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Transplantation

Mise au point

Presse Med. 2014; 43: 921–930 ß 2014 Elsevier Masson SAS Tous droits réservés.

Lésions d’ischémie-reperfusion en transplantation pulmonaire Stéphane Gennai1,2, Christophe Pison3, Raphaël Briot1,2

1. CHU de Grenoble, pôle urgences et médecine aiguë, CS 10217, 38043 Grenoble cedex 09, France 2. Laboratoire TIMC-IMAG, UMR 5525, domaine de la Merci, 38706 La Tronche cedex, France 3. Université Joseph-Fourier, laboratoire de bioénergétique fondamentale et appliquée, Inserm U1055, BP 53, 38041 Grenoble cedex 09, France

Correspondance : Stéphane Gennai, CHU de Grenoble, pôle urgences et médecine aiguë, CS 10217, 38043 Grenoble cedex 09, France. [email protected]

Key points Ischemia-reperfusion injury after lung transplantation Lung ischemia-reperfusion is characterized by diffuse alveolar damage arising from the first hours after transplantation. The first etiology of the primary graft dysfunction in lung is ischemia-reperfusion. It is burdened by an important morbimortality. Lung ischemia-reperfusion increases the oxidative stress, inactivates the sodium pump, increases the intracellular calcium, leads to cellular death and the liberation of pro-inflammatory mediators. Researches relative to the reduction of the lung ischemiareperfusion injuries are numerous but few of them found a place in common clinical practice, because of an insufficient level of proofs. Ex vivo lung evaluation is a suitable technique in order to evaluate therapeutics supposed to limit lung ischemia-reperfusion injuries.

tome 43 > n89 > septembre 2014 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.01.018

Points essentiels L’ischémie-reperfusion pulmonaire est caractérisée par des dommages alvéolaires diffus survenant dès les premières heures post-transplantation. La défaillance primaire du greffon a comme première étiologie l’ischémie-reperfusion pulmonaire. Elle est grevée d’une importante morbi-mortalité. L’ischémie-reperfusion pulmonaire augmente le stress oxydatif, inactive la pompe à sodium, augmente le calcium intracellulaire, induit la mort cellulaire et la libération de médiateurs pro-inflammatoires. Les recherches relatives à la réduction des lésions d’ischémiereperfusion pulmonaires sont nombreuses mais peu d’entre elles ont trouvé une place en pratique clinique courante, en raison d’un niveau de preuves insuffisant. L’évaluation pulmonaire ex vivo constitue une technique de choix pour évaluer des thérapeutiques supposées limiter les lésions d’ischémie-reperfusion pulmonaires.

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Disponible sur internet le : 13 juin 2014

S Gennai, C Pison, R Briot

L

es lésions d’ischémie-reperfusion (I/R) sont caractérisées par des dommages alvéolaires diffus non spécifiques, un oedème pulmonaire et une hypoxie pouvant conduire jusqu’à la dysfonction primaire du greffon, parfois responsable du décès du patient, de la prolongation de son assistance respiratoire par ventilation mécanique ou du rejet aigu du greffon. Elles constituent la principale étiologie de la dysfonction primaire du greffon (DPG), syndrome qui apparaît habituellement dans les 72 heures post-transplantation. Quatre grades de sévérité de DPG ont été identifiés par l’International Society of Heart and Lung Transplantation (ISHLT), selon la valeur du rapport entre la pression partielle artérielle en oxygène (PaO2) et la fraction inspirée en oxygène (FiO2), et la présence ou non d’infiltrats radiologiques compatibles avec un oedème pulmonaire (tableau I) [1]. La DPG peut également résulter d’agressions survenant chez le donneur avant le prélèvement d’organe. Il s’agit de la préservation pulmonaire en ischémie froide, de la ventilation mécanique, de la mort cérébrale, de l’hypotension, des aspirations bronchiques et d’éventuels traumatismes ou infections. C’est la raison pour laquelle l’évaluation du donneur doit s’attacher à sélectionner des poumons qui seront à même de supporter plusieurs heures d’ischémie, sans qu’ils soient trop impactés sur le plan fonctionnel. Plusieurs stratégies de prévention et de traitement des lésions pulmonaires induites par l’I/R, introduites en pratique clinique, ont permis de réduire l’incidence de la DPG de 30 à 15 %.

Enjeux En dépit des avancées en matière de préservation pulmonaire, de l’amélioration des techniques chirurgicales et de la prise en charge péri-opératoire, les lésions pulmonaires induites par l’I/R demeurent une cause importante de morbi-mortalité, à la fois précoce et tardive, après transplantation pulmonaire.

Tableau I Grades de sévérité de la dysfonction primaire du greffon pulmonaire, d’après l’ISHLT [1] Grade

PaO2/FiO2

Infiltrats radiologiques compatibles avec un oedème pulmonaire

0

> 300

Absents

1

> 300

Présents

2

200–300

Présents

3

< 200

Présents

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FiO2 : fraction inspirée en oxygène ; PaO2 : pression partielle artérielle en oxygène.

