Pour citer cet article : Klotz, M C, et al. Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique. Presse Med. (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.06.025 Presse Med. 2014; //: ///

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Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique Caroline Klotz 1, Maximilien Barret 1,2, Marion Dhooge 1,2, Ammar Oudjit 3, Stanislas Chaussade 1,2, Romain Coriat 1,2, Vered Abitbol 1

Disponible sur internet le :

1. AP–HP, hôpital Cochin, service de gastroentérologie, 75014 Paris, France 2. Université Sorbonne Paris Descartes, faculté de médecine, 75014 Paris, France 3. AP–HP, hôpital Cochin, service de radiologie, 75014 Paris, France

Correspondance : Vered Abitbol, CHU Cochin, service d'hépato-gastroentérologie, 27, rue du Faubourg Saint-Jacques, 75014 Paris, France. [email protected]

Points essentiels La rectocolite hémorragique (RCH) est une maladie inflammatoire chronique intestinale limitée à la muqueuse et affectant de façon continue le rectum et le côlon. Les dérivés salicylés sont le traitement de choix des formes modérées. La corticothérapie est le traitement des poussées et n'est pas utilisée en traitement de fond. Les thiopurines sont indiqués en traitement d'entretien, en cas d'échec des salicylés ou de corticodépendance. Le traitement par anti-TNF alpha est indiqué lors des poussées sévères corticorésistantes ou en cas de corticodépendance. Le vedolizumab (anti-intégrine) est la première biothérapie non anti-TNF alpha désormais disponible dans le traitement de la RCH. La colite aiguë grave est une urgence médico-chirurgicale ; son diagnostic repose sur le score de Lichtiger. Une colectomie en urgence est indiquée en cas de colite aiguë grave, compliquée ou résistante au traitement médical. Les patients ayant une RCH étendue au-delà de l'angle colique gauche sont à risque de cancer colorectal, majoré par la durée d'évolution, la sévérité de l'inflammation, les antécédents familiaux de cancer colorectal et l'existence d'une cholangite sclérosante. Une coloscopie de dépistage annuelle est indiquée en cas de cholangite sclérosante, quelle que soit l'extension de la RCH.

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Pour citer cet article : Klotz, M C, et al. Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique. Presse Med. (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.06.025

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C. Klotz, M. Barret, M. Dhooge, A. Oudjit, S. Chaussade, R. Coriat, et al.

Key points Management of diagnosis and treatment in ulcerative colitis Ulcerative colitis (UC) is a chronic inflammatory bowel disease limited to the mucosa and affecting the rectum and the colon continuously. Salicylates are the first line treatment for moderate forms. Corticosteroids are used to induce remission, but are not given as maintenance therapy. Thiopurines are indicated as maintenance therapy in case of failure of salicylates or corticodependence. Anti TNF alpha are indicated in cortico-resistant severe flares or if cortico- dependence. Vedolizumab (anti-integrin) is the first non anti-TNF alpha biotherapy available for the treatment of UC. Severe acute colitis is a medical emergency; diagnosis is based on Lichtiger score. An emergency colectomy for severe acute colitis is indicated in cases of surgical complication or resistance to medical therapy. UC patients with extension beyond splenic flexure are at risk of colorectal cancer, increasing with the duration of the disease, severity of mucosal inflammation, family history of colorectal cancer, and the existence of sclerosing cholangitis. Annual surveillance colonoscopy is required in patients with sclerosing cholangitis regardless of the extension of their UC.

L

a rectocolite hémorragique (RCH) est une maladie inflammatoire chronique de l'intestin (MICI) limitée à la muqueuse, affectant de façon continue le rectum et le côlon. Elle évolue par poussées, entrecoupées de rémissions. Son origine est encore imparfaitement connue, mais probablement multifactorielle, conséquence d'une dérégulation du système immunitaire en réponse à des facteurs environnementaux et au microbiote intestinal, survenant chez des patients génétiquement prédisposés [1]. Son diagnostic repose sur un faisceau d'arguments cliniques, biologiques, endoscopiques et histologiques. Le choix de la stratégie thérapeutique et sa surveillance dépendent de la localisation et de la sévérité de l'atteinte.

