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L’Encéphale (2014) xxx, xxx—xxx

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MÉMOIRE ORIGINAL

Signes neurologiques mineurs dans la schizophrénie précoce Neurological soft signs in early onset schizophrenia S. Bourgou Gaha a,∗,b, S. Halayem Dhouib a,b,c, I. Amado d,e,f, A. Bouden a,b,c a

Service de pédopsychiatrie, hôpital Razi, rue des Orangers, 2010 La Manouba, Tunisie Unité de recherche UR 02/04 : processus cognitifs en pathologie psychiatrique, hôpital Razi, rue des Orangers, 2010 La Manouba, Tunisie c Faculté de médecine de Tunis, université de Tunis El Manar, rue Jbel lakhdhar, Tunis, Tunisie d Service hospitalo-universitaire, hôpital Saint-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France e UMR894, Inserm, laboratoire de physiopathologie des maladies psychiatriques, 2 ter, rue d’Alésia, 75014 Paris, France f Faculté de médecine Paris Descartes, 15, rue de l’école de médecine, 75006 Paris, France b

Rec ¸u le 4 mars 2013 ; accepté le 16 janvier 2014

MOTS CLÉS Schizophrénie précoce ; Signes neurologiques mineurs ; Neurodéveloppement ; Adolescent



Résumé But. — Les objectifs de notre étude étaient de déterminer la prévalence, les scores et la nature des signes neurologiques mineurs (SNM) chez des adolescents présentant une schizophrénie à début précoce et de rechercher les corrélations entre ces marqueurs et les caractéristiques démographiques, cliniques et thérapeutiques des patients. Méthodologie. — Il s’agit d’une étude cas-témoins portant sur 12 patients appariés par âge et par niveau scolaire à 12 témoins sains sans antécédents personnels, ni familiaux psychiatriques. La procédure d’évaluation a consisté en la passation des échelles cliniques des symptômes positifs et négatifs (PANSS), et de l’échelle des SNM de Krebs et al. (2000). Résultats. — L’âge moyen de notre population était de 14,7 ans. La prévalence des SNM était de 100 % avec un score total moyen de 29,3 ± 4,1 contre 7 ± 1,3 chez les témoins. Des corrélations négatives entre l’âge et le score total des SNM (p = 0,05) et celui de l’intégration sensorielle (p = 0,04) ont été trouvées. Aucune corrélation n’a été trouvée entre les différents scores de l’échelle des SNM et les caractéristiques cliniques et thérapeutiques des patients. Conclusion. — La prévalence et les scores élevés des SNM chez les jeunes atteints de schizophrénie précoce traduiraient l’existence d’anomalies structurelles cérébrales, elles-mêmes

Auteur correspondant. Adresse e-mail : soumaya [email protected] (S. Bourgou Gaha).

http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.005 0013-7006/© L’Encéphale, Paris, 2014.

Pour citer cet article : Bourgou Gaha S, et al. Signes neurologiques mineurs dans la schizophrénie précoce. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.005

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S. Bourgou Gaha et al. séquelles de perturbations du développement neurologique précoce, ce qui serait en faveur de l’hypothèse neurodéveloppementale pour cette pathologie. © L’Encéphale, Paris, 2014.

KEYWORDS Early onset schizophrenia; Neurological soft signs; Neurodevelopment; Adolescent

