Rec¸u le : 15 aouˆt 2013 Accepte´ le : 23 avril 2014 Disponible en ligne 13 juin 2014

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com



Fait clinique

Le syndrome d’hyper-immunoglobulines D (HIGDS) avec fie`vre pe´riodique. A` propos de deux observations Hyperimmunoglobulinemia D and periodic fever syndrome K.-P. Agbo-kpatia,*, R. Condora, H. Hollenberga, A. Chalvon Demersaya, L. Cuissetb, P. Quartierc a

Service de pe´diatrie, centre hospitalier de Marne-La-Valle´e, 2-4, cours de La-Gondoire, 77600 Jossigny, France b Laboratoire de ge´ne´tique mole´culaire, CHU Cochin, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France c Unite´ d’immunologie, d’he´matologie et de rhumatologie pe´diatriques, centre de re´fe´rence des arthrites juve´niles idiopathiques, universite´ Paris-Descartes, institut Imagine, CHU Necker– Enfants-Malades, Assistance Publique–Hoˆpitaux de Paris, 149, rue de Se`vres, 75015 Paris, France

Summary

Re´sume´

We report the cases of two sisters born of parents who were firstdegree cousins, who started recurrent fever with lymph node and digestive tract involvement at the age of 2 years. There was no mutation of the familial Mediterranean fever gene and a diagnosis of partial mevalonate kinase (MVK) deficiency was made. However, immunoglobulin (Ig) D and A levels were normal. Elevated mevalonic acid in the patients’ urine during an episode and MVK gene analysis provided the diagnosis. Clinical remission was obtained under anti-TNF-alpha treatment with etanercept. These observations and those of several previously reported patients, particularly in French and Dutch series, illustrate the importance of considering the diagnosis in a child with early-onset auto-inflammatory syndrome even in the absence of hyper-IgD or -IgA. ß 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Nous rapportons les cas de deux sœurs issues de parents cousins germains. Depuis l’aˆge de 2 ans, elles pre´sentaient une fie`vre re´currente avec des ade´nopathies et des signes digestifs, sans mutation du ge`ne de la fie`vre me´diterrane´enne familiale, mais avec un. Les dosages d’immunoglobulines (Ig) D et A e´taient normaux mais l’e´le´vation de l’acide me´valonique urinaire en crise et l’e´tude du ge`ne MVK ont permis le diagnostic de de´ficit partiel en me´valonate-kinase. Une re´mission clinique a e´te´ obtenue sous traitement anti-TNF (Tumor Necrosis Factor)-alpha par e´tanercept. Ces observations et celles rapporte´es notamment dans des se´ries franc¸aises et hollandaises illustrent l’importance d’e´voquer le diagnostic chez l’enfant en l’absence meˆme d’hyper-IgD ou -IgA devant un tableau auto-inflammatoire de de´but pre´coce. ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

1. Introduction

choleste´rol et des isopre´noı¨des [1,2]. Le tableau clinique associe typiquement des pousse´es fe´briles mensuelles ou plurimensuelles ne durant que quelques jours, des ade´nopathies cervicales, des troubles digestifs avec douleurs abdominales, des aphtes buccaux ou vaginaux, un syndrome inflammatoire biologique non spe´cifique avec typiquement hyper-IgA et hyper-IgD [3]. L’augmentation des IgD a longtemps e´te´ conside´re´e comme l’une des principales caracte´ristiques de cette maladie, d’ou` sa de´nomination propose´e en 1984 [4]. Cependant, la compre´hension de la maladie a e´volue´ avec la mise en

Le syndrome d’hyper-immunoglobuline (Ig) D (HIDS) est une maladie auto-inflammatoire rare, autosomique re´cessive. Il est lie´ a` une mutation du ge`ne qui code pour la me´valonatekinase (MVK), enzyme qui intervient dans la biosynthe`se du

* Auteur correspondant. e-mail : [email protected], [email protected] (K.-P. Agbo-kpati). http://dx.doi.org/10.1016/j.arcped.2014.04.024 Archives de Pe´diatrie 2014;21:765-767 0929-693X/ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

765

Archives de Pe´diatrie 2014;21:765-767

K.-P. Agbo-kpati et al.

e´vidence des mutations causales et des cas avec IgD se´riques normales ont e´te´ publie´s [5]. Nous rapportons deux observations de HIDS sans hyper-IgD ni hyper-IgA chez deux sœurs.

