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MYCMED-506; No. of Pages 10 Journal de Mycologie Médicale (2014) xxx, xxx—xxx

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DOSSIER ONYCHOMYCOSES/ONYCHOMYCOSIS

Méthodes de diagnostic d’une onychomycose§,§§ Mycological diagnosis of onychomycosis D. Chabasse *, M. Pihet ´ , centre hospitalier universitaire, Laboratoire de parasitologie-mycologie, institut de biologie en sante 4, rue Larrey, 49933 Angers cedex 9, France

MOTS CLÉS Onychomycoses ; Dermatophytes ; Pseudodermatophytes ; Levures ; Moisissures ; Diagnostic clinique et mycologique

Résumé Les onychomycoses représentent environ 50 % des causes de pathologie unguéale. Les dermatophytes (notamment Trichophyton rubrum et Trichophyton interdigitale) sont les principaux agents isolés au niveau des pieds. Les levures du genre Candida (Candida albicans, Candida parapsilosis,. . .) prédominent aux mains, associées le plus souvent à un périonyxis. En dehors des classiques dermatophytes et des levures, d’autres champignons sont parfois isolés d’ongles pathologiques. Parmi eux, on trouve surtout des espèces appartenant aux genres Scopulariopsis, Aspergillus et Fusarium, dont le pouvoir pathogène doit être précisé. D’autres moisissures ayant une affinité particulière pour la kératine (pseudodermatophytes) sont considérées comme de vrais pathogènes. Il s’agit d’espèces issues de régions tropicales ou subtropicales comme Neoscytalidium dimidiatum (ex Scytalidium dimidiatum) ou de pays tempérés ou froids comme Onychocola canadensis qui est impliqué dans des onyxis des pieds chez le sujet âgé. Une approche pluridisciplinaire, clinico-biologique, est nécessaire pour confirmer la mycose et identifier l’espèce en cause. Cette revue comparative des différentes méthodes de diagnostic souligne l’intérêt de l’examen histologique de l’ongle, ainsi que celui des techniques de biologie moléculaire, qui s’avèrent très contributives au diagnostic d’onychomycose. L’interprétation des résultats s’efforcera de démontrer que le champignon isolé du prélèvement d’ongles pathologiques est bien à l’origine des lésions. # 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

DOIs des articles originaux : http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.007, http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.005, http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.008, http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.009, http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.003, http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.004. § D’après une conférence donnée à Rabat le 26 octobre 2013, à l’occasion des 1res journées franco-maghrébines de parasitologie et mycologie. §§ Cette revue générale fait suite au symposium sur les onychomycoses (conférences) dans le cadre des journées scientifiques d’hiver de la Société française de mycologie médicale les 29 et 30 novembre 2013 à Paris (CHU Cochin-Port Royal). * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Chabasse). http://dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.006 1156-5233/# 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Chabasse D, Pihet M. Méthodes de diagnostic d’une onychomycose. Journal De Mycologie Médicale (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.006

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D. Chabasse, M. Pihet

KEYWORDS Onychomycosis; Dermatophytes; Pseudodermatophytes; Yeasts; Molds fungi; Clinical and mycological diagnostic

Summary Onychomycosis represents about 50% of ungueal pathology. Dermatophytes (especially Trichophyton rubrum and Trichophyton interdigitale) are the main species involved in tinea pedis. Yeasts of the Candida (Candida albicans, Candida parapsilosis,. . .) genus are predominant on hands and very often associated with ungueal disease and perionyxis. Fungi other than the classic dermatophytes and yeasts can be rarely isolated from nail diseases. Among them, species belonging to Scopulariopsis, Aspergillus and Fusarium genus are mainly found, but their involvement in the disease must be proved. Other fungi, presenting a special affinity to keratin (pseudodermatophytes), such as Neoscytalidium dimidiatum (ex Scytalidium dimidiatum) from tropical and subtropical areas and Onychocola canadensis from Northern America and Europe, are considered as real pathogens in nail diseases. A multidisciplinary approach, including clinicians and biologists, is required to confirm the mycosis. This comparative review emphasizes the importance of histological examination, as well as molecular approaches, which are very contributive to the diagnosis of onychomycosis. The role of the laboratory is to identify at the species level the fungus isolated from nail scrapings and to show its involvement in the ungueal lesions. # 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction La fréquence des onychomycoses augmente avec l’âge. Rares chez l’enfant, ces infections sont beaucoup plus fréquentes chez les personnes âgées. Leur prévalence est ainsi estimée entre 6 et 9 % dans la population générale, et entre 14 et 18 % chez les patients vus en consultation de dermatologie [1,14,15,18,54]. Elle atteindrait 48 % chez les sujets plus de 70 ans [32]. La fréquence des onychomycoses est également plus élevée chez les sportifs. Mais onychopathie n’est pas synonyme d’onychomycose, et la réalisation d’un prélèvement biologique à visée diagnostique est incontournable pour poser un diagnostic étiologique [21]. Le biologiste se voit ainsi fréquemment confier la tâche de confirmer la mycose et d’en préciser l’agent responsable. Un traitement antifongique adapté sera le plus souvent instauré en fonction des résultats de ces analyses [22] (cf. traitement des onychomycoses, par M. Feuilhade de Chauvin). Schématiquement, on peut distinguer trois groupes de champignons susceptibles d’être incriminés dans la survenue d’une onychomycose : les dermatophytes, les levures et les moisissures (Tableau 1). Ces différents champignons sont responsables de présentations cliniques variées (cf. nouvelle classification clinique des onychomycoses, par R. Baran). La démarche diagnostique, qui tient compte des lésions cliniques, sera complétée par une analyse mycologique et/ ou histologique. L’étude anatomopathologique de l’ongle est considérée comme la technique de référence, mais elle est en réalité peu pratiquée au regard de la demande importante d’analyses et en l’absence de pratique anatomopathologique par les laboratoires de biologie médicale. Il est parfois avancé que les examens à visée mycologique représentent un coût important pour la Sécurité sociale, surtout au regard du caractère généralement bénin des onychomycoses, et que les laboratoires polyvalents sont dans l’ensemble peu performants pour ces analyses [44]. Mais, il faut garder à l’esprit que le coût des analyses mycologiques reste relativement faible par rapport au coût d’un traitement antifongique inutile sur une dystrophie unguéale d’origine mécanique ou un ongle psoriasique. D’autre part, des traitements antifongiques de plusieurs mois par voie systémique peuvent entraîner des effets secondaires non