Summary Introduction. — Neurological soft signs (NSS) are subtle neurological abnormalities that cannot be linked to the achievement of a specific region of the central nervous system and which are not part of a particular neurological syndrome. These signs are observed in the case of diseases supporting the neurodevelopmental model such as schizophrenia in general and its early form defined notably by an age of onset of less than 18 years. Indeed, the NSS belong to a set of clinical, cognitive, electrophysiological and neuroanatomical markers reflecting neurodevelopmental brain abnormalities in patients with schizophrenia. Objective. — The objectives of our study were to determine the prevalence, the scores, and the nature of neurological soft signs (NSS) in adolescent patients suffering from early onset schizophrenia diagnosis in comparison to healthy controls, and to explore the correlations between NSS and the demographic, clinical and therapeutic features of these patients. Materials and methods. — Twelve adolescents were recruited in the Child Psychiatry Department at the Razi Hospital (Tunisia), with the diagnosis of schizophrenia according to the DSM-IV supplemented by the Kiddie SAD PL. They were matched by age and educational level with twelve healthy controls without psychiatric family or personal history. The clinical status of the patients was assessed using the Positive and Negative Syndrome Scale (PANSS). Neurological soft signs (NSS) were rated with the Neurological Soft Signs Examination (NSSE) by Krebs et al. (2000) for the two groups. This scale is composed of 23 items exploring motor coordination, motor integrative function, sensory integration, involuntary movements and quality of lateralization. Results. — The mean age of our population was 14.7 years. The average age of onset of the disease was 12.2 years. The sex-ratio was 1.4. Educational level was 7.4 years. The PANSS mean total score was 74.3. The mean daily dose, in chlorpromazine equivalents, was 523.9 mg/day. Four patients received a strict monotherapy of antipsychotics, while the other patients were receiving an association of two neuroleptics. The prevalence of NSS was 100% (cut-off point = 11) with a mean total score of 29.3 ± 4.1. The highest score was for the motor coordination (10.1). As for the control group, the mean total score was 7 ± 1.3. A highly significant difference was found between patients and controls for all sub-scores of NSS. Negative correlations were found in patients, between age and neurological soft signs total score (P = 0.05; r = −0.57) and also with sensory integration score (P = 0.04; r = −0.58). The NSS total score was also correlated with low educational level (P = 0.03; r = −0.61). There was no correlation between neurological soft signs scores and PANSS scores or the daily dose of antipsychotics. Conclusion. — The prevalence and NSS scores are high among young people with early onset schizophrenia diagnosis illustrating the existence of structural abnormalities of the brain, themselves consequences of early neurodevelopmental disturbances, which would support the neurodevelopmental hypothesis concerning this pathology. © L’Encéphale, Paris, 2014.

Introduction Les signes neurologiques mineurs (SNM) sont de subtiles anomalies neurologiques qui ne peuvent pas être reliées à l’atteinte d’une région spécifique du système nerveux central et qui ne font pas partie d’un syndrome neurologique particulier [1,2]. Ils traduisent un dysfonctionnement du développement précoce du système nerveux central en rapport avec une altération précoce du développement du neuroectoderme [3,4] survenant au cours du premier trimestre et au début du second trimestre de la gestation. Ces anomalies sont souvent regroupées en catégories, variables d’un auteur à l’autre [1,5—8], les plus fréquentes étant les fonctions sensorielles, intégratives, la coordination motrice,

les séquences de mouvements complexes et les réflexes développementaux. Ces signes sont retrouvés dans des pathologies répondant au modèle neurodéveloppemental dont la schizophrénie en général et qui dans sa forme précoce, définie par un âge de début inférieur à 18 ans [9], est la plus illustratrice. En effet, les SNM entreraient ainsi dans le cadre d’un ensemble de marqueurs cliniques, cognitifs, électrophysiologiques et neuroanatomiques [10—13] traduisant des anomalies du neurodéveloppement cérébral chez les patients atteints de schizophrénie. Toutes les études de prévalence ont montré, quel que soit l’outil de mesure, une plus grande fréquence de SNM chez les patients souffrant de schizophrénie (50 à 65 %), comparés aux sujets sains (5 %) avec une plus grande

Pour citer cet article : Bourgou Gaha S, et al. Signes neurologiques mineurs dans la schizophrénie précoce. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.005

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prévalence en cas d’installation précoce de la pathologie [1,2,14] et ce indépendamment du genre [2]. Ceci a été également noté aussi bien chez les sujets présentant un premier épisode psychotique [15,16] que chez les sujets atteints de schizophrénie naïfs de tout traitement [17,18]. Les apparentés sains de sujets atteints ainsi que ceux à haut risque de développer une schizophrénie présenteraient également des scores élevés de SNM par rapport aux témoins [19—22]. Les objectifs de notre étude étaient de déterminer la prévalence, les scores, et la nature des SNM chez un groupe d’adolescents présentant une schizophrénie précoce en les comparant à un groupe de témoins et de rechercher des corrélations entre ces marqueurs et les caractéristiques sociodémographiques, cliniques et thérapeutiques des patients.

comporte 33 items composés de 23 signes neurologiques mineurs avec quatre niveaux de cotations (de 0 à 3), regroupés en cinq facteurs : coordination motrice, intégration motrice, intégration sensorielle, qualité de latéralisation et mouvements involontaires, ainsi que dix signes extrapyramidaux utilisant les items de l’échelle de Simpson et Angus [25] et complétée par l’échelle AIMS [26]. Pour les patients, l’évaluation clinique a porté sur la revue du dossier médical et la passation de la Positive and Negative Syndrome Scale (PANSS) [27].

