kidney disease (RIFLE) a e´te´ propose´e en 2001 a` l’initiative du groupe Acute Dialysis Quality Initiative (ADQI) [14]. Celle-ci a pour but, d’une part, de disposer d’une classification simple et reproductible de la de´faillance re´nale pour faciliter la re´alisation et l’interpre´tation des e´tudes cliniques futures et, d’autre part, d’accroıˆtre la sensibilite´ du diagnostic de de´faillance re´nale en conside´rant donc plusieurs stades d’agressions re´nales (Fig. 2). Cette classification clinicobiologique se base sur l’intensite´ et la dure´e de la re´duction du de´bit urinaire ainsi que sur l’e´le´vation de la cre´atinine plasmatique. Elle a donc pour principal avantage de re´ve´ler pre´cocement les atteintes re´nales a` cre´atinine´mie constante ou diminue´e par l’he´modilution lie´e au remplissage initial souvent important dans un contexte pe´riope´ratoire. L’existence d’une corre´lation entre le score RIFLE et la mortalite´ hospitalie`re a e´te´ observe´e sur d’importants collectifs de patients [15]. Cette liaison statistique n’a rien d’une surprise dans la mesure ou`, comme e´voque´ plus haut, les patients atteints de de´faillances se´ve`res pre´sentent une mortalite´ accrue et fre´quemment une insuffisance re´nale aigue¨, possiblement elle-meˆme a` l’origine d’un surcroıˆt de mortalite´. D’autres auteurs ont confirme´ l’existence de ce lien entre mortalite´ et score RIFLE au cours de diverses circonstances : re´animation [16] ou apre`s chirurgie cardiaque. Dans cette dernie`re situation, le RIFLE apparaıˆt plus performant, chez les patients pre´sentant une insuffisance re´nale aigue¨ postope´ratoire, dans la pre´diction de la mortalite´ que le score de gravite´ le plus utilise´ dans cette discipline, l’EuroSCORE [17]. Cette approche, bien qu’elle fasse couler beaucoup d’encre, ne correspond pas a` une approche rationnelle car elle de´tourne ce score de son utilite´ premie`re : de´celer pre´cocement les patients a` risque re´nal. De fait, plusieurs auteurs contestent la valeur pronostique du score RIFLE sur la base d’e´tudes simples qui parviennent a` mettre ce score en difficulte´ dans une fonction qui n’est pas celle pour laquelle il a e´te´ conc¸u [18]. Il est probable qu’un score de gravite´ construit pour pre´dire la mortalite´ soit plus efficace qu’un score construit pour e´valuer l’e´mergence d’une atteinte re´nale infraclinique. Bien qu’elle ne soit pas un reflet de la gravite´ ge´ne´rale du malade, la classification Acute Kidney Injury Network (AKIN) [19] est une version le´ge`rement modifie´e de celle de RIFLE, renforce´e de crite`res d’augmentation de la cre´atine´mie en

[(Fig._2)TD$IG]

Fig. 2. Score RIFLE. DFG : de´bit de filtration glome´rulaire ; IRA : insuffisance re´nale aigue¨ ; D : diure`se.

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valeur absolue qui n’a pas de´montre´ de supe´riorite´ dans la classification des malades en agression re´nale aigue¨ [20]. Ces deux classifications sont donc devenues des gold standard dans l’e´valuation et la stratification de l’agression re´nale aigue¨ en re´animation, ce afin d’en homoge´ne´iser les de´finitions. 3. Particularite´s de la fonction re´nale en pe´riode pe´riope´ratoire Le rein est l’un des organes les plus sensibles a` l’ische´mie bien qu’il soit pourvu de me´canismes neurohumoraux d’autore´gulation lui permettant de se prote´ger, notamment par le maintien d’un de´bit sanguin constant pour diffe´rentes plages de pression arte´rielle. La pe´riode pe´riope´ratoire est particulie`rement a` risque pour le rein pour des raisons, certes, ine´vitables mais qu’il faut toutefois garder a` l’esprit pour pre´venir la survenue d’une agression re´nale aigue¨. En effet, la ventilation me´canique lors d’une anesthe´sie ge´ne´rale est responsable d’une diminution du de´bit de filtration glome´rulaire, du de´bit sanguin re´nal et donc de la diure`se. A` cela s’ajoute l’utilisation d’agents anesthe´siques posse´dant intrinse`quement, ou par une inhibition du syste`me sympathique, un effet vasodilatateur qui, par la diminution du retour veineux, va renforcer les effets pe´joratifs sur le de´bit sanguin re´nal et la diure`se [21]. Enfin, en pe´riode postope´ratoire imme´diate, le fameux, bien que flou, « stress chirurgical » via l’activation du syste`me adre´nergique, du syste`me re´nine–angiotensine– aldoste´rone et de la se´cre´tion d’hormone antidiure´tique entraıˆne e´galement une vasoconstriction re´nale favorisant l’agression re´nale. Tous ces facteurs sont responsables d’une antidiure`se physiologique perope´ratoire. Le seul monitorage de la diure`se n’est donc probablement pas suffisant pour de´pister une agression re´nale aigue¨ pendant la pe´riode ope´ratoire. 4. Pronostic de l’insuffisance re´nale aigue¨ pe´riope´ratoire S’il y a 40 ans, l’insuffisance re´nale aigue¨ isole´e e´tait sans aucun doute une cause importante de mortalite´, la performance cliniquement e´vidente des techniques d’e´puration extrare´nale a rendu commun de ne plus conside´rer l’insuffisance re´nale aigue¨ comme la cause de la mortalite´ observe´e mais simplement un phe´nome`ne associe´ : une cause non inde´pendante de mortalite´. Cependant, il semble difficile d’admettre que la survenue d’une insuffisance re´nale aigue¨ ne soit pas au minimum associe´e a` un surcroıˆt de morbimortalite´ et, au maximum, qu’elle n’en soit pas la cause. Il faut en effet reconnaıˆtre qu’en de´pit d’importants progre`s re´alise´s dans la mise en œuvre des techniques d’e´puration extrare´nale, le surcroıˆt de mortalite´ des patients pre´sentant une insuffisance re´nale aigue¨ reste e´leve´ aux alentours de 50 % [22]. Plusieurs auteurs s’accordent pour mettre en e´vidence, en utilisant diffe´rentes techniques d’ajustement, qu’il existe bien un surcroıˆt de mortalite´ directement lie´ a` l’insuffisance re´nale aigue¨ [23,24]. Dans la plus importante e´tude publie´e, incluant plus de 17 000 patients, Metnitz et al. utilisant la technique du cas te´moin, ont observe´ un accroissement de mortalite´ de 38,5 % a` 62,8 % lorsque l’insuffisance re´nale aigue¨ e´tait pre´sente [25]. Au total, sans que cela ne soit quantitativement appre´cie´, il est probable que la surmortalite´ observe´e en re´animation de`s lors qu’une insuffisance re´nale aigue¨ est pre´sente soit le fait de deux composantes : une lie´e au contexte pathologique qui requiert un traitement e´tiologique et une seconde, lie´e a` l’insuffisance re´nale aigue¨, qui justifie d’ame´liorer la pre´vention mais aussi le traitement de l’insuffisance re´nale aigue¨. Assez logiquement, le de´veloppement d’une insuffisance re´nale aigue¨ est associe´ a` un allongement de la dure´e de se´jour en re´animation, a` une re´duction de la qualite´ de vie des survivants et a` ˆ ts de sante´ accrus [26,27]. En de´pit d’une mortalite´ e´leve´e, des cou