Épidémiologie

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Les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin obéissent classiquement à un gradient Nord-Sud, affectant préférentiellement les populations des pays développés. Néanmoins, l'incidence de la RCH tend à croître dans les pays du tiers monde, alors qu'elle reste stable dans les pays occidentaux. En Europe, elle est de 24,3 pour 100 000 habitants par an, et sa prévalence est de 500 pour 100 000 habitants, avec environ 120 000 cas en France. Le sex-ratio est de 1,2 femme pour 1 homme. En Asie, la plus haute incidence rapportée est de 6,2 pour 100 000 habitants [2]. Les personnes ayant une RCH ont un taux de mortalité comparable à celui de la population générale.

développement de la maladie chez ses apparentés au premier degré ont été estimés à 1,6 %. Si les deux parents sont atteints, le risque de développer une RCH dans la vie serait de 36 %. Le taux de concordance de survenue d'une RCH entre deux jumeaux homozygotes est seulement de 6 à 19 %. L'antigène HLA DR2 est associé à la maladie.

Tabac Le tabac est un facteur protecteur dans la RCH, il protège contre sa survenue et améliore son évolution. Le risque relatif de développer une RCH est 2,5 fois moins élevé chez les fumeurs que chez les sujets n'ayant jamais fumé. Cet effet protecteur est proportionnel au nombre de paquets-année consommé. Lors du diagnostic de RCH, 10 % des patients sont fumeurs, contrairement à 25 à 40 % dans la population générale de même âge. L'évolution naturelle de la maladie est moins sévère chez les fumeurs. L'arrêt du tabac aggrave la maladie et sa reprise l'améliore [3].

Appendicectomie

Étiologie et physiopathologie

Chez les patients atteints de RCH, l'antécédent d'appendicectomie est associé à une évolution moins sévère. Une appendicectomie avant 20 ans protégerait également de la survenue d'une RCH. Les hypothèses physiopathologiques sont que l'appendice jouerait un rôle de réservoir de bactéries pouvant favoriser la survenue d'une RCH, ou que l'état inflammatoire responsable de l'appendicite protégerait du développement d'une RCH.

Facteurs génétiques

Le microbiote intestinal

Un antécédent familial de MICI est le principal facteur de risque de RCH. Lorsqu'un parent est atteint de RCH, les risques de

Il correspond à l'ensemble des micro-organismes présents dans le tube digestif (bactéries, phages, champignons, archaea). Il se

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Pour citer cet article : Klotz, M C, et al. Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique. Presse Med. (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.06.025 Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique

Circonstances du diagnostic Présentation clinique Des signes généraux peuvent être observés, notamment une altération de l'état général, avec pâleur et fièvre dans les formes sévères. Les signes digestifs sont principalement représentés par une diarrhée glairo-sanglante associée à un syndrome rectal, avec épreintes, ténesmes, faux besoins et impériosités. Ces symptômes altèrent considérablement la qualité de vie des malades. Les douleurs abdominales sont surtout présentes dans les atteintes coliques. Il n'y a pas de lésions anopérinéales, signe négatif important pour le diagnostic différentiel avec la maladie de Crohn. Des manifestations extradigestives peuvent apparaître au cours des MICI. Elles sont le plus souvent contemporaines de l'atteinte digestive. Elles sont cutanées (érythème noueux, pyoderma gangrenosum) ; ophtalmologiques (sclérites, épisclérites, uvéites, kératites) ; ostéo-articulaires (spondylarthropathies avec atteinte axiale, oligo-arthrite, ostéoporose) ; hépatobiliaires (cholangite sclérosante primitive). La cholangite sclérosante primitive (CSP) est fortement associée à la RCH : 70 % des CSP sont associées à une RCH, et une CSP est observée chez 0,5 à 5 % des patients atteints de RCH. L'association à une CSP est un facteur majeur de risque de cancer colorectal, justifiant une coloscopie annuelle de dépistage quelle que soit l'extension de la RCH. Le risque thromboembolique est majoré dans les MICI en poussée.

Apport de l'endoscopie La rectosigmoïdoscopie est le plus souvent le premier examen réalisé en urgence devant un tableau de rectorragies, elle permet d'identifier des lésions endoscopiques et de faire la première série de biopsies. Ce bilan sera complété par une coloscopie sous anesthésie générale avec biopsies étagées en muqueuse pathologique et macroscopiquement normale. Dans la RCH, le rectum est toujours atteint à partir de la partie supérieure du canal anal, de manière continue, avec une limite nette entre muqueuse pathologique et saine (figure 1). Lorsque le côlon est atteint au-delà de l'angle gauche, on parle de pancolite. La coloscopie totale permet d'évaluer les lésions muqueuses, leur sévérité et leur extension. Plusieurs scores endoscopiques de gravité existent. Le score de MAYO est le plus utilisé. Le score UCEIS est plus reproductible dans la RCH [5– 7]. Il prend en compte la disparition de la trame vasculaire, l'existence d'un saignement spontané ou provoqué et la présence d'ulcérations plus ou moins profondes. La présence de pseudopolypes inflammatoires et la perte des haustrations coliques sont les témoins d'une maladie ancienne. Ultérieurement, la surveillance endoscopique permet d'évaluer la réponse au traitement [8]. L'objectif thérapeutique est la cicatrisation muqueuse qui est associée à un meilleur pronostic évolutif avec moins d'hospitalisations, une épargne en corticoïdes et une diminution du recours à la chirurgie. La cicatrisation muqueuse endoscopique et histologique est également associée à une diminution du risque néoplasique lié à l'inflammation [9–11].

Mise au point

constitue au cours de la vie, en fonction de l'environnement et de facteurs liés à l'hôte. Il influe dans l'orientation de la réponse immune, dans la prolifération épithéliale. Au cours des MICI, il a été observé une dysbiose, un déséquilibre entre les bactéries protectrices et délétères [4].

GASTROENT EROLOGIE

Biologie

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Figure 1 Vue endoscopique de la limite nette entre muqueuse pathologique et muqueuse saine dans la rectocolite hémorragique

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Un syndrome inflammatoire biologique (C-réactive protéine [CRP]), une anémie et une éventuelle hypo-albuminémie permettent d'établir un diagnostic de gravité de la maladie. Une CRP normale n'élimine pas le diagnostic. Une coproculture avec recherche de toxine de Clostridium difficile et une parasitologie des selles permettent d'éliminer une infection à C. difficile, Salmonella, Shigella, Yersinia enterocolitica, ou une amoebose. Au cours de l'évolution, et a fortiori chez un patient immunodéprimé, une recherche de cytomégalovirus (CMV) par polymerase chain reaction (PCR) est obligatoire lors des poussées pour ne pas méconnaître une colite aiguë virale. Le dosage de la calprotectine fécale est un marqueur non invasif d'inflammation muqueuse, sensible mais non spécifique, utile lors de la surveillance. Le dosage des p-ANCA est peu utile en pratique au moment du diagnostic, il peut permettre, en cas de positivité, d'étiqueter une colite inclassée : 65 % des patients atteints de RCH ont des p-ANCA positifs contre 10 % dans la maladie de Crohn.

Pour citer cet article : Klotz, M C, et al. Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique. Presse Med. (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.06.025

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Figure 2 Vue histologique d'une biopsie colique : cryptite et abcès cryptique dans la rectocolite hémorragique

gauche. Un traitement combiné par voie locale et orale est plus efficace que la forme locale seule [12]. En cas d'atteinte pancolique, un traitement oral par dérivés du 5ASA est associé à des traitements locaux. La posologie d'attaque des 5-ASA per os est de 4 grammes par jour et l'efficacité est obtenue en 2 à 4 semaines. En cas d'échec des traitements salicylés, une corticothérapie orale est indiquée à la dose de 40 mg/jour ou 0,8 à 1 mg/kg/jour d'équivalent-prednisone à maintenir à pleine dose jusqu'à rémission clinique avant décroissance. La corticothérapie est un traitement uniquement de la poussée. Vingt pour cent des patients ayant eu recours à une corticothérapie deviennent corticodépendants dans l'année [13]. Le budésonide n'a pas prouvé son efficacité dans la RCH. Dans les formes sévères en poussée, une corticothérapie est prescrite en première intention. En cas de résistance à la forme orale, elle est administrée par voie intraveineuse. En cas de corticorésistance, un traitement par anti-TNF alpha (infliximab, adalimumab, golimumab) doit être introduit.

Anatomopathologie Lors du diagnostic, des biopsies étagées sont réalisées au cours de la coloscopie, avec au moins 2 biopsies de l'iléon confirmant son caractère sain. Les principaux signes observés à l'histologie sont : des anomalies épithéliales, des abcès cryptiques, et un infiltrat inflammatoire diffus transmuqueux (figure 2). La présence d'une plasmocytose basale a une bonne valeur prédictive positive de MICI à la phase précoce. Il n'y a jamais de granulome épithélioïde et gigantocellulaire dans la RCH, contrairement à la maladie de Crohn. L'activité histologique de la maladie est évaluée au cours du suivi. L'analyse histologique des biopsies aide au dépistage de lésions dysplasiques ou néoplasiques.

Traitement Traitement médical L'attitude thérapeutique dans la RCH doit être discutée en fonction de la localisation, de la sévérité clinique, biologique et endoscopique, du terrain, et de la réponse aux traitements antérieurs. Les objectifs sont, d'une part, cliniques, avec un contrôle des symptômes et une amélioration de la qualité de vie, et d'autre part, endoscopiques, avec l'obtention d'une cicatrisation muqueuse.

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Contrôle des poussées Les dérivés salicylés (5-ASA) sont le traitement de choix des formes légères à modérées de RCH. En cas d'atteinte rectale isolée, les suppositoires de mésalazine sont prescrits en première intention. Ils permettent, à eux seuls, une rémission dans 50 % des cas. En cas d'atteinte rectale et colique gauche, les 5-ASA locaux sous forme de mousse ou de lavements rectaux sont utiles en première intention, leur galénique permet d'atteindre l'angle

Maintien de la rémission Les dérivés salicylés sont indiqués par voie orale ou locale ou en association. Afin d'obtenir une meilleure observance, une prise orale unique quotidienne est préférable. Les thiopurines (azathioprine à 2,5 mg/kg ou 6-mercaptopurine à 1,5 mg/kg) sont utilisés en cas de corticodépendance ou d'échec des salicylés seuls [13–15]. Ils peuvent être prescrits en monothérapie ou en association avec un traitement par antiTNF alpha. Ils ont un délai d'action et leur efficacité ne peut être évaluée qu'à partir de 3 mois de traitement. Un bilan préthérapeutique est nécessaire comprenant une numération formule sanguine, un bilan hépatique et des sérologies virales dont celle de l'Epstein Barr virus (EBV). En cas de sérologie EBV négative (absence d'IgG), les thiopurines doivent être évitées en raison du risque létal d'une primo-infection à EBV sous thiopurines. Ce traitement contre-indique les vaccins vivants. Il convient de surveiller la numération formule sanguine, le bilan hépatique et de pratiquer une lipasémie en urgence en cas de douleur épigastrique sous thiopurines (risque de pancréatite médicamenteuse dans les premières semaines de traitement). Une protection solaire (photosensibilisation) et un suivi dermatologique sont recommandés. Chez la femme, la surveillance gynécologique (frottis) est recommandée. Le méthotrexate n'est actuellement pas recommandé en monothérapie dans la RCH, dans l'attente des résultats de l'étude METEOR du GETAID, étudiant son efficacité dans les formes corticodépendantes. Il peut être utilisé en association avec les anti-TNF alpha pour augmenter leur efficacité en diminuant l'imunogénicité. Les anti-TNF alpha sont indiqués en traitement d'entretien pour les formes sévères ou en cas de corticorésistance ou corticodépendance [16–18]. Un bilan pré-thérapeutique complet est

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Pour citer cet article : Klotz, M C, et al. Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique. Presse Med. (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.06.025 Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique

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nécessaire comprenant une recherche de tuberculose latente ou patente nécessitant un traitement antituberculeux avant de débuter les anti-TNF alpha. L'adalimumab, le golimumab [19] (par voie sous-cutanée) et l'infliximab (en perfusion) sont les anti-TNF alpha disponibles dans la RCH. Le vedolizumab (antiintégrine) [20] est la première biothérapie non anti-TNF alpha désormais disponible dans le traitement de la RCH. L'association d'un immunosuppresseur à une biothérapie augmente l'efficacité du traitement et diminue le risque d'immunisation à la biothérapie (anticorps anti-médicaments) [21].

Traitement chirurgical

Complications Colite aiguë grave La colite aiguë grave est une urgence médicochirurgicale menaçant le pronostic vital à court terme. Elle peut survenir au cours de la RCH ou la révéler. Elle est observée chez 10 à 15 % des malades atteints de RCH. Son diagnostic est clinico-biologique et peut être étayé par des éléments endoscopiques (figure 3). Les critères de Truelove et Witts permettent un diagnostic rapide (http://www.getaid.org/outils/score-de-truelove-et-witts. html). Une poussée sévère est définie par une diarrhée aiguë glairo sanglante avec plus de 6 selles par jour, associée à au moins un de ces critères : température > 37,5 8C, fréquence cardiaque > 90 bpm, hémoglobine < 10 g/dL, VS > 30 mm et albuminémie < 35 g/L. Le score de Lichtiger est exclusivement clinique et peut être suivi au lit du malade (http://www. getaid.org/outils/score-de-lichtiger.html). La colite aiguë grave est définie par un score de Lichtiger supérieur ou égal à 10. Il est utile pour la définition de la réponse au traitement : score de Lichtiger inférieur à 10 pendant 2 jours consécutifs, avec baisse d'au moins 3 points par rapport au score initial. Le bilan initial devant une colite aiguë grave consiste à rechercher des complications pouvant indiquer le recours à une chirurgie d'emblée : mégacôlon toxique (diamètre du côlon transverse supérieur à 6 cm et signes systémiques), perforation colique, hémorragie digestive basse massive. Lors du diagnostic, il est nécessaire de rechercher un facteur déclenchant infectieux.

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Figure 3 Vue endoscopique au cours d'une rectoscopie en urgence pour colite aiguë grave au cours de la RCH : ulcérations profondes et creusantes, perte de la trame vasculaire, muqueuse fragile saignant au contact

La prise en charge de la colite aiguë grave requiert la collaboration entre le gastroentérologue et le chirurgien digestif. Les formes compliquées d'emblée nécessitent une prise en charge chirurgicale urgente par colectomie subtotale et double stomie. Dans les formes non compliquées, le traitement de première intention repose sur la corticothérapie intraveineuse à la dose de 0,8 mg/kg/jour de méthylprednisone. Une évaluation clinicobiologique au cinquième jour de traitement va permettre de poursuivre la corticothérapie en cas de succès ou, en cas d'échec, de proposer un traitement de deuxième ligne par infliximab ou ciclosporine [24]. En cas d'échec du traitement médical de deuxième ligne, une colectomie doit être réalisée.

Risque de cancer colorectal L'inflammation muqueuse chronique fait le lit du cancer colorectal avec une séquence inflammation-dysplasie-cancer. Le risque de cancer colorectal augmente avec la durée d'évolution de la RCH, son étendue (absence de sur-risque pour une rectite isolée), la sévérité de l'inflammation et l'existence d'antécédents familiaux de cancer colorectal. Actuellement, on observe une réduction du risque de cancer colorectal [25], due à un meilleur contrôle de l'inflammation et à une meilleure surveillance. Les traitements par dérivés du 5-ASA ou azathioprine ont été associés à une diminution du risque de cancer colorectal, probablement par un meilleur contrôle de l'inflammation muqueuse [26–28]. Une coloscopie avec chromo-endoscopie et biopsies multiples étagées est recommandée à partir de 8 ans d'évolution pour

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La colectomie avec anastomose iléo-anale et réservoir en J est l'intervention de référence dans la RCH. La colectomie est indiquée en urgence lors de colite aiguë grave compliquée ou résistante au traitement médical. Elle peut être indiquée à froid chez des patients résistants au traitement médical maximal. En cas de dysplasie multifocale, de dysplasie de haut grade ou de lésion en relief dysplasique se développant au sein d'une muqueuse dysplasique (non adenoma-like lesions, anciennement appelées DALM), la coloproctectomie totale est indiquée en raison du haut risque de cancer. Après anastomose iléo-anale et réservoir en J, 10 à 59 % des patients ont un risque de développer une inflammation du réservoir (pochite) [22,23].

Pour citer cet article : Klotz, M C, et al. Rectocolite hémorragique : conduite diagnostique et prise en charge thérapeutique. Presse Med. (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.06.025

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dépister une dysplasie précédant le cancer. Elle doit être faite en période de rémission de la maladie car l'inflammation muqueuse conduit à des faux positifs. Les coloscopies de surveillance sont à répéter tous les 1 à 3 ans en fonction des résultats et des facteurs de risque individuels. En cas de cholangite sclérosante associée, une coloscopie annuelle est

recommandée, quelle que soit la durée d'évolution ou l'extension de la RCH. Déclaration d'intérêts : Vered Abitbol a été consultant pour MSD, Abbvie et Ferring. Les autres auteurs n'ont aucun conflit d'intérêt.

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