Population et méthodes Population Il s’agit d’une étude prospective de type cas-témoins réalisée dans le service de pédopsychiatrie de l’hôpital Razi à la Manouba (Tunisie). Les patients ont été recrutés parmi les patients hospitalisés ou consultants en ambulatoire et portant le diagnostic de schizophrénie selon les critères du DSM-IV [23], diagnostic complété par la passation d’un questionnaire standardisé semi-structuré Kiddie SAD PL [24]. Le groupe de témoins a été recruté parmi les élèves scolarisés dans un collège de la ville de Sousse (Tunisie). Ces sujets ont été appariés un par un aux patients selon l’âge et le niveau scolaire. Les critères d’exclusion pour les sujets appartenant aux deux groupes étaient l’existence d’un retard mental, d’une pathologie neurologique associée ou la prise de toxiques. Les témoins ayant des antécédents psychiatriques de premier ou de deuxième degré n’ont pas été inclus dans l’étude. Un consentement éclairé de la part des participants et de leurs parents a été obtenu pour la participation à l’étude et aux différentes épreuves.

Statistiques L’analyse statistique a été faite par le logiciel SPSS 18.0. Elle a consisté en une analyse descriptive des différentes variables et une analyse analytique par l’utilisation de tests non paramétriques : le test de Mann-Whitney pour la comparaison entre les deux groupes et le coefficient de corrélation de Spearman pour rechercher les corrélations entre les scores des SNM et les variables démographiques et cliniques, avec un indice de significativité p < 0,05.

Résultats Caractéristiques démographiques et cliniques L’échantillon était formé de 12 patients atteints de schizophrénie précoce avec une moyenne d’âge de 14,7 ans (Tableau 1). L’âge moyen de début de la maladie était de 12,2 ans. Le groupe des patients était composé de 7 garc ¸ons et 5 filles avec une sex-ratio de 1,4, alors que celui des témoins était formé de 6 garc ¸ons pour 6 filles. Le niveau scolaire pour les deux groupes était de 7,4 ± 1,3 années. Quatre patients ont bénéficié d’un traitement antipsychotique en monothérapie alors que les autres patients étaient sous bithérapie, avec une dose moyenne journalière de 523,9 mg/j en équivalent chlorpromazine. Le score total moyen de la PANSS était de 74,3 ± 16,9 avec des extrêmes entre 60 et 115.

Évaluation Pour l’ensemble des sujets inclus, la procédure d’évaluation a consisté en le recueil des données sociodémographiques et anamnestiques et la passation de l’échelle des signes neurologiques mineurs de Krebs et al. (2000) [1]. L’échelle Tableau 1

Prévalence et scores des signes neurologiques mineurs La prévalence des NSS était de 100 % chez nos patients en adoptant le score seuil de 11 [1] (Tableau 2). Le score total

Caractéristiques démographiques et cliniques des adolescents atteints de schizophrénie précoce et de leurs témoins.

Variables

Patients (DS)

Témoins (DS)

p

Âge (années) Sexe (masculin/féminin) Niveau d’étude (années) Durée de la maladie (mois) Équivalent en chlorpromazine (mg/j) PANSS positif PANSS négatif PANSS désorganisé PANSS général PANSS total

14,7 (± 1,7) 7/5 7,4 (± 1,3) 30 (± 6) 523,8 16,7 (± 6) 22 (± 7) 9,8 (± 2,3) 33,5 (± 11,3) 74,3 (± 16,9)

14,74 (1,5) 6/6 7,4 — — — — — — —

> 0,05 > 0,05

Pour citer cet article : Bourgou Gaha S, et al. Signes neurologiques mineurs dans la schizophrénie précoce. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.005

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S. Bourgou Gaha et al. Tableau 2 Prévalences et scores des signes neurologiques chez les patients adolescents avec une schizophrénie précoce.

Total des SNM Coordination motrice (Cm) Intégration motrice (Im) Intégration sensorielle (Is) Mouvements anormaux (Ma) Latéralisation (L) Signes extrapyramidaux AIMS

Patients

Témoins

p

29,3 (± 4,1) 10,1 (± 1,1)

7 (± 1,3) 2,3 (± 0,9)

< 10−3 < 10−3

8,3 (± 1)

2 (± 0,8)

< 10−3

8,4 (± 2,1)

2,2 (± 1,01)

< 10−3

0,9 (± 0,8)

0,3 (± 0,5)

< 10−3

1,5 (± 1,3) 0,3

0,3 (± 0,5) 0

0,009 > 0,05

0,1

0

> 0,05

témoins a été retrouvée pour tous les sous-scores des signes neurologiques mineurs. Les signes extrapyramidaux ont été retrouvés selon la Simpson Angus de même que les mouvements anormaux dans les deux populations cliniques selon l’AIMS.

