Synthèse General review

Volume 101 • N◦ 1 • janvier 2014 John Libbey Eurotext

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La voie de signalisation MET et son implication thérapeutique dans les cancers digestifs MET signalling pathway and its therapeutic implications in gastrointestinal cancers Aziz Zaanan1,2 , Pierre Laurent-Puig2 , Julien Taieb1 Article rec¸u le 15 septembre 2013, accepté le 25 septembre 2013 Tirés à part : A. Zaanan

1 Hôpital européen Georges-Pompidou, AP-HP, Service de gastroentérologie et oncologie digestive, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France 2 UMR-S775, Inserm, Paris, France

Pour citer cet article : Zaanan A, Laurent-Puig P, Taieb J. La voie de signalisation MET et son implication thérapeutique dans les cancers digestifs. Bull Cancer 2014 ; 101 : 25-30. doi : 10.1684/bdc.2013.1870.

Résumé. Le récepteur transmembranaire tyrosine kinase MET et son ligand HGF, régulent de nombreuses voies de signalisation impliquées dans la prolifération et la mobilité cellulaire, l’invasion et l’angiogenèse. La dérégulation du système HGF-MET par différents mécanismes biologiques peut contribuer au processus tumoral de nombreux types de cancers. Certaines approches pharmacologiques ont été développées pour inhiber la voie de signalisation HGF-MET, soit en utilisant des anticorps monoclonaux dirigés contre MET ou HGF, soit en utilisant des inhibiteurs de l’activité tyrosine kinase du récepteur MET. En cancérologie digestive, plusieurs études cliniques ont évalué la tolérance et l’efficacité de ces thérapies ciblées, avec des résultats parfois prometteurs mais qui nécessitent une confirmation par des essais de phase III. Par ailleurs, il semble que l’expression tumorale de MET pourrait être un facteur prédictif de réponse à ces thérapies ciblées pour certaines tumeurs digestives. Ainsi, ces altérations somatiques à l’origine de l’activation du système HGFMET pourraient représenter des cibles thérapeutiques intéressantes et permettre de sélectionner les patients les plus susceptibles de répondre favorablement à ce type de traitement. 

doi : 10.1684/bdc.2013.1870

Mots clés : MET, HGF, cancers digestifs, thérapie ciblée, biomarqueur

Introduction MET (mesenchymal- epithelial transition factor) ou cMET ou HGFR (hepatocyte growth factor receptor) est un récepteur membranaire dont l’activation par son unique ligand, le HGF (hepatocyte growth facBull Cancer vol. 101 • N◦ 1 • janvier 2014

Abstract. The MET receptor tyrosine kinase and its ligand HGF regulates many signalling pathways involved in proliferation and cell motility, invasion and angiogenesis. Deregulation of HGFMET system by different biological mechanisms may contribute to the tumour development in many types of cancers. Some pharmacological approaches have been developed to inhibit the HGF-MET signalling pathway, using monoclonal antibodies against HGF or MET, or using tyrosine kinase inhibitors of MET receptor. In digestive cancers, several clinical studies have evaluated the safety and efficacy of these targeted therapies, with some promising results but requiring confirmation in phase III trials. Moreover, it appears that MET tumour expression could be a predictive marker of response to these targeted therapies for some gastrointestinal tumours. Thus, somatic alterations in HGF-MET system may represent interesting therapeutic targets and help to select patients who can favourably respond to such targeted treatment. 

Key words: MET, HGF, gastrointestinal cancers, targeted therapy, biomarker

tor), également appelé SF (scatter factor), induit une activité de prolifération, migration et anti-apoptotique de nombreux types cellulaires. La voie HGF-MET est particulièrement impliquée dans l’embryogenèse, le développement et la régénération tissulaire. Cette voie

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comme un inducteur de la prolifération des hépatocytes puis, pour d’autres types cellulaires, comme les cellules fibroblastiques, hématopoïétiques, endothéliales, neuronales ou musculaires lisses. HGF est une protéine hétérodimérique composée de deux sous-unités ␣ et ␤ capables de se fixer sur le domaine extra cellulaire de MET. Cette liaison ligand-récepteur permet la dimérisation de MET pour former des homo- ou hétérodimères, qui à son tour entraîne une activation de la fonction tyrosine kinase de la partie intracellulaire de MET. La fixation du ligand sur son récepteur entraîne également une autophosphorylation de 2 sites tyrosine du domaine C terminal qui va permettre le recrutement de protéines de transduction impliquées dans les signaux de survie cellulaire (voie PI3K/AKT/mTOR), de prolifération (activation des voies MAP kinases), d’angiogenèse et de mobilité cellulaire (figure 2) [3].

de signalisation quiescente chez les adultes peut être réactivée en cas d’agression tissulaire ou de prolifération tumorale, MET devenant alors un oncogène majeur [1]. Plusieurs molécules visant à inhiber cette voie de signalisation ont été développées dans le traitement du cancer, avec notamment des résultats convaincants en phase III publiés récemment dans le cancer du poumon non à petites cellules. Dans cette revue, nous aborderons d’une part, les mécanismes biologiques de l’activation de la voie de signalisation de HGF-MET et son implication dans les cancers digestifs, et d’autre part, les différentes approches pharmacologiques pour l’inhiber et les implications thérapeutiques qui en découlent.

La voie de signalisation HGF-MET Le gène du récepteur MET est localisé sur le bras long du chromosome 7 (7q31). Il code pour un précurseur protéique de 170 kb qui est ensuite clivé et glycosylé pour former le récepteur MET, constitué d’une sous-unité ␣ extracellulaire reliée par un pont disulfure à une sous unité ␤ transmembranaire contenant l’activité catalytique dans sa partie intracellulaire [2]. La partie intracellulaire du récepteur MET comprend 3 régions distinctes, une séquence juxtamembranaire capable d’inhiber l’activité tyrosine kinase, le domaine de l’activité catalytique permettant la phosphorylation de résidus tyrosine, et la partie C terminale capable d’interagir avec certains facteurs de transduction (figure 1) [2]. La protéine HGF est un facteur de croissance qui se lie exclusivement sur le récepteur MET. Il s’agit du ligand physiologique de MET. Il a été décrit initialement

Anticorps anti-HGF

La dérégulation de MET MET est principalement exprimé par les cellules épithéliales et sa dérégulation est impliquée dans le développement et la progression de plusieurs cancers. L’expression aberrante de MET dans certains cancers confère un phénotype tumoral plus agressif favorisant l’extension métastatique. Historiquement, MET a été identifié à partir de cellules d’ostéosarcome comme un oncogène activé par un réarrangement chromosomique conduisant à une protéine de fusion TRP-MET [4]. Par la suite, d’autres mécanismes d’activation de MET ont été décrits. La surexpression protéique de MET par augmentation de la transcription du gène est l’altération biologique tumorale la plus fréquente. Elle est principalement due à la production autocrine ou paracrine

Anticorps anti-MET

HGF

MET Milieu extra cellulaire

Milieu intra cellulaire Inhibiteurs tyrosine kinase

P P

Figure 1. Structure et différents modes d’inhibition de la voie HGF-MET.

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La voie de signalisation MET et son implication thérapeutique dans les cancers digestifs

HGF

HGF

MET

MET

Milieu extra cellulaire

Milieu intra cellulaire GAB1 PI3K

AKT

mTOR

NFkB

P

P

P

P

Intégrines

GRB2

RAS

FAK

RAF

RAP1

MEK

CDC 42 RAC1

ERK

Adhésion Mobilité Invasion E-cadhérines

Survie Anti-apoptose Prolifération

Figure 2. Schéma simplifié des différentes voies de signalisation activées par HGF-MET. HGF (hepatocyte growth factor) induit la dimérisation et l’activation de MET (mesenchymal-epithelial transition factor) par la phosphorylation de résidus tyrosine dans la partie intra-cytoplasmique du récepteur. Différents effecteurs cytoplasmiques tels que GRB2 (growth factor receptor-bound protein 2) et GAB1 (GRB2-associated-binding protein 1), sont alors recrutés par MET pour activer différentes voies de signalisation comme la voie PI3K-AKT ou RAS-MAPK. Ces 2 voies de signalisation entrainent l’activation de l’expression de certains gènes impliqués dans la prolifération et le cycle cellulaire. En parallèle, cette cascade de signalisation aboutit également à l’activation, d’une part de RAP1 - FAK (RAS-related protein 1 - focal adhesion kinase) par GRB2, et d’autre part de CDC42 - RAC1 (cell division control protein 42 – RAS-related C3 botulinum toxin substrate 1) par RAS. Ces 2 voies de signalisation sont impliquées dans le contrôle de l’activité des intégrines, du cytosquelette et des cadhérines, affectant ainsi l’adhésion, la mobilité et l’invasion cellulaire.

d’HGF dans l’environnement tumoral ou à une amplification génomique. Les mutations ponctuelles dans le domaine tyrosine kinase de MET, aboutissant à une activation constitutive du récepteur, ont été également décrites comme favorisant le développement de certains cancers, notamment les formes héréditaires de cancer papillaire du rein en cas de mutations constitutionnelles [5].

Les cibles thérapeutiques La dérégulation de la voie de signalisation de MET est impliquée dans de nombreuses pathologies cancéreuses, incluant principalement les tumeurs épithéliales, comme les cancers du sein, colorectaux, pulmonaires, hépatiques, gastriques et ovariens. Les différentes anomalies génétiques à l’origine de l’activation de la voie de signalisation MET peuvent être observées de fac¸on isolée ou combinée dans les tissus tumoraux. L’émergence de molécules biologiques capables d’inhiber la voie de signalisation de MET semble être une approche thérapeutique prometteuse pour certains cancers. Plusieurs types de molécules ont été dévelopBull Cancer vol. 101 • N◦ 1 • janvier 2014

pés dans le domaine de la cancérologie pour inhiber la voie de signalisation MET en ciblant le récepteur ou son ligand par l’utilisation d’anticorps monoclonaux ou de molécules inhibant l’activité tyrosine kinase [2] (figure 1). Les anticorps spécifiques anti-MET ou anti-HGF sont capables d’inhiber la voie de signalisation en bloquant l’interaction entre le récepteur et son ligand. Les anticorps monoclonaux anti-MET peuvent également inhiber son action en induisant son internalisation et sa dégradation. Par ailleurs, certains travaux ont suggéré que l’inhibition de la voie de signalisation de MET pouvait également restaurer l’efficacité d’un traitement anti-EGFR [6]. Néanmoins, l’exposition prolongée des tumeurs à ces thérapies ciblées peut entraîner un mécanisme de résistance, notamment par le biais d’une amplification génomique de MET. De plus, cette approche pharmacologique reste inefficace en cas de mutation activatrice constitutive du récepteur MET. L’ensemble de ces données pharmacologiques sur l’inhibition de la voie de signalisation de HGF-MET ont permis le développement d’études cliniques dans le domaine de la cancérologie digestive.

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Cancers colorectaux La dérégulation de la voie de signalisation de MET dans les cancers colorectaux est associée une prolifération cellulaire tumorale plus importante et un pronostic plus grave [7, 8]. Plusieurs travaux cliniques ont donc été développés pour évaluer l’intérêt thérapeutique de certains anticorps monoclonaux dirigés contre HGF ou MET. L’une des molécules les plus avancées dans l’évaluation thérapeutique du cancer colorectal est le rilotumumab. Il s’agit d’un anticorps monoclonal de type IgG2 entièrement humanisé dirigé contre HGF. Un premier essai de phase I/II a été mené sur une série de 142 patients avec un cancer colorectal métastatique KRAS sauvage. Les patients ont été randomisés en trois bras de traitement : panitumumab (anticorps anti-EGFR) + placebo, versus panitumumab + rilotumumab (10 mg/kg), versus panitumumab + ganitumab (AMG 479, anticorps anti-IGF-1R) [9]. En dehors d’une augmentation du taux de rash cutané grade 3-4 dans les bras de traitement combinant les 2 molécules, le profil de tolérance était similaire dans les 3 bras. Le taux de réponse objectif, critère d’évaluation principal de l’étude, était respectivement de 21 %, 31 % et 22 %. Le profil d’expression tumorale de MET en immunohistochimie (IHC) était disponible pour la majorité des patients mais n’avait pas été analysé en fonction des résultats de survie et de réponse tumorale. Les résultats d’efficacité thérapeutique de la combinaison panitumumab et rilotumumab semblent encourageants et l’analyse de l’impact prédictif de l’expression tumorale de MET permettra probablement de cibler les patients les plus susceptibles de bénéficier de cette approche thérapeutique [9]. Un autre anticorps monoclonal, dirigé cette fois-ci contre MET, est actuellement en cours d’évaluation dans un essai de phase II randomisé [10]. Il s’agit de l’onartuzumab, un anticorps monoclonal humanisé recombinant, capable de se fixer sur la partie extracellulaire de MET et bloquer ainsi la fixation de HGF sur MET. De plus, le design monovalent de cet anticorps élimine la possibilité d’une activation du récepteur par dimérisation. L’essai de phase II randomisé actuellement en cours dans le cancer colorectal métastatique compare en première ligne de chimiothérapie et en double aveugle un traitement par FOLFOX + bévacizumab associé à l’onartuzumab ou à un placebo [10]. Par ailleurs, les auteurs de cette étude ont souhaité évaluer l’intérêt de l’association du bévacizumab avec l’onartuzumab. En effet, certains travaux précliniques ont montré que le blocage de la voie de signalisation HGF-MET entraînait la production de facteurs proangiogéniques, tels que de VEGF et d’IL8, capables à leur tour de stimuler la production de HGF [10]. L’association du bévacizumab avec l’onartuzumab permettrait donc de rompre ce rétrocontrôle positif et

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augmenter ainsi l’efficacité du traitement anti-tumoral. Les résultats de cette étude sont donc attendus avec grand intérêt.

Cancers œso-gastriques Comme pour les cancers colorectaux, les cancers oeso-gastriques peuvent également présenter une dérégulation de la voie de signalisation de HGF/MET. Certains travaux ont rapporté des taux de surexpression de MET en immunohistochimie (IHC) d’environ 50 % et une amplification de MET par hybridation in situ (FISH) dans 5 à 10 % des cas [11, 12]. Une étude de cohorte menée sur 489 patients atteints d’un cancer œso-gastrique a analysé l’impact pronostique de MET (évalué par FISH) et l’efficacité du crizotinib chez les patients avec une surexpression tumorale de MET. Cette étude a montré d’une part, qu’une amplification de MET était un facteur de mauvais pronostic, et d’autre part, que le crizotinib pouvait être efficace en cas de surexpression tumorale de MET, puisque 2 patients sur 4 traités par cette molécule avaient présenté une réponse tumorale [12]. Le Crizotinib est un inhibiteur non spécifique de l’activité tyrosine kinase du récepteur MET qui a montré in vitro sa capacité d’inhiber la prolifération cellulaire de certaines tumeurs. Il est intéressant de noter que cette molécule, qui agit également sur le récepteur ALK (anaplastic lymphoma kinase) en inhibant son activité tyrosine kinase, a été développée initialement chez les patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC) avec réarrangement de ALK. Une étude de phase I publiée en 2010 avait permis en France la délivrance d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) pour les patients atteints d’un CBNPC avec réarrangement de ALK (environ 2 à 7 % des tumeurs) devant les résultats d’efficacité très intéressants [13]. Les résultats de cette étude ont été confirmés récemment par une étude de phase III [14]. Le rilotumumab, que nous avons vu précédemment dans le chapitre du cancer colorectal, a été également développé dans le traitement des adénocarcinomes œso-gastriques. Des résultats intéressants ont été communiqués à partir d’une étude randomisée de phase II évaluant en première ligne de traitement une chimiothérapie par ECX (épirubicine, cisplatine et capécitabine) plus rilotumumab ou placebo. Les 121 patients inclus dans cette étude avaient un adénocarcinome de l’estomac ou de la jonction œso-gastrique à un stade avancé, et le rilotumumab était administré avec deux dosages différents (7,5 mg/kg et 15 mg/kg) [15]. Les résultats de cette étude ont montré un bénéfice de survie dans le bras rilotumumab, avec paradoxalement un effet plus important pour le dosage le plus faible. Le profil de tolérance montrait une incidence plus élevée d’œdèmes périphériques, de toxicités hématologiques et de thromboses veineuses profondes dans le bras Bull Cancer vol. 101 • N◦ 1 • janvier 2014

La voie de signalisation MET et son implication thérapeutique dans les cancers digestifs

rilotumumab. De plus, MET semblait être un facteur prédictif de réponse au traitement puisque les patients dont la tumeur avait un niveau d’expression élevé de MET (évalué par IHC ou FISH) présentaient une survie plus longue dans le bras rilotumumab par rapport au bras placebo [15]. Par ailleurs, notons qu’une étude randomisée de phase II, nommée « MEGA » et coordonnée par le groupe franc¸ais PRODIGE, évalue actuellement le rilotumumab en association avec le FOLFOX dans cette même indication. Ces résultats encourageants sur la prise en charge thérapeutique de ces patients doivent maintenant être validés par des essais de phase III, actuellement en cours.

Carcinome hépatocellulaire Dans le traitement du carcinome hépatocellulaire, le tivantinib est la molécule la plus développée en phase clinique. Il s’agit d’un inhibiteur allostérique spécifique du récepteur MET. Cette molécule permet de bloquer MET dans sa conformation inactive non phosphorylée. In vitro, le tivantinib a montré une action inhibitrice sur la prolifération de cellules cancéreuses gastriques, ainsi qu’une activité antitumorale sur des souris avec des xénogreffes de tumeurs colorectale ou mammaire [16]. Dans le traitement du carcinome hépatocellulaire, une étude randomisée de phase II publiée très récemment a comparé un traitement par tivantinib (n = 71) versus placebo (n = 36) après échec du sorafenib chez des patients présentant un carcinome hépatocellulaire avancé [17]. Les patients inclus dans cette étude avaient une cirrhose Child-Pugh A et le dosage du tivantinib a été amendé en cours d’étude pour être diminué de 360 mg à 240 mg fois 2 par jour en raison d’une incidence élevée de toxicité de grade 3. Les résultats de ce travail ont montré que le temps à progression des patients recevant le tivantinib était de 1,6 mois vs 1,4 mois pour les patients recevant le placebo. Bien que la différence en médiane soit faible, elle était significative en terme de HR qui était à 0,64 (90 % CI 0,43–0,94 ; p=0,04) [17]. Au moment de cette analyse, la différence de médiane de survie globale entre les 2 groupes de patients n’était pas significative (6,6 mois vs 6,2 mois) (HR = 0,90 ; 95 % CI 0,57–1,40 ; p = 0.63). L’étude de l’expression tumorale de MET en IHC a montré que parmi les patients avec une surexpression (> 50% des cellules marquées), ceux qui recevaient le tivantinib (n = 22) avaient un temps à progression plus long que ceux qui recevaient le placebo (n = 15) (2,7 mois versus 1,4 mois) (HR = 0,43 ; 95 % CI 0,19–0,97 ; p = 0,03). En revanche, il n’y avait pas de différence significative de temps à progression entre le bras tivantinib (1,5 mois) et le bras placebo (1,4 mois) parmi les patients avec un taux d’expression faible de MET (HR = 0,96 ; 95 % CI 0,43–2,14 ; p = 0,92) [17]. Ces résultats suggèrent donc que MET Bull Cancer vol. 101 • N◦ 1 • janvier 2014

est un biomarqueur prédictif de réponse au tivantinib, capable de sélectionner les patients qui peuvent bénéficier le plus de ce traitement. Les principaux effets secondaires graves étaient la neutropénie grade 3 (6 % dans le groupe à 240 mg, et 21 % dans le groupe à 360 mg) et l’anémie grade 3 (9 % dans le groupe à 240 mg, et 13 % dans le groupe à 360 mg). La confirmation de ces résultats par une étude randomisée de phase III pourrait permettre de traiter ces patients après échec du sorafenib, en cas de surexpression tumorale de MET.

Autres tumeurs digestives Plusieurs dizaines d’études précoces sont actuellement en cours et évaluent la tolérance et l’efficacité de différentes molécules inhibant la voie de signalisation de HGF/MET dans le traitement des tumeurs digestives. Citons par exemple le cabozantinib qui est un inhibiteur non spécifique de l’activité tyrosine kinase des récepteurs MET, VEGFR2, TIE2, KIT et RET. Dans les modèles de xénogreffes, le cabozantinib a montré son action antitumorale sur plusieurs types de cancers (sein, poumon, gliome, cancers de la thyroïde avec mutation de RET et les tumeurs endocrines pancréatiques). Une étude de phase II randomisée a évalué l’activité du cabozantinib dans le traitement de différentes tumeurs solides. Le taux de contrôle tumoral à 12 semaines était de 35 % pour les cancers du pancréas, 33 % pour les cancers œso-gastriques et 73 % pour les carcinomes hépatocellulaires [18]. Les principaux effets secondaires étaient la diarrhée, les nausées, l’asthénie et le syndrome mains-pieds. En raison des résultats intéressants du cabozantinib, une étude de phase II est en cours dans le traitement des tumeurs endocrines du pancréas et du grêle [19].

Conclusions et perspectives Les progrès dans la compréhension des mécanismes de dérégulation de la voie de signalisation HGF-MET a permis le développement de différentes approches pharmacologiques pour inhiber l’activité de MET dans le domaine de la cancérologie digestive. Plusieurs molécules inhibitrices de la voie de signalisation HGFMET ont été évaluées dans des essais cliniques avec des résultats prometteurs mais nécessitant la confirmation par des études randomisées de phase III. En revanche, certains patients présentent une résistance primaire à ces molécules inhibitrices du système HGF-MET, soulignant l’intérêt d’identifier des biomarqueurs prédictifs de réponse au traitement afin de sélectionner les patients les plus susceptibles de bénéficier de ces thérapies ciblées. D’autre part, une résistance secondaire peut apparaître en cours de traitement. L’utilisation de traitement combiné associant différentes molécules inhibitrices du système HGF-MET permet dans certains cas de restaurer une efficacité antitumorale. Ainsi,

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les différentes altérations somatiques à l’origine de la dérégulation de HGF-MET et du processus tumoral pourraient constituer à la fois des cibles thérapeutiques et/ou des marqueurs prédictifs de réponse ou de résistance à un traitement donné. Cet exemple parmi d’autre illustre l’importance du génotype tumoral pour un traitement personnalisé en cancérologie digestive.  Liens d’intérêt : les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec l’article.

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