2. Observations A` l’aˆge de 4 ans et 2 mois, cette premie`re enfant avait consulte´ pour une fie`vre re´currente depuis l’aˆge de 2 ans. Les crises survenaient une fois par mois et duraient de quatre a` cinq jours. Ces crises e´taient souvent associe´es a` des frissons, une pharyngite, des ade´nopathies cervicales unilate´rales ou bilate´rales, parfois a` des aphtes buccaux, des douleurs abdominales, des vomissements, des selles paˆteuses ou molles, sans atteinte articulaire ni cutane´e. Aucun facteur de´clenchant n’avait e´te´ trouve´, notamment infectieux ou vaccinal. Un syndrome inflammatoire biologique avait e´te´ authentifie´ en crise. Plusieurs bilans infectieux s’e´taient ave´re´s ne´gatifs. Le de´veloppement psychomoteur et staturo-ponde´ral de l’enfant e´tait normal et sur le plan familial, les parents e´taient cousins germains, d’origine alge´rienne. Cette enfant avait deux fre`res aıˆne´s bien portants et une petite sœur chez qui on avait signale´ e´galement la notion de fie`vre re´cidivante depuis quelques mois. La me`re e´tait suivie pour une thyroı¨dite auto-immune et une myasthe´nie. Une cousine du coˆte´ maternel, issue d’une union non consanguine pre´sentait un tableau clinique d’arthrite juve´nile idiopathique. L’examen clinique de l’enfant au moment d’une crise avait montre´ une fie`vre a` 40 8C avec des frissons, des marbrures, une ade´nopathie sousmandibulaire droite et une pharyngite. Sur le plan biologique, il existait un syndrome inflammatoire avec une hyperleucocytose a` 20,3 G/L dont 12 G/L polynucle´aires neutrophiles (PNN), une vitesse de se´dimentation (VS) a` 46 mm a` la premie`re heure (H1), des taux de fibrinoge`ne a` 5,57 g/L, de prote´ine C-re´active (CRP) a` 111 mg/L, et de prote´ine se´rum amyloı¨de A a` 6,53 (n < 1). Le dosage ponde´ral des immunoglobulines e´tait normal avec des IgA a` 1,16 g/L et des IgD a` 55,9 mg/L (n < 153). Le bilan he´patique, le bilan auto-immun et le bilan infectieux e´taient ne´gatifs. Sur des urines

recueillies lors d’une crise fe´brile, le dosage de l’acide me´valonique urinaire rapporte´ au dosage de la cre´atininurie e´tait a` 6,53 (n < 3). L’analyse du ge`ne de la fie`vre me´diterrane´enne familiale (FMF) n’avait pas re´ve´le´ de mutation mais celle du ge`ne MVK avait trouve´ une mutation p.Val377Ile a` l’e´tat homozygote. Cette mutation e´tait retrouve´e a` l’e´tat he´te´rozygote chez les parents. Sous traitement par e´tanercept, re´cepteur soluble du TNF (Tumor Necrosis Factor)-alpha, une re´mission clinique et biologique a e´te´ obtenue. La petite sœur, aˆge´e de 2 ans et demi, avait les meˆmes symptoˆmes depuis l’aˆge de deux ans. En crise, elle avait des leucocytes a` 18,4 G/L dont a` 11, 96 G/L de PNN, une CRP a` 157 mg/L et une VS a` 37 mm a` H1. Le dosage ponde´ral des immunoglobulines e´tait e´galement normal avec des IgA a` 0,94 g/L et des IgD a` 9 mg/M. Le dosage de l’acide me´valonique urinaire rapporte´ au dosage de la cre´atinine e´tait e´leve´ en crise a` 5,90. La meˆme mutation que celle de sa sœur aıˆne´e a e´te´ retrouve´e, e´galement a` l’e´tat homozygote. Chez cette enfant e´galement, le traitement par e´tanercept a entraıˆne´ une re´mission clinique et biologique.

