Synthèse ´ Ann Biol Clin 2013 ; 71 (special 1) : 5-18

Infections materno-fœtales : difficultés diagnostiques et prise en charge maternelle

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Infections transmitted from the mother to the fetus: diagnostic issues and management of pregnancy Christelle Vauloup-Fellous Elise Bouthry Liliane Grangeot-Keros Laboratoire de virologie du GH Paris-Sud, Centre national de référence des infections rubéoleuses materno-fœtales, AP-HP, Hôpital Paul Brousse, Villejuif, France

Résumé. Les infections materno-fœtales sont fréquentes et posent de délicats problèmes de diagnostic et de conduite thérapeutique. Au cours de la grossesse, la transmission de l’agent infectieux (virus, bactéries et parasites) au fœtus et son retentissement embryofœtal sont très variables selon l’agent causal, le terme de la grossesse et l’état immunitaire de la mère. Les conséquences délétères pour le fœtus sont majoritairement observées au cours des primo-infections maternelles : avortement prématuré, mort in utero, embryopathies, fœtopathies mais également atteintes du nouveau-né ou conséquences apparaissant plus tardivement. Les circonstances du diagnostic de l’infection maternelle et/ou fœtales sont variables selon l’agent infectieux. Certaines pathologies infectieuses : la toxoplasmose, la rubéole, la syphilis et l’hépatite B font l’objet de programmes de dépistage prénatal. D’autres infections sont souvent diagnostiquées à la suite d’anomalies échographiques évocatrices (en particulier le cytomégalovirus et le parvovirus B19) ou de signes cliniques maternels (varicelle). Couplée aux données cliniques et à l’imagerie, la biologie occupe une place essentielle dans la prise en charge et le suivi de ces femmes et de leurs nouveau-nés. L’objectif de cet article est de faire le point sur le diagnostic des différentes infections materno-fœtales pour lesquelles la stratégie diagnostique biologique est spécifique à la grossesse : la rubéole, la varicelle, la syphilis, la toxoplasmose, l’hépatite B, et les infections à cytomégalovirus et à parvovirus B19. Mots clés : infections materno-fœtales, diagnostic biologique, prise charge, prévention

doi:10.1684/abc.2013.0897

Abstract. Some infections are considered as feared risks during pregnancy. These infections may lead to severe damage of the fetus or the newborn depending on the infectious agent and the term of pregnancy where the infection occurred. Antenatal screening (in France it concerns toxoplasmosis, rubella, syphilis and hepatitis B) play an important role in prevention and management of vertically transmissible infections. However, biological diagnosis is also essential when maternal/neo-natal clinical symptoms or abnormal ultrasound findings are observed. In this article we chose to focus on rubella, varicella, syphilis, toxoplasmosis, hepatitis B and cytomegalovirus and parvovirus infections. Key words: materno-fetal infections, biological diagnosis, management, prevention

Tirés à part : C. Vauloup-Fellous Pour citer cet article : Vauloup-Fellous C, Bouthry E, Grangeot-Keros L. Infections materno-fœtales : difficultés diagnostiques et prise en charge maternelle. Ann Biol Clin 2013 ; 71(sp´ecial 1) : 5-18 doi:10.1684/abc.2013.0897

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Synthèse Les infections materno-fœtales sont fréquentes et posent de délicats problèmes de diagnostic et de conduite thérapeutique. Différents virus, bactéries et parasites peuvent être transmis d’une femme enceinte à son fœtus, et être à l’origine (selon l’agent responsable et la période de contamination) : d’un avortement spontané, d’une embryopathie (malformation congénitale), de pathologies fœtales, d’atteintes du nouveau-né (naissance d’un enfant mort-né ou maladie néonatale clinique), ou avoir des conséquences post-natales différées de quelques mois à quelques années alors que l’infection était inapparente à la naissance. Le retentissement embryo-fœtal d’une infection verticale est variable selon le micro-organisme en cause, mais également selon le terme de la grossesse où survient l’infection. Les circonstances du diagnostic de l’infection maternelle et/ou fœtale sont variables selon l’agent infectieux : dépistage systématique obligatoire ou recommandé, constatation de signes cliniques maternels évocateurs ou d’anomalies échographiques. À l’occasion de cet article, nous proposons un focus sur le diagnostic des infections materno-fœtales pour lesquelles le biologiste est particulièrement sollicité en termes d’interprétation des examens sérologiques et moléculaires en raison d’une stratégie diagnostique spécifique à la grossesse : la syphilis, la toxoplasmose, la rubéole, la varicelle, l’hépatite B et les infections à cytomégalovirus (CMV) et à parvovirus B19.

Rubéole La rubéole était, avant l’ère de la vaccination, une maladie essentiellement infantile et bénigne. Aujourd’hui, malgré les campagnes de vaccination, la rubéole persiste en France sous forme de cas sporadiques, et on estime qu’environ 5 % des femmes en âge de procréer ne sont pas immunisées. En cas d’infection maternelle avant 12 SA, la fréquence de l’infection fœtale est de 90 % et le risque d’anomalies fœtales majeures est très important (de l’ordre de 90 %). L’atteinte virale au cours de l’embryogenèse se traduit essentiellement par des malformations cardiaques (persistance du canal artériel, hypoplasie de l’artère pulmonaire), une diminution de l’audition, une atteinte oculaire (microphtalmie, cataracte, rétinopathie, glaucome, opacités cornéennes), et peut s’accompagner d’atteintes du système nerveux central (microcéphalie, retard mental). La fœtopathie peut également comporter une pneumopathie interstitielle, une encéphalite ou un retard de croissance intra-utérin. Des phénomènes auto-immuns, tel un diabète, peuvent survenir dans l’adolescence. Certaines lésions restent longtemps évolutives après la naissance et le pronostic 6

à long terme d’une rubéole congénitale malformative est très réservé, surtout pour ce qui concerne l’avenir psychomoteur. En cas d’infection maternelle entre 12 et 18 SA, la fréquence des anomalies est variable et les séquelles le plus souvent constatées sont auditives (perte d’audition, qui peut se développer tardivement après la naissance). En cas d’infection maternelle après 18-20 SA, ce risque malformatif est quasi nul. La primo-infection rubéoleuse guérit en laissant une immunité durable. Cependant, les réinfections sont possibles. En général elles sont cliniquement inapparentes, et les malformations congénitales après réinfection maternelle sont exceptionnelles. En France, grâce au réseau Rénarub, l’Institut de veille sanitaire recense chaque année les infections rubéoleuses survenues pendant la grossesse ainsi que les infections congénitales. Entre 2006 et 2010, moins de 10 cas de rubéole ont été rapportés chaque année chez la femme enceinte et le nombre de cas de rubéoles congénitales malformatives est de 0 à 2 cas par an environ [1]. Le nombre de cas a tendance à augmenter ces dernières années, notamment en raison d’une couverture vaccinale imparfaite en France, et à des épidémies importantes de rubéole constatées dans des pays n’ayant pas de politique vaccinale en population générale (cas importés). Concernant, la femme enceinte, la Haute autorité de santé (HAS), en octobre 2009, a émis les recommandations suivantes : « Compte tenu de la situation épidémiologique actuelle, il est recommandé qu’une sérologie rubéoleuse soit proposée à l’occasion de la première consultation prénatale (avant la fin du 3e mois de grossesse), en l’absence de preuve écrite de l’immunité et sauf si deux vaccinations contre la rubéole documentées ont été antérieurement réalisées, à seule fin de déterminer le statut immunitaire vis-à-vis de la rubéole. Cette sérologie ne portera que sur la détection des IgG spécifiques et sera réalisée sur un seul prélèvement. Chez les femmes enceintes séronégatives, une nouvelle sérologie rubéoleuse devra être proposée uniquement à 20 semaines d’aménorrhées (SA), à la recherche d’une éventuelle séroconversion » [2]. Le premier objectif de la sérologie effectuée pendant la grossesse, est donc de dépister les femmes enceintes séronégatives afin de leur proposer la vaccination après l’accouchement. Le second objectif est de dépister une éventuelle primo-infection qui serait survenue entre le premier dépistage et la 20e SA. La conduite à tenir et l’interprétation des résultats en cas de dépistage systématique (en dehors de tout contexte clinique évocateur) des IgG rubéoleuses au cours de la grossesse sont détaillées dans la figure 1. En dehors du dépistage systématique, on peut être amené à faire le diagnostic d’une primo-infection rubéoleuse ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

Diagnostic et prise en charge des infections materno-fœtales

IgG -

IgG +

2e prélèvement vers 20 SA

Patiente immunisée à interpréter en fonction du contexte clinique

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IgG Vaccination après l’accouchement

IgG +

IgM +

IgM -

Primo-infection probable à confirmer par la mesure de l’avidité des IgG

Primo-infection très peu probable à confirmer par la mesure de l’avidité des IgG et la recherche des Ac anti-E1 protecteurs sur le 1er prélèvement

Figure 1. Interprétation de la sérologie rubéole dans le cadre du dépistage systématique.

maternelle dans les circonstances suivantes : contage, signes cliniques évocateurs, ou sérologies évocatrices d’une infection active (séroconversion, augmentation du titre des anticorps). Les signes cliniques sont inconstamment présents et peu spécifiques. Par ailleurs, la rubéole étant devenue une infection très rare en France, peu de cliniciens pensent à cette infection lorsqu’une éruption est rapportée ou observée. Le diagnostic de l’infection maternelle repose essentiellement sur la sérologie : mise en évidence d’une séroconversion et/ou détection d’IgG et d’IgM spécifiques. Toutefois, en l’absence de contexte clinique évocateur de rubéole, la séroconversion et/ou la présence d’IgM spécifiques doit être interprétée et annoncée avec prudence, et la réalisation d’examens complémentaires dans des laboratoires spécialisés (avidité des IgG spécifiques et/ou western blot/immunoblot à la recherche d’anticorps protecteurs) peut être justifiée. Les IgM spécifiques apparaissent dans les 3 jours qui suivent l’éruption et disparaissent en général en 4 à 10 semaines, selon les sujets et les techniques utilisées. Attention : le premier jour de l’éruption, les IgM sont très fréquemment absentes. Les IgG, détectés par Elisa, apparaissent, en général, un peu plus tardivement (environ 5-8 jours après le début de l’éruption). Le titre maximal des anticorps au plateau, ainsi que le titre résiduel, est extrêmement variable selon le patient et la technique utilisée. Un titre élevé d’anticorps n’est pas en soi un marqueur de primo-infection récente. À l’occasion d’un contage datant de moins de 15 jours, seule une recherche des IgG doit être prescrite et leur positivité permettra de rassurer la patiente. En cas de négativité des IgG, il est préconisé une sérologie de contrôle 3 ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

semaines après contage avec dosage des IgG et des IgM afin d’exclure une primo-infection rubéoleuse asymptomatique (figure 2). Lorsqu’il existe un contexte clinique évocateur, ou un contage datant de plus de 15 jours, le diagnostic de l’infection rubéoleuse est confirmé biologiquement par l’observation d’une séroconversion et/ou la détection conjointe des IgG et des IgM spécifiques, souvent complétées par la mesure de l’avidité des IgG rubéoleuse (figure 3). En effet, il est aujourd’hui clairement établi que si les IgM spécifiques sont pratiquement toujours détectées au cours des primo-infections récentes (< 2 mois), lorsque l’on utilise des techniques suffisamment sensibles, elles peuvent aussi être mises en évidence dans des situations beaucoup plus fréquentes que la primo-infection : plusieurs mois/années après vaccination, au cours des réinfections, et surtout en raison de stimulations polyclonales non spécifiques du système immunitaire. Lorsque des IgM spécifiques sont présentes, il est recommandé d’avoir recours à la mesure de l’avidité des IgG pour infirmer ou confirmer une primo-infection. Une faible avidité correspond généralement à une primo-infection récente (< 1-3 mois), une forte avidité correspond à une primo-infection datant en général de plus de 3 mois. Il est à noter qu’après vaccination, l’avidité « mature » plus lentement qu’après infection naturelle et se stabilise souvent à des niveaux d’indice moyen [3]. Attention : souvent l’observation de titres stables d’anticorps est considérée comme rassurante. En fait, selon les sujets testés et surtout la technique utilisée, les anticorps peuvent atteindre un plateau en quelques jours ou en quelques semaines après le début de l’infection. Il existe des différences importantes de sensibilité entre les 7

Synthèse

Sérum précoce < 15 j

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IgG + Immunité antérieure

IgG 2e prélèvement 3 semaines plus tard

IgM IgG -

IgM IgG +

IgM + IgG +

IgM + IgG -

Absence d’infection

Stimulation polyclonale du système immunitaire

Primo-infection possible

Primo-infection probable

À confirmer éventuellement par la mesure de l’avidité des IgG (rubéole)

À confirmer par l’apparition des IgG sur un nouveau prélèvement dans 5-10 jours

Figure 2. Interprétation de la sérologie en cas de contage récent (< 15 jours) pour une infection possiblement asymptomatique (rubéole, infection à parvovirus B19).

Sérologie IgG/IgM

IgM IgG -

IgM + IgG +

IgM IgG +

IgM + IgG -

Prélèvement trop précoce ou Absence d’infection

Primo-infection possible

Primo-infection peu probable

Primo-infection probable

À confirmer par la mesure de l’avidité des IgG (rubéole/CMV) ou par une PCR dans le sang maternel (parvovirus B19)

À confirmer par l’apparition des IgG sur un nouveau prélèvement dans 5-10 jours

Figure 3. Interprétation de la sérologie en cas de signes cliniques ou de contage > 15 jours (rubéole, infection à parvovirus B19).

techniques de dosages des IgG malgré l’utilisation d’unités internationales. Il est souhaitable d’avoir recours au western blot/immunoblot pour déterminer la spécificité des anticorps en cas de discordance entre techniques. Le diagnostic prénatal de l’infection fœtale repose soit sur la mise en évidence des IgM rubéoleuses dans le sang fœtal, soit sur la mise en évidence du génome viral dans le liquide amniotique (LA) par RT-PCR. La spécificité de ces deux procédures est voisine de 100 % et leur sensibilité supérieure à 90 %, à condition : - qu’un délai d’au moins 6 semaines entre l’infection maternelle et la ponction de LA soit respecté ; - que les prélèvements ne soient pas effectués avant la 21e SA ; 8

- que le sang fœtal soit conservé et transporté à +4 ◦ C au laboratoire mais qu’impérativement le LA soit conservé et transporté congelé (en raison de l’extrême fragilité du virus de la rubéole). Le diagnostic post-natal de l’infection congénitale repose sur la mise en évidence des IgM spécifiques, de préférence par une technique d’immunocapture. La sensibilité et la spécificité de cet examen sont voisines de 100 %. Le diagnostic post-natal de l’infection congénitale doit être réalisé même si l’enfant est asymptomatique car un enfant infecté in utero peut développer des séquelles, notamment auditives, à distance de la naissance. De plus, ces enfants vont excréter du virus dans leur salive et dans leurs urines pendant plusieurs mois (voire plusieurs années) et seront donc ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

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Diagnostic et prise en charge des infections materno-fœtales

potentiellement contaminants pour l’entourage. L’absence ou la présence d’excrétion virale pourra être contrôlée par PCR sur la salive ou sur les urines (le transport de ces prélèvements doit également être effectué à - 20 ◦ C). Que ce soit au cours de la grossesse ou à la naissance, aucun antiviral n’est actif contre le virus de la rubéole. En France, des gammaglobulines polyvalentes sont disponibles mais leur efficacité n’a jamais été démontrée. La prise en charge de l’infection repose sur l’évaluation du pronostic de l’atteinte fœtale en fonction de la date présumée de l’infection maternelle. En effet, en dehors du terme de la grossesse auquel survient l’infection, aucun facteur prédictif de sévérité n’a été établi. Lorsque l’infection maternelle survient avant la 12e SA, les risques d’infection et de malformations fœtales sont très importants ce qui justifie d’accéder, parfois d’emblée, à une demande d’interruption de grossesse pour raison médicale. Cependant, si un examen échographique détaillé et une recherche d’ARN viral dans le LA sont réalisés et se révèlent négatifs, la grossesse pourra être poursuivie. Lorsque l’infection maternelle survient entre la 12e et la 18e SA, l’aide du diagnostic anténatal est précieuse pour évaluer l’infection fœtale, mais ne permet pas de prédire les éventuelles malformations congénitales consécutives à l’infection. Par ailleurs, en dehors des atteintes cardiaques et parfois oculaires, ces anomalies sont difficilement accessibles à l’échographie obstétricale. En plus de l’examen pédiatrique à la naissance, la survenue de troubles de l’audition sera particulièrement recherchée au cours des premières années de vie. Passée la 20e SA, le risque d’infection fœtale demeure élevé jusqu’à la fin de la grossesse, mais le risque de rubéole congénitale malformative est quasi nul. La grossesse sera poursuivie et l’infection congénitale sera tout de même recherchée à la naissance. Il est important de rappeler qu’aujourd’hui, en France, la rubéole ne devrait plus exister puisqu’il existe un vaccin vivant atténué, très efficace (souche RA 27/3 combiné dans le vaccin trivalent rougeole/oreillons) et pratiquement dénué d’effet secondaire majeur. Il est recommandé à tous les enfants entre 12 et 24 mois une dose du vaccin trivalent contre la rougeole, les oreillons et la rubéole à 12 mois et une seconde dose entre 16 et 18 mois ainsi qu’à toute femme en âge de procréer séronégative, de préférence avant toute grossesse ou juste après l’accouchement pour celles qui auraient été dépistées négatives pendant leur grossesse [4]. Il n’y a pas lieu de revacciner des femmes ayant rec¸u deux injections de vaccin rubéole ou trivalent, quel que soit le résultat de la sérologie, si elle a été pratiquée. S’agissant d’un vaccin vivant atténué, il est déconseillé de l’administrer durant la grossesse et toute grossesse doit être évitée dans le mois qui suit la vaccination. Par contre, même ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

si la souche vaccinale a été détectée dans le lait maternel, la vaccination juste après l’accouchement ne constitue pas une contre-indication à l’allaitement.

Cytomégalovirus On estime que les infections à CMV représentent la première cause d’infections congénitales dans les pays développés, et qu’il y aurait chaque année environ 1 % des nouveau-nés qui auraient acquis cette infection in utero. Le CMV est la principale cause de handicaps neurosensoriels consécutifs à une infection congénitale. Toutefois, parmi ces enfants environ 80 % ne garderont aucune séquelle de cette infection Globalement, en Europe de l’Ouest, 50 % des femmes en âge de procréer sont immunisées contre le CMV, mais la prévalence varie en fonction du statut socio-économique, de l’âge, de la profession, de la parité et de l’origine ethnique. Les femmes les plus exposées sont les femmes séronégatives travaillant au contact de très jeunes enfants ou ayant un premier enfant en crèche, car la circulation de ce virus est extrêmement fréquente au sein des collectivités de très jeunes enfants [5]. La transmission s’effectue par contacts étroits d’individu à individu (à partir des urines, des sécrétions oro-pharyngées, du lait, des larmes, des sécrétions génitales. . .). En France, le rapport de l’Anaes (Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé) de 2004 préconise que les femmes enceintes soient informées des mesures d’hygiène universelles, à respecter pendant leur grossesse (tableau 1). Il est couramment admis que le risque d’une transmission materno-fœtale du CMV résulte majoritairement d’une primo-infection maternelle péri- ou post-conceptionnelle. L’incidence de la primo-infection durant la grossesse est estimée entre 0,5 et 2 %. Environ 30-50 % de ces femmes transmettront le virus à leur fœtus, mais ce taux de transmission varie en fonction du terme de la grossesse où est contractée l’infection (environ 30-40 % au 1er , 50 % au 2e et 70-80 % au 3e trimestre). La transmission au fœtus s’effectue alors par voie hématogène transplacentaire lors de la virémie maternelle concomitante à la primo-infection. Dans une moindre mesure, le fœtus peut s’infecter suite à une réactivation ou une réinfection maternelle. On estime que 10 à 30 % des femmes immunisées excréteront du virus au cours de leur grossesse, et qu’environ 0,2 % des enfants, nés de mère séropositive pour le CMV avant leur grossesse, seront infectés à la naissance. La transmission maternofœtale du CMV après infection maternelle secondaire est difficile à estimer dans la mesure où le diagnostic de la réinfection ou de la réactivation est très difficile et non réalisé en pratique. 9

Synthèse Tableau 1. Conseils de prévention de la primo-infection à cytomégalovirus en cours de grossesse.

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• Se laver fréquemment les mains. • En cas de contact avec un enfant en bas âge, prendre des précautions particulières, notamment s’il fréquente une collectivité (crèche, garderie) car cet enfant a pu être contaminé au contact des autres enfants. Dans ce cas, le virus reste présent dans sa salive et ses urines pendant plusieurs mois. • Ne pas utiliser les mêmes ustensiles de repas, ne pas finir le repas d’enfants de moins de 3 ans. Ne pas « goûter » les biberons ou les cuillerées d’aliments et ne pas sucer sa tétine. • Ne pas partager les affaires de toilette (gant, serviette, brosse à dents) des enfants de moins de 3 ans. • Limiter le contact buccal avec les larmes et/ou la salive des enfants de moins de 3 ans ; ne pas les embrasser sur la bouche. • Se laver soigneusement les mains à l’eau et au savon après chaque change ou contact avec les urines (pot, pyjama, couche. . .). • Ces précautions doivent être appliquées lors de contacts professionnels avec un ou plusieurs jeunes enfants. • Ces règles d’hygiène doivent également être suivies par le conjoint. À respecter jusqu’à l’accouchement

Enfin, la période néonatale est une période de haute contagiosité (par les sécrétions cervico-vaginales, le lait maternel, les contacts rapprochés), mais n’est pas suivie de séquelles neurologiques. Cette infection périnatale est très fréquente et on retrouve globalement 12 à 15 % de nouveau-nés viruriques à 1 mois de vie alors qu’ils étaient négatifs à la naissance. Les conséquences d’une transmission materno-fœtale du CMV sont variables mais classiquement plus sévères après une primo-infection maternelle qu’après une réactivation ou une réinfection. Le risque de séquelles pour le fœtus est maximum (20-30 %) lorsque la primo-infection maternelle survient avant la 20e SA et moindre par la suite. Les manifestions cliniques observées peuvent alors être une microcéphalie, des déficits de l’audition et des atteintes neurologiques mineures. Cependant, c’est lors d’une primo-infection maternelle précoce au cours de la grossesse que l’on observe les atteintes fœtales les plus graves se traduisant par la maladie des inclusions cytomégaliques qui régresse spontanément, mais induit des dommages qui peuvent persister et occasionner dans 80 % des cas de lourdes séquelles à long terme. Pour la France, ces chiffres couramment avancés dans la littérature sont en réalité surestimés. En effet, les situations où le doute subsiste quant au pronostic de lésions gravissimes deviennent rares lorsque la grossesse est correctement suivie et plus particulièrement lorsque ce suivi est effectué dans un centre spécialisé (ce qui devrait toujours être le cas lorsqu’une séroconversion maternelle ou une infection fœtale à CMV a été constatée). L’amélioration de la qualité des échographes et de la résolution de l’IRM permet maintenant de diminuer le nombre de cas où la gravité de l’atteinte neurologique ne peut pas être appréciée. La souplesse quant au délai de recours à l’interruption de grossesse pour raison médicale, dans notre pays, contribue également à diminuer le nombre de nouveau-nés naissant sévèrement atteints. À côté de ce tableau gravissime, on estime que, dans plus de 90 % des cas, l’infection congénitale à CMV est asymp10

tomatique à la naissance. Néanmoins, pour ces enfants une surveillance clinique est indispensable car, parmi ces formes initialement silencieuses, 5 à 10 % des enfants développeront des séquelles neuro-sensorielles à type de surdité le plus souvent. Partielle ou totale, cette surdité peut ne pas se manifester dès la naissance et se développer ultérieurement au cours des premières années de vie. Les risques encourus par le fœtus lors d’une infection maternelle secondaire sont moins bien connus. Les études rapportent que, même si une immunité préexistante à la grossesse confère une certaine protection, celle-ci n’est pas suffisante pour empêcher la transmission du CMV au fœtus d’une part, et, d’autre part, pour prévenir la survenue d’anomalies plus ou moins graves chez le fœtus. Le dépistage systématique de l’infection à CMV pendant la grossesse n’est actuellement pas recommandé dans la plupart des pays européens (dont la France) et seules des mesures d’hygiène peuvent être proposées pour réduire significativement l’incidence des infections maternelles à CMV [6]. Néanmoins, une recherche d’IgG en début de grossesse est parfois pratiquée afin de déterminer le statut sérologique maternel notamment lorsque les patientes exercent une profession à risque (personnel de crèche, infirmière, puéricultrice, mère de famille. . .). Le diagnostic de l’infection maternelle peut également être effectué en cas de symptômes maternels. Toutefois, de nombreuses infections à CMV au cours de la grossesse passent inaperc¸ues car les signes cliniques de la primo-infection à CMV, s’ils sont relativement fréquents, sont en général peu spécifiques (fatigue, fièvre, maux de tête. . .), et recueillis a posteriori, ne suffisent généralement pas à alerter sur l’éventualité d’une primo-infection à CMV. Enfin, en présence d’anomalies échographiques évocatrices, une infection maternelle/congénitale à CMV doit être envisagée et recherchée. La virémie, chez l’individu immunocompétent, serait un marqueur d’une primo-infection récente mais n’est pas utilisée dans la pratique courante dans un but diagnostique. ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

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Diagnostic et prise en charge des infections materno-fœtales

La virurie maternelle n’est pas un bon outil pour le diagnostic de primo-infection à CMV puisqu’elle est aussi souvent positive à l’occasion de réactivations, qui ne sont à l’origine que de très rares cas d’infections congénitales symptomatiques. Le diagnostic de la primo-infection à CMV chez la femme enceinte repose donc essentiellement sur la sérologie. La présence d’IgG spécifiques signe un contact avec le virus, mais interprété isolément leur titre n’est en aucun cas indicatif de la date de survenue de la primo-infection maternelle. Quant à la détection des IgM spécifiques, elle n’est pas nécessairement corrélée à une infection récente. En effet, même si les IgM sont pratiquement toujours mises en évidence dans les primo-infections récentes, elles peuvent également être détectées en raison de réactions croisées (avec l’EBV par exemple), mais également au cours d’infections secondaires, ou à l’occasion d’une stimulation polyclonale non spécifique du système immunitaire. Il est donc clairement établi que la détection des IgM spécifiques est insuffisante pour faire le diagnostic de primo-infection, et que leur présence peut être difficile à interpréter. Pour ces raisons, le recours à la mesure de l’avidité des IgG spécifiques et à l’étude comparative des sérums antérieurs et/ou ultérieurs est donc le plus souvent nécessaire pour préciser le caractère éventuellement post-conceptionnel de l’infection. Le résultat de l’avidité est à interpréter en fonction du terme de la grossesse car au-delà du 1er trimestre de grossesse, une avidité élevée ne permettra en général pas d’exclure une infection postconceptionnelle. L’indice d’avidité est également fonction des individus testés ainsi que des techniques utilisées. Enfin, il faut noter que lorsque le titre d’IgG est faible, l’indice d’avidité peut être erroné. Sa valeur n’est donc pas toujours aisée à interpréter.

En pratique : – malgré les recommandations, une recherche d’IgG en début de grossesse est parfois pratiquée afin de déterminer le statut sérologique maternel notamment lorsque les patientes exercent une profession à risque (personnel de crèche, infirmière, puéricultrice, mère de famille. . .) (figure 4) ; – le diagnostic de l’infection maternelle peut également être effectué en cas de symptômes maternels (figure 3) ; – de nombreuses infections à CMV au cours de la grossesse passent inaperc¸ues, mais en présence d’anomalies échographiques évocatrices (RCIU, anomalies cérébrales, oligoamnios, intestin hyperéchogène, anarsaque. . .), une infection maternelle/congénitale à CMV doit être envisagée et recherchée (figure 5). Si les IgG sont négatives (quelle que soit la valeur des IgM), la responsabilité du CMV, pour expliquer les anomalies échographiques, peut être exclue. Si les IgG sont positives, quelle que soit la valeur des IgM, une mesure de l’indice d’avidité des IgG et/ou l’examen d’un sérum du début de grossesse (sérum prélevé pour d’autres sérologies, pour le dosage de la ␤-hCG, pour le dépistage de la trisomie. . .) permettra d’apprécier le caractère éventuellement post-conceptionnel de l’infection. En effet, comme nous l’avons vu précédemment, la présence d’IgM ne signifie pas obligatoirement primo-infection. De plus, au moment de la constatation des anomalies échographiques, les IgM peuvent avoir déjà disparu. Si les résultats obtenus sur un sérum du début de grossesse ne sont pas évocateurs d’une primo-infection à CMV (IgG+/IgM- ou IgG+/IgM+/avidité élevée) un diagnostic anténatal peut toutefois être recommandé car les IgM peuvent être fugaces, et une infection survenant dans les semaines précédant la conception ou une infection secondaire peuvent être à l’origine d’une infection fœtale symptomatique.

IgG -

IgG +

Absence d’immunité Conseils d’hygiène +++

IgM +

IgM -

Possible primo-infection récente à confirmer par la mesure de l’indice d’avidité des IgG

Patiente immunisée, absence de marqueur de primo-infection récente* Conseils d’hygiène

Avidité élevée Primo-infection > 3 mois* Conseils d’hygiène

Avidité faible Primo-infection < 3 mois* Suivi spécifique

* Résultat à interpréter en fonction du terme de la grossesse et de la technique utilisée

Figure 4. Interprétation des sérologies de dépistage de l’infection à CMV. ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

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Synthèse

Sérologie IgG/IgM

IgG IgM -

IgG IgM +

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Anomalies non liées à l’infection

IgG + IgM +

IgG + IgM -

Possible infection post-conceptionnelle Mesure de l’avidité des IgG (CMV) Analyse d’un sérum du début de grossesse Attention ! au moment de la constatation des anomalies échographiques, les IgM peuvent avoir disparu

Diagnostic anté-natal

Figure 5. Interprétation des sérologies en cas d’observation d’anomalies échographiques évocatrices de l’infection virale.

– le diagnostic d’infection maternelle secondaire est difficilement réalisable et n’est que très rarement effectué. En effet, s’il est couramment admis que l’augmentation des IgG spécifiques (en présence ou en absence d’IgM spécifiques) chez une femme immunisée avant sa grossesse, signe une infection secondaire, cette situation se rencontre également, et certainement beaucoup plus fréquemment, lors de stimulations polyclonales non spécifiques du système immunitaire. La mesure de l’avidité des IgG n’est pas contributive dans ce cas puisqu’elle sera élevée dans les deux situations. Tout au plus, peut-on supposer rétrospectivement cette infection secondaire lorsqu’un enfant naît infecté d’une mère séropositive pour le CMV avant sa grossesse. L’indication du diagnostic prénatal suite à une primoinfection maternelle, mais sans signe échographique, est discutée dans la mesure où les traitements pouvant être proposés en cas de recherche positive dans le LA, et donc en cas d’infection fœtale, sont encore en cours d’évaluation, tandis que le risque de l’amniocentèse n’est pas nul. De plus, en l’absence d’anomalies échographiques, il est encore difficile actuellement d’évaluer le risque fœtal car il n’existe pas de paramètres fiables pour faire la distinction entre un fœtus infecté et un fœtus cliniquement atteint. Le diagnostic d’infection fœtale est réalisé par la mise en évidence du génome viral (par PCR) dans le LA. La spécificité de la PCR est proche de 100 % et sa sensibilité est supérieure à 95 % si l’amniocentèse est réalisée au moins 6 semaines après l’infection maternelle et à partir de la 21e SA, ou dès la constatation des anomalies échographiques. À la naissance, la recherche des IgM dans le sang du nouveau-né n’est positive que chez 50 % des enfants 12

infectés. Plus couramment, la recherche de CMV est effectuée par culture et/ou PCR dans les urines. C’est un examen d’une excellente sensibilité et spécificité si le prélèvement est effectué dans les 10-15 jours qui suivent l’accouchement. Le prélèvement de salive peut s’avérer plus pratique à réaliser, mais toute positivité salivaire doit être confirmée par une recherche de virus sur les urines (contamination possible du prélèvement de salive par le lait maternel infecté en cas d’allaitement maternel). Les infections périnatales étant très fréquentes, lorsque des anomalies (notamment, la surdité) sont constatées plusieurs mois après la naissance, ni la sérologie, ni la détection du virus dans les urines ne permettent d’incriminer le CMV comme agent responsable de ces manifestations cliniques. Il faut alors avoir recours à la recherche rétrospective du génome viral par PCR à partir du sang séché conservé sur les cartes de Guthrie [7]. La prise en charge de l’infection à CMV chez la femme enceinte est un problème complexe du fait, notamment, qu’il n’existe pas, pour l’instant, de traitement efficace et dénué d’effets secondaires capable d’être administré au cours la grossesse. Quelques essais cliniques évaluant l’efficacité d’injection d’immunoglobulines hyperimmunes ou de valaciclovir en prévention, ainsi que pour le traitement de l’infection fœtale à CMV, sont en cours. Lorsqu’une primo-infection maternelle à CMV est diagnostiquée avec certitude, le fœtus doit bénéficier d’une surveillance échographique morphologique étroite et répétée (en général mensuelle ou bimensuelle si la PCR CMV est positive dans le LA) dans un centre spécialisé en médecine fœtale, car cela reste un examen performant pour détecter les atteintes fœtales, l’existence/l’évolution des ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

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signes échographiques ayant une bonne valeur pronostique. Cette surveillance doit être poursuivie jusqu’à la fin de la grossesse, les signes échographiques pouvant apparaître tardivement. Une étude randomisée de phase II rapporte l’effet bénéfique sur l’évolution de la surdité, d’une cure de 6 semaines de ganciclovir administrée en IV à des enfants présentant une infection congénitale sévère avec notamment une atteinte du système nerveux central. En raison de la toxicité du ganciclovir et de son utilisation par voie IV, sa seule indication consensuelle actuelle reste l’utilisation chez des nouveaunés présentant une atteinte du système nerveux central. Le valganciclovir, pro-drogue du ganciclovir mais mieux toléré sur le plan hématologique est à l’étude. Enfin, les enfants asymptomatiques excrétant le virus dans leurs urines aux premiers jours de vie doivent faire l’objet d’une surveillance clinique (fond d’œil, examens auditifs. . .) attentive jusqu’à leur 6e année.

Varicelle La varicelle est une maladie infectieuse fréquente de l’enfance et le plus souvent bénigne. La séroprévalence en France des femmes en âge de procréer est de plus de 90 %. Environ 500 femmes enceintes seraient infectées par an. Une primo-infection confère dans la majorité des cas une immunité à vie mais des réinfections sont possibles, et estimées entre 4 et 13 %. L’infection à VZV est potentiellement grave pour la mère elle-même du fait de l’atteinte pulmonaire. Cette atteinte pulmonaire n’est pas plus fréquente que chez l’adulte non enceinte, mais serait plus sévère, notamment du fait de difficultés ventilatoires liées au volume utérin. Le traitement

antiviral par valaciclovir IV et les progrès de réanimation ont permis de réduire considérablement la mortalité de cette infection. Le risque malformatif lié au VZV, lors d’une infection survenant avant 20 SA, est au maximum de l’ordre de 2 %. La fœtopathie varicelleuse est de pronostic sévère et le tableau clinique comprend des anomalies cutanées, neurologiques, ophtalmologiques et/ou musculo-squelettiques. Après 20 SA, le syndrome de varicelle congénitale est exceptionnel, et le risque principal est alors celui de la survenue d’un zona dans la première année de vie. La survenue d’une varicelle maternelle dans les jours qui précèdent ou qui suivent l’accouchement expose à un risque élevé de varicelle congénitale néo-natale très sévère et impose une prise en charge obstétricale et pédiatrique spécifique [8]. Le risque néonatal est maximal lorsque l’accouchement a lieu entre 2 jours avant et 5 jours après l’éruption, car la transmission du virus est alors transplacentaire avant toute synthèse et donc transmission des anticorps maternels. En cas de contage maternel au cours de la grossesse ou en péri-partum, si la patiente ne rapporte pas d’histoire personnelle de varicelle, il est légitime de déterminer son statut immunitaire par la recherche des IgG anti-VZV. En cas de sérologie négative, un contrôle sérologique ultérieur est inutile car le diagnostic de la varicelle est clinique. Par contre, la présence d’IgG indique que la patiente est immunisée mais ne permet pas d’exclure la possibilité d’une réinfection par le VZV (figure 6). Attention : les tests sérologiques visant à mettre en évidence les anticorps anti-VZV sont, pour la plupart, moins sensibles et moins spécifiques que pour d’autres virus. De plus, il n’y a pas de relation étroite entre la concentration des anticorps et la protection. La vaccination qui a pu être pratiquée avant la grossesse

Sérum précoce < 15 j IgG Patiente non immunisée

IgG + Patiente immunisée 2 – 3 semaines plus tard

Varicelle clinique

Asymptomatique

Asymptomatique

Varicelle clinique

Privilégier le prélèvement des vésicules

2e sérologie à 3 semaines ?

Faut-il dépister sérologiquement une éventuelle réinfection ?

Privilégier le prélèvement des vésicules Vérifier les IgG sur 1er prélèvement par une autre technique

NON

Figure 6. Interprétation de la sérologie en cas de contage varicelleux récent (< 15 jours). ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

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Synthèse ne protège efficacement que contre les formes graves de varicelle et n’exclut pas l’éventualité de développer une varicelle clinique ultérieurement. Quel que soit le résultat de la sérologie, il est donc licite de recommander de limiter les contacts avec la personne infectée. Le traitement par valaciclovir peut être proposé en attendant les résultats de la sérologie et poursuivi en cas de sérologie négative. Après 37 SA et en l’absence d’immunité, l’accouchement peut être programmé dans les 6 jours qui suivent le contage. En cas de contage datant de moins de 72 h, une injection d’immunoglobulines varicelle-zona peut être proposée afin de diminuer le risque de survenue de varicelle maternelle et de ses complications. En cas d’éruption varicelleuse en cours de grossesse ou en peri-partum, le diagnostic de l’infection maternelle est essentiellement clinique, mais il peut être utile en cas d’éruption atypique ou douteuse de pratiquer la recherche directe du virus par PCR à partir du liquide vésiculaire. L’apparition des anticorps spécifiques se produit 2 à 5 jours après le début de l’éruption. En cas d’éruption, une recherche d’IgM spécifiques peut être effectuée sachant qu’un prélèvement sérique réalisé dès les premiers jours de l’éruption peut s’avérer trop précoce pour retrouver des anticorps. Même si elles sont pratiquement toujours mises en évidence dans les primo-infections récentes, on peut également détecter des IgM spécifiques au cours d’une réinfection, d’une réactivation (zona), ou à l’occasion d’une autre infection évolutive entraînant une stimulation polyclonale non spécifique du système immunitaire. En cas de varicelle confirmée en cours de grossesse, il faut prendre en compte le risque de complications maternelles, et ne pas hésiter à hospitaliser les patientes en dehors de la maternité, voire en réanimation en cas de signes respiratoires, du fait du risque d’hypoxie majeure. Avant 20 SA, le risque est celui d’une fœtopathie varicelleuse pour laquelle une surveillance échographique mensuelle est instaurée. L’amniocentèse est possible mais est discutable dans la mesure où un résultat positif ne changerait pas la prise en charge. En cas d’éruption en peri-partum, le risque est celui de la varicelle généralisée congénitale, il est donc conseillé d’hospitaliser l’enfant, même asymptomatique, et de le traiter par aciclovir et immunoglobulines. En cas d’éruption et d’accouchement imminent, une tocolyse peut être mise en place, ainsi qu’un traitement par valaciclovir. En cas d’accouchement plus de 5 jours après l’éruption ou en cas d’éruption plus de 3-5 jours après l’accouchement, le risque est une varicelle néonatale bénigne. En cas de zona maternel, le risque de transmission in utero est quasi nul. Le vaccin est notamment recommandé pour les personnes séronégatives exerc¸ant une profession de santé ou en relation avec la petite enfance, et chez les femmes en âge de procréer séronégatives et sans antécédent de varicelle [4]. 14

Le vaccin peut également être administré aux personnes séronégatives dans les trois jours qui suivent le contage (en dehors de toute grossesse). La vaccination selon le protocole en deux doses protège à plus de 90 % contre les varicelles modérées à sévères et environ de 70 % contre les autres formes de varicelle.

Parvovirus B19 Les infections à parvovirus B19 surviennent sous forme sporadique ou sont responsables d’épidémies hivernoprintanières. Chez les enfants, le virus est à l’origine du mégalérythème épidémique ou cinquième maladie associant un syndrome pseudo-grippal avec fièvre modérée suivi par une éruption débutant au visage d’évolution bénigne. Toutefois, l’infection est asymptomatique dans 30 % des cas. Le parvovirus B19 doit être suspecté devant une éruption ou l’apparition de douleurs articulaires chez une femme enceinte. Environ 50 % des femmes seraient séronégatives en France. Parmi elles, le risque de primo-infection est de 1 à 1,5 % et de 13-13,5 % respectivement en dehors et pendant les épidémies. Le risque de transmission materno-fœtale est de 30 %. Le parvovirus n’est pas un virus tératogène mais il est essentiellement responsable d’anémie fœtale pouvant aboutir à une anasarque fœto-placentaire et à la mort fœtale en particulier si l’infection maternelle survient avant 20 SA [9]. En cas de contage (< 15 jours), seule une recherche d’IgG peut être effectuée et leur positivité permettra de rassurer la patiente. En cas de négativité des IgG, il est préconisé une sérologie de contrôle (IgG et IgM) 3 semaines après contage afin d’exclure une primo-infection asymptomatique (figure 2). En cas de symptomatologie évocatrice (éruption, arthralgies) ou contage de plus de 15 jours, une recherche des IgG et IgM spécifiques est recommandée (figure 3). En cas primo-infection maternelle confirmée avant 20 SA, une surveillance échographique fœtale hebdomadaire dans un centre de référence doit être établie. Les signes d’insuffisance cardiaque (cardiomégalie, anasarque) et les signes d’anémie (augmentation de la vitesse dans l’artère cérébrale moyenne) seront recherchés [8]. Au-delà de 30 SA ou 20 semaines après l’infection maternelle, la patiente peut être rassurée. En cas d’anomalies échographiques évocatrices, une infection maternelle/congénitale doit être envisagée et recherchée (figure 5). Si les IgG sont négatives (quelle que soit la valeur des IgM), la responsabilité du parvovirus B19, pour expliquer les anomalies échographiques, peut être exclue. Si les IgG sont positives, il est indiqué d’examiner un sérum du début de grossesse (sérum prélevé pour d’autres sérologies, pour le dosage de la ␤-hCG, pour ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

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le dépistage de la trisomie. . .), et ce, quelle que soit la valeur des IgM. En effet, comme nous l’avons vu précédemment, la présence d’IgM ne signifie pas obligatoirement primoinfection. De plus, lors de la constatation des anomalies échographiques, les IgM peuvent avoir déjà disparu. C’est pourquoi seul le diagnostic anténatal permettra de confirmer l’infection congénitale, et en cas d’anémie sévère, une transfusion in utero pourra être réalisée.

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Syphilis L’Organisation mondiale de la santé (OMS) évalue à 12 millions le nombre de nouveaux cas de syphilis chaque année au niveau mondial, dont plus de 90 % dans les pays en voie de développement. En France, aujourd’hui, on observe une augmentation de l’incidence de la syphilis, en particulier au sein de la communauté homosexuelle masculine, mais à ce jour, on n’a pas noté d’augmentation significative de l’incidence de la syphilis congénitale. La prévalence de cette infection chez les femmes enceintes est estimée à 1/10 000. Quel que soit le stade de l’infection de la mère avant la grossesse, une syphilis congénitale peut survenir et le risque d’infection d’un nouveau-né dont la mère non traitée est en phase primaire ou secondaire est de l’ordre de 50 %. La transmission survient principalement au cours de la 2e moitié de la grossesse et peut être responsable d’une mort fœtale in utero, ou d’un accouchement prématuré. Les formes précoces de syphilis congénitale associent des signes cutanés

et muqueux, des manifestations osseuses et articulaires, et des atteintes viscérales. La syphilis tardive s’exprime audelà de 5 ans par des anomalies dentaires, une surdité, et une gomme cutanéo-muqueuse. En pratique courante, le diagnostic maternel repose essentiellement sur la sérologie. Il s’agit d’une sérologie tréponémique qui ne permet pas de différencier Treponema pallidum d’une tréponématose endémique telle que le Pian (retrouvé dans toutes les régions chaudes et humides), le Bejel (retrouvé en Afrique sub-saharienne, au Maroc, en Afghanistan, en Iran) ou la Pinta (retrouvée en Amérique centrale, en Amérique du Sud et au Mexique). De plus, nous ne disposons actuellement pas d’outil biologique permettant de différencier avec certitude une syphilis latente d’une cicatrice sérologique. L’interprétation du dépistage sérologique repose sur la combinaison de plusieurs tests tréponémiques (TPHA, TPLA, FTA, immunoblot. . .) et non tréponémiques (VDRL, RPR. . .) (figure 7). Chez le nouveau-né, outre le diagnostic clinique (observation de lésions cutanées ou recherche d’une méningite lymphocytaire), le diagnostic biologique peut être également bactériologique dans le cas de lésions cutanées, et sérologique par la surveillance de la non-disparition des anticorps maternels transmis à partir de l’âge de 6 mois et la mise en évidence d’IgM spécifiques. Le traitement de la syphilis maternelle ou congénitale est basé sur l’utilisation de la pénicilline dont la posologie et la durée dépendent du stade évolutif. La prévention de la syphilis congénitale passe par le dépistage systématique lors de la 1re visite pré-natale (1er trimestre de grossesse)

VDRL et TPHA ou VDRL et FTA IgG

Négatif

Dissociés

En cas de suspicion clinique (chancre) : fond noir et contrôle sérologique 2 semaines plus tard Confirmer une syphilis débutante ou un faux positif : contrôle sérologique 1 semaine plus tard

Dissociés

Positifs

Positifs

Tréponématose guérie ou pas

Traitement Suivi sérologique de la mère : 3, 6, 12 et 24 mois (le VDRL doit se négativer ou diminuer significativement) Suivi échographique puis clinique et sérologique de l’enfant Contrôle du partenaire

Faux positif ou Tréponématose guérie (TPHA +/VDRL -)

Figure 7. Interprétation de la sérologie syphilis chez la femme enceinte. ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

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Synthèse et le traitement de la syphilis maternelle. Un second dépistage est recommandé à la 28e SA ou lors de l’accouchement s’il existe des facteurs de risque de contracter la syphilis pendant la grossesse (notamment si le partenaire a des comportements sexuels à risque).

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Toxoplasmose La toxoplasmose est une zoonose parasitaire due à un parasite très répandu Toxoplasma gondii. L’ingestion du parasite est le mode d’infection principal dans la toxoplasmose humaine. Chez la femme enceinte, l’identification des facteurs de risques associés à l’infection par Toxoplasma gondii permet de proposer une prévention et une information aux patientes enceintes séronégatives : – éviter la consommation de viande crue ou insuffisamment cuite ; – hygiène optimale des mains et des ustensiles de cuisine, la consommation de crudités bien nettoyées. Les enquêtes épidémiologiques récentes illustrent une baisse de la séroprévalence de la toxoplasmose chez les femmes enceintes en France : le taux d’immunisation était d’environ 80 % dans les années 1960, autour de 66 % dans les années 1980 et estimé à 43,8 % en 2003 [10]. L’origine de cette diminution est multifactorielle, mais il est évident que la modification des comportements alimentaires y jouent un rôle déterminant : congélation des viandes, diminution de la consommation de crudités maraîchères et de viande ovine. . . Chaque année, on estime que le toxoplasme infecterait 1 000 femmes enceintes entraînant une vingtaine de fœtopathies sévères [11].

En France, le décret n◦ 92-143 du 14 février 1992, relatif aux examens pré-nataux précise le caractère obligatoire du dépistage de la toxoplasmose avant la fin du premier trimestre de la grossesse, en l’absence de résultats écrits permettant de considérer l’immunité comme acquise. La sérologie doit être répétée chaque mois à partir du 2e examen prénatal si la patiente n’est pas immunisée. Ces dispositions ont été reconduites par la HAS en 2009 et le dépistage sérologique s’inscrit actuellement dans un algorithme général détaillé dans la figure 8 [2]. Il n’existe pas d’autre tableau sérologique permettant de diagnostiquer avec certitude une infection acquise en cours de grossesse. La maturation de l’avidité des IgG anti-toxoplasmique est en général lente et il est donc courant qu’une faible avidité persiste plusieurs années après primo-infection [12]. Par ailleurs, les IgM peuvent persister plusieurs mois voire plusieurs années après primo-infection. En revanche, la recherche de signes cliniques, bien que rares et non spécifiques (adénopathies, syndrome grippal), peut aider à la datation. Une fois que l’infection maternelle acquise en cours de grossesse est établie par les examens sérologiques, la prise en charge comprend 3 aspects : la recherche de l’infection fœtale par amniocentèse, la surveillance échographique et le traitement. L’infection fœtale est diagnostiquée suite à environ 30 % des primo-infections maternelles, tout terme de grossesse confondu. Toutefois ce risque croît régulièrement et de fac¸on importante avec l’âge gestationnel auquel survient l’infection, tandis que le risque de forme grave avec lésions cérébrales diminue avec le terme de la grossesse. L’amniocentèse peut être réalisée à partir de la 18e SA et au moins 4 semaines après l’infection maternelle. Son

Détermination du statut immunitaire maternel

IgG IgM -

IgG IgM +

IgG + IgM -

IgG + IgM +

Datation : Si 1re détermination : avidité des IgG confirmer éventuellement les IgG avec une autre technique Forte IgG IgG + Faible infection IgM + IgM + Contrôle > 4 mois sérologique Patiente à 3 sem-1 mois immunisée Fausse réaction Absence de en IgM marqueur de Prévention IgG stables : IgG x 2 : Séroconversion primo-infection primaire Infection Infection récente > 2 mois < 2 mois

Prévention primaire

Contrôle sérologique à 15 j

Figure 8. Interprétation du dépistage sérologique de la toxoplasmose en cours de grossesse.

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indication, en l’absence de lésions échographiques évidentes, peut être discutée pour les infections maternelles précédant la 8e SA compte tenu du faible risque de transmission à ce terme. La recherche de toxoplasme se fait par PCR dont la sensibilité et la valeur pronostique négative sont respectivement de 88 % et 98 %. La mise en évidence d’ADN parasitaire dans le LA prouve définitivement l’infection congénitale mais ne renseigne pas sur la forme clinique de cette infection. Toutefois, l’estimation de la charge parasitaire peut être utile à l’évaluation du pronostic fœtal : il a été montré qu’une infection maternelle acquise avant 20 SA associée à une concentration de parasites supérieure à 100/mL était prédictive à presque 100 % d’une fœtopathie sévère, alors même que l’échographie pouvait être normale au moment de l’amniocentèse [13]. La surveillance échographique repose sur un examen mensuel jusqu’à l’amniocentèse, puis une surveillance plus rapprochée peut être instaurée en cas de PCR positive. L’atteinte fœtale peut être suspectée devant des signes échographiques d’infection non spécifiques à la toxoplasmose comme une hépatosplénomégalie, des calcifications digestives ou hépatiques, une augmentation de la taille du placenta, des épanchements des séreuses, pouvant s’intégrer dans une myocardite parasitaire avec anasarque. Le pronostic sera surtout lié à l’atteinte cérébrale et à la précocité de l’infection. Classiquement, le traitement anténatal était donné le plus précocement possible afin de prévenir la transmission materno-fœtale et réduire les manifestations cliniques des enfants infectés. Cependant, l’étude Syrocot a remis en question l’efficacité de ces traitements et a justifié la mise en place d’un essai thérapeutique randomisé multicentrique et national Toxogest depuis 2010. Il a pour objectif de comparer l’efficacité de la spiramycine versus l’association pyriméthamine-sulfamide. L’attitude actuelle, en attendant les résultats, est de débuter la spiramycine dès le diagnostic de l’infection maternelle et de la continuer jusqu’à l’accouchement en cas de PCR négative dans le liquide amniotique. En cas de PCR positive, le relais par pyriméthamine-sulfamide est instauré. Une supplémentation en acide folinique est nécessaire pendant la durée de ce traitement et l’existence de réactions cutanées sévères peut justifier son arrêt.

Hépatite B Dans le monde, 1/3 de la population a été en contact avec le virus de l’hépatite B (VHB) et 400 millions de cas évoluent vers le statut de porteurs chroniques du VHB. La prévalence des porteurs chroniques au sein de la population varie de moins de 1 % dans les pays développés ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

à 20 % dans les pays en voie de développement, mais 70 % des porteurs chroniques se trouvent en Asie. La transmission materno-fœtale serait responsable pour 5 % des infections à VHB dans la population asiatique. La France est une zone de faible endémie pour l’infection par le VHB car moins de 20 % de la population franc¸aise a été en contact avec le virus et on recense moins de 2 % de porteurs chroniques (sujets porteurs chroniques de l’antigène HBs). La transmission mère-enfant est le mode de transmission pourvoyeur par excellence d’infection chronique, car en l’absence de mesures préventives à la naissance, plus de 80 % des enfants infectés développeront une hépatite B chronique avec risque d’évolution ultérieure vers la cirrhose hépatique et le carcinome hépatocellulaire. La transmission in utero est rare tandis que le risque de transmission est élevé au moment de la naissance (exposition per-partum à du sang ou à des sécrétions génitales contaminées) mais également en post-natal (allaitement et contamination salivaire). Ce risque est d’autant plus élevé que la mère est porteuse de marqueurs liés à la réplication virale (Ag HBe, ADN viral). Le nombre d’hépatites B néonatales est de l’ordre de 0,5 % en France, variant de 0,2 à 3,75 % selon les facteurs de risque, en particulier l’origine géographique. Ce taux peut atteindre 5 à 20 % dans certaines régions du monde. Actuellement, en France, le dépistage systématique de l’hépatite B (Ag HBs uniquement) est obligatoirement proposé au 6e mois de la grossesse. En cas de découverte d’une antigénémie HBs positive, le diagnostic de l’infection maternelle repose sur la sérologie (Ag HBs, Ac anti-HBc, Ac anti-HBs, Ag HBe, Ac anti-HBe) et la recherche du génome viral dans le sang. La patiente sera alors étroitement surveillée afin de déterminer le stade et l’activité de la maladie, et dirigée chez un médecin spécialiste des maladies du foie. La contamination de l’enfant est prouvée par la détection de l’Ag HBs et/ou de l’ADN viral, mais ces 2 paramètres peuvent persister ou disparaître à la naissance. L’interprétation des sérologies de l’enfant né de mère porteuse chronique de l’antigène HBs et sérovacciné, est parfois délicate ce qui impose un suivi durant la 1re année de vie. L’infection du nouveau-né peut être prévenue par l’administration d’immunoglobulines anti-HBs et du vaccin, dans les premières heures qui suivent la naissance. Cette sérovaccination sera suivie d’une vaccination « classique » (à M1 et M6) afin d’instaurer une protection durable et de prévenir les infections chroniques. En cas de charge virale maternelle élevée ou d’hépatite aiguë en fin de grossesse, un traitement par lamivudine à partir de la 34e SA peut se discuter. Ce traitement ne modifie pas la sérovaccination de l’enfant à la naissance. Il n’a pas été démontré que des accouchements par césarienne empêchaient la 17

Synthèse transmission du VHB de la mère à l’enfant. L’allaitement ne présenterait pas de danger si le nouveau-né est sérovacciné correctement. Liens d’intérêts : C. Vauloup-Fellous : formations (bioMérieux), consultant (Roche-diagnostics) ; L. GrangeotKeros : consultant (bioMérieux, Roche) ; interventions ponctuelles (Beckman, DiaSorin, Siemens, bioMérieux, Roche).

6. Vauloup-Fellous C, Picone O, Cordier AG, Parent-du-Châtelet I, Senat MV, Frydman R, et al. Does hygiene counseling have an impact on the rate of CMV primary infection during pregnancy ? Results of a 3-year prospective study in a French hospital. J Clin Virol 2009 ; 46 : S49-53. 7. Vauloup-Fellous C, Ducroux A, Couloigner V, Marlin S, Picone O, Galimand J, et al. Evaluation of cytomegalovirus (CMV) DNA quantification in dried blood spots : retrospective study of CMV congenital infection. J Clin Microbiol 2007 ; 45 : 3804-6. 8. Picone O, Vauloup-Fellous C, Senat MV, Frydman R, Grangeot-Keros L. Maternal varicella infection during pregnancy in a vaccinated patient. Prenat Diagn 2008 ; 28 : 971-2.

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18

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´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

[Infections transmitted from the mother to the fetus: diagnostic issues and management of pregnancy].

Some infections are considered as feared risks during pregnancy. These infections may lead to severe damage of the fetus or the newborn depending on t...
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