négligeables, d’où la nécessité de disposer d’un diagnostic de certitude avant de mettre en place ce type de traitement. Pour pallier les difficultés diagnostiques, il existe des approches non invasives qui permettent d’évoquer une mycose devant un aspect dystrophique de l’ongle et de proposer ainsi un prélèvement à visée mycologique. Il est fortement recommandé aux biologistes, ainsi qu’aux médecins prescripteurs de recherches de mycose unguéale, de suivre les recommandations du groupe de travail initiées par la Société française de dermatologie et validées par la Société française de mycologie médicale [1].

Examens non invasifs Dermoscopie Le dermatoscope, outil fréquemment utilisé par le dermatologue, notamment dans le cadre de la surveillance des nævi, peut permettre dans certains cas d’évoquer une atteinte fongique. En effet, dans l’étude italienne de Piraccini et al. [43], la présence d’un aspect « spiculé » visible dans l’épaisseur de l’ongle, notamment au cours des lésions superficielles ou disto-latérales, serait associée à une positivité beaucoup plus importante de l’examen mycologique. Cependant, cette technique reste globalement insuffisamment contributive au diagnostic d’une onychomycose.

Microscopie confocale in vivo Préconisée par Piérard et al. [41], la microscopie confocale permet de visualiser la présence du champignon à l’aide d’un microscope dont l’objectif est posé directement sur l’ongle du patient [28,34,47,48]. Dans une étude rassemblant 42 patients suspects d’onychomycose, sa spécificité, sensibilité, valeur prédictive positive et valeur prédictive négative étaient respectivement de 100 %, 37,5 %, 100 % et 72 % [40]. Dans l’étude de Rothmund et al. [47], les auteurs trouvaient cependant une sensibilité de 79,5 % et une spécificité de 81 %. Si l’excellente spécificité de cette technique est reconnue, en revanche sa sensibilité reste insuffisante. Cette approche diagnostique, qui nécessite un appareillage coûteux, demeure très peu utilisée en pratique.

Pour citer cet article : Chabasse D, Pihet M. Méthodes de diagnostic d’une onychomycose. Journal De Mycologie Médicale (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.006

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Méthodes de diagnostic d’une onychomycose

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Tableau 1 Principales espèces fongiques isolées d’un ongle pathologique selon la localisation et l’origine, d’après [1]. Most frequent fungal species isolated from pathological nails, according to localisation and origin, adapted from [1]. Espèces ou genres

Dermatophytes Habituels Trichophyton rubrum Trichophyton interdigitale Rares Epidermophyton floccosum Trichophyton soudanense Trichophyton violaceum Trichophyton tonsurans Microsporum audouinii Microsporum canis Moisissures Habituelles Scopulariopsis brevicaulis Acremonium sp. (A. strictum) Fusarium sp. Rares Aspergillus sp. (A. versicolor, A. candidus, A. sydowi, A. terreus, A. flavus, A. sclerotium. . .) Paecilomyces sp. (P. lilacinus) Pseudodermatophytes Onychocola canadensis Neoscytalidium dimidiatum, Scytalidium hyalinum Levures Habituelles Candida albicans Candida parapsilosis Candida guilliermondii Rares Cryptococcus sp. Trichosporon sp. Autres espèces du genre Candida

Localisation

Origine principale

Mains

Pieds

++ +

+++ +++

Homme a Homme a

+ +++ +++ +++ +++ +++

     

Homme a Homme a Homme a Homme a Homme a Chat, chien

++ ++ ++

+++ +++ ++

Sol Sol Sol, plantes

++

++

Sol, plantes

++

++

Sol

 +

+++ +

Sol ? eau ? Sol, plantes (régions tropicales)

+++ +++ 

+ + +

Homme Homme Homme

+ + +

  

Sol Homme Homme

(+++) fréquent, (++) peu fréquent, (+) rare, () exceptionnel. a Auto-inoculation.