Corrélations entre signes neurologiques mineurs et caractéristiques des patients L’âge était inversement corrélé au score total des SNM (p = 0,05 ; r = −0,57) et à celui de l’intégration sensorielle (p = 0,04 ; r = −0,58). Le score total était également corrélé au bas niveau scolaire (p = 0,03 ; r = −0,61). Aucune corrélation n’a été trouvée entre les différents scores de l’échelle des SNM et les autres caractéristiques cliniques (âge, scores de la PANSS) (Tableau 3). Aucune corrélation n’a été trouvée entre les scores à la NSS avec les doses de neuroleptique exprimées en équivalent chlorpromazine.

Discussion moyen des SNM était significativement plus élevé chez les patients que chez les témoins sains (p < 10−3 ). La moyenne du score total dans le groupe des patients, était de 29,3 avec une déviation standard de 4,1. Les extrêmes variaient de 23 à 37. Quant au groupe des témoins, la moyenne du score total était de 7 avec une déviation standard de 1,3 avec des extrêmes allant de 4 à 8. Le sous-score le plus élevé, chez les patients, concernait les anomalies de la coordination motrice avec un score moyen de 10,1 (± 1,1) (Tableau 2). Une différence nettement significative entre patients et

Tableau 3

Dans ce travail, nous avons étudié les particularités des signes neurologiques mineurs chez des sujets atteints de schizophrénie précoce. Ainsi, des scores élevés des signes neurologiques mineurs ont été trouvés chez ces patients par rapport à ceux des témoins. Ce constat est en accord avec les résultats de la littérature tels que rapportés par la revue de Krebs et Mouchet réalisée en 2007 [2] et celle de Varambally et al. en 2012 [28]. Par ailleurs, Mittal et al. [29] ont noté dans une étude réalisée en 2007 que des

Corrélation entre SNM et variables cliniques et thérapeutiques. Âge

Niveau scolaire

PANSS positif

PANSS négatif

PANSS PANSS désorganisé général

PANSS total

Dose médicamenteuse en équivalent chlorpromazine

0,05* −0,57

0,03* −0,61

0,27 0,34

0,37 0,28

0,50 0,21

0,48 0,22

0,48 0,22

0,65 0,14

Coordination motrice p 0,63 r 0,15

0,34 −0,30

0,53 −0,19

0,92 −0,02

0,92 0,03

0,58 −0,17

0,8 −0,04

0,24 0,38

Intégration motrice p r

0,32 −0,30

0,24 −0,36

0,07 0,53

0,44 0,04

0,99 0,00

0,90 0,03

0,31 0,31

0,69 0,14

Intégration sensorielle p 0,04* r −0,58

0,07 −0,53

0,36 0,28

0,42 0,25

0,44 0,24

0,30 0,32

0,52 0,20

0,67 0,15

Mouvements anormaux p 0,80 r 0,08

0,67 −0,13

0,95 0,02

0,37 0,28

0,70 0,09

0,64 0,15

0,23 0,37

0,60 0,16

Latéralisation p r

0,14 −0,45

0,97 −0,01

0,21 0,38

0,60 0,16

0,66 0,14

0,68 0,13

0,44 0,05

Total des SNM p r

*

0,07 −0,58

p ≤ 0,05.

Pour citer cet article : Bourgou Gaha S, et al. Signes neurologiques mineurs dans la schizophrénie précoce. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.005