3. Discussion Les observations que nous rapportons e´taient e´vocatrices d’un syndrome auto-inflammatoire qui pouvait en premie`re hypothe`se faire suspecter une FMF ou une fie`vre re´currente associe´e a` un de´ficit partiel en MVK, en raison de la notion de consanguinite´, l’origine me´diterrane´enne (pour la premie`re hypothe`se), le jeune aˆge de de´but, les symptoˆmes, la fre´quence des crises et leur dure´e de quelques jours. La seconde hypothe`se a e´te´ confirme´e par les analyses ge´ne´tiques en l’absence meˆme d’hyper-IgD et ou hyper-IgA chez les deux sœurs. Depuis 1999 et la mise en e´vidence de mutations du ge`ne MVK comme causes du HIDS, plusieurs mutations ont e´te´ de´crites dont la plus fre´quente est V377I. Le lien entre l’anomalie ge´ne´tique et les manifestations cliniques autoinflammatoires reste myste´rieux. Des mutations de MVK sont responsables de l’acidurie me´valonique, maladie me´tabolique et inflammatoire de re´ve´lation ne´onatale avec phe´notype tre`s

Tableau I Fre´quence de l’hyper-IgD et de l’hyper-IgA chez les patients ayant une fie`vre re´cidivante. Auteurs

Nombre total de patients

Van der Hilst et al. [5] Bader-Meunier et al. [6] W. Ammouri et al. [11]

103

IgD se´rique e´leve´e

50

30/34

50

38

IgA se´rique e´leve´e

16

HIDS et IgD se´rique e´leve´e

HIDS et IgA se´rique normale

HIDS et IgA se´rique e´leve´e

4/34 (12 %)

30/34

13/30

17/30

5

19

2

12

HIDS

HIDS et IgD se´rique normale

103

22 %

24

D’apre`s [5,6,11]. Ig : immunoglobulines ; HIDS : syndrome d’hyper-immunoglobuline D ; MVK : me´valonate-kinase.

766

Syndrome d’hyper Ig D

se´ve`re qui, en dehors des e´pisodes fe´briles, est caracte´rise´ par un retard psychomoteur et des atteintes multivisce´rales diverses. Contrairement au de´ficit complet en MVK de l’acidurie me´valonique, le de´ficit en MVK est partiel dans HIDS [6–8]. L’e´le´vation des IgD a une spe´cificite´ et une sensibilite´ limite´es dans l’HIDS. Elle peut en effet eˆtre pre´sente au cours d’autres maladies auto-inflammatoires, des infections, des ne´oplasies et quelques autres affections. Elle peut aussi eˆtre absente dans l’HIDS, surtout chez l’enfant, avec parfois cependant une hyper-IgA [9–11]. Le tableau I re´sume les re´sultats de trois e´tudes concernant la fre´quence de l’hyper-IgD et parfois de l’hyper-IgA. Ainsi est-il important d’e´voquer le diagnostic de HIDS devant toute fie`vre re´currente ayant de´bute´ pendant la petite enfance. Il est e´galement important de noter qu’un large spectre phe´notypique existe entre les formes les plus typiques de la maladie et des formes plus se´ve`res, certaines e´tant proches du tableau d’acidurie me´valonique avec une composante neurologique et d’autres pouvant se traduire par une maladie intestinale inflammatoire se´ve`re du nourrisson. La conse´quence du de´ficit enzymatique e´tant l’excre´tion urinaire d’une quantite´ importante et anormale d’acide me´valonique au moment des crises fe´briles, le dosage de cet acide sur des urines re´colte´es en crise et congele´es jusqu’a` analyse dans un laboratoire de biochimie spe´cialise´ est un e´le´ment important du diagnostic. Le diagnostic doit eˆtre confirme´ par la recherche d’une mutation touchant les deux alle`les du ge`ne, a` l’e´tat homozygote comme dans nos observations ou de double he´te´rozygotie. E´tablir le diagnostic est d’autant plus important que certains traitements anti-cytokines, antiTNF-alpha ou anti-interleukine-1 ont montre´ une efficacite´ sur les symptoˆmes [12] et qu’il est envisageable de traiter les formes les plus se´ve`res et re´fractaires aux autres traitements par allogreffe de cellules souches he´matopoı¨e´tiques [13].

De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

Re´fe´rences [1]

[2]

[3]

[4]

[5]

[6] [7]

[8]

[9]

[10]

[11]

4. Conclusion Cette observation souligne l’importance, devant un tableau auto-inflammatoire de de´but pre´coce chez un enfant d’e´voquer le diagnostic de syndrome d’hyper-IgD, meˆme en l’absence d’hyper-IgD ou -IgA.

[12]

[13]

Drenth JP, Cuisset L, Grateau G, et al. Mutations in the gene encoding mevalonate kinase cause hyper-IgD and periodic fever syndrome. International Hyper-IgD Study Group. Nat Genet 1999;22:178–81. Houten SM, Kuis W, Duran M, et al. Mutations in MVK, encoding mevalonate kinase, cause hyperimmunoglobulinaemia D and periodic fever syndrome. Nat Genet 1999;22:175–7. Prieur AM, Griscelli C. Aspect nosologique des formes syste´mique d’arthrite juve´nile a` de´but tre`s pre´coce. A` propos de dixsept observations. Sem Hop 1984;60:163–7. van der Meer JW, Vossen JM, Radl J, et al. Hyperimmunoglobulinaemia D and periodic fever: a new syndrome. Lancet 1984;1:1087–90. van der Hilst JC, Bodar EJ, Barron KS, et al. Long-term follow-up, clinical features and quality of life in a series of 103 patients with hyperimmunoglobulinemia D syndrome. Medicine (Baltimore) 2008;87:301–10. Bader-Meunier B, Florkin B, Sibilia J, et al. Mevalonate kinase deficiency: a survey of 50 patients. Pediatrics 2011;128:e152–9. Cuisset L, Drenth JP, Simon A, et al. Molecular analysis of MVK mutations and enzymatic activity in hyper-IgD and periodic fever syndrome. Eur J Hum Genet 2001;9:260–6. Haas D, Hoffmann GF. Mevalonate kinase deficiencies: from mevalonic aciduria to hyperimmunoglobulinemia D syndrome. Orphanet J Rare Dis 2006;1:13. Di Rocco M, Caruso U, Waterham HR, et al. Mevalonate kinase deficiency in a child with periodic fever and without hyperimmunoglobulinaemia D. J Inherit Metab Dis 2001;24:411–2. Saulsbury FT. Hyperimmunoglobulinemia D and periodic fever syndrome (HIDS) in a child with normal serum IgD, but increased serum IgA concentration. J Pediatr 2003;143:127–9. Ammouri W, Cuisset L, Rouaghe S, et al. Diagnostic value of serum immunoglobulinaemia D level in patients with a clinical suspicion of hyper-IgD syndrome. Rheumatology (Oxford) 2007;46:1597–600. Galeotti C, Meinzer U, Quartier P, et al. Efficacy of interleukin-1targeting drugs in mevalonate kinase deficiency. Rheumatology (Oxford) 2012;51:1855–9. Neven B, Valayannopoulos V, Quartier P, et al. Allogeneic bone marrow transplantation in mevalonic aciduria. N Engl J Med 2007;356:2700–3.

767

[Hyperimmunoglobulinemia D and periodic fever syndrome].

We report the cases of two sisters born of parents who were first-degree cousins, who started recurrent fever with lymph node and digestive tract invo...
235KB Sizes 0 Downloads 3 Views