Tomographie par cohérence optique (OCT) L’OCT permet d’explorer complètement l’épaisseur de la tablette unguéale [36,47]. Grâce à la bonne résolution de la technique, les structures fongiques (filaments mycéliens, spores,. . .) peuvent être mises en évidence. Cette technique posséderait une sensibilité de plus de 90 % [47]. Il existerait également une bonne corrélation entre les lésions fongiques observées sur une coupe histologique de l’ongle et les images visualisées en temps réel par l’OCT [3]. Toutefois, en raison de son coût prohibitif, cette technique reste de pratique encore très limitée.

Examen anatomopathologique La biopsie de l’ongle demeure le « gold standard » dans le diagnostic d’une onychomycose. La technique d’Achten, qui

fait appel à la coloration par l’acide périodique et réactif de Schiff (PAS), présente ainsi une sensibilité de 85 % [4,31]. L’étude histologique permet non seulement de poser un diagnostic de certitude, mais aussi de comprendre l’envahissement fongique qui est à la base de la classification des onychomycoses et de la conduite thérapeutique [7,19]. Les faux positifs ou faux négatifs de l’examen mycologique peuvent ainsi être redressés par un examen histologique de la tablette unguéale [41]. Cependant, l’étude histologique de l’ongle reste peu prescrite en France. Le prélèvement doit être réalisé par un opérateur expérimenté. Les fragments d’ongle (ou « galette ») peuvent être conservés et acheminés dans un tube sec sans fixateur. Au laboratoire d’anatomopathologie, les échantillons seront montés dans de la paraffine, puis découpés en tranches de 6 mm d’épaisseur environ avant d’être colorés au PAS et/ou par imprégnation argentique de Gomori-Grocott [39], voire par le bleu de toluidine [41]. Certains auteurs proposent, par

Pour citer cet article : Chabasse D, Pihet M. Méthodes de diagnostic d’une onychomycose. Journal De Mycologie Médicale (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.006

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ailleurs, de fixer le disque de kératine dans une solution aqueuse à 5 % de formol, puis de réaliser des coupes plus fines (de 2 à 3 mm d’épaisseur). Classiquement, en cas d’invasion par les dermatophytes, les filaments mycéliens sont assez longs, rectilignes, et le plus souvent orientés parallèlement à la surface de l’ongle. Leur calibre est en général régulier, et la coloration au PAS est uniforme. L’invasion par des levures montre plutôt du pseudomycélium court, plus ou moins septé, ainsi que des blastospores bourgeonnantes. Enfin, pour les champignons filamenteux non-dermatophytiques (ou moisissures), les structures fongiques apparaissent plus irrégulières et assez polymorphes [42]. Parfois, outre la présence de fins filaments perforateurs, on peut observer des images plus spécifiques comme une tête aspergillaire dans la kératine hyponychiale pour Aspergillus, ou des spores en montgolfière pour Scopulariopsis brevicaulis. En cas d’infection par des phaeohyphomycètes comme Neoscytalidium ou les Alternaria dont la paroi est mélanisée, une paroi épaisse et brunâtre est visible sur les coupes colorées à l’Hémalun-Eosine-Safran (HES). L’examen anatomopathologique de l’ongle permet de préciser la localisation du champignon et d’observer sa voie d’entrée. Il peut également révéler des infections mixtes associant des champignons différents (dermatophytes et moisissures) dans le même site, ou au niveau de sites différents. Mais surtout, en cas de discordance entre un examen direct négatif et une culture positive à moisissure, il permettra de distinguer une contamination « en surface » d’une réelle infection [41]. Il est également possible, grâce à l’étude de la totalité de l’épaisseur de l’ongle, de mettre en évidence une localisation médio-unguéale que l’on observe dans la variété « endonyx » du parasitisme à Trichophyton soudanense et Trichophyton violaceum, et qui peut échapper à la seule étude mycologique [41]. L’analyse informatisée des images permet également d’apprécier la taille de l’inoculum fongique, ce qui peut influer sur l’attitude thérapeutique. Ainsi, une avulsion chimique ou mécanique est nécessaire préalablement au traitement médical d’un dermatophytome de l’ongle. La quantité de kératine parasitée doit en effet être réduite au maximum afin d’accélérer la guérison [7]. L’utilisation d’anticorps monoclonaux (notamment dirigés contre des antigènes de Trichophyton rubrum) peut permettre d’identifier l’espèce en cause, mais cette technique est peu utilisée en pratique [6,29].

Examen mycologique L’examen mycologique reste la méthode la plus pratiquée et la plus accessible aux laboratoires de biologie médicale. Un groupe de travail pluridisciplinaire, issu des Sociétés françaises de dermatologie et de mycologie médicale et associant dermatologues, médecins généralistes, mycologues et podologues, propose la réalisation d’un prélèvement à visée mycologique de manière systématique, avant tout traitement local et a fortiori systémique. Il recommande, par ailleurs, de réaliser cet examen en suivant une technique rigoureuse et dans un laboratoire ayant l’habitude de ce type de prélèvements. Le laboratoire doit notamment fournir les résultats d’un examen direct et d’une culture [1].

Le prélèvement est une étape essentielle, qui conditionne la réussite de l’analyse mycologique. Il sera réalisé idéalement sur des ongles bien essuyés afin d’éliminer une contamination par des moisissures de l’environnement, et à distance de tout traitement antifongique local ou général afin d’éviter des faux négatifs en culture [23]. Une fenêtre thérapeutique d’environ 3 mois pourra ainsi être proposée après un traitement systémique, ou par un vernis ou une solution filmogène. Lorsque seule une crème antifongique a été appliquée, la fenêtre thérapeutique peut être réduite à 15 jours. Si le prélèvement est réalisé au sein du laboratoire, il est préférable qu’il soit effectué par un biologiste expérimenté [16]. À ce propos, des formations en mycologie médicale, qui incluent le diagnostic des onychomycoses, sont proposées aux biologistes et techniciens des laboratoires de biologie médicale. Ces formations sont à l’initiative de structures universitaires (CHU, facultés de médecine et de pharmacie), d’organismes de formation continue (BioForma, BioFormation), ou de centres de formation des industriels du réactif et des milieux de cultures (bioMérieux, Bio-Rad,. . .) [17].

Interrogatoire du patient Il existe un intérêt particulier pour le biologiste de prélever lui-même le patient. En effet, outre la « fidélisation » de sa patientèle, cet acte lui permet de préciser :  le siège de l’onychomycose ;  aux ongles des pieds, dermatophytes (au premier rang desquels on trouve T. rubrum) et pseudodermatophytes (Neoscytalidium dimidiatum et Onychocola canadensis) sont le plus souvent isolés, tandis qu’aux ongles des mains ce sont les levures du genre Candida qui prédominent. Dans les deux cas, on peut retrouver des moisissures qui colonisent le plus souvent un ongle pathologique (cf. onychomycoses à moisissures), ainsi que des levures commensales appartenant aux genres Trichosporon ou Rhodotorula ;  la sémiologie de cette onychomycose. On notera une atteinte disto-latérale, proximale, superficielle ou totale, ainsi que la présence ou non d’un périonyxis, fréquemment observé au cours des candidoses mais parfois aussi dans les onychomycoses à Fusarium ou Aspergillus, mais en règle général absent des onyxis à dermatophytes [8,10] :  l’anamnèse, l’ancienneté de cet onyxis et son mode d’évolution (lent pour les dermatophytes et les moisissures, plus rapide pour les levures du genre Candida) ;  les facteurs favorisants professionnels (pâtissiers, coiffeurs, fleuristes, métiers nécessitant le port prolongé de gants ou de chaussures de sécurité), la pratique de sports (port de chaussures de type baskets), la notion d’un séjour même lointain en zone tropicale (N. dimidiatum) ;  la présence d’autres lésions associées. Ces lésions pourront être prélevées, même sans prescription spécifique : intertrigos interdigitoplantaires, atteintes

Pour citer cet article : Chabasse D, Pihet M. Méthodes de diagnostic d’une onychomycose. Journal De Mycologie Médicale (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.006

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Méthodes de diagnostic d’une onychomycose palmaires ou plantaires (tinea pedis), teignes du cuir chevelu et épidermophytoses de la peau glabre.

Réalisation du prélèvement Les modalités de prélèvement seront adaptées à la symptomatologie des lésions. Le principe essentiel consiste à prélever au niveau de la jonction entre la zone saine et la zone malade de l’ongle, c’est-à-dire là où le champignon est le plus actif. Dans la forme la plus fréquente des onychomycoses (atteinte disto-latérale), il convient tout d’abord d’éliminer la partie de l’ongle la plus externe, potentiellement souillée par les spores de moisissures environnementales et/ou colonisée par des levures. On prélèvera ensuite le produit pathologique suspect le plus près possible du front invasif du champignon. Les fragments obtenus seront recueillis dans une boîte de Pétri (idéalement en verre afin d’éviter l’électricité statique) ou tout autre récipient stérile. En cas de leuconychie superficielle, le grattage en surface après avoir nettoyé la tablette de l’ongle à l’alcool est très contributif, puisqu’il associe un prélèvement ciblé sur la zone suspecte et un traitement physique qui participe à l’élimination du champignon. Pour cela, on utilise habituellement une curette de Brocq ou un vaccinostyle. En cas d’onychomycose proximale ou de leuconychie profonde, le prélèvement est plus délicat. Il faut d’abord éliminer toutes les couches superficielles, jusqu’à visualiser la tablette inférieure parasitée. Le prélèvement peut être réalisé au lit du malade, à son domicile ou au cabinet médical, voire lors d’une intervention chirurgicale sur un ongle incarné suspect de mycose. Dans cette dernière situation, un découpage à la pince à ongle de la zone suspecte est réalisé, puis le fragment d’ongle est acheminé au laboratoire dans un flacon sec stérile, sans précautions particulières lors du transport. Au laboratoire, un grattage des débris friables kératosiques au niveau de la zone pathologique (jonction zone saine-zone malade) sera réalisé sur les fragments unguéaux recueillis. Lorsqu’il existe une paronychie, habituellement dans le cadre d’une candidose ou d’une fusariose unguéale, un grattage est réalisé sous les replis sus-unguéaux. Les sérosités ou écoulements purulents sont récupérés par écouvillonnage appuyé à l’aide d’un écouvillon sec stérile. En présence d’une coloration verdâtre de l’ongle, un prélèvement à visée bactériologique devra être réalisé en parallèle, en raison d’une probable surinfection bactérienne à Pseudomonas aeruginosa (bacille pyocyanique).

5 à 10 %, 20 % ou 30 %) ou le chloral-lactophénol d’Amman. Ce dernier permet, par ailleurs, de conserver pendant plusieurs semaines les préparations, contrairement à la potasse qui digère rapidement les différentes structures et impose donc une lecture rapide des préparations. En l’absence de coloration, la sensibilité de cette méthode peut être améliorée par l’utilisation d’un microscope à contraste de phase, qui facilite l’observation des éléments mycéliens. Les liquides éclaircissants seront utilisés de préférence en association avec un colorant, qui améliore grandement le confort de lecture grâce à une meilleure visualisation des structures fongiques (Fig. 1). Des colorants tels que le bleu lactique, le noir chlorazole (Chlorazol Black E), le rouge Congo (Mycetcolor1) ou à défaut l’encre ParkerTM bleue ou noire, ont été proposés [38,46]. Lorsque l’on dispose d’un équipement de microscopie à fluorescence avec les jeux de filtres adéquats (filtre bleu 400—440 nm), il est possible d’utiliser des agents clarifiants tels que le Calcofluor

Examen direct En l’absence d’étude histologique de l’ongle, l’examen direct demeure incontournable dans le diagnostic d’une onychomycose. De réalisation simple, il est accessible à tous les laboratoires de biologie médicale et permet d’apporter une réponse rapide au médecin prescripteur. Il s’effectue à partir de fragments d’ongles issus du grattage, de squames ou de sérosités recueillies au niveau des replis unguéaux. Ces échantillons sont examinés au microscope entre lame et lamelle, dans une goutte de produit éclaircissant comme l’hydroxyde de potassium (potasse

Figure 1 Examen direct de fragments d’ongles infectés. Les éléments fongiques peuvent être visualisés directement au microscope à contraste de phase (A), mais l’utilisation de colorants comme le rouge Congo (B), ou surtout de fluorochromes comme le Calcofluor White (C), facilite grandement l’observation. Direct examination of nails scrapings. Fungal elements may be seen directly by phase contrast microscopy (A), but the use of stains like Congo red (B), or fluorochromes such as Calcofluor White (C), greatly facilitate their detection.

Pour citer cet article : Chabasse D, Pihet M. Méthodes de diagnostic d’une onychomycose. Journal De Mycologie Médicale (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.006

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White (Sigma) ou le Blankophor1 (Bayer), qui permettent une lecture beaucoup plus rapide des lames (Fig. 1). Abdelrahman et al. [2] ont montré, dans une étude portant sur 240 échantillons d’ongles, une meilleure spécificité et sensibilité de l’examen direct réalisé avec le Calcofluor White, par rapport à la potasse seule. Le recours aux fluorochromes apparaît donc très intéressant, notamment lors de l’observation de grandes séries d’échantillons, à condition toutefois de disposer de l’équipement nécessaire. Comme pour l’examen histologique, la mise en évidence de filaments mycéliens septés au sein des fragments unguéaux oriente vers une onychomycose. En outre, certains aspects morphologiques peuvent aider à préciser le type de champignon en cause. Ainsi, la présence de filaments réguliers sera en faveur d’une infection par un dermatophyte, tandis que des filaments irréguliers vésiculeux évoqueront plutôt une pseudodermatophytose ou une onychomycose à moisissure, et du pseudomycélium avec des blastospores orienteront vers une candidose. La présence de blastospores ou de spores isolées peut signifier un simple portage et plaider en faveur d’une contamination. Enfin, l’abondance des éléments fongiques devra être précisée. Les limites de l’examen direct reposent essentiellement sur les difficultés de réalisation de certains prélèvements, notamment en cas d’onychomycose proximale ou d’onychodystrophie totale. Des prélèvements trop superficiels, réalisés au niveau des parties les plus friables de l’ongle, peuvent révéler des filaments mycéliens ou des spores qui correspondent le plus souvent à une contamination de la tablette pathologique par des moisissures saprophytes et non à un parasitisme fongique. Inversement, un examen direct négatif peut être lié à un traitement antérieur par un vernis antifongique, ou à la réalisation d’un prélèvement trop distal [39].

Histomycologie de l’ongle La technique de Hotchkiss et Mac Manus représente un bon compromis entre l’examen direct mycologique et l’histologie sur coupes d’ongles avec coloration au PAS [45]. Les fragments d’ongles sont observés après une coloration simplifiée, adaptée du PAS. Facile à mettre en œuvre, cette technique est rapide, peu coûteuse et néanmoins très contributive au diagnostic. (cf. histomycologie de l’ongle, par L. Lachaud). Cette technique permet de pallier les insuffisances de l’examen direct standard.

Diagnostic moléculaire Le recours à la PCR (Polymerase Chain Reaction) permet également de pallier le manque de sensibilité de l’examen direct, qui serait faussement négatif dans près de 30 % des cas [9,50]. De même, la PCR peut être utile en cas d’examen direct positif et de culture négative. De nombreuses techniques ont été développées, qui permettent la détection in situ du champignon mais aussi parfois l’identification de l’espèce en cause : PCR suivie d’une analyse des produits d’amplification après digestion par une enzyme de restriction (PCR-RFLP), ou d’une détection des produits d’amplification par Elisa (PCR-Elisa), PCR en temps réel et PCR

multiplexe [11,13,33,35,37,51,52]. Les études les plus récentes avancent ainsi des taux de positivité de 74 % à 100 %, avec une identification possible en moins de 48 heures [47,53]. Plusieurs kits sont actuellement commercialisés. Certains coffrets (Mentype1 MycoDermQS, Biotype Diagnostic GmbH) permettent d’identifier au niveau du genre ou de l’espèce la plupart des agents responsables d’onychomycoses (dermatophytes, levures et moisissures), tandis que d’autres (FTD1 Dermatophytes, Fast-track Diagnostics) ciblent les principales espèces de dermatophytes (T. rubrum, T. interdigitale, T. violaceum, T. tonsurans, Microsporum canis, M. audouinii,. . .). D’autres kits assurent uniquement l’identification de T. rubrum (Dermatophyte PCR kit1, SSI Diagnostica) ou se contentent de la détection d’ADN dermatophytique, ne permettant pas d’identifier l’espèce en cause (PCR Tps Réel1, Bio-Évolution). Dans ce cas précis, la réponse apportée au clinicien se limitera à « présence » ou « absence » d’ADN fongique dans le prélèvement. Les techniques de biologie moléculaire représentent indiscutablement une avancée dans le diagnostic direct des onychomycoses. La rapidité de la réponse, apportée parfois dans les 24 heures, est en effet privilégiée par rapport aux résultats des cultures, qui nécessitent souvent un délai de plus de deux semaines. Elles restent, cependant, coûteuses et réservées à des laboratoires spécialisés [5,12].

Identification directe par spectrométrie de masse Des essais utilisant la spectrométrie de masse de type MALDITOF ont montré la possibilité d’identifier T. rubrum directement à partir d’un échantillon d’ongle pathologique [27].

Culture mycologique En attendant la généralisation des techniques de biologie moléculaire, la culture reste le complément indispensable de l’examen direct ou de l’histopathologie de l’ongle. En effet, l’isolement en culture du champignon en cause, suivi de son identification (qui ne peut être réalisée par le seul examen direct), demeure la technique de référence [17]. En raison de la présence fréquente de nombreuses bactéries et de champignons saprophytes ou commensaux au niveau de la peau ou des phanères, il est indispensable d’utiliser un milieu de culture sélectif. Ainsi, le milieu de référence pour les dermatophytes est le milieu de Sabouraud additionné d’antibiotique(s) (chloramphénicol et/ou gentamicine) et de 0,5 à 1 g/L de cycloheximide (Actidione1). Cette dernière molécule inhibe en effet la croissance de la plupart des moisissures, ainsi que de certaines espèces de Candida telles que Candida parapsilosis et Candida famata, et facilite donc l’isolement des dermatophytes. Compte tenu de la présence possible d’une moisissure potentiellement pathogène ou d’un pseudodermatophyte, il conviendra d’utiliser en parallèle une gélose de Sabouraud-antibiotiques sans cycloheximide. D’autres milieux d’isolement peuvent être proposés, tels que le milieu de Taplin (ou DTM, Dermatophyte Test Medium) qui permet l’isolement et l’identification présomptive des dermatophytes. La couleur de ce milieu vire en effet au

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Tableau 2 Comparaison des performances des principales méthodes utilisées dans le diagnostic d’une onychomycose, d’après [47]. Comparison of performances of the main methods used in the diagnosis of onychomycoses, adapted from [47]. Méthodes diagnostiques

Positivité (%)

Se (%)

Sp (%)

VPP (%)

VPN (%)

Examen direct (KOH) Culture PCR Histologie (coloration PAS) MC in vivo OCT

57,6 13,3 61,7 45 58,3 80

74,4 20,5 94,9 69,2 79,5 92,3

76,2 100 100 100 81 42,9

85,3 100 100 100 88,6 75

61,5 40,4 91,3 63,6 85,3 75

Se : sensibilité ; Sp : spécificité, VPP : valeur prédictive positive, VPN : valeur prédictive négative ; KOH : hydroxyde de potassium ; PCR : polymerase chain reaction ; PAS : acide périodique - réactif de Schiff ; MC : microscopie confocale ; OCT : tomographie par cohérence optique.

rouge en présence de ces champignons. Cependant, un certain nombre de faux positifs et de faux négatifs ont été rapportés, et malgré les améliorations apportées à cette gélose commercialisée, celle-ci ne fait pas l’unanimité. La culture peut être réalisée en tubes ou sur boîtes, selon les habitudes du laboratoire. D’expérience, l’usage des boîtes nous semble préférable, au moins pour les primocultures. La difficulté de l’utilisation du tube est essentiellement liée à la surface réduite offerte par la gélose, qui rend difficile l’individualisation d’un dermatophyte en cas d’association avec une moisissure, dont la croissance est souvent plus rapide. La manipulation des dermatophytes ou des moisissures en boîtes est, par ailleurs, plus aisée, tant pour l’ensemencement (plusieurs points peuvent être bien individualisés) que pour la réalisation des montages nécessaires à l’observation microscopique (technique du « drapeau de Roth). Le produit pathologique est déposé en appuyant légèrement, en plusieurs endroits séparés à la surface de la gélose. Si l’ensemencement est réalisé en tubes, les dermatophytes étant aérobies, il conviendra de ne pas visser complètement le bouchon, de manière à permettre une bonne aération de la culture. À l’inverse, l’ensemencement en boîte s’accompagne parfois d’un dessèchement des géloses, notamment en cas d’incubation prolongée (plus de 3 semaines). Pour le transport et la conservation de souches, ou en cas d’incubation prolongée, l’utilisation de tubes sera donc préférée. Les cultures sont incubées habituellement à 20—25 8C. Une durée d’incubation de 3 semaines doit être respectée avant de rendre des résultats négatifs. Certaines espèces comme O. canadensis présentent en effet un développement lent, et nécessitent un délai plus long (3 à 4 semaines d’incubation) avant de présenter des éléments morphologiques typiques. Les cultures sont observées en général deux fois par semaine. Si la primo-culture ne permet pas d’identifier le champignon isolé, il peut être nécessaire de réaliser un repiquage sur milieu spécifique, afin de favoriser la sporulation ou la production de pigment. La nécessité de conserver les cultures représente une contrainte pour le laboratoire, mais ceci est incontournable dans le diagnostic des onychomycoses. Les inconvénients de l’examen mycologique résident dans sa faible sensibilité (Tableau 2 et Fig. 2), ainsi que dans la longueur du délai de réponse (2 à 4 semaines, voire plus avec

O. canadensis). En outre, certaines souches restant stériles sur gélose de Sabouraud, des repiquages sur milieux spécifiques sont souvent nécessaires pour mettre en évidence les organes de fructification, base du diagnostic morphologique. Enfin, l’identification repose essentiellement sur des critères morphologiques (aspects macro- et microscopiques des cultures), plus rarement physiologiques (recherche d’organes perforateurs, exigences vitaminiques,. . .) et sur l’étude des caractères biochimiques pour les levures (auxanogramme), ce qui nécessite un personnel expérimenté. L’identification moléculaire (voir paragraphe précédent) contribue largement à l’amélioration et à la rapidité du diagnostic [25]. De même, la généralisation dans les laboratoires de l’utilisation en routine de la spectrométrie de masse devrait permettre de rendre une réponse plus rapide aux médecins prescripteurs [30].

Interprétation des résultats La démarche diagnostique est présentée Fig. 3, tandis que le Tableau 1 résume les principaux agents fongiques isolés dans

Figure 2 Comparaison des sensibilités et spécificités des principales méthodes utilisées dans le diagnostic d’une onychomycose, d’après [47]. Comparing the sensitivities and specificities of main methods used in the diagnosis of onychomycoses, adapted from [47].

Pour citer cet article : Chabasse D, Pihet M. Méthodes de diagnostic d’une onychomycose. Journal De Mycologie Médicale (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.006

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D. Chabasse, M. Pihet CAT devant une onychopathie D'abord confirmer ou écarter une onychomycose

Prélèvement mycologique

Onychopathie fongique (50%)

Onychopathie non fongique (50%) Examen direct : Négatif Culture : Stérile Conclusion : Onychopathie non fongique

1. Dermatophytes (surtout aux pieds) 1.1. Examen direct : présence de filaments septés plus ou moins réguliers 1.2. Culture : Trichophyton rubrum ++, T. interdigitale +, Epidermophyton floccosum +/Conclusion : Dermatophytose unguéale à … 2. Levures (surtout aux mains) 2.1. Examen direct : présence de pseudo-mycélium 2.2. Culture et identification : Candida albicans, Candida non albicans Conclusion : Candidose unguéale à … 3. Pseudodermatophytes (rare) 3.1. Examen direct : présence de filaments mycéliens septés irréguliers, arthrosporés (ou arthospores isolées) 3.2. Culture : Neoscytalidium dimidiatum, N. hyalinum, Onychocola canadensis (attendre pour cette dernière 4 semaines avant une identification morphologique) Conclusion : Onyxis à … 4. Moisissures (rare) 4.1. Examen direct : présence de filaments septés, irréguliers, nombreuses spores (parfois évocatrices) 4.2. Culture : moisissure en culture pure, à tous les points d'ensemencements (Scopulariopsis, Acremonium, Aspergillus,…) 4.3. Renouveler le prélèvement s’il existe un doute Conclusion : Onyxis à ... Figure 3 Démarche diagnostique d’une onychopathie d’origine fongique, d’après [1]. Diagnosis of onychomycoses, adapted from [1].

un ongle pathologique suspect d’onychomycose. Ces résultats doivent être interprétés par le clinicien afin de conclure ou non à une onychomycose. Il existe habituellement une bonne concordance entre le résultat de l’examen direct et celui de la culture (voir arbre décisionnel de la Fig. 3). En cas de dermatophytose, l’examen direct objective la présence de filaments mycéliens septés et la culture identifie dans un second temps le dermatophyte responsable. Il existe très fréquemment une atteinte associée des espaces interorteils et/ou de la plante des pieds par le même dermatophyte. Un tel résultat concerne, dans notre expérience, plus de 90 % des prélèvements des ongles des orteils. En cas d’identification d’un pseudodermatophyte (N. dimidiatum ou O. canadensis), il convient de le signaler au prescripteur, ces champignons étant considérés comme

présentant un pouvoir pathogène sur l’ongle proche de celui des dermatophytes. Les levures sont fréquemment incriminées dans les onychomycoses des mains. La présence de colonies de C. albicans isolées d’un prélèvement unguéal est un véritable indice de pathogénicité, cette levure n’étant habituellement pas présente sur la peau saine. L’examen direct devrait alors mettre en évidence du pseudomycélium ou du mycélium vrai, qui témoignent de la forme infectieuse de cette levure, mais l’examen direct est souvent de lecture difficile. Si une espèce autre que C. albicans est identifiée, seuls l’examen direct (présence ou non de pseudo-filaments) et un isolement en culture pure permettent de faire la distinction entre une colonisation d’une onychopathie, comme par exemple un psoriasis unguéal ou une paronychie

Pour citer cet article : Chabasse D, Pihet M. Méthodes de diagnostic d’une onychomycose. Journal De Mycologie Médicale (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.mycmed.2014.10.006

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Méthodes de diagnostic d’une onychomycose chronique, et une réelle onychomycose à levures [20,24,26,49]. L’interprétation de la présence d’une moisissure en culture s’avère en revanche plus difficile. En effet, ces champignons sont souvent des contaminants de laboratoire et peuvent par ailleurs coloniser sans effet pathogène le revêtement cutané et la kératine distale de l’appareil unguéal. Il est donc banal d’en isoler à partir d’un prélèvement d’ongle. Cependant, l’isolement d’une moisissure en culture pure au niveau de plusieurs points d’ensemencement, sans dermatophyte (ni pseudodermatophyte) associé, mais avec un examen direct positif, est en faveur d’une onychomycose à moisissure. Afin de confirmer ce diagnostic, la réalisation d’un prélèvement de contrôle dans un laboratoire expérimenté est fortement recommandée. À noter qu’il n’est pas rare que le second prélèvement soit totalement indemne de moisissures, ou permette d’isoler un dermatophyte masqué par une moisissure, dont le développement en culture est souvent beaucoup plus rapide que celui d’un dermatophyte. La leuconychie superficielle, souvent causée par T. interdigitale, mais qui peut être aussi la forme débutante de certaines onychomycoses à moisissures, représente cependant une exception. Dans ce cas précis, le grattage de la lésion et l’étude mycologique du prélèvement permettent habituellement de poser un diagnostic étiologique dès le premier examen. En l’absence de méthodes évaluées, l’étude de la sensibilité aux antifongiques (antifongigramme) ne présente pas d’intérêt pour le praticien. Par ailleurs, en dehors de certaines moisissures intrinsèquement résistantes, les échecs thérapeutiques ne sont le plus souvent pas dus à une résistance des dermatophytes ou des Candida aux antifongiques, mais plutôt à une prise en charge thérapeutique insuffisante ou inadaptée.

Comparaison de la valeur diagnostique des différentes méthodes Dans une étude récente incluant 60 patients, Rothmund et al. [47] ont comparé les performances des différentes méthodes utilisées dans le diagnostic des onychomycoses (sensibilité, spécificité, valeurs prédictives positive et négative sont reportées Tableau 2). Culture mycologique, PCR et examen histologique (coloration au PAS) se sont avérées être les techniques les plus spécifiques, avec une valeur prédictive de 100 %. Cependant, la sensibilité de la culture apparaissait la plus faible (20 %), tandis que PCR et OCT présentaient une sensibilité supérieure à 90 % (Fig. 2). PCR et histologie sont actuellement les techniques les plus fiables et les plus rapides à mettre en œuvre dans le cadre du diagnostic d’une onychomycose. Pour conclure, lorsqu’un clinicien rencontre des difficultés dans l’interprétation des résultats rendus par le laboratoire (ou émet des doutes sur la qualité des analyses effectuées), il est préférable de répéter l’examen mycologique et d’envisager une étude histologique, avant toute décision thérapeutique (consensus du groupe de travail).

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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[Mycological diagnosis of onychomycosis].

Onychomycosis represents about 50% of ungueal pathology. Dermatophytes (especially Trichophyton rubrum and Trichophyton interdigitale) are the main sp...
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