Gyne´cologie Obste´trique & Fertilite´ 42 (2014) 8–13

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

Article original

Combien d’e´chographies pour le suivi des grossesses a` bas risque ? How many ultrasound examinations for low-risk pregnancies monitoring? E.G. Simon a,*,b, K. Perruche c, C.J. Arthuis a,b, V. Denais c, F. Perrotin a,b a

Service de gyne´cologie-obste´trique et me´decine fœtale, CHRU de Tours, 2, boulevard Tonnelle´, 37044 Tours cedex 9, France UMR Inserm U 930, universite´ Franc¸ois-Rabelais, 2, boulevard Tonnelle´, 37044 Tours cedex 9, France c ´ Ecole re´gionale de sages-femmes, 2, boulevard Tonnelle´, 37044 Tours cedex 9, France b

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 4 mars 2013 Disponible sur Internet le 3 janvier 2014

Objectifs. – Estimer le nombre moyen d’e´chographies par grossesse et estimer la proportion des e´chographies sans examen morphologique du fœtus au cours des grossesses a` bas risque. Type d’e´tude. – E´tude re´trospective portant sur des patientes ayant accouche´ entre janvier 2012 et fe´vrier 2012 au CHU de Tours. Population de l’e´tude. – Patientes ayant pre´sente´ une grossesse singleton et ayant accouche´ d’un enfant eutrophe au-dela` de 37 semaines d’ame´norrhe´e. Collection des donne´es. – On distinguait les e´chographies morphologiques et les e´chographies non morphologiques, ainsi que le type d’examen non morphologique. Re´sultats et discussion. – Sur les 300 patientes de l’e´tude, le nombre moyen d’e´chographies par patiente est de cinq (e´cart-type = 1,9), ce qui est donc plus e´leve´ que les trois e´chographies recommande´es pour ces grossesses a` bas risque. Dans cette e´tude, 77 % des patientes be´ne´ficiaient de plus de trois e´chographies. Par ailleurs, 28,1 % de l’ensemble des examens e´taient des e´chographies non morphologiques. Ces dernie`res repre´sentaient 42,2 % des examens re´alise´s au 3e trimestre de la grossesse. Parmi ces e´chographies non morphologiques du 3e trimestre, on comptait 51,9 % de controˆles biome´triques et une mesure de la longueur du col dans 18,5 % des cas. Selon nous, le recours a` l’e´chographie non morphologique au cours des grossesses a` bas risque n’est pas critiquable en soi et doit meˆme eˆtre encourage´. Mais une re´flexion doit eˆtre mene´e afin d’ame´liorer la pertinence de tous ces examens. ß 2013 Publie´ par Elsevier Masson SAS.

Mots cle´s : Grossesse a` bas risque De´pistage E´chographie non morphologique

A B S T R A C T

Keywords: Low-risk pregnancy Screening Non-morphological ultrasound

Objectives. – To assess the average number of ultrasounds per low-risk pregnancy and estimate the proportion of ultrasound scans without morphological examination of the fetus (non-morphological ultrasounds). Research design and setting. – Retrospective study conducted among patients who delivered at the University Hospital of Tours (France) between January 2012 and February 2012. Participants. – Women with a singleton pregnancy who delivered after 37 weeks’ gestation an eutrophic child. Data collection. – Distinction was made between morphological and non-morphological ultrasound examinations. The type of non-morphological ultrasound examination was analyzed. Results and discussion. – Among the 300 patients of the study, the average number of scans per patient was five (SD = 1.9), which is higher than the three recommended ultrasounds for these low-risk pregnancies. In this study, 77% of patients were receiving more than three ultrasounds. Moreover, 28.1% of all ultrasound examinations were non-morphological examinations. Among them, 42.2% of examinations were performed in the third trimester of pregnancy. Among these non-morphological ultrasounds performed in the third trimester, there were 51.9% of fetal biometric measurements and cervical length measurements in 18.5% of cases. We believe that resorting to non-morphological ultrasounds during low-risk pregnancies is not censurable in itself and should even be promoted. Nevertheless, we should improve the relevance of all these examinations. ß 2013 Published by Elsevier Masson SAS.