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scores élevés de SNM, sans préciser le seuil, sont prédicteurs d’une mauvaise réponse au traitement neuroleptique. Ces deux caractéristiques, à savoir SNM élevés et mauvaise réponse thérapeutique, sont des caractéristiques rapportées dans la littérature en cas de schizophrénie précoce [9]. Le recours à une bithérapie dans huit cas sur douze dans notre échantillon est en faveur d’une réponse thérapeutique insuffisante, cependant un suivi longitudinale de l’échantillon permettrait de confirmer ce constat. Pour étudier la particularité des SNM en cas d’installation de la pathologie schizophrénique avant l’âge adulte, quelques travaux se sont intéressés à étudier ces anomalies dans des populations d’enfants ou d’adolescents et ont tous noté l’intensité et la sévérité des SNM dans cette tranche d’âge [30—32]. D’autres études ont étudié les SNM dans des populations de sujets adultes portant le diagnostic de schizophrénie précoce et ont rapporté l’intensité de ces signes [14,33]. Biswas et al. [33] ont comparé les SNM dans trois populations de sujets adultes atteints de schizophrénie : à début dans l’enfance, dans l’adolescence et à l’âge adulte et ont conclu que plus l’installation du trouble est précoce, plus l’intensité de SNM augmente. La prévalence des SNM dans notre travail était 100 %, un score beaucoup plus élevé que celui retrouvé chez les sujets adultes (68 à 98 %) avec la même échelle [2,28]. Ainsi, l’intensité des SNM retrouvés en cas de schizophrénie précoce est une spécificité de cette forme de la pathologie et renforce le caractère neurodéveloppemental de cette dernière. Nous avons trouvé des différences significatives entre patients et témoins concernant les scores de la coordination motrice, de l’intégration motrice et de l’intégration sensorielle. Par ailleurs, dans notre étude, les anomalies de la coordination motrice étaient les SNM les plus fréquents chez les patients schizophrènes, suivies par les anomalies d’intégration sensorielle et motrice. Nos résultats rejoignent ceux de la littérature [1,19]. On peut donc supposer, que parmi les SNM, les troubles de la coordination motrice sont plus spécifiques de la maladie schizophrénique comme en témoignent les résultats d’une étude récente qui a quantifié les anomalies de la coordination motrice dans cette pathologie [34]. Ce facteur regroupe de nombreux signes pouvant être rapportés à une dimension cérébelleuse (ataxie, marche talon—pointe, épreuve doigt nez, marche. . .), témoignant ainsi d’une atteinte du cervelet dans la schizophrénie. Cette atteinte est non exclusive et pourrait s’inscrire dans le cadre d’une atteinte globale du circuit cortico-cérebelleux-thalamo-cortical impliqué dans la schizophrénie [35,36]. Nous n’avons trouvé aucune corrélation entre la symptomatologie clinique et les anomalies neurologiques mineures. Nos résultats ne sont pas concordants avec ceux des travaux antérieurs. Les facteurs de la PANSS fréquemment retrouvés dans la littérature en corrélation avec le score total ou les sous-scores des SNM sont le facteur négatif et le facteur de « désorganisation » [2,19,28,32,36—39]. Quelques rares études ont rapporté des corrélations avec le facteur positif [29,39]. L’absence de corrélations entre SNM et les facteurs cliniques pourrait s’expliquer par la taille réduite de notre population. L’évaluation de la réponse au traitement chez les populations ayant des SNM élevés pourrait être mieux évaluée par un suivi longitudinal de notre population. Nous n’avons pas trouvé de corrélations entre les scores de SNM et

la posologie journalière du traitement antipsychotique, ce qui est en accord avec les données de la littérature [2,16]. Le score total des SNM était corrélé d’une manière négative à l’âge. Ceci pourrait être expliqué par le fait qu’il y ait un « polissage » relatif des signes neurologiques mineurs au cours de l’adolescence au fur et à mesure du développement chez les témoins sains comme chez les sujets atteints de schizophrénie [32,40]. Enfin, nous avons trouvé une corrélation entre le score total élevé de SNM avec le faible niveau d’éduction traduisant ainsi, comme rapporté dans la littérature [40], le lien inverse entre le niveau cognitif et la prévalence des signes neurologiques mineurs. Notre travail présente des limites telles que la taille réduite de notre population expliquée largement par la faible prévalence de la schizophrénie précoce [9] et également l’absence d’un suivi longitudinal de nos patients à long terme. La prise en compte de ces limites dans des travaux ultérieurs nous permettra de mieux cerner la spécificité des signes neurologiques mineurs lors de l’installation précoce de la pathologie schizophrénique.

Conclusion Les signes neurologiques mineurs sont considérés comme un marqueur clinique de la pathologie schizophrénique. La prévalence et les scores élevés des SNM chez les jeunes atteints de la forme précoce de cette maladie traduiraient l’existence d’anomalies structurelles cérébrales, elles-mêmes séquelles des perturbations du développement neurologique précoce, ce qui serait en faveur de l’hypothèse neurodéveloppementale pour cette pathologie.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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Pour citer cet article : Bourgou Gaha S, et al. Signes neurologiques mineurs dans la schizophrénie précoce. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.005

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Pour citer cet article : Bourgou Gaha S, et al. Signes neurologiques mineurs dans la schizophrénie précoce. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.01.005

[Neurological soft signs in early onset schizophrenia].

Neurological soft signs (NSS) are subtle neurological abnormalities that cannot be linked to the achievement of a specific region of the central nervo...
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