Depuis 1982, la transplantation pulmonaire a rencontré un succès croissant. Elle constitue la thérapie de dernier recours d’un grand nombre pathologies pulmonaires au stade ultime de leur évolution. Les dernières décennies ont été marquées par le nombre croissant de patients sur liste d’attente de greffe malgré l’augmentation significative des centres pratiquant la transplantation pulmonaire [1]. Le registre de l’ISHLT rapportait en 2011 que près de 45 000 transplantations pulmonaires et cardio-pulmonaires avaient été effectuées à travers le monde [1]. En France, le nombre de patients enregistrés sur liste d’attente de transplantation pulmonaire ou cardiopulmonaire est passé de 166 en 2007 à 185 en 2011. Dans le même temps, le nombre de patients décédés en attente d’une greffe pulmonaire ou cardiopulmonaire diminuait (54 en 2007, 20 en 2011) grâce à l’augmentation de l’activité de greffe sur le territoire (223 en 2007, 324 en 2011) [2]. Par ailleurs, le taux de survie à 5 ans des patients transplantés est passé de 25 % dans les années 1980, à 50 % actuellement [2]. Ce résultat encore relativement mauvais est principalement imputable à la DPG. Selon une étude publiée par l’ISHLT en 2005 et qui concernait près de 5000 patients, la prévalence de la DPG était de 10 % [1]. La DPG augmentait le risque de décès des patients transplantés à la fois en aiguë (42 % des patients avec DPG décédaient à 30 jours versus 6 % en l’absence de DPG) et en chronique, avec une augmentation du risque de décès > 35 % dans les quatre ans post-greffe. La DPG étant la principale conséquence des lésions d’I/R, celles-ci sont devenues une thématique fondamentale de recherche, avec pour perspective la réduction de la morbi-mortalité post-transplantation pulmonaire.

Physiopathologie Les poumons sélectionnés pour la transplantation sont classiquement perfusés avec du liquide de préservation froid puis conservés en hypothermie, afin de ralentir leur métabolisme : il s’agit de l’ischémie froide, période de refroidissement de l’organe intervenant au cours de la décroissance ou de l’arrêt de la perfusion de sang ou d’un liquide de substitution (perfusat). L’ischémie est responsable d’une réduction de la quantité d’oxygène apportée aux organes par le perfusat : il s’agit de l’hypoxie. Hypothermie, ischémie, hypoxie et reperfusion induisent de nombreux processus physiopathologiques susceptibles de concourir à la mort cellulaire, tels que l’augmentation du stress oxydatif, l’inactivation de la pompe à sodium, l’augmentation du calcium intracellulaire, l’induction de l’apoptose et la libération de médiateurs pro-inflammatoires (tableau II).

Conséquences de l’ischémie froide et de l’hypoxie Accumulation de substances à l’origine du stress oxydatif Le stress oxydatif est caractérisé par la production d’espèces oxygénées particulièrement instables telles que l’anion tome 43 > n89 > septembre 2014

Lésions d’ischémie-reperfusion en transplantation pulmonaire

Tableau II Éléments de physiopathologie de l’ischémie-reperfusion en transplantation pulmonaire Conséquences de l’ischémie froide et de l’hypoxie Glycolyse anaérobie et acidose lactique Décroissance en ATP Inactivation de la pompe à sodium avec accumulation de calcium intracellulaire qui potentialise la production d’espèces oxygénées réactives Surcharge en calcium intracellulaire qui favorise l’ouverture du PTPm

Conséquences de la reperfusion Production d’espèces oxygénées réactives responsables de lésions cellulaires et de l’ouverture du PTPm

Mise au point

Transplantation

Apoptose par ouverture du PTPm Libération de médiateurs pro-inflammatoires tels que : IL-1b, IL-6, TNF-a et RAGE Activation du système du complément

Accumulation d’hypoxanthine et de NADPH à l’origine du stress oxydatif Production d’oxyde nitrique par les eNOS dont la production est favorisée par la NADPH oxydase ATP : adénosine triphosphate ; IL : interleukine ; NADPH : nicotinamide adénine dinucléotide phosphate ; eNOS : endothelial nitric oxide synthase ; PTPm : pore de transition de perméabilité mitochondriale ; RAGE : receptor for advanced glucose end-products ; TNF : tumor necrosis factor.

L’augmentation de la glycolyse anaérobie au cours de l’ischémie est responsable de l’accumulation d’acide lactique et d’ions H+ au niveau cytoplasmique. Les ions H+ sortent en partie de la cellule grâce à l’échangeur membranaire Na+/H+. Le sodium entrant est ensuite évacué de la cellule par la pompe Na+/K+-ATPase dont dépend essentiellement la clairance liquidienne alvéolaire. En situation d’hypothermie ou d’hypoxie, la tome 43 > n89 > septembre 2014