les trois quarts des patients survivants ayant be´ne´ficie´ d’une e´puration extrare´nale retrouvent une fonction re´nale leur permettant d’eˆtre autonome a` 90 jours comme a` 1 an [28]. Il existe cependant une importante he´te´roge´ne´ite´ entre les patients puisque si l’irre´versibilite´ comple`te de la fonction re´nale est de l’ordre de 5 %, elle atteint 16 % chez les sujets aˆge´s [29]. 5. Facteurs de risque pe´riope´ratoires d’insuffisance re´nale aigue¨ La survenue d’une insuffisance re´nale aigue¨ pe´riope´ratoire est souvent multifactorielle, associant diffe´rents me´canismes qui sont, le plus souvent, d’origine chirurgicale, ische´mique et toxique. 5.1. Situations chirurgicales a` risque La chirurgie cardiaque est a` risque d’agression re´nale aigue¨ et d’insuffisance re´nale aigue¨ du fait de variations he´modynamiques parfois importantes en pe´riode pe´riope´ratoire et de l’utilisation d’une circulation extracorporelle, responsable d’une alte´ration des conditions he´modynamiques physiologiques (flux constant et non pulsatile) mais e´galement d’une re´ponse inflammatoire syste´mique de´le´te`re pour le rein [30]. De plus, ces patients ont e´galement un terrain de´bilite´ (diabe`te, hypertension arte´rielle, insuffisance re´nale chronique, etc.) propice a` la constitution d’une insuffisance re´nale aigue¨. La chirurgie vasculaire, notamment celle qui touche l’aorte abdominale ou thoracique, est e´galement a` risque. Les clampages aortiques, en particulier ceux au-dessus des arte`res re´nales mais e´galement sous-re´naux, modifient les conditions de perfusion re´nale et favorisent la survenue d’une agression re´nale aigue¨ qui peut eˆtre aggrave´e par l’instabilite´ he´modynamique fre´quente dans ce type de chirurgie. Par ailleurs, en chirurgie he´patique, les clampages veineux (syste`me porte et cave infe´rieur) peuvent e´galement eˆtre a` l’origine d’une souffrance re´nale. D’autres chirurgies comme la chirurgie orthope´dique, gyne´cologique, visce´rale ou urologique peuvent eˆtre a` risque d’agression re´nale aigue¨, notamment en cas de constitution d’une rhabdomyolyse. En effet, la premie`re en est grande pourvoyeuse du fait des complications postope´ratoires (syndrome des loges, compression excessive d’un plaˆtre, etc.). Les positions perope´ratoires (gyne´cologique, de´cubitus ventral, etc.) peuvent e´galement eˆtre responsables d’une rhabdomyolyse meˆme en l’absence de points de compression visibles. 5.2. Facteurs de risque he´modynamique De fac¸on paralle`le aux agressions secondaires ce´re´brales au cours des traumatismes, on peut parler d’agressions re´nales secondaires d’origine syste´mique (ARSOS). A` coˆte´ des agressions toxiques, envisage´es plus bas, les agressions he´modynamiques occupent une place privile´gie´e. L’une des principales causes de morbimortalite´ pe´riope´ratoire dans une grande enqueˆte observationnelle conduite par la Socie´te´ franc¸aise d’anesthe´sie-re´animation (Sfar) a e´te´ le de´faut de remplissage vasculaire [31]. La pe´riode pe´riope´ratoire est propice a` la survenue d’une re´duction du retour veineux au cœur en raison des pertes sanguines occasionne´es par le geste chirurgical, des pertes hydriques lie´es a` l’effraction cutane´e et visce´rale, a` la constitution d’un secteur de spoliation liquidienne (inflammation, syndrome occlusif, etc.). L’anesthe´sie est e´galement responsable de variations he´modynamiques qu’il faut connaıˆtre pour pouvoir en anticiper les conse´quences, notamment chez un patient fragile. En effet, les agents anesthe´siques sont constamment responsables d’une vasodilatation avec pour effet une diminution des re´sistances vasculaires, donc du retour veineux syste´mique sans qu’il y ait

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ne´cessairement d’hypovole´mie (laquelle n’est jamais mesure´e en clinique). De plus, les techniques d’anesthe´sie pe´rime´dullaire (anesthe´sie pe´ridurale ou rachianesthe´sie) sont e´galement responsables d’une vasople´gie dont l’intensite´ de´pendra des doses et de la technique employe´e. Au total, l’hypotension arte´rielle et la re´duction du retour veineux sont toutes deux responsables d’une agression re´nale aigue¨ pouvant entraıˆner une ne´crose tubulaire d’origine ische´mique. La correction de ces deux facteurs est l’une des proble´matiques essentielles de la prise en charge pe´riope´ratoire. 5.3. Facteurs de risque me´dicamenteux et toxique Compte tenu de la particulie`re susceptibilite´ de la fonction re´nale aux agressions survenant en pre´sence d’une agression re´nale aigue¨ [32], il convient d’eˆtre tre`s attentif et de pre´venir l’emploi de toute action ne´phrotoxique non indispensable. Les anti-inflammatoires non ste´roı¨diens, tre`s utiles a` des fins analge´siques en pe´riode pe´riope´ratoire, exercent une toxicite´ re´nale bien de´crite au plan physiopathologique. Ils ont e´te´ l’objet de nombreux rapports isole´s de toxicite´ re´nale mais n’ont jamais e´te´ correctement e´tudie´s en clinique au plan de la toxicite´ re´nale autrement que de fac¸on collate´rale a` des e´tudes d’efficacite´. Nous ne disposons donc pas de donne´es actuellement suffisantes pour trouver une place a` l’emploi de cette classe pharmacologique alors qu’une agression re´nale aigue¨ est pre´venue ou e´tablie. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion ou les antagonistes des re´cepteurs a` l’angiotensine II sont e´galement des me´dicaments a` utiliser avec pre´caution en pe´riode pe´riope´ratoire. En effet, par leur action vasodilatatrice sur l’arte´riole effe´rente du rein, ils alte`rent l’un de ces me´canismes he´modynamiques de protection. A` cela s’ajoutent les effets syste´miques responsables d’une diminution de la pression arte´rielle qui peut eˆtre plus marque´e lors de l’utilisation concomitante de me´dicaments anesthe´siques et de la ventilation me´canique. Ces me´dicaments doivent donc eˆtre arreˆte´s au moins 12 heures avant une chirurgie sauf en cas de prescription pour une insuffisance cardiaque pre´ope´ratoire [33]. Des antibiotiques d’usage fre´quent en re´animation, comme les glycopeptides ou les aminosides, exercent une toxicite´ re´nale connue. Leurs indications, dure´e et modalite´s d’administration doivent donc, comme en l’absence d’insuffisance re´nale, eˆtre soigneusement re´fle´chies. En aucun cas les doses de charge ne doivent eˆtre re´duites. Seules les doses d’entretien (glycopeptides) ou la fre´quence d’administration (aminosides) doivent eˆtre adapte´es aux dosages se´riques syste´matiques. L’amphote´ricine B be´ne´ficie d’une e´trange recommandation issue de la confe´rence de consensus sur la prise en charge des candidoses invasives de 2004 [34] : l’amphote´ricine B liposomale est re´serve´e aux patients dont la fonction re´nale est anormale. Il en re´sulte re´gulie`rement l’initiation d’un traitement par amphote´ricine B suivi a` quelques jours d’intervalle par un relais pour la forme liposomale en raison de l’apparition d’une ne´phropathie tubulaire. Le rapport be´ne´fice– risque d’une telle prescription n’est plus en faveur de la recommandation. Une importante controverse existe quant a` la toxicite´ des hydroxye´thylamidons, colloı¨des de synthe`se fre´quemment utilise´s pour le remplissage vasculaire. Bien qu’il soit aujourd’hui e´tabli que leur administration entraıˆne des le´sions histologiques typiques, de topographie diffe´rente de celle que l’on observe lors de l’administration d’autres produits (mannitol, saccharose), sie´geant au niveau des tubules proximaux et distaux [35], une des questions importante serait de savoir si ces le´sions sont associe´es a` des troubles de la fonction re´nale. Cette toxicite´ semble e´tablie pour la spe´cialite´ Elohe`s1 retire´e du marche´ depuis plusieurs anne´es [36,37]. Elle ne l’est cependant pas de fac¸on aussi claire pour les amidons de dernie`re ge´ne´ration a` plus faible poids

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mole´culaire (Voluven1) pour lesquels la controverse porte sur leur demi-vie tissulaire compare´e a` celle de l’Elohe`s1 et sur le lien existant entre leur toxicite´ re´nale et la pre´sence des fameuses le´sions histologiques. Il est a` noter que la toxicite´ des hydroxye´thylamidons n’a e´te´ observe´e que chez des patients au statut re´nal pre´caire (transplante´s, e´tat de choc septique) avec des crite`res de jugement base´s sur l’e´le´vation de la concentration de la cre´atinine plasmatique. Dans la mesure ou` ce crite`re est peu sensible, il est licite de se demander si l’atteinte re´nale n’est pas en fait beaucoup plus fre´quente qu’il n’y paraıˆt et de se questionner sur son be´ne´fice avant toute prescription d’hydroxye´thylamidon. Les examens radiologiques sont tre`s fre´quents en pe´riode pe´riope´ratoire et conduisent souvent a` l’administration de produits de contraste iode´s qui, en de´pit de progre`s re´cents, restent de re´els ne´phrotoxiques qui doivent eˆtre re´serve´s aux menaces vitales de`s lors qu’une insuffisance re´nale est constitue´e. Une discussion e´troite du dossier avec un radiologue expe´rimente´ permet en ge´ne´ral d’opter pour le meilleur compromis : examen sans injection, e´chographie, imagerie par re´sonance magne´tique (IRM), injection re´duite, etc. Il est e´vident qu’en cas d’injection, ces patients doivent be´ne´ficier d’une mise en condition sans faille. La prescription de N-ace´tylcyste´ine en association avec une hydratation (pre´alable a` l’injection du produit de contraste iode´) s’est ave´re´e capable de pre´venir l’e´le´vation de la cre´atinine plasmatique dans le cadre de tre`s nombreuses e´tudes et de plusieurs me´taanalyses chez les patients soumis a` l’administration de produit de contraste iode´ [38,39]. Cependant aucune diffe´rence d’effet clinique (mortalite´, besoin de dialyse, dure´e de l’insuffisance re´nale aigue¨, etc.) n’a jamais e´te´ observe´e entre la N-ace´tylcyste´ine et un placebo. En effet, la N-ace´tylcyste´ine semble accroıˆtre le me´tabolisme de la cre´atinine par une activation de la cre´atinine kinase [40]. Enfin, il a e´te´ observe´ chez des volontaires sains que la N-ace´tylcyste´ine re´duit la cre´atinine plasmatique mais pas la cystatine C confirmant l’existence d’une action spe´cifique inde´pendante de la fonction re´nale de la N-ace´tylcyste´ine sur la cre´atinine [41]. Au total, il convient de donner la priorite´ a` l’hydratation convenablement re´alise´e avant l’injection de produit de contraste iode´ plutoˆt que de compter sur l’administration pre´coce ou tardive de N-ace´tylcyste´ine. 6. Traitement me´dicamenteux de l’insuffisance re´nale aigue¨ pe´riope´ratoire 6.1. Optimisation he´modynamique Le traitement d’un patient atteint d’insuffisance re´nale aigue¨ est un sujet en fait beaucoup plus large que celui de la prise en charge de la fonction re´nale car l’insuffisance re´nale aigue¨ isole´e est devenue rare en re´animation. Des patients atteints d’insuffisance re´nale aigue¨ isole´e peuvent eˆtre hospitalise´s en re´animation mais de fac¸on transitoire le temps de prendre en charge une menace vitale temporaire (œde`me pulmonaire, ence´phalopathie, hyperkalie´mie, etc.). La plupart des insuffisances re´nales aigue¨s observe´es le sont dans un contexte de de´faillance multivisce´rale chez des patients de re´animation [42]. Il est ainsi possible que d’autres facteurs interviennent de fac¸on pre´ponde´rante et sans eˆtre ne´cessairement clairement identifie´s dans la gene`se, l’entretien et le pronostic de la dysfonction re´nale. En 1987, Kelleher et al. ont mis en e´vidence sur le mode`le de rat de Conger l’influence des conditions he´modynamiques sur la fonction re´nale en phase de re´cupe´ration [32]. L’expe´rimentation consistait a` comparer l’effet sur la fonction, l’autore´gulation et l’histologie re´nales de se´ances d’hypotension arte´rielle induites par he´morragie. Ces auteurs ont ainsi observe´ que, lorsque l’innervation re´nale est conserve´e, les e´pisodes d’hypotension arte´rielle aboutissent a` une atteinte de l’autore´gulation associe´e a` une baisse de la clairance de la

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cre´atinine. Les le´sions histologiques d’ische´mie n’ont pas e´te´ observe´es dans le groupe te´moin. Extrapole´es chez l’humain, ces donne´es sugge`rent que la prise en charge optimale d’une insuffisance re´nale aigue¨ ne se limite pas a` assurer une clairance ou un taux de re´duction azote´ convenable mais qu’il faudrait tenir compte de la fac¸on par laquelle on y parvient. A` l’heure actuelle, l’e´tude de cette proble´matique isole´e n’a pas e´te´ rapporte´e en clinique humaine. La correction de la re´duction du retour veineux est une e´tape indispensable a` l’optimisation he´modynamique d’un patient. Toute la difficulte´ repose sur la quantification du volume a` restituer de fac¸on exacte afin de restaurer des conditions he´modynamiques optimales. C’est pourquoi l’anesthe´siste-re´animateur a souvent recours a` un monitorage plus e´labore´ et souvent invasif en cas de chirurgie complexe ou de patients fragiles. En effet, le monitorage de la pression arte´rielle ne peut pas suffire a` rassurer sur le statut he´modynamique d’un patient parce qu’un organe a non seulement besoin d’une pression de perfusion suffisante mais e´galement d’un de´bit sanguin ade´quat. Ainsi, de nombreux outils se sont de´veloppe´s pour aider au diagnostic en tentant de quantifier le de´bit sanguin, autrefois obtenu par le cathe´te´risme cardiaque droit (dit de Swan-Ganz), par des techniques e´chosonographiques (e´chographie cardiaque, Doppler transœsophagien) mais e´galement par analyse du contour de l’onde de pouls obtenue par un monitorage invasif de la pression arte´rielle (Vigileo1, PiCCO1). Ces monitorages permettent de s’assurer de l’absence de pre´charge-de´pendance excessive, limitant le retour veineux. C’est-a`-dire que le remplissage vasculaire n’augmente plus le volume d’e´jection systolique de fac¸on concomitante. Ils permettent e´galement de surveiller un patient tout au long de l’acte chirurgical afin de compenser ses variations de vole´mie efficace, qu’elles soient le fait de variation du tonus sympathique, du degre´ de vasoconstriction veineuse ou arte´rielle ou d’une perte de volume sanguin. Ce monitorage serait incomplet si on voulait s’assurer de fac¸on fiable de l’ade´quation des apports d’oxyge`ne fournis aux organes par le de´bit cardiaque par rapport a` leur re´el besoin. La mesure de la lactate´mie arte´rielle permet de de´pister cette situation de fac¸on retarde´e. Le monitorage de la saturation veineuse en oxyge`ne au niveau cave supe´rieur semble repre´senter un bon compromis pour estimer la saturation veineuse (SvO2) meˆle´e au niveau de l’arte`re pulmonaire (uniquement obtenue par un cathe´ter arte´riel pulmonaire). La diminution de celle-ci, synonyme d’une augmentation de l’extraction tissulaire d’oxyge`ne, doit repre´senter un signal d’alarme et doit faire rechercher une e´tiologie a` corriger parmi ses quatre de´terminants : saturation arte´rielle en oxyge`ne  ˙ 2 , index cardiaque (IC) et (SaO2), consommation en oxyge`ne VO he´moglobine´mie (Hb) : ˙ 2 VO Sv O2 ¼ S@ O2  IC  Hb  1; 34

connue, les preuves re´pertorie´es en faveur de ce traitement sont tre`s peu nombreuses et de me´diocre qualite´ me´thodologique a` tel point que la confe´rence de consensus portant sur la fonction re´nale pe´riope´ratoire s’est trouve´e dans l’obligation de ne pas la retenir comme traitement protecteur de la fonction re´nale [44]. Certaines indications semblent toutefois adapte´es a` ce traitement, notamment les intoxications a` certains toxiques (sels de platine, aciclovir, me´thotrexate) mais e´galement pour pre´venir ou traiter une ne´phropathie aux produits de contraste iode´s ou une rhabdomyolyse. Ainsi, dans la pre´vention de la ne´phropathie secondaire a` l’administration de produits de contraste iode´s, l’efficacite´ de diffe´rents me´dicaments notamment de la N-ace´tylcyste´ine demeure incertaine. En revanche, il est tre`s probable que l’hydratation soit efficace dans cette indication [45,46]. En ce qui concerne la rhabdomyolyse, son traitement fait classiquement appel a` une alcalinisation associe´e a` une hyperhydratation [47]. Cette attitude re´sulte de la compre´hension de la physiopathologie et d’avis d’experts. Les arguments s’y opposant reposent sur des e´tudes de qualite´ me´thodologique insuffisante pour emporter de´finitivement la conviction [48], bien que nous disposions de donne´es pertinentes en faveur d’une absence d’hyperhydratation encadrant une chirurgie abdominale dans le but d’ame´liorer la re´habilitation postope´ratoire sur des crite`res pulmonaires ou digestifs [49,50]. 6.1.2. Expansion vole´mique Le remplissage vasculaire aboutit a` une hyperhydratation, en particulier chez les patients oligoanuriques, du fait de la dure´e de vie limite´e de la plupart des solute´s dans l’espace vasculaire. Il est cependant ne´cessaire d’isoler l’expansion vole´mique temporaire que le remplissage vasculaire rapide permet d’obtenir, laquelle peut eˆtre a` l’origine d’effets he´modynamiques syste´miques favorables a` la fonction re´nale. 6.1.2.1. Colloı¨des. Les colloı¨des assurent l’expansion vole´mique la plus durable au prix d’une hyperhydratation mode´re´e et d’une accumulation extravasculaire au cours des e´tats inflammatoires. Les diverses solutions propose´es sur le marche´ n’ont pas fait la preuve de diffe´rence d’efficacite´ en regard de l’optimisation de la fonction re´nale. Cependant, une importante controverse existe quant a` la toxicite´ re´nale des hydroxye´thylamidons, leur utilisation a de´ja` e´te´ proscrite dans certaines circonstances, notamment le pre´le`vement d’organes. C’est pourquoi, si le recours a` un colloı¨de semble indique´ au praticien et bien que la supe´riorite´ d’un colloı¨de sur un cristalloı¨de n’ait jamais e´te´ de´montre´e dans les e´tats de choc [51], il semble plus raisonnable de recourir, dans ces cas-la`, aux ge´latines, qui ne semblent pas avoir d’effets de´le´te`res sur la fonction re´nale mais qui pre´sentent tout de meˆme des effets adverses potentiellement graves notamment anaphylactiques [52].

Toujours en cours d’e´valuation, la mesure de l’index de re´sistance par Doppler des arte`res re´nales intraparenchymateuses tente de s’inte´resser spe´cifiquement a` la perfusion re´nale afin de de´terminer individuellement les besoins de chaque patient en termes de pression de perfusion re´nale [43]. En effet, l’e´valuation Doppler permet d’acce´der aux conditions objectives de vascularisation intrare´nale et d’en de´duire, par l’interme´diaire de l’appre´ciation du syste`me de re´gulation re´nale, les conditions he´modynamiques syste´miques.

6.1.2.2. Albumine. L’albumine synthe´tique est aujourd’hui de´pourvue des risques infectieux qu’on lui a attribue´s autrefois. Il est actuellement e´tabli de fac¸on convaincante que l’albumine ne doit pas eˆtre le solute´ de remplissage de premie`re intention chez le malade de re´animation [53]. La question de ses indications au sein de sous-groupes de patients reste ne´anmoins ouverte en particulier dans le cadre de la de´faillance re´nale. Si l’hypoalbumine´mie est associe´e a` une mortalite´ e´leve´e au cours de l’insuffisance re´nale aigue¨, rien ne permet d’affirmer que la correction de cette hypoalbumine´mie par administration d’albumine soit de nature a` ame´liorer ce risque [54].

6.1.1. Hyperhydratation L’hyperhydratation serait un facteur protecteur de la fonction re´nale en pe´riode pe´riope´ratoire. Bien que cette notion soit tre`s

6.1.2.3. Cristalloı¨des. L’expansion vole´mique par cristalloı¨des est d’efficacite´ tre`s transitoire et trouve donc ses indications dans le cadre de l’optimisation he´modynamique imme´diate ou de la

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re´hydratation. La composition chimique des solute´s disponibles est susceptible d’interagir avec l’e´quilibre hydroe´lectrolytique et leur choix me´rite d’eˆtre reconside´re´ en cas d’insuffisance re´nale. La traditionnelle e´viction des apports potassiques est justifie´e chez le patient insuffisant re´nal chronique et l’e´tait au cours de l’insuffisance re´nale aigue¨ chez les patients dont on repoussait au maximum la mise en œuvre d’une e´puration extrare´nale. Il apparaıˆt aujourd’hui que le se´rum sale´ isotonique peut entraıˆner une acidose me´tabolique mine´rale dite hyperchlore´mique [55] pouvant induire un relargage de potassium vers le secteur extracellulaire contrairement au Ringer lactate qui, en de´pit de ses apports potassiques (5,3 a` 5,4 mmol/l), augmente la kalie´mie dans une moindre mesure [56]. 6.1.3. Cate´cholamines L’utilisation des cate´cholamines devient ne´cessaire afin d’e´quilibrer un statut he´modynamique devenu pre´caire une fois que le retour veineux a e´te´ normalise´. En effet, l’hypotension arte´rielle, si elle se prolonge, peut e´voluer vers une ne´crose tubulaire aigue¨ d’origine ische´mique. C’est pourquoi, a` l’aide du monitorage e´voque´ pre´ce´demment, il convient de de´terminer l’e´tiologie de la de´faillance (myocardique ou vasople´gique) afin de recourir a` la cate´cholamine la plus adapte´e. 6.1.3.1. Noradre´naline. La noradre´naline, par ses effets vasoconstricteurs puissants, ame´liore la pression de perfusion re´nale lors des situations de vasople´gie septique. Elle re´duit en outre le tonus sympathique re´nal re´flexe. Il est maintenant e´tabli que la noradre´naline accroıˆt la diure`se et la clairance de la cre´atinine au cours des situations septiques mais ne pre´sente pas ces inte´reˆts chez les patients non septiques [57,58]. 6.1.3.2. Dobutamine. Les effets de la dobutamine sur le rein sont vraisemblablement imputables aux effets syste´miques de cette cate´cholamine exoge`ne d’activite´ pre´dominante agoniste beˆta-1. L’e´tude de Duke et al. a d’ailleurs mis en e´vidence sa probable supe´riorite´ sur la dopamine en termes d’effet diure´tique ainsi que sur la re´duction de la cre´atinine plasmatique [59]. Son emploi entre donc dans le cadre de l’optimisation he´modynamique globale dont la fonction re´nale peut be´ne´ficier. Elle reste une the´rapeutique de seconde intention d’usage limite´ a` la de´faillance myocardique symptomatique. 6.1.3.3. Agonistes dopaminergiques. La dopamine est connue pour exercer des effets spe´cifiquement re´naux par l’interme´diaire de re´cepteurs de type delta situe´s sur l’appareil tubulaire. Elle exerce ainsi un le´ger effet diure´tique e´ventuellement renforce´ par ses effets syste´miques. Nous disposons aujourd’hui d’arguments forts pour en bannir l’usage dans le cadre du traitement ou de la pre´vention de l’insuffisance re´nale aigue¨ [60–62]. La dopexamine semble dote´e de proprie´te´s diure´tiques e´quivalentes a` celles de la dopamine et n’a pas montre´ d’effets be´ne´fiques sur la fonction re´nale [63,64]. 6.2. E´viction des toxiques La pre´vention de l’insuffisance re´nale aigue¨ pe´riope´ratoire passe e´videmment par l’e´viction des me´dicaments potentiellement ne´phrotoxiques, e´voque´s plus haut. Il convient ainsi de re´fle´chir au bien-fonde´ de chaque the´rapeutique mise en œuvre d’autant plus si celle-ci peut aller a` l’encontre de l’he´modynamique re´nale ou eˆtre cause d’une toxicite´ re´nale. Aussi, meˆme les prescriptions les plus anodines, car les plus courantes, ne le sont plus lorsque coexistent plusieurs facteurs de risque d’insuffisance re´nale aigue¨, il est indispensable de bien peser les be´ne´fices et les risques pour le patient avant d’instituer un tel traitement.

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Cependant, l’utilisation de me´dicaments ne´phrotoxiques, notamment dans le cadre d’une antibioprophylaxie ou d’une antibiothe´rapie pe´riope´ratoire, est parfois indispensable. Dans ce cas, l’optimisation des autres traitements pre´ventifs de l’insuffisance re´nale aigue¨ devrait permettre d’e´viter la survenue de cette dernie`re. 6.3. Insuffisance re´nale aigue¨ et diure´tiques L’administration de diure´tiques de l’anse, et en particulier de furose´mide, lors de la prise en charge de l’insuffisance re´nale aigue¨ est de pratique courante et se justifie par des arguments the´oriques qui permettent de conforter la satisfaction de croire que la fonction re´nale persiste. Ces arguments sont les suivants :  les diure´tiques accroissent le de´bit urinaire, ce qui permet la dilution des substances ne´phrotoxiques filtre´es par les glome´rules et favorise l’e´limination des de´bris cellulaires pre´sents dans la lumie`re des tubules pre´venant ainsi l’obstruction tubulaire ;  ils diminuent les besoins e´nerge´tiques des cellules de la branche ascendante de l’anse de Henle´ et du tubule distal en inhibant la pompe Na+/2Cl/K+, et ainsi la re´absorption active du sodium et du chlore au niveau de la branche ascendante de l’anse de Henle´ et du tubule distal, ce qui re´duit alors la consommation tubulaire d’oxyge`ne ;  enfin, les diure´tiques de l’anse stimulent la synthe`se des prostaglandines PGE2, entraıˆnant ainsi vasodilatation et redistribution du flux [65]. Meˆme si quelques mode`les expe´rimentaux ont sugge´re´ un possible effet protecteur re´nal du furose´mide, le be´ne´fice des diure´tiques de l’anse dans la prise en charge de l’insuffisance re´nale aigue¨ n’a pas e´te´ de´montre´ en clinique humaine. Il est probable que leur administration prophylactique ne soit pas efficace pour pre´venir la survenue d’une insuffisance re´nale aigue¨ et qu’elle puisse meˆme eˆtre de´le´te`re avant l’administration de produits de contraste iode´s [66]. Leur place dans le traitement de l’insuffisance re´nale aigue¨ e´tablie est l’objet de davantage de controverses, lie´es a` l’absence de me´thodologie rigoureuse, a` la difficulte´ du choix d’un crite`re de jugement comme a` l’interpre´tation des re´sultats. En effet, de nombreux travaux sont re´trospectifs, sujets a` de multiples biais, ou de faibles effectifs. Les e´tudes prospectives mais non randomise´es ne distinguent pas le be´ne´fice apporte´ par les diure´tiques de celui qui est lie´ au remplissage vasculaire [47]. Ne´anmoins, et malgre´ le manque d’arguments cliniques, la pratique consiste souvent a` recourir aux diure´tiques de l’anse pour accroıˆtre le de´bit urinaire, comme l’a souligne´ une enqueˆte de pre´valence de l’utilisation des diure´tiques. En effet, la principale indication (40 % des cas) d’un traitement par diure´tiques e´tait l’existence d’une diure`se insuffisante [67]. Or cette pratique, qui vise a` limiter la progression de l’insuffisance re´nale aigue¨ et a` convertir les insuffisance re´nales aigue¨s oligoanuriques en insuffisances re´nales aigue¨s a` diure`se conserve´e pour simplifier la gestion du bilan entre´es–sorties, se heurte aux re´sultats des e´tudes publie´es comme a` la compre´hension physiopathologique. S’il est vrai que les diure´tiques peuvent transformer une insuffisance re´nale aigue¨ oligurique en insuffisance re´nale aigue¨ nonoligurique, et que les patients oliguriques ont un plus mauvais pronostic que ceux dont la diure`se est conserve´e, il n’a pas e´te´ montre´ d’effet be´ne´fique des diure´tiques de l’anse que ce soit en termes de dure´e de l’insuffisance re´nale aigue¨, de fre´quence du recours aux techniques d’e´puration extrare´nale, de dure´e d’hospitalisation ou de mortalite´ [68–70]. Au contraire, des effets secondaires sur l’e´quilibre acidobasique, la balance hydroe´lectrolytique et le me´tabolisme leur sont attribue´s [71]. De plus, il semble que les diure´tiques puissent eˆtre de´le´te`res pour la fonction

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[(Fig._3)TD$IG]

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re´nale, en particulier en situation de retour veineux limitant pre´alable ou induit par le traitement, puisqu’ils perturbent la redistribution corticome´dullaire protectrice du flux sanguin re´nal et favorisent ainsi l’hypoxie me´dullaire [65]. Cela souligne la ne´cessite´ de s’assurer de l’absence d’alte´ration de l’he´modynamique pre´cardiaque avant d’envisager l’induction pharmacologique d’une diure`se, et de la controˆler tre`s souvent, pour ne pas aggraver une insuffisance re´nale aigue¨ encore fonctionnelle et favoriser ainsi la constitution d’une ne´crose tubulaire aigue¨ ische´mique. Une e´ventuelle prise de poids ou la pre´sence d’œde`mes pe´riphe´riques meˆme importants ne refle`te pas l’e´tat de re´ple´tion du compartiment vasculaire et encore moins l’he´modynamique re´nale. Les e´tudes cliniques randomise´es explorant l’effet des diure´tiques au cours de l’insuffisance re´nale aigue¨ ne disposaient pas d’une puissance statistique suffisante pour mette en e´vidence un e´ventuel be´ne´fice. Forts de ce constat, Mehta et al., a` travers une e´tude de cohorte, ont re´alise´ l’analyse de 552 patients en insuffisance re´nale aigue¨ en soins intensifs ayant be´ne´ficie´ d’une consultation de ne´phrologie [72]. Ils ont observe´ un accroissement de 68 % de la mortalite´ hospitalie`re et de 77 % de la probabilite´ cumule´e de de´ce`s ou de non-re´cupe´ration de la fonction re´nale associe´ a` l’administration de diure´tiques au cours de l’insuffisance re´nale aigue¨. Il faut surtout noter que, si les patients re´pondeurs aux diure´tiques (de´bit de diure`se e´leve´e par dose unitaire de diure´tique) e´voluaient de fac¸on comparable aux patients ne recevant pas de diure´tiques, les malades non re´pondeurs quant a` eux voyaient leur probabilite´ de de´ce`s ou de non-re´cupe´ration re´nale augmenter comparativement aux patients ne recevant pas de diure´tique. Si dans cette e´tude, l’association de l’usage de diure´tiques a` une hausse de la mortalite´ peut eˆtre impute´e a` une toxicite´ des diure´tiques, d’autres explications doivent eˆtre conside´re´es, comme en particulier le retard de mise en œuvre d’une e´puration extrare´nale que leur emploi peut induire, comme d’autres e´tudes l’ont de´ja` sugge´re´. Les auteurs ont conclu qu’en l’absence d’e´tude clinique prospective randomise´e de qualite´, l’emploi de fortes doses de diure´tiques ne trouvait pas sa place dans la prise en charge en re´animation des patients atteints d’insuffisance re´nale aigue¨. Leur conclusion est en apparente contradiction avec l’e´tude observationnelle prospective multicentrique internationale rapporte´e par Uchino et al. qui ont observe´, contrairement a` la pre´ce´dente et selon trois me´thodes statistiques redondantes, que l’usage des diure´tiques n’e´tait pas associe´ a` une hausse de la mortalite´ [73]. Ces deux travaux suffisent pour conclure a` la ne´cessite´ et a` la faisabilite´ e´thique d’une e´tude prospective randomise´e pour de´terminer si les diure´tiques ont un be´ne´fice dans la prise en charge de l’insuffisance re´nale aigue¨. Dans l’attente de ces re´sultats, il semble sage de recommander un usage prudent et re´fle´chi des diure´tiques de l’anse, toujours apre`s optimisation de l’e´tat l’he´modynamique re´nale. Un sche´ma re´sumant les pre´cautions et les modalite´s de l’administration des diure´tiques de l’anse est propose´ sur la Fig. 3. 7. E´puration extrare´nale 7.1. Supple´ance re´nale continue 7.1.1. He´mofiltration continue Au cours de l’he´mofiltration continue, les e´changes se re´alisent par transport convectif : seul le gradient de pression hydrostatique de´termine le passage des substances et de leur solute´. Dans le cas typique, il n’y a pas de diffe´rence de pression osmotique de part et d’autre de la membrane. Toutes les mole´cules dont l’encombrement ste´rique et la charge e´lectrique sont compatibles avec la dimension des pores membranaires peuvent fuir du plasma vers l’exte´rieur. On exprime souvent cette caracte´ristique par la notion de « point de coupure » [74]. Ainsi, l’ultrafiltrat contient, a` des

Fig. 3. Arbre de´cisionnel. Proposition d’un protocole de prescription des diure´tiques de l’anse en re´animation. SvO2 : saturation veineuse en oxyge`ne.

concentrations proches de leur concentration plasmatique, toutes les substances ayant la capacite´ de passer la membrane d’he´mofiltration. Il en re´sulte que la clairance des mole´cules est a` peu pre`s e´gale au de´bit d’ultrafiltration. 7.1.2. He´modiafiltration Parfois, une part diffusive peut eˆtre associe´e au me´canisme d’e´change purement convectif de l’he´mofiltration, ces techniques sont regroupe´es sous le nom d’he´modiafiltration [75]. Cette dialyse est re´alise´e en faisant circuler un liquide a` bas de´bit (0,5 l/h a` 4 l/h) et a` contre-courant dans le compartiment de recueil d’ultrafiltrat. Lors de l’utilisation de l’he´modiafiltration, il ne semble pas que la prescription d’un de´bit de dialysat et d’ultrafiltration diffe´rent ge´ne`re un quelconque be´ne´fice dans l’efficacite´ de l’e´puration des mole´cules de poids mole´culaire faible ou moyen. Le meilleur compromis reste donc de re´gler la machine avec les meˆmes de´bits d’ultrafiltration et de dialysat [76]. Ne´anmoins, lorsque l’ultrafiltration est utilise´e aux doses convectives actuellement recommande´es (supe´rieures a` 35 ml/kg/h), la part diffusive semble superflue puisque le dialysat qui circule a` contre-courant dans l’he´mofiltre est principalement en contact avec un ultrafiltrat de composition proche du plasma. L’he´modiafiltration reste donc re´serve´e a` certains cas ou` l’on ne peut atteindre le de´bit sanguin souhaite´, notamment chez les enfants ou` les acce`s veineux sont de calibre plus mode´re´ ou chez certains patients ou` le cathe´ter ne satisfait pas aux exigences souhaite´es. 7.1.3. He´mofiltration a` haute clairance Cette technique n’est autre qu’une he´mofiltration re´alise´e a` un tre`s importants de´bit sanguin (supe´rieur a` 300 ml/min) et

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d’ultrafiltrat (supe´rieur a` 60 ml/kg/min) et d’ultrafiltrat (supe´rieurs a` 60 ml/kg/min) afin de de´passer les seuils de clairance de´crits comme ne´cessaires et suffisants pour assurer une e´puration extrare´nale. Il a e´te´ sugge´re´ que le be´ne´fice a` en attendre porte essentiellement sur l’ame´lioration de l’e´tat he´modynamique au cours des re´actions inflammatoires syste´miques se´ve`res lors de sepsis [77,78] ou apre`s circulation extracorporelle en chirurgie cardiaque [79,80]. Ne´anmoins, des e´tudes sont actuellement en cours pour de´terminer de fac¸on pratique les e´ventuelles indications de cette technique. 7.2. Supple´ance re´nale discontinue : he´modialyse intermittente Au contraire, l’he´modialyse intermittente repose sur le principe physique de diffusion qui entraıˆne peu de passage de solvant. L’intensite´ du transport de´pend du gradient de concentration, du coefficient de diffusion de la substance conside´re´e, de la composition du dialysat, de la nature de la membrane et de la surface d’e´change. La vitesse de transfert est inversement proportionnelle au poids mole´culaire de la substance. En cas de fort gradient de concentration entre le plasma et le dialysat, le transport est maximal pour chaque e´lectrolyte entre le compartiment ayant la concentration la plus forte vers celui de concentration infe´rieure. L’he´modialyse intermittente peut donc eˆtre tre`s efficace pour les mole´cules anormalement pre´sentes en grande quantite´, notamment les mole´cules de petite taille. 7.3. Nouvelle modalite´ de supple´ance re´nale : SLED Que ce soit la sustained low-efficiency dialysis (SLED), la dialyse lente continue (slow continous dialysis) ou la dialyse quotidienne prolonge´e (extended daily dialysis), il s’agit dans tous les cas d’une nouvelle modalite´ d’he´modialyse dont la dure´e a e´te´ rallonge´e (entre 6 heures et 12 heures, parfois plus) afin de compenser une efficacite´ dialytique moindre. En effet, le de´bit sanguin est limite´ a` environ 200 ml/min et le de´bit de dialysat a` 350 ml/min. Cette modalite´ de dialyse peut s’apparenter a` une e´puration extrare´nale continue avec des proprie´te´s diffusives exclusives, dont le but est d’avoir les be´ne´fices the´oriques d’une e´puration continue lente et ceux d’un transport diffusif. En effet, la lenteur du processus permet un e´quilibre the´orique des concentrations e´lectrolytiques entre secteur vasculaire et extravasculaire permettant d’optimiser la dose de dialyse tout en conservant une stabilite´ he´modynamique. De plus, l’arreˆt quotidien de l’e´puration permet de re´aliser diffe´rents actes diagnostiques et the´rapeutiques en s’affranchissant d’un de´branchement inopine´. Marshall a e´value´ la SLED chez des patients en re´animation et a obtenu des doses de dialyse satisfaisantes e´value´es par le Kt/V a` 1,36 et 1,43 [81,82]. D’autres e´tudes semblent en faveur d’une stabilite´ he´modynamique comparable a` celle obtenue par les techniques d’he´mofiltration classique [83]. D’autre part, la SLED semble plus efficace que l’he´modialyse intermittente pour l’e´puration des petites mole´cules [84]. 7.4. Optimisation de la dose d’e´puration La dose d’e´puration, souvent de´nomme´e de fac¸on restrictive « dose de dialyse », est une notion utilise´e chez le patient insuffisant re´nal chronique pour juger de l’efficacite´ d’une he´modialyse d’apre`s la clairance re´elle de l’ure´e. La liaison entre pronostic et dose de dialyse a de´ja` e´te´ observe´e chez ces patients e´pure´s au long cours et les e´tudes semblent e´galement eˆtre en faveur de la re´alite´ de cette notion chez les patients en insuffisance re´nale aigue¨. Ronco et al., en comparant trois doses d’e´puration chez des patients en insuffisance re´nale aigue¨, ont observe´ que les groupes traite´s avec 35 ml/kg/h ou 45 ml/kg/h d’ultrafiltration (en

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postdilution exclusive) pre´sentaient une meilleure survie que le groupe a` 20 ml/kg/h [85]. D’autres e´tudes ont conforte´ l’inte´reˆt d’une dose de dialyse importante [86]. Au contraire, Palevsky et al. ont tente´ de remettre en cause l’importance de cette dose d’e´puration [87]. En comparant deux doses d’e´puration chez 1124 patients, l’une e´leve´e (he´modiafiltration a` 35 ml/kg/h ou he´modialyse 6 fois/semaine) et l’autre, de clairance attendue moindre, (he´modiafiltration a` 20 mlkg/h ou he´modialyse 3 fois/semaine), les auteurs n’ont pas observe´ de diffe´rence en comparant la mortalite´ a` 60 jours entre les deux groupes, le nombre de de´faillances d’organes ou le de´lai de re´cupe´ration d’une fonction re´nale pre´de´finie comme normale. Ne´anmoins, lorsqu’on s’inte´resse aux caracte´ristiques des patients, on remarque que quel que soit le groupe de randomisation, l’efficacite´ e´value´e par la clairance de l’ure´e semble en re´alite´ eˆtre du meˆme ordre, ce qui laisse a` penser que la dose de dialyse a finalement e´te´ relativement similaire dans les deux groupes. Cet e´chec a` conduire l’e´tude telle qu’attendue pourrait en expliquer le re´sultat ne´gatif. En outre, on peut s’interroger sur le bien-fonde´ d’un crite`re de jugement comme la mortalite´ a` 60 jours pour e´valuer l’effet d’une the´rapeutique, qui sans pre´tendre modifier la mortalite´, exerce de fac¸on e´vidente son be´ne´fice potentiel au cours des premiers jours de mise en œuvre. Une autre e´tude plus re´cente publie´e en 2009 par Bellomo et al., comparant deux doses d’e´puration en he´modiafiltration (25 mlkg/ h contre 40 mlkg/h) n’a pas mis en e´vidence de diffe´rence de mortalite´ a` 90 jours entre les deux groupes [88]. La meˆme critique sur la pertinence du crite`re de jugement principal ne permet pas de conclure a` l’absence de be´ne´fice d’une dose de dialyse plus importante. Il faut par ailleurs remarquer que pre`s de 50 % des patients e´pure´s l’e´taient pour sepsis et que le de´lai entre l’admission en re´animation et le de´but de l’e´puration e´tait de pre`s de 48 heures, empeˆchant de ce fait l’e´valuation des be´ne´fices d’un traitement e´puratif pre´coce au cours des e´tats inflammatoires. Meˆme si des e´tudes re´centes semblent remettre en cause le concept d’une dose de dialyse importante, il faut certainement relativiser toutes les observations cite´es et cerner des indications pre´cises pour lesquelles une dose de dialyse plus forte serait be´ne´fique. En l’absence d’indications claires reposant sur des e´tudes randomise´es, une ultrafiltration de l’ordre de 35 mlkg/h semble, pour le moment, repre´senter un compromis ide´al entre ceux qui pre´conisent une dose plus importante et ceux qui affirment l’inverse. 7.5. Place respective des deux me´thodes d’e´puration Le choix entre he´mofiltration continue et he´modialyse intermittente est un sujet de controverses alimente´es par les habitudes de chacun plus que par des donne´es fiables. En effet, plusieurs e´tudes ou me´ta-analyses ont tente´ de re´pondre a` cette question sans y parvenir de fac¸on satisfaisante du fait de lacunes me´thodologiques ou de manque de puissance [89–91]. Le message pratique qu’il semble possible d’en tirer est que la meilleure technique est sans doute celle que l’on maıˆtrise le mieux du fait des tre`s nombreux risques anticipables qui l’accompagnent [92]. 8. Conclusion L’insuffisance re´nale aigue¨ pe´riope´ratoire est souvent multifactorielle associant des e´tiologies ische´miques, toxiques, iatroge`nes et chirurgicales. La pre´vention de l’insuffisance re´nale aigue¨ repose essentiellement sur l’optimisation he´modynamique perope´ratoire et l’e´viction des substances ne´phrotoxiques. Les indications des diffe´rentes techniques d’e´puration extrare´nale, en pe´riope´ratoire, ne diffe`rent pas d’une insuffisance re´nale aigue¨

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dans un autre contexte. La meilleure technique est celle que l’on maıˆtrise le mieux, celle ou` l’on sait optimiser les parame`tres et pre´venir les effets inde´sirables. De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Chew SL, Lins RL, Daelemans R, De Broe ME. Outcome in acute renal failure. Nephrol Dial Transplant 1993;8:101–7. [2] Novis BK, Roizen MF, Aronson S, Thisted RA. Association of preoperative risk factors with postoperative acute renal failure. Anesth Analg 1994;78:143–9. [3] McCullough PA, Wolyn R, Rocher LL, Levin RN, O’Neill WW. Acute renal failure after coronary intervention: incidence, risk factors, and relationship to mortality. Am J Med 1997;103:368–75. [4] Brady H, Brenner B, Clarkson M, Lieberthal W. Acute Renal Failure. In: Brenner B, editor. The Kidney. Philadelphia: WB Saunders; 2000. p. 1201. [5] Macedo E, Bouchard J, Soroko SH, Chertow GM, Himmelfarb J, Ikizler TA, et al. Fluid accumulation, recognition and staging of acute kidney injury in critically-ill patients. Crit Care 2010;14:R82. [6] Shemesh O, Golbetz H, Kriss JP, Myers BD. Limitations of creatinine as a filtration marker in glomerulopathic patients. Kidney Int 1985;28:830–8. [7] Cockcroft DW, Gault MH. Prediction of creatinine clearance from serum creatinine. Nephron 1976;16:31–41. [8] Hoste EA, Damen J, Vanholder RC, Lameire NH, Delanghe JR, Van den Hauwe K, et al. Assessment of renal function in recently admitted critically ill patients with normal serum creatinine. Nephrol Dial Transplant 2005;20:747–53. [9] Herget-Rosenthal S, Marggraf G, Husing J, Goring F, Pietruck F, Janssen O, et al. Early detection of acute renal failure by serum cystatin C. Kidney Int 2004;66:1115–22. [10] Hewitt SM, Dear J, Star RA. Discovery of protein biomarkers for renal diseases. J Am Soc Nephrol 2004;15:1677–89. [11] Mishra J, Dent C, Tarabishi R, Mitsnefes MM, Ma Q, Kelly C, et al. Neutrophil gelatinase-associated lipocalin (NGAL) as a biomarker for acute renal injury after cardiac surgery. Lancet 2005;365:1231–8. [12] du Cheyron D, Daubin C, Poggioli J, Ramakers M, Houillier P, Charbonneau P, et al. Urinary measurement of Na+/H+ exchanger isoform 3 (NHE3) protein as new marker of tubule injury in critically ill patients with ARF. Am J Kidney Dis 2003;42:497–506. [13] Han WK, Waikar SS, Johnson A, Betensky RA, Dent CL, Devarajan P, et al. Urinary biomarkers in the early diagnosis of acute kidney injury. Kidney Int 2008;73:863–9. [14] Bellomo R, Kellum J, Ronco C. Acute renal failure: time for consensus. Intensive Care Med 2001;27:1685–8. [15] Uchino S, Bellomo R, Goldsmith D, Bates S, Ronco C. An assessment of the RIFLE criteria for acute renal failure in hospitalized patients. Crit Care Med 2006;34:1913–7. [16] Hoste EA, Kellum JA. RIFLE criteria provide robust assessment of kidney dysfunction and correlate with hospital mortality. Crit Care Med 2006;34:2016–7. [17] Kuitunen A, Vento A, Suojaranta-Ylinen R, Pettila V. Acute renal failure after cardiac surgery: evaluation of the RIFLE classification. Ann Thorac Surg 2006;81:542–6. [18] Maccariello E, Soares M, Valente C, Nogueira L, Valenca RV, Machado JE, et al. RIFLE classification in patients with acute kidney injury in need of renal replacement therapy. Intensive Care Med 2007;33:597–605. [19] Mehta RL, Kellum JA, Shah SV, Molitoris BA, Ronco C, Warnock DG, et al. Acute Kidney Injury Network: report of an initiative to improve outcomes in acute kidney injury. Crit Care 2007;11:R31. [20] Bagshaw SM, George C, Bellomo R. A comparison of the RIFLE and AKIN criteria for acute kidney injury in critically ill patients. Nephrol Dial Transplant 2008;23:1569–74. [21] Sladen R. Renal physiologyAnesthesia. New York: Churchill Livingstone; 1994: 663–88. [22] Brivet FG, Kleinknecht DJ, Loirat P, Landais PJ. Acute renal failure in intensive care units-causes, outcome, and prognostic factors of hospital mortality; a prospective, multicenter study. French Study Group on Acute Renal Failure. Crit Care Med 1996;24:192–8. [23] Chertow GM. On the design and analysis of multicenter trials in acute renal failure. Am J Kidney Dis 1997;30(5suppl. 4):S96–101. [24] Clermont G, Acker CG, Angus DC, Sirio CA, Pinsky MR, Johnson JP. Renal failure in the ICU: comparison of the impact of acute renal failure and end-stage renal disease on ICU outcomes. Kidney Int 2002;62:986–96. [25] Metnitz PG, Krenn CG, Steltzer H, Lang T, Ploder J, Lenz K, et al. Effect of acute renal failure requiring renal replacement therapy on outcome in critically ill patients. Crit Care Med 2002;30:2051–8. [26] de Mendonca A, Vincent JL, Suter PM, Moreno R, Dearden NM, Antonelli M, et al. Acute renal failure in the ICU: risk factors and outcome evaluated by the SOFA score. Intensive Care Med 2000;26:915–21.

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[Perioperative acute kidney injury and failure].

Perioperative period is very likely to lead to acute renal failure because of anesthesia (general or perimedullary) and/or surgery which can cause acu...
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