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Volume 101 • N◦ 6 • juin 2014 John Libbey Eurotext

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Intérêt du pazopanib dans le traitement des cancers du rein et des sarcomes des tissus mous Pazopanib for treatment of renal cell carcinoma and soft tissue sarcomas Article rec¸u le 03 avril 2014, accepté le 14 avril 2014 Tirés à part : T. Brotelle

Thibault Brotelle, Jacques-Olivier Bay Centre Jean-Perrin, Département d’oncologie médicale, 58, rue Montalembert, 63011 Clermont-Ferrand cedex 01, France Pour citer cet article : Brotelle T, Bay JO. Intérêt du pazopanib dans le traitement des cancers du rein et des sarcomes des tissus mous. Bull Cancer 2014 ; 101 : 641-6. doi : 10.1684/bdc.2014.1981.

Résumé. L’angiogenèse a un rôle fondamental dans la physiopathologie du cancer du rein. Des stratégies ciblant l’angiogenèse ont ainsi été élaborées notamment les inhibiteurs du VEGF et du VEGFR qui font partie intégrante de la prise en charge du cancer du rein métastatique, en première et deuxième lignes. Le pazopanib est un inhibiteur de tyrosine kinase ciblant notamment le VEGFR. Il s’intègre dans l’arsenal thérapeutique du traitement du cancer du rein métastatique en première ligne ou après échec d’une immunothérapie. Ce traitement a également été récemment approuvé dans la prise en charge des sarcomes des tissus mous métastatiques après échec d’au moins une ligne de chimiothérapie.  Mots clés : pazopanib, cancer du rein, sarcome des tissus mous, angiogenèse, inhibiteur tyrosine kinase

doi : 10.1684/bdc.2014.1981

Introduction Dans les pays occidentaux, les cancers du rein représentent 2 à 3 % des cancers de l’adulte [1]. Sur le plan histologique, il s’agit dans 70 à 75 % des cas de tumeurs épithéliales malignes à cellules claires. Depuis l’avènement des thérapies ciblées, la médiane de survie du cancer du rein métastatique est estimée à 40 mois environ [2]. Le traitement du cancer du rein au stade avancé est basé sur des critères pronostiques définis selon la classification du Memorial Sloan Kettering Cancer Center (MSKCC) prenant en compte l’état général (index de Karnofsky), le délai entre le diagnostic initial et le traitement de première ligne, le taux de LDH et d’hémoglobine et la calcémie corrigée. Jusqu’en 2006, les seuls traitements disponibles pour les patients atteints d’un cancer du rein métastatique étaient des traitements d’immunothérapie avec de l’interféron ␣ en SC et/ou de l’interleukine 2 en IV ou SC. Ces traitements permettaient d’obtenir des taux de réponse de 5 à 20 % et une médiane de survie globale (Overall survival : Bull Cancer vol. 101 • N◦ 6 • juin 2014

Abstract. The role of angiogenesis in the physiopathology of renal cell carcinoma is fundamental. Strategies targeting angiogenesis have been developed including VEGF and VEGFR inhibitors for the treatment of metastatic renal cell carcinoma (mRCC), in first and second line. Pazopanib is an angiogenesis inhibitor targeting VEGF receptor, PDGF receptor and c-KIT receptor. This treatment is a treatment option recommended for patients with mRCC, would be in first line or after cytokines failure. Pazopanib has been recently approved for patients with metastatic soft tissue sarcoma, after failure of at least one line of chemotherapy.  Key words: pazopanib, renal cell carcinoma, soft tissue sarcoma, angiogenesis, tyrosine kinase inhibitor

OS) de 13 mois. Les mutations du gène de Von HippelLindau (VHL), l’accumulation de hypoxia inducible factor 1 ␣ (HIF1 ␣) et l’hyperexpression du vascular endothelial growth factor (VEGF) représentent les principaux médiateurs de la résistance au traitement. Une meilleure compréhension de l’oncogenèse de ces cancers ainsi que des voies métaboliques impliquées ont conduit à des stratégies thérapeutiques ciblant l’angiogenèse. Parmi elles, se trouve l’inhibition du VEGF par un anticorps monoclonal (bévacizumab : Avastin® ) ou celle de son récepteur, le VEGFR, via des inhibiteurs de tyrosine kinase (sunitinib : Sutent® et sorafénib : Nexavar® ). Le pazopanib (Votrient® ) est actuellement une nouvelle molécule disponible dans ces situations métastatiques. Les sarcomes des tissus mous (STM) représentent 1 % des cancers de l’adulte. Il s’agit de tumeurs mésenchymateuses malignes dont la classification est basée sur leur morphologie, leurs cellules initialement impliquées dans l’oncogenèse, la cytogénétique et, plus récemment, la biologie

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T. Brotelle, J.-O. Bay moléculaire. En situation non métastatique, le traitement de choix est chirurgical avec des marges de résection suffisantes. Une radiothérapie complémentaire est souvent envisagée. La survie médiane des patients atteints d’un STM métastatique est de 12 mois. Dans cette situation, la chimiothérapie constitue le traitement de référence avec comme seules substances connues actives depuis plus de 20 ans, la doxorubicine et l’ifosfamide (la dacarbazine et l’association gemcitabine-docétaxel sont également utilisées mais moins fréquemment). L’apparition de la trabectédine (Yondelis® ) en 2007 constitue la seule véritable avancée dans ce domaine [3]. Hormis les tumeurs gastro-intestinales digestives (GIST), jusqu’à l’arrivée du pazopanib, aucune thérapie ciblée n’était reconnue efficace. En effet, une analyse des résultats de 52 études de phase II publiées entre 1999 et 2009, testant différentes substances chez des patients atteints de STM, n’a démontré une activité prometteuse qu’avec le pazopanib [4].

Mécanisme d’action Le pazopanib est une indazolylpyrimidine synthétique. C’est un inhibiteur oral de tyrosine kinase multicible avec une activité anti-angiogénique. Son action cible des récepteurs du facteur de croissance endothélial vasculaire (VEGFR-1, VEGFR-2 et VEGFR-3), des récepteurs du facteur de croissance plaquettaire (PDGFR ␣ et PDGFR ␤) et le récepteur du facteur de cellule souche (c-KIT). Il inhibe également, mais de manière moins puissante, des récepteurs du facteur de croissance des fibroblastes (FGFR-1 et FGFR-3) [5] (figure 1).

Études cliniques Phase I Le pazopanib a été étudié chez 63 patients atteints de tumeurs solides réfractaires aux traitements classiques [6].

Angiogenèse

VEGFR-2

VEGFR-3 PDGFR

VEGFR-1

PDGFR c-KIT

Pazopanib

Cellule tumorale

Figure 1. Mécanisme d’action du pazopanib.

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Intérêt du pazopanib dans le traitement des cancers du rein et des sarcomes des tissus mous Le traitement était donné à doses croissantes avec analyse des concentrations plasmatiques. La dose de 800 mg/j a finalement été retenue pour les études ultérieures. Sur les 12 patients présentant une tumeur rénale, deux réponses partielles et quatre maladies stables ont été obtenues. Des réponses ont été obtenues également dans le cadre de tumeurs neuroendocrines et d’un chondrosarcome. Le développement de cette molécule a été privilégié pour les cancers du rein à cellules claires et les STM.

Cancer du rein Phase II Une étude a été menée chez 225 patients présentant un cancer du rein à cellules claires récidivant localement ou métastatique [7]. Les patients ne devaient avoir rec¸u au plus qu’une seule ligne de traitement au préalable. Les autres critères d’inclusions étaient un PS 0 ou 1, et des fonctions d’organes normales. Les patients présentant des métastases cérébrales ou lepto-méningées ne pouvaient être inclus. Le pazopanib a été administré à la dose de 800 mg/j pendant 12 semaines. Le traitement était poursuivi chez les patients répondeurs après 12 semaines de traitement. En cas de stabilité de la maladie, les patients étaient randomisés entre la poursuite du traitement ou un placebo. Une analyse intermédiaire a montré un taux de réponse élevé (38 %) chez les 60 premiers patients du groupe pazopanib. Au vu de ces résultats, le double insu a été levé et les patients du bras placebo ont pu recevoir le pazopanib. La population étudiée était finalement composée de 69 % de patients n’ayant rec¸u aucun traitement systémique préalable contre 31 % en progression après une ligne de traitement (cytokines ou bévacizumab). Le taux de réponse objective (réponse complète [RC] et réponse partielle [RP]) à 12 semaines était de 35 % avec 45 % de maladie stable. La survie sans progression (progression free survival [PFS]) médiane était de 11,9 mois. Phase III Une étude multicentrique, randomisée, en double insu, a évalué l’efficacité du pazopanib versus placebo chez 435 patients atteints d’un cancer du rein avancé ou métastatique [8]. L’objectif principal de l’étude était d’évaluer la PFS et les critères secondaires majeurs étaient la OS, le taux de réponse globale (RG) et la durée de la réponse. Le protocole initial, finalisé en novembre 2005, prévoyait d’inclure des patients ayant rec¸u un traitement antérieur par cytokines (interféron ␣ ou interleukine 2). Suite à l’approbation aux États-Unis du sorafénib en décembre 2005 et du sunitinib en janvier 2006, la population d’inclusion a été élargie aux patients naïfs de traitement de première ligne sans modification du bras de comparaison. Les patients ont été randomisés selon un ratio 2:1 pour recevoir le pazopanib (800 mg/j) ou le placebo, jusqu’à progression de la maladie ou toxicité jugée inacceptable. Au total, 233 patients (54 %) n’avaient préalablement rec¸u aucun traitement et 202 (46 %) étaient des patients de deuxième ligne ayant préalablement rec¸u un traitement à base d’interféron ␣ ou d’interleukine 2. Dans 93 % Bull Cancer vol. 101 • N◦ 6 • juin 2014

des cas, les patients avaient un pronostic favorable ou intermédiaire selon la classification pronostique du MSKCC. Tous les patients avaient un cancer du rein de type histologique à cellules claires ou à prédominance de cellules claires. Dans la population globale, la PFS médiane a été de 9,2 mois dans le groupe pazopanib versus 4,2 mois dans le groupe placebo, soit un gain absolu de cinq mois (hazard ratio [HR] = 0,46). La médiane de l’OS n’a pas été significativement différente entre les deux groupes : 21,1 mois sous pazopanib versus 18,7 mois sous placebo. Dans le sous-groupe des patients en première ligne de traitement, la PFS a été de 11,1 mois versus 2,8 mois, soit un gain absolu de 8,3 mois en faveur du pazopanib. Dans le sous-groupe des patients en échec aux cytokines, la PFS a été de 7,4 mois versus 4,2 mois, soit un gain absolu de 3,2 mois en faveur du pazopanib. Le pourcentage de réponse a été de 30 % dans le groupe pazopanib et de 3 % dans le groupe placebo (p < 0,001). Les données de qualité de vie n’ont pas montré de différence entre les deux groupes. L’étude PISCES a randomisé 168 patients atteints d’un cancer rénal métastatique non prétraités en double insu, avec cross-over [9]. L’objectif principal était l’évaluation de la préférence du patient pour un traitement par pazopanib versus sunitinib. Les patients ont rec¸u dans le groupe « PS » : 800 mg de pazopanib (4 × 200 mg) une fois par jour per os pendant dix semaines, suivi de deux semaines de « wash-out », puis 50 mg de sunitinib (4 × 12,5 mg) une fois par jour per os pendant quatre semaines, puis deux semaines de placebo, puis 50 mg de sunitinib (4 × 12,5 mg) une fois par jour per os pendant quatre semaines. La séquence contraire a été proposée aux patients du groupe « SP » : 50 mg de sunitinib (4 × 12,5 mg) une fois par jour per os pendant quatre semaines, puis deux semaines de placebo, puis 50 mg de sunitinib (4 × 12,5 mg) une fois par jour per os pendant quatre semaines, suivi de deux semaines de « wash-out », puis de 800 mg de pazopanib (4 × 200 mg) une fois par jour per os pendant dix semaines. Le critère d’évaluation principal était la préférence du patient mesurée à l’aide de la réponse à la question suivante : « Maintenant que vous avez rec¸u les deux traitements, lequel des deux préfèreriez-vous continuer à prendre pour traiter votre cancer, en supposant que ces deux médicaments ont la même efficacité pour traiter votre cancer ? ». La préférence du patient a été de 70 % pour le pazopanib versus 22 % pour le sunitinib. Cette étude ne permet cependant pas de tirer des conclusions sur l’efficacité et la tolérance du pazopanib versus le sunitinib compte tenu de l’objectif choisi. L’étude COMPARZ, randomisée, en ouvert, a comparé pazopanib versus sunitinib chez des patients atteints d’un cancer du rein localement avancé ou métastatique non prétraités [10]. L’analyse principale de l’étude était une analyse de non-infériorité portant sur la PFS. L’analyse statistique se fondait sur l’hypothèse suivante : la non-infériorité est établie si la limite supérieure de l’intervalle de confiance à 95 % du risque relatif est inférieure à 1,25. Cette borne correspond à une perte d’efficacité consentie entre les deux groupes de traitement d’au maximum 2,2 mois sur la PFS en

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T. Brotelle, J.-O. Bay défaveur du pazopanib. Le critère de jugement principal était la PFS. Les critères secondaires étaient l’OS, le pourcentage de RG, défini comme le pourcentage de patients ayant une RC ou RP selon les critères d’évaluation des tumeurs solides (RECIST), la durée de réponse, définie comme l’intervalle de temps entre la première preuve documentée de RC ou RP et la première documentation de progression de la maladie ou le décès, quelle que soit la cause (selon l’événement qui survient en premier), et la qualité de vie évaluée selon trois questionnaires : FKSI-19, FACIT-F, Cancer Treatment Satisfaction Questionnaire (CTSQ). Les patients ont été randomisés selon un ratio 1:1 pour recevoir soit le pazopanib à la dose de 800 mg/j soit le sunitinib 50 mg/j durant quatre semaines suivi d’une période de deux semaines sans traitement et reprise au cycle suivant. Chacun de ces traitements était poursuivi jusqu’à progression de la maladie, décès, toxicité jugée inacceptable ou retrait du consentement. Un total de 1 110 patients a été randomisé (557 dans le groupe pazopanib et 553 dans le groupe sunitinib). Dans 83 % des cas, le pronostic des patients était favorable ou intermédiaire selon la classification MSKCC. Concernant le critère de jugement principal, l’analyse principale de l’étude a été réalisée uniquement en ITT. Le HR du critère principal a été de 1,0466 avec une limite supérieure de l’intervalle de confiance à 95 % de 1,22 donc inférieur à la limite de 1,25 prévue au protocole. Il n’y a pas eu d’analyse du critère de jugement principal en per protocole. Cependant, une analyse de sensibilité réalisée dans la population per protocole (pazopanib, n = 501 ; sunitinib, n = 494) a montré un HR pour la médiane de PFS de 1,069 [0,910 ; 1,255]. Étant donné le seuil fixé, cette analyse n’a donc pas pu conclure à la non-infériorité du pazopanib par rapport au sunitinib. Concernant les critères secondaires, la SG n’a pas différé entre les deux groupes : 45 % de patients (n = 250) décédés dans le groupe pazopanib versus 46 % (n = 252) dans le groupe sunitinib. La RG a été de 31 % dans le groupe pazopanib versus 25 % dans le groupe sunitinib. Le délai de réponse a été de trois mois dans le groupe pazopanib versus 4,3 mois dans le groupe comparateur. La durée de réponse a été de 13,8 mois dans le groupe pazopanib versus 18 mois dans le groupe comparateur. Les scores d’évaluation de la qualité de vie ont montré une absence de différence sur l’échelle FKSI-19 et des résultats hétérogènes sur les échelles FACIT-F et CTSQ. Une différence statistique pouvait être notée sur une mesure, cependant, sa valeur était parfois en dessous du seuil de pertinence clinique reconnu.

Sarcomes des tissus mous Phase II Une seule étude a été menée par l’European Organisation for Research and Treatment of Cancer (EORTC) sur 142 patients atteints de STM progressifs, non éligibles pour une chimiothérapie ou n’ayant pas rec¸u plus de deux lignes de traitement [11]. L’objectif principal était l’évaluation de la PFS à trois mois, avec une stratification selon différents sous-groupes histologiques (liposarcomes, léiomyosarcomes,

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synovialosarcomes et un groupe hétérogène reprenant le reste des sarcomes). La PFS à trois mois était de 44 % dans le groupe des léiomyosarcomes, 49 % pour les synovialosarcomes, 39 % pour les autres types de sarcomes et 26 % pour les liposarcomes, ce qui a justifié la fermeture rapide de ce dernier bras. Phase III L’étude PAzopanib expLorEd in sofT-Tissue Sarcoma (PALETTE), randomisée, en double insu, a été menée chez des patients atteints d’un STM métastatique, excluant les tumeurs de type GIST et les liposarcomes [12]. Au total, 369 patients adultes atteints d’un STM métastatique ayant progressé malgré au moins une ligne de chimiothérapie par anthracyclines (mais ne dépassant pas 4 lignes préalables) ont été randomisés de manière 2:1 entre le pazopanib (800 mg/j) et un placebo. Cinquante-six pour cent des patients avaient rec¸u deux lignes de traitements préalables ou plus, et 21 %, trois lignes ou plus. Le taux de réponses objectives était de 6 % versus 0 % en faveur du bras pazopanib. Le taux de maladie stable était de 67 % versus 38 % en faveur également du bras pazopanib. La PFS médiane était de 4,6 mois versus 1,6 mois (p < 0,0001), en faveur du pazopanib. Ce bénéfice en termes de PFS, retrouvé dans l’ensemble de la population, fut confirmé dans des sous-types particuliers : léiomyosarcome, synovialosarcome et un sous-groupe de sarcomes d’histologie variée. L’OS, à l’analyse intermédiaire, n’est cependant pas statistiquement significative (12,5 mois versus 10,7 mois, p = 0,25).

Pharmacocinétique Absorption L’absorption du pazopanib est augmentée lors de la prise alimentaire. La biodisponibilité et la vitesse d’absorption orale sont augmentées après l’administration d’un comprimé écrasé par rapport à l’administration d’un comprimé entier [13]. Par conséquent, le pazopanib doit être administré strictement, comme dans les études cliniques, au moins une heure avant ou deux heures après un repas et avalé en entier sans être écrasé, pour éviter un surdosage et des phénomènes de toxicité.

Distribution La liaison du pazopanib aux protéines plasmatiques humaines in vivo est supérieure à 99 %.

Biotransformation Les résultats d’études in vitro ont montré que le métabolisme du pazopanib est médié principalement par le CYP3A4.

Élimination Le pazopanib est éliminé lentement avec une demi-vie moyenne de 30,9 heures. L’élimination se fait principalement Bull Cancer vol. 101 • N◦ 6 • juin 2014

Intérêt du pazopanib dans le traitement des cancers du rein et des sarcomes des tissus mous par les selles, avec une élimination rénale comptant pour moins de 4 % de la dose administrée [14].

Insuffisance rénale Aucun ajustement posologique n’est requis chez les patients ayant une clairance de la créatinine supérieure à 30 mL/min. Aucune donnée n’étant disponible chez les patients ayant une valeur inférieure à 30 mL/min, il est donc conseillé d’être prudent dans cette population de patients.

Insuffisance hépatique Aucune donnée n’est disponible chez les sujets ayant une insuffisance hépatique légère. La posologie du pazopanib doit être réduite à 200 mg une fois par jour chez les sujets ayant une insuffisance hépatique modérée. Il est contre-indiqué chez les patients présentant une insuffisance hépatique sévère [15]. L’inhibition de l’UGT1A1 par le pazopanib est responsable d’une augmentation du taux sérique de bilirubine. Les patients avec un certain polymorphisme pour cet UGT1A1 (syndrome de Gilbert, etc.) peuvent être à plus haut risque de développer une hyperbilirubinémie [16].

Nausées Elles sont rapportées dans 26 à 42 % des cas avec de très rares grades 3 ou 4 (0 à 2 %).

Asthénie Elle est présente dans 19 à 46 % des cas avec 2 à 11 % de grades élevés.

Interactions L’administration concomitante avec des inhibiteurs puissants du CYP3A4 et de la glycoprotéine P (P-gp) doit être évitée en raison du risque d’augmentation de l’imprégnation en pazopanib. Pour les mêmes raisons, le jus de pamplemousse doit être également évité pendant le traitement par pazopanib.

Anomalies biologiques

Elle est retrouvée dans 30 à 63 % des cas avec 4 à 8 % de grades 3 ou 4.

Une élévation des transaminases est très fréquente (24 à 54 %), avec maximum 19 % de grades 3 ou 4. Elle aboutit rarement à un arrêt du traitement. Le bilan biologique hépatique doit être contrôlé avant l’instauration du traitement par pazopanib et au moins une fois toutes les quatre semaines pendant les quatre premiers mois de traitement. Il convient de poursuivre une surveillance périodique après ce délai. Des cas d’hypothyroïdie ont été décrits. Des dosages biologiques de la fonction thyroïdienne sont recommandés préalablement au traitement par pazopanib, et les patients atteints d’hypothyroïdie doivent être traités. Une surveillance biologique de la fonction thyroïdienne doit être réalisée périodiquement. Une myélosuppression majeure est rare : neutropénie/lymphopénie/thrombopénie de grades 3 ou 4 respectivement 1 à 4 %, 4 à 14 % et 1 à 2 %. D’autre part, des cas de diminution de la FEVG et d’insuffisance cardiaque congestive ont été décrits. Les patients doivent être étroitement surveillés afin de détecter d’éventuels signes ou symptômes cliniques d’une insuffisance cardiaque congestive. Un contrôle de la FEVG à l’initiation du traitement, puis périodiquement, est recommandé chez les patients à risque de dysfonctionnement cardiaque. Des cas d’allongement de l’intervalle QT et de torsades de pointes ont également été décrits. Une surveillance par des électrocardiogrammes avant traitement et régulièrement, et le maintien des électrolytes (potassium, magnésium et calcium notamment) dans les valeurs normales sont recommandés. Une protéinurie peut également apparaître ou s’aggraver en cours de traitement. Il est recommandé de réaliser une analyse urinaire avant l’initiation du traitement puis périodiquement. Le traitement par pazopanib doit être arrêté si le patient développe un syndrome néphrotique (protéinurie de grade 4). Des évènements thrombotiques et hémorragiques ont également été décrits.

Peau

Conclusion

Une décoloration des cheveux est observée dans 32 à 43 % des cas.

L’évolution des connaissances en cancérologie a permis de mettre en évidence le rôle fondamental de l’angiogenèse dans

Effets secondaires Les effets secondaires les plus fréquents répertoriés dans la phase I étaient l’HTA, la diarrhée, la décoloration des cheveux et les nausées [6]. Un profil de toxicité similaire a été observé dans les études de phases II et III [8].

HTA L’HTA est un effet indésirable fréquent chez les patients traités par pazopanib. Elle est retrouvée dans 40 à 62 % des cas avec 3 à 29 % de grades 3 ou 4. La pression artérielle doit être bien contrôlée préalablement à l’initiation du traitement par pazopanib. Elle doit être ensuite surveillée rapidement après l’initiation du traitement (au plus tard une semaine après), puis régulièrement au cours du traitement. Des valeurs élevées de pression artérielle (pression artérielle systolique ≥ 150 ou pression artérielle diastolique ≥ 100 mmHg) ont été rapportées en début de traitement (environ 40 % des cas sont survenus avant le neuvième jour de traitement et environ 90 % des cas sont survenus dans les 18 premières semaines). L’HTA doit être traitée rapidement par un traitement antihypertenseur suivie d’une réduction de la dose de pazopanib ou de l’interruption du traitement si elle est justifiée sur le plan clinique (avec possibilité de réinitiation du traitement à une dose réduite après évaluation clinique).

Diarrhée

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T. Brotelle, J.-O. Bay la physiopathologie tumorale et notamment dans le cancer du rein. Les traitements anti-angiogéniques ont révolutionné la prise en charge des patients atteints de ce type de cancer (doublement de la PFS et augmentation des taux de réponses) en comparaison aux traitements d’immunothérapie (interféron ␣ et interleukine 2). Le pazopanib est un inhibiteur de tyrosine kinase. Son action est multicible, visant plusieurs récepteurs impliqués dans l’angiogenèse et particulièrement le VEGFR-2. Ce traitement est indiqué dans la prise en charge des cancers du rein localement avancés ou métastatiques, en première ligne (chez des patients de bon pronostic ou de pronostic intermédiaire) ou après échec d’un traitement par une cytokine. Son utilisation et son développement dans les STM sont liés aux résultats des essais de phase I et phase II. Il est indiqué dans les STM avancés ou métastatiques après échec d’au moins une ligne de chimiothérapie. Le profil de tolérance du pazopanib est sensiblement comparable aux autres inhibiteurs de tyrosine kinase avec cependant quelques effets secondaires distincts (perturbation du bilan biologique hépatique notamment) [17]. Son utilisation est actuellement en cours d’évaluation en situation adjuvante dans les cancers du rein à haut risque de rechute (étude PROTECT) de même que dans d’autres pathologies tumorales, en monothérapie ou associé à divers schémas de chimiothérapie notamment dans le cancer de l’ovaire [18], du sein [19] et du poumon [20].  Liens d’intérêts : les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec cet article.

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The role of angiogenesis in the physiopathology of renal cell carcinoma is fundamental. Strategies targeting angiogenesis have been developed includin...
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