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (E.G. Simon). 1297-9589/$ – see front matter ß 2013 Publie´ par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2013.12.002

E.G. Simon et al. / Gyne´cologie Obste´trique & Fertilite´ 42 (2014) 8–13

1. Introduction L’e´chographie a pris une place croissante dans le suivi de grossesse. De´sormais l’examen ultrasonore constitue le prolongement de l’examen clinique et son objectif n’est plus exclusivement l’e´tude de la morphologie fœtale. Pour s’assurer que la grossesse se de´roule normalement, nous sommes fre´quemment amene´s a` re´aliser des e´chographies « non morphologiques ». Ces examens ne sont pas un screening complet des pathologies du fœtus mais re´pondent a` une question pre´cise. Il est parfois ne´cessaire de re´aliser un controˆle de la croissance, une e´tude des mouvements du fœtus, une e´valuation de la quantite´ de liquide amniotique, un Doppler ou une e´chographie du col ute´rin. Dans d’autres cas, nous ve´rifierons la pre´sentation fœtale, ou la localisation placentaire. A` cela il faut ajouter la place croissante de l’e´chographie en salle de naissances. Le Comite´ national technique de l’e´chographie de de´pistage pre´natal conseille de re´aliser trois examens de de´pistage aux termes de 12, 22 et 32 semaines d’ame´norrhe´es (SA) [1]. Si une anomalie est de´tecte´e, la patiente be´ne´ficiera d’une e´chographie de diagnostic [2]. Ainsi une femme menant une grossesse physiologique ne devrait the´oriquement be´ne´ficier que de trois e´chographies. Pourtant la pratique clinique nous sugge`re que les examens e´chographiques sont plus nombreux, y compris dans les situations a` bas risque. En effet il faut ajouter aux e´chographies de de´pistage toutes les e´chographies non morphologiques pre´ce´demment cite´es. Si le contenu des examens de de´pistage et de diagnostic est de´sormais standardise´ en France [1,2], il en va diffe´remment du recours a` l’e´chographie non morphologique. Les donne´es de la litte´rature sur ce sujet sont limite´es. L’Enqueˆte Nationale Pe´rinatale de 2003 retrouvait un nombre moyen de 4,5 e´chographies par femme et de plus de 10 e´chographies pour 4 % d’entre elles [3]. D’autres donne´es de 2010 rapportaient une moyenne de 5 e´chographies par femme et plus de 3 examens pour 67 % d’entre elles [4]. Ces chiffres sont vraisemblablement en augmentation. En 2000, Audipog estimait un nombre moyen de 3,4 e´chographies par femme [1]. Ces donne´es sont insuffisantes car elles ne diffe´rencient pas les grossesses a` haut risque et les grossesses a` bas risque. De plus il existe probablement une he´te´roge´ne´ite´ de la fre´quence des examens sur l’ensemble du territoire national. Nous avons donc mene´ une e´tude dont l’objectif e´tait d’estimer le nombre moyen d’e´chographies par patiente pour des grossesses a` bas risque. Notre second objectif e´tait l’estimation de la proportion d’e´chographies non morphologiques parmi toutes les e´chographies. Nous souhaitions e´galement identifier les diffe´rents types d’e´chographies non morphologiques et leur re´partition au cours de la grossesse.