pompe Na+/K+-ATPase dysfonctionne et le sodium s’accumule au niveau intracellulaire, entraînant un « oedème cellulaire » [3]. En parallèle, l’échangeur Na+/Ca2+ est responsable d’une accumulation de calcium au niveau cytoplasmique d’autant plus importante que la pompe à sodium est inefficace (figure 1). Surcharge en calcium intracellulaire La surcharge en calcium intracellulaire est liée à l’hypoxie qui inactive la pompe Na+/K+-ATPase et à l’hypothermie qui libère le calcium de ses espaces de stockage intracellulaire. Cette surcharge peut engendrer des dommages cellulaires, en particulier en favorisant l’ouverture du pore de transition de perméabilité mitochondriale (PTPm) et la transformation de la xanthine déshydrogénase en xanthine oxydase qui potentialise la production de radicaux libres (figure 1) [3]. Production d’oxyde nitrique L’oxyde nitrique ou monoxyde d’azote (NO) est un radical libre synthétisé les NO synthases (NOS), protéines enzymatiques comportant trois isomères. La forme neuronale (nNOS) est essentiellement présente dans le cytosol des cellules neuronales du système nerveux central et a un rôle neuro-modulateur. La forme inductible (iNOS) est présente dans le cytosol des macrophages, induite par des cytokines et endotoxines et a un rôle cytotoxique. La forme endothéliale (eNOS) est essentiellement présente dans la membrane des cellules de l’endothélium vasculaire et a un rôle vasodilatateur. Ces trois isomères sont calcium dépendants. En hypoxie, l’activité de la eNOS calcium/calmoduline dépendante décroît, réduisant à son tour la production de NO. Il en résulte une vasoconstriction, défavorable notamment au passage de la solution de

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superoxyde, le peroxyde d’hydrogène et le radical hydroxyle, susceptibles d’interagir avec la première structure moléculaire rencontrée, habituellement les lipides constitutifs de la membrane cellulaire. Les lésions cellulaires induites vont de la simple augmentation de perméabilité à la lyse cellulaire. Le stress oxydatif intéresse la plupart des cellules du parenchyme pulmonaire [3]. Il résulte de deux mécanismes :  un premier lié à l’hypoxie–anoxie : la décroissance de l’adénosine triphosphate (ATP) avec accumulation de son produit de dégradation, l’hypoxanthine, à partir duquel des espèces oxygénées réactives sont produites au moment de la réoxygénation par reperfusion et/ou ventilation ;  un second lié à l’ischémie mais non lié à l’hypoxie ou à la décroissance en ATP, nicotinamide adénine dinucléotide phosphate (NADPH) oxydase dépendant, qui survient principalement au niveau des cellules endothéliales, des polynucléaires neutrophiles et des monocytes/macrophages (figure 1). Au niveau endothélial, la modification des forces physiques liées à l’arrêt du flux sanguin induit des signaux biochimiques (méchanotransduction), responsables de l’activation de la NADPH oxydase et du facteur nucléaire (NF)-kB [4]. Inactivation de la pompe à sodium

S Gennai, C Pison, R Briot

Na+

Secteur extracellulaire

Secteur intracellulaire

K+

Ca2+

Na+ intracellulaire

Na+

H+ H+ intracellulaire

ATP

Na+

ADP

lactates

Hypoxie

Ca2+ intracellulaire

Ischémie

glycolyse anaérobie

hypoxanthine

xanthine

xanthine

déshydrogénase

oxydase

NADPH

O2

NADPH oxydase

Ca2+ espèces oxygénées réacves

Ca2+ PTPm Mitochondrie

Figure 1 Formation d’espèces oxygénées réactives au cours de l’ischémie-reperfusion pulmonaire L’hypoxie est responsable, au niveau intracellulaire, de la mise en route de la glycolyse anaérobie, de l’accumulation de lactates et d’ions H+. La baisse de la production d’ATP et l’accumulation de son produit de dégradation, l’hypoxanthine, favorise la production d’espèces oxygénées réactives sous l’effet de la xanthine oxydase. Les ions H+ accumulés au niveau intracellulaire s’échangent avec les ions Na+ extracellulaires. La pompe Na+/K+-ATPase ne fonctionnant plus par manque d’ATP, le Na+ s’accumule au niveau intracellulaire et s’échange avec le Ca2+ extracellulaire. Le Ca2+ accumulé au niveau intracellulaire favorise à son tour l’ouverture du PTPm et la transformation de la xanthine déshydrogénase en xanthine oxydase. L’ischémie est par ailleurs responsable d’une accumulation de NADPH qui, sous l’effet de la NADPH oxydase, favorise la production d’espèces oxygénées réactives. Ces dernières favorisent à leur tour l’ouverture du PTPm. ATP : adénosine triphosphate ; ADP : adénosine diphosphate ; NADPH : nicotinamide adénine dinucléotide phosphate ; PTPm : pore de transition de perméabilité mitochondriale.

préservation [5]. Certains auteurs ont cependant montré que la production de NO pouvait augmenter en situation hypoxique via l’élévation de la concentration intra-cytoplasmique en calcium [5].

Conséquences de la reperfusion Augmentation du stress oxydatif L’hypoxanthine et la NADPH, accumulées en phase d’ischémie froide et d’hypoxie, favorisent la production d’espèces oxygénées réactives au moment de la réoxygénation par reperfusion (figure 1). Ces dernières sont responsables à la fois de lésions cellulaires directes par dégradation ou destruction des structures moléculaires rencontrées et de lésions cellulaires indirectes en favorisant l’ouverture du PTPm. Mort cellulaire et pore de transition de perméabilité mitochondriale

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Chez l’homme, dans les transplantations pulmonaires réussies (fonction pulmonaire conservée, devenir favorable des patients), environ 30 % des cellules pulmonaires entrent en

apoptose dans les deux heures qui suivent la reperfusion. Des faits similaires ont été observés expérimentalement chez le rat, après 12 heures d’ischémie froide [3]. L’apoptose n’intervient alors pas au moment de l’ischémie (contrairement à la nécrose), mais à la reperfusion. L’induction de l’apoptose est régulée par deux voies, intrinsèque et extrinsèque [3]. La voie intrinsèque met en jeu la mitochondrie et le PTPm ; elle est notamment activée par les espèces oxygénées réactives et l’accumulation de calcium intracellulaire (figure 1). La voie extrinsèque met en jeu des récepteurs de mort cellulaire et leurs ligands (ex : TNF et son récepteur). L’activation de la première voie est précoce lors de la reperfusion ; la seconde est tardive, son induction prenant parfois plusieurs heures. Le PTPm est situé au niveau de la membrane mitochondriale interne. Sa structure moléculaire est toujours débattue. Dans des conditions physiologiques normales, le PTPm est fermé et la membrane mitochondriale interne est imperméable à la plupart des ions et métabolites. Sous l’effet du stress oxydatif, le PTPm s’ouvre et les forces osmotiques engendrées tome 43 > n89 > septembre 2014

Lésions d’ischémie-reperfusion en transplantation pulmonaire

par les protéines de la matrice mitochondriale deviennent responsables d’un gonflement de la matrice, pouvant conduire à la rupture de la membrane mitochondriale externe et à la libération au sein du cytoplasme de facteurs pro-apoptotiques [6]. Libération de médiateurs pro-inflammatoires L’I/R des organes solides tels que les reins, le foie, le coeur et les poumons, est responsable de la libération précoce de cytokines pro-inflammatoires telles que les interleukines (IL)-1b et IL-6 ou le tumor necrosis factor (TNF)-a [3]. Une grande partie de ces cytokines est produite par les macrophages alvéolaires, en réponse au stress oxydatif. L’I/R s’accompagne également d’un remodelage membranaire avec production de lipides bioactifs dont certains ont des fonctions de médiateurs intra- ou extracellulaires. Elle est également responsable de l’activation du système du complément et de la production d’endothéline qui vont indirectement augmenter la perméabilité vasculaire et amplifier la réponse inflammatoire [3]. Le receptor for advanced glycation end-products (RAGE) constitue par ailleurs un marqueur relativement spécifique de la lésion épithéliale pulmonaire. En situation de stress, le RAGE, produit principalement par les cellules alvéolaires de type I qui recouvrent 95 % de la surface pulmonaire, se retrouve au niveau alvéolaire et du perfusat. Les travaux de Briot et al. montrent que la concentration de RAGE dans le liquide alvéolaire est corrélée aux capacités de réabsorption liquidienne épithéliale du poumon [7]. Le taux de RAGE est également corrélé à la mortalité précoce post-transplantation.

Prévention des lésions d’ischémiereperfusion pulmonaires Les principaux moyens préventifs des lésions d’I/R en transplantation pulmonaire, utilisés en pratique clinique courante, sont résumés dans le tableau III.

Moyens préventifs utilisés au moment de l’ischémie Thérapies injectables ou en nébulisation Un certain nombre de thérapies ont été testées juste avant l’ischémie, dans l’espoir de réduire les lésions d’I/R. Ainsi, l’administration de calcium-bloqueurs avant le prélèvement pulmonaire, limiterait les lésions d’I/R [3]. Certains auteurs ont montré sur un modèle animal, que l’administration de Nacétyl cystéine par nébulisation avant ischémie (effet antioxydant par stimulation de la production de glutathion) limite le nombre de macrophages, lymphocytes et neutrophiles et réduit les taux d’IL-1b dans le lavage broncho-alvéolaire (LBA) après reperfusion [8]. Par ailleurs, plusieurs travaux ont mis en évidence l’effet protecteur des prostaglandines (PG) sur la survenue des lésions d’I/R. L’administration de PGE1 en intraveineux (IV) avant ischémie, améliore la distribution du liquide de préservation et diminue l’oedème pulmonaire en réduisant le coefficient de filtration capillaro-alvéolaire [9]. L’administration conjointe de PGE2 et de rolipram en nébulisation, possède également un effet protecteur sur la survenue des lésions d’I/R [10]. Cependant, aucune de ces études ne possède un niveau de preuve suffisant pour légitimer un consensus de prise en charge.

Mise au point

Transplantation

Surfactant Le surfactant est principalement constitué de lipides. Il est produit, stocké et sécrété par les cellules alvéolaires de type II. Il existe un pool intracellulaire au sein des cellules épithéliales alvéolaires de type II et un pool intra-alvéolaire. Le surfactant dysfonctionne au cours de l’I/R. L’administration de surfactant exogène améliore la fonction pulmonaire après transplantation, notamment lorsqu’elle intervient chez le donneur avant prélèvement [11]. Mais les études à haut niveau de preuve manquent et l’utilisation de surfactant exogène n’est pas recommandée en pratique clinique courante.

Tableau III Principaux moyens préventifs des lésions d’ischémie-reperfusion en transplantation pulmonaire utilisés en pratique clinique courante Moyens préventifs utilisés au moment de l’ischémie Prostaglandines injectables Solutions de préservation extracellulaires avec apport de glucose et faible concentration en potassium Administration de la solution de préservation par flush antérograde progressif, pneumoplégie rétrograde additionnelle ou flush rétrograde Inflation pulmonaire avant réimplantation

Moyens préventifs utilisés au moment de la reperfusion Circulation extracorporelle Levée progressive du clamp artériel Faibles volumes courants (5-7 mL/kg) et PEP = 5 cmH2O FiO2 la plus basse possible

FiO2  50 % Hypothermie 4–8 -C

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FiO2 : fraction inspirée en oxygène ; PEP : pression expiratoire positive.

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Préconditionnement En partant du postulat qu’un tissu exposé à un premier stress peut développer une tolérance à un second stress, plusieurs équipes ont développé dans les années 1990 des méthodes de préconditionnement pulmonaires et cardiaques, qui visaient à réduire les lésions d’I/R. Ainsi, l’application de brèves périodes d’ischémie ou d’hyperthermie juste avant la période ischémique permettait de réduire les lésions secondaires à la reperfusion [12]. Deux effets protecteurs sont actuellement distingués dans la littérature : un effet précoce plus efficient et un effet tardif, survenant plus de 12 h après la phase de préconditionnement et persistant pendant 72 h. Les mécanismes physiopathologiques à l’origine de ces effets protecteurs ont été partiellement élucidés ces dernières années. Ils font intervenir la production de protéine kinase C, à l’origine d’une cascade d’événements aboutissant à l’activation des protéines kinases activées par des agents mitogènes (mitogen-activated protein kinases [MAPK]), qui inhibent l’ouverture du PTPm [12]. Solutions de préservation La solution de préservation idéale doit avoir une pression oncotique et une composition électrolytique proches du milieu extracellulaire, tout en garantissant un apport énergétique suffisant. Elles se partagent deux groupes : les intracellulaires d’une part avec Euro-CollinsW et University of WisconsinW, et les extracellulaires d’autre part avec CelsiorW, PerfadexW (low potassium dextran [LPD] – glucose) et WallworkW. Le PerfadexW, développé spécifiquement pour les poumons, est la seule solution qui contienne du dextran. Cela lui confère un plus grand pouvoir osmotique dont l’objectif est de réduire l’oedème cellulaire secondaire à l’accumulation cytoplasmique de sodium, et un rôle anti-thrombotique par l’amélioration de la déformabilité des érythrocytes. La faible concentration en potassium des solutions CelsiorW et PerfadexW permet de se prémunir de la vasoconstriction secondaire à la dépolarisation des cellules musculaires lisses et, en conséquence, de la production d’espèces oxygénées réactives par les artères pulmonaires. Le bénéfice des solutions extracellulaires en transplantation pulmonaire, bien qu’ayant fait l’objet de controverses, a été démontré par un grand nombre d’études : elles réduisent l’oedème pulmonaire post-transplantation et garantissent une meilleure fonction initiale des greffons dans des délais pouvant atteindre 24 heures d’ischémie [13]. En revanche, la supériorité d’une solution extracellulaire par rapport à l’autre n’est pas établie. Techniques d’administration de la solution de préservation

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La plupart des équipes qui pratiquent la transplantation pulmonaire utilisent la méthode du flush unique (flush antérograde via l’artère pulmonaire) en raison de sa simplicité technique. Toutefois, certaines équipes utilisent la technique du flush rétrograde additionnel : le flush antérograde via

l’artère pulmonaire est suivi d’un flush rétrograde via les veines pulmonaires. Cette technique permettrait d’obtenir un refroidissement plus rapide du greffon, associé à une moindre expression de cytokines pro-inflammatoires telles que l’interféron (IFN)-g [14]. D’autres équipes ont évalué, chez l’animal, la technique du flush rétrograde, associée ou non à un refroidissement in situ du greffon. Elle permettrait de « laver » les poumons des médiateurs pro-inflammatoires accumulés en phase d’ischémie et d’évacuer de la circulation pulmonaire des petits caillots ou d’éventuelles autres embolies créées pendant le prélèvement, réduisant ainsi les résistances vasculaires pulmonaires et améliorant l’oxygénation des greffons post-transplantation. Par ailleurs, dans une étude expérimentale qui comparait le débit de perfusion d’une solution de préservation de 20 mL/kg en 6 minutes, à l’administration du même volume en fixant la pression d’administration au niveau de l’artère pulmonaire à 18–20 mmHg, le temps d’administration de la solution de préservation était réduit, les capacités d’oxygénation améliorées, la présence d’eau pulmonaire réduite, et la survie post-opératoire des animaux plus élevée, dans le groupe à plus haut débit de perfusion [15]. Les études à haut niveau de preuve manquant, il n’existe pas de consensus relatif à la technique d’administration de la solution de préservation. L’utilisation d’une solution hypothermique reste néanmoins la règle. Inflation, oxygénation et température de préservation De nombreuses études montrent qu’on améliore la préservation pulmonaire en pratiquant une inflation durant la période d’ischémie froide. Cela permet de maintenir un certain niveau de métabolisme aérobie et donc une production énergétique. Le maintien de la pompe Na+/K+-ATPase évite ainsi, au niveau intracellulaire, une surcharge en sodium et la surcharge en calcium qui en résulterait (figure 1). En conséquence, la production de radicaux libres et le risque d’apoptose sont réduits au moment de la reperfusion. L’inflation permet également de préserver, au moins partiellement, l’intégrité du surfactant et le transport épithélial alvéolaire. Sakuma et al. ont montré que l’inflation pulmonaire permettait de maintenir la clairance liquidienne alvéolaire (versus déflation avec décroissance de la clairance), indépendamment de la présence d’oxygène [16]. Certaines équipes réalisent une fibroscopie bronchique avant la phase d’ischémie. Elle optimiserait l’inflation pulmonaire en permettant l’extraction d’éventuels bouchons muqueux et la réalisation de manoeuvres de recrutement alvéolaire sélectif. Il n’existe pas à ce jour d’étude avec un niveau preuve suffisant, qui justifierait son utilisation en pratique clinique courante. D’une façon générale, l’inflation pulmonaire vise à réduire les atélectasies, associées à des résistances vasculaires pulmonaires élevées et à une moins bonne distribution de la solution de préservation. Cependant, la détermination d’une inflation « idéale » qui lèverait les atélectasies en évitant les tome 43 > n89 > septembre 2014

Lésions d’ischémie-reperfusion en transplantation pulmonaire

Moyens préventifs utilisés au moment de la reperfusion Thérapies injectables Des thérapies impliquant des médiateurs de l’inflammation, utilisées au début de la reperfusion, permettraient de réduire les lésions d’I/R. Il s’agit, par exemple, de l’administration de PGE1 en phase précoce de reperfusion. Les mécanismes en cause sont les propriétés vasodilatatrices de PGE1 et la modification du profil des cytokines, avec décroissance des cytokines pro-inflammatoires TNF-a et IL-12, et production de la cytokine anti-inflammatoire IL-10 [17]. Les études à haut niveau de preuve faisant défaut, l’utilisation de PGE1 n’est pas recommandée en pratique clinique courante. L’inhibition du système du complément semble aussi avoir un effet bénéfique sur les lésions d’I/R, la durée d’intubation et la durée moyenne de séjour en réanimation des patients transplantés [18]. Par ailleurs, l’injection d’agents anti-apoptotiques de type insulin-like growth factor (IGF)-1 ou ZVAD-fmk (Z-Val-AlaAsp(OMe)-CH2F) avant la reperfusion permettrait de réduire les lésions d’I/R sur des modèles murins [19]. Monoxyde d’azote Le NO a des propriétés vasoactives et immunomodulatrices [3]. Il catalyse la formation de 30 -50 -guanosine monophosphate cyclique (GMPc), principal événement qui entre en compte dans son mécanisme d’action. Le NO réduit le tonus vasculaire et la vasoconstriction hypoxique, limite l’adhésion plaquettaire, est impliqué dans la destruction d’organismes exogènes et limite les lésions tissulaires. Il décroît au cours de l’I/R. L’augmentation du NO avant reperfusion, soit par un apport exogène sous forme d’inhalation, soit par stimulation de l’activité des NOS, permettrait de réduire les lésions d’I/R [3]. Cependant, le NO peut réagir avec l’anion superoxyde pour former l’acide peroxynitreux, oxydant très actif qui peut induire une libération tome 43 > n89 > septembre 2014

d’endothéline et majorer les lésions alvéolaires. Le NO n’a toutefois pas démontré son intérêt dans la prévention de la défaillance primaire du greffon, la durée de séjour ou la mortalité à 30 jours des patients greffés [3]. Monoxyde de carbone Le monoxyde carbone (CO) est issu de la voie de l’hème oxygénase. Il a, comme le NO, des propriétés vasoactives via la formation de GMPc. Il possède également une activité anti-inflammatoire et anti-apoptotique, dépendante de la voie des MAPK et distincte de la voie NO/GMPc [3]. Une surexpression de l’hème oxygénase risque cependant d’entraîner une accumulation de fer libre à l’origine de la catalyse du radical hydroxyle, augmentant ainsi le stress oxydatif. Techniques de reperfusion Deux techniques chirurgicales sont applicables aux premiers instants de la reperfusion : la purge rétrograde et la purge antérograde du lit vasculaire pulmonaire. La purge antérograde a l’inconvénient d’exposer le lit vasculaire d’aval à une reperfusion à haute pression, à moins qu’une assistance circulatoire ne soit utilisée. Dans les deux cas, il est recommandé de lever progressivement le clamp artériel pulmonaire afin de limiter le débit initial de reperfusion. Aucune technique n’a cependant démontré sa supériorité par rapport à l’autre. La transplantation cardiopulmonaire, contrairement à la transplantation mono-pulmonaire, indique l’utilisation d’une circulation extracorporelle (CEC), appelée cardiopulmonary bypass par les anglophones. Le choix d’une CEC dans la transplantation bi-pulmonaire séquentielle dépend de plusieurs facteurs. Le poumon dont la fonction est la plus mauvaise est généralement remplacé en premier, afin d’éviter de recourir à la CEC. Celui-ci peut toutefois se révéler indispensable en cas d’oedème de reperfusion précoce du premier poumon transplanté, favorisé par l’afflux sanguin qui correspond alors à la totalité du débit cardiaque. Certaines équipes proposent une CEC de façon systématique, juste après l’implantation du premier poumon et avant l’implantation du second. Cette technique permettrait une meilleure oxygénation des poumons dans les heures qui suivent la transplantation et réduirait l’occurrence de l’oedème pulmonaire sévère dans le premier poumon transplanté, en contrôlant la vitesse de reperfusion. Aucun bénéfice significatif n’a cependant été démontré sur la prévalence de la DPG ou la survie des patients transplantés [20]. Il existerait même une morbi-mortalité accrue chez les patients bénéficiant de cette technique. Post-conditionnement Le concept de post-conditionnement a été développé après celui du préconditionnement par Zhao et al. : l’application de brèves périodes d’ischémie au moment d’une reperfusion suivant une période d’ischémie prolongée, réduisait significativement la taille de l’infarctus myocardique [21]. Cette étude a

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barotraumatismes demeure empirique, la plupart des études publiées à ce sujet portant sur des modèles animaux. La présence d’oxygène est requise durant la période de préservation des poumons prélevés. Toutefois, une FiO2 > 50 % s’associerait à une peroxydation lipidique accrue et donc à plus grande production d’espèces oxygénées réactives au moment de la reperfusion. L’utilisation d’une FiO2 de 50 % ou moins est recommandée en pratique clinique. La température de préservation des poumons a fait l’objet de débats. Certaines équipes ont suggéré que les poumons devraient être préservés à 10 8C plutôt qu’à 4 ou 15 8C, mais d’autres auteurs n’ont pas corroboré cette thèse. Si à cela on ajoute qu’à 10 8C les poumons ont davantage besoin de substrats métaboliques et qu’au-delà de 10 8C le risque de lésion pulmonaire augmente fortement, une température de préservation comprise entre 4 et 8 8C semble être la plus adaptée [3]. De fait, il s’agit de la température de conservation habituellement utilisée en pratique clinique courante.

Mise au point

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permis d’établir de façon formelle le concept de reperfusion létale qui faisait débat jusqu’alors. Les phénomènes de nécrose et d’apoptose ont été décrits dans la reperfusion létale [3]. Par ailleurs, la majorité des lésions tissulaires sont déclenchées par des événements biologiques qui surviennent lors des premières minutes de reperfusion. Le post-conditionnement réduit la production d’espèces oxygénées réactives et la concentration en calcium intracellulaire [3]. Cette technique n’est pas utilisée en pratique clinique courante. Techniques de ventilation La variation des pressions transpulmonaires influence l’environnement microvasculaire, ce qui explique l’importance du choix de la stratégie de ventilation. Des pressions alvéolaires élevées peuvent conduire à des lésions capillaires et à une augmentation du coefficient de filtration alvéolo-capillaire. Inversement, des pressions alvéolaires basses favorisent la clairance liquidienne péri-alvéolaire, facilitant les mouvements de liquides lymphatiques depuis les espaces péri-microvasculaires vers les vaisseaux lymphatiques plus larges. De faibles volumes de ventilation (VT = 5–7 mL/kg) associés à une faible pression expiratoire positive (PEP) (5 cmH2O) ont ainsi été suggérés pour garantir la protection des poumons, de faibles volumes courants étant associés à de faibles pressions au niveau des voies aériennes. Par ailleurs, le phénomène d’I/R est responsable de la coexistence de zones normalement ventilées, de zones collabées recrutables et de zones oedématiées non recrutables (le plus souvent situées au niveau de la zone 3 de west). L’augmentation des volumes courants ou des pressions du respirateur risque de distendre de façon inappropriée les zones normalement ventilées et d’y induire des barotraumatismes. Des lésions de cisaillement de la barrière alvéolo-capillaire à l’origine d’une fuite liquidienne du secteur vasculaire vers le secteur alvéolaire peuvent également survenir lors de cycles répétés d’ouverture et de fermeture des alvéoles : les ventilatory induced lung injury (VILI). D’autre part, il a été clairement démontré par une étude multicentrique intéressant 1255 patients transplantés, que le choix d’une FiO2 la plus basse possible au moment de la reperfusion réduit le risque de survenue de la DPG [22]. Les recommandations en termes de ventilation du poumon réimplanté avant l’implantation du second respectent les mêmes principes : faibles volumes courants, PEP modérée et FiO2 basse.

Nouvelles perspectives

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Cette dernière décennie a connue l’avènement de progrès techniques et de découvertes thérapeutiques dont le principal objectif est la réduction des lésions d’I/R. Ces avancées vont très probablement prendre toute leur part dans l’avenir proche de la transplantation pulmonaire. Au premier rang de ces avancées, figure la technique de perfusion pulmonaire ex vivo (ex vivo lung perfusion [EVLP]),

inventée par le chirurgien thoracique suédois Stig Steen [23]. Poussés par la pénurie de greffons pulmonaires, Stig Steen et son équipe de transplantation ont été amenés à reconsidérer les critères d’acceptabilité des greffons, estimés trop stricts. L’EVLP avait alors pour objectif de requalifier objectivement des poumons marginaux, c’est-à-dire non acceptés a priori. Depuis 2001, cette technique de « reconditionnement » a été utilisée avec succès par divers centres de transplantation à travers le monde. Elle a permis des greffes de poumons marginaux « limites » avec des résultats comparables à ceux de greffes classiques [24]. Des dispositifs semi-automatisés facilitant la procédure d’EVLP ont même été commercialisés : le système O.C.S. TransmedicsW qui permet l’évaluation des poumons immédiatement après leur prélèvement (sans période d’ischémie froide) et le système VivolineW basé sur le principe de Steen (évaluation après ischémie froide). L’EVLP a été également utilisée par certaines équipes pour évaluer des thérapeutiques médicamenteuses, issues de la thérapie génique ou cellulaire. Inci et al. ont montré sur un modèle animal porcin d’EVLP, que l’adjonction de N-acétylcystéine ou d’urokinase, améliorait la fonction pulmonaire et que la réalisation d’un lavage broncho-alvéolaire avec du surfactant, diminuait les lésions pulmonaires induites par de l’acide gastrique [25]. Frank et al. ont montré, sur un modèle humain d’EVLP, que la clairance liquidienne alvéolaire était améliorée par l’instillation de terbutaline [26]. Cypel et al. ont par ailleurs mis en évidence sur des poumons humains dont la production de cytokine anti-inflammatoire IL-10 était stimulée par thérapie génique, que les capacités d’échanges gazeux s’amélioraient et les RVP diminuaient [27]. Dans un modèle similaire, Lee et al. ont rapporté que l’administration de cellules souches mésenchymateuses (MSC) allogéniques, une heure après l’instillation d’endotoxine d’Escherichia coli, diminuait la perméabilité alvéolo-capillaire et restaurait la clairance liquidienne alvéolaire. L’effet bénéfique était principalement associé à la sécrétion du facteur de croissance des kératinocytes [28]. Une étude préliminaire publiée par la même équipe sous la forme d’un résumé par l’American Thoracic Society, révèle que l’administration intraveineuse de MSC humaines sur des poumons récusés pour transplantation, dont la clairance liquidienne alvéolaire est < 10 % mais non nulle, augmente cette dernière. Plusieurs travaux sont actuellement menés par cette même équipe, pour investiguer les effets immunomodulateurs médiés par les MSC et les effets thérapeutiques potentiels de microvésicules issues de MSC, contenant des protéines et du matériel génétique d’intérêt. Par ailleurs, certaines équipes proposent l’utilisation d’un oxygénateur membranaire extracorporel (extracorporeal membrane oxygenator [ECMO]) pour les patients qui auraient une défaillance respiratoire aiguë immédiatement après transplantation [29]. Les publications démontrent la faisabilité tome 43 > n89 > septembre 2014

Lésions d’ischémie-reperfusion en transplantation pulmonaire

de cette technique et l’absence de risque majeur lié à sa mise en oeuvre dans cette indication. Au sein de notre laboratoire, nous avons mis en pratique la technique de l’EVLP, afin de tester pour la première fois sur un modèle utilisant des poumons de grands mammifères, les effets de la cyclosporine A (CsA) dans la prévention des lésions d’I/R pulmonaires [30]. La CsA avait déjà montré des propriétés anti-apoptotiques par inhibition du PTPm, dans différents organes d’espèces animales variées. Nous avons montré que la CsA donnée au moment de l’ischémie et au début de la reperfusion, après une période de deux heures d’ischémie froide, augmente le rapport PaO2/FiO2 comparée aux poumons non traités, de façon dose-dépendante.

Conclusion L’I/R en transplantation pulmonaire est la première responsable de la dysfonction primaire du greffon. Elle est grevée

d’une importante morbi-mortalité, en phase aiguë post-greffe, mais également plusieurs années après transplantation. La réduction des lésions d’I/R pulmonaires constitue un enjeu majeur de la prise en charge des transplantés pulmonaires. De nombreuses thérapies ont montré un intérêt à l’échelle expérimentale, mais peu d’entre elles ont démontré leur efficacité en pratique clinique courante. En parallèle, de nombreuses procédures chirurgicales et de réanimation demeurent liées à des protocoles locaux plutôt qu’à des consensus nationaux ou internationaux. La validation de ces procédures par des études cliniques plus ambitieuses constituerait un pas important vers la réduction des lésions d’I/R, mais l’EVLP porte d’ores et déjà l’espoir d’une « révolution » en matière de transplantation pulmonaire.

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Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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[Ischemia-reperfusion injury after lung transplantation].

Lung ischemia-reperfusion is characterized by diffuse alveolar damage arising from the first hours after transplantation. The first etiology of the pr...
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