2. Me´thode 2.1. Type d’e´tude Nous avons re´alise´ une e´tude re´trospective a` la maternite´ Olympe de Gouges (CHU de Tours). Cette maternite´ de type 3 re´alise entre 3800 et 3900 accouchements par an (3828 en 2011). Notre objectif e´tait d’analyser un nombre de dossiers correspondant approximativement a` l’activite´ mensuelle des naissances de l’e´tablissement. 2.2. Pe´riode de l’e´tude Les dossiers ont e´te´ se´lectionne´s a` partir du registre des accouchements et a` partir de la codification informatique de la maternite´. Cette se´lection a porte´ sur les accouchements qui ont eu

9

lieu entre janvier 2012 et fe´vrier 2012. Aucun e´le´ment ne permettait de pre´fe´rer une pe´riode de l’anne´e a` une autre, car le nombre mensuel d’accouchements e´tait stable. 2.3. Population de l’e´tude Nous avons choisi d’effectuer notre recueil au sein d’une population a` bas risque. Les de´finitions de la grossesse a` bas risque e´tant multiples et extreˆmement restrictives [5,6], nous avons choisi d’inclure toutes les patientes pre´sentant une grossesse unique et ayant accouche´ au terme de 37 SA ou plus d’un enfant vivant et eutrophe. Nous n’avons pas inclus les grossesses multiples conside´rant que celles-ci ne´cessitaient une surveillance e´chographique plus soutenue. Les naissances pre´mature´es, souvent induites a` la de´couverte d’une pathologie, n’ont pas e´te´ incluses. L’existence d’une malformation conge´nitale de l’ute´rus ou d’un diabe`te insulino-reque´rant e´taient des crite`res de noninclusion. Pour juger la croissance de l’enfant ne´, nous avons utilise´ les courbes biome´triques Audipog (module d’estimation ponde´rale disponible en ligne) [7]. Seuls les enfants se situant entre le 10e et le 90e percentile ont e´te´ retenus dans l’e´tude. Les patientes ayant be´ne´ficie´ d’un avis du Comite´ pluridisciplinaire de diagnostic pre´natal, les patientes dont le fœtus pre´sentait une malformation et les patientes ayant un ante´ce´dent de mort fœtale in utero ont e´te´ exclues. 2.4. Crite`res de jugement Les objectifs de l’e´tude e´taient d’estimer le nombre moyen d’e´chographies par patiente et la proportion des e´chographies non morphologiques parmi l’ensemble des e´chographies re´alise´es. 2.5. Proce´dures e´chographiques Nous avons classe´ les examens e´chographiques en huit cate´gories. La terminologie e´tait la suivante :  « E´chographie de datation », de´finie par les examens re´alise´s entre 5 SA et 11 SA ;  « E´chographie de de´pistage », correspondant aux trois e´chographies conseille´es entre 11–13+6 SA, 20–25 SA et 30– 35 SA ;  « E´chographie de controˆle de´pistage », lorsque l’exploration morphologique pre´ce´dente e´tait incomple`te et justifiait un examen de controˆle (dans un contexte de de´pistage) ;  « E´chographie de controˆle de la croissance », ou` seules les biome´tries fœtales e´taient e´tudie´es. Cette cate´gorie ne comprenait donc pas les mesures re´alise´es au cours des examens de de´pistage ;  « E´chographie de terme », re´alise´e a` 41 SA comportant une e´valuation de la quantite´ de liquide amniotique (et comportant parfois des biome´tries ou des Dopplers) ;  « E´chographie cervicale » que celle-ci soit isole´e (« e´chographie cervicale ») ou associe´e a` un autre type d’e´chographie (« e´chographie de de´pistage + cervicale », « controˆle de´pistage + cervicale », « controˆle de la croissance + cervicale »). Cette typologie permettait de quantifier pre´cise´ment le nombre d’e´chographies cervicales ;  « E´chographie autre », inte´grant le controˆle des mouvements fœtaux, la ve´rification de la localisation placentaire, le controˆle de la pre´sentation, l’e´valuation de la quantite´ de liquide amniotique, les Dopplers fœto-placentaires et la mesure du segment infe´rieur (en cas d’ute´rus cicatriciel) ;  « E´chographie non morphologique », incluant toutes les e´chographies cite´es pre´ce´demment a` l’exception des e´chographies de de´pistage et de controˆle de´pistage.

E.G. Simon et al. / Gyne´cologie Obste´trique & Fertilite´ 42 (2014) 8–13

10

Les e´chographies non obste´tricales (par exemple, l’e´chographie re´nale ou l’e´chographie he´patobiliaire) n’e´taient pas comptabilise´es dans l’e´tude.

de 35 ans ou plus. L’indice de masse corporelle e´tait normal dans 64,3 % des cas et 7,7 % des patientes e´taient obe`ses. La proportion d’ute´rus cicatriciel e´tait de 7,3 %. Seules 2,3 % des patientes ont e´te´ hospitalise´es au cours de leur grossesse.

2.6. Analyse 3.3. Nombre moyen d’e´chographies par patiente Les re´sultats ont e´te´ pre´sente´s de manie`re descriptive, sous forme d’effectifs et de pourcentages. Seule l’analyse des dossiers complets a e´te´ rapporte´e. Aucune me´thode de gestion des donne´es manquantes n’a e´te´ applique´e. 3. Re´sultats 3.1. Se´lection des dossiers Nous avons retenu 468 dossiers correspondant a` la naissance d’un enfant vivant et viable. Apre`s exclusion des nouveau-ne´s pre´mature´s, des grossesses multiples, des malformations ute´rines et des diabe`tes insulino-reque´rants, 406 dossiers ont e´te´ e´tudie´s. On observait que 9,6 % des nouveau-ne´s e´taient macrosomes et que 10,8 % des nouveau-ne´s e´taient hypotrophes. Ces dossiers ont e´te´ secondairement exclus. De plus, 18 dossiers incomplets ou perdus n’ont pas pu eˆtre exploite´s. L’analyse a e´te´ effectue´e a` partir de 300 dossiers complets entre janvier 2012 et fe´vrier 2012. 3.2. Population de l’e´tude Le Tableau 1 pre´sente les caracte´ristiques de la population. L’aˆge des patientes e´tait dans l’intervalle 19–35 ans pour la plupart d’entre elles. Ne´anmoins, 21,3 % des femmes e´taient aˆge´es Tableau 1 Population de l’e´tude.

Aˆge  18 ans 19–35 ans  35 ans De´pistage de la trisomie 21a Recherche ge´ne´tiqueb Indice de masse corporelle < 18,5 18,5–24,9 25–29,9 30–34,9 > 35 Gestite´ Primigeste Multigeste Parite´ Primipare Multipare Ute´rus cicatriciel Grossesse spontane´e Hospitalisationc Terme de l’accouchement 37–37+6 SA 38–38+6 SA 39–39+6 SA 40–40+6 SA  41 SA Percentile de naissance < 25e percentile 25–75e percentile > 75e percentile

Effectif

Pourcentage

6 230 64 228 8

2,0 76,7 21,3 76,0 2,7

19 193 65 21 2

6,3 64,3 21,7 7,0 0,7

96 204

32,0 68,0

135 165 22 288 7

45,0 55,0 7,3 96,0 2,3

10 42 95 95 58

3,3 14,0 31,7 31,7 19,3

56 198 46

18,7 66,0 15,3

a De´pistage combine´ du 1er trimestre ou de´pistage se´quentiel inte´gre´ du 2e trimestre ou marqueurs du 2e trimestre isole´s. b Re´alisation d’une amniocente`se ou d’une biopsie de trophoblaste. c Motifs de l’hospitalisation : menace d’accouchement pre´mature´ (n = 3), pye´lone´phrite (n = 2), vomissements (n = 1), surveillance pour suspicion de retard de croissance intra-ute´rin (n = 1).

Le nombre total d’e´chographies releve´ dans notre e´tude e´tait de 1498. Le nombre moyen d’e´chographies par patiente e´tait de 5 (l’e´cart-type e´tait de 1,9), avec une e´tendue allant de 1 a` 13 examens ultrasonores et une me´diane e´gale a` 5. Nous observions que 77 % des patientes be´ne´ficiaient de plus de 3 e´chographies. Pour les grossesses de´clare´es au 1er trimestre, le nombre moyen d’e´chographies e´tait de 5,1 tandis qu’il e´tait de 3,4 pour les grossesses de´couvertes plus tardivement (au deuxie`me ou au troisie`me trimestre) (p = 0,02). 3.4. Proportion des e´chographies non morphologiques au cours de la grossesse Nous observions que 28,1 % des e´chographies re´alise´es au cours de la grossesse (quel que soit le terme de re´alisation de ces e´chographies) e´taient des e´chographies non morphologiques. Le Tableau 2 rapporte la re´partition des diffe´rents types d’e´chographie au cours des trois trimestres de la grossesse. On observait ainsi que 42,2 % des e´chographies du 3e trimestre e´taient des e´chographies non morphologiques. 3.5. Chronologie des e´chographies au cours de la grossesse Une grande proportion d’e´chographies e´tait re´alise´e au troisie`me trimestre de la grossesse puisque ces e´chographies du troisie`me trimestre repre´sentaient 46,9 % de l’ensemble des e´chographies (Tableau 2). Au cours du premier trimestre, le nombre moyen d’e´chographies par patiente e´tait de 1,2. Au deuxie`me trimestre, ce chiffre e´tait de 1,5 e´chographies par femme et de 2,3 au troisie`me trimestre. Tableau 2 Type d’e´chographie en fonction du trimestre de la grossesse. Nombre d’ e´chographies

Pourcentage

1er trimestre : < 15 SA Datation Comportant un examen morphologique Examen non morphologique Comportant une e´chographie cervicale Autre#

357 77 275 82 2 5

23,8* 21,6 77,0 23,0 0,6 1,4

2e trimestre : 15–28 SA Comportant un examen morphologique Examen non morphologique Comportant une e´chographie cervicale Comportant un controˆle de la croissance§ Autre#

438 396 42 110 20 8

29,2* 90,4 9,6 25,1 4,6 1,8

3e trimestre : > 28 SA Comportant un examen morphologique Examen non morphologique Comportant une e´chographie cervicale Comportant un controˆle de la croissance§ E´chographie a` terme Autre#

703 406 297 177 154 48 66

46,9* 57,8 42,2 25,2 21,9 6,8 9,4

Les pourcentages sont exprime´s par rapport a` l’ensemble des e´chographies du trimestre conside´re´ sauf les pourcentages note´s (*) qui sont rapporte´s a` l’ensemble des examens e´chographiques de la grossesse. Certaines e´chographies pouvaient combiner plusieurs types d’examens. La cate´gorie « comportant un controˆle de la croissance » (§) ne concernait pas les biome´tries re´alise´es au cours des examens de de´pistage. La cate´gorie « autre » (#) est de´finie dans le chapitre Me´thode.

E.G. Simon et al. / Gyne´cologie Obste´trique & Fertilite´ 42 (2014) 8–13

11

Fig. 1. Re´partition des e´chographies a` partir de 32 SA : a : re´partition parmi toutes les e´chographies ; b : re´partition des e´chographies non morphologiques.

3.6. Re´partition des diffe´rents types d’e´chographies apre`s 32 SA Les diffe´rents types d’e´chographies re´alise´es a` partir de 32 SA sont pre´sente´s sur la Fig. 1a. Nous constations que la majorite´ des examens re´alise´s entre 32 et 34 SA e´taient des examens de de´pistage. Par ailleurs, les examens de « controˆle du de´pistage » repre´sentaient 20 % des e´chographies re´alise´es entre 34 et 36 SA et 6 % apre`s 36 SA. Les e´chographies non morphologiques repre´sentaient respectivement 7,4 %, 55 % et 93,1 % des examens effectue´s entre 32– 34 SA, 34–36 SA et apre`s 36 SA. Parmi les examens non morphologiques (Fig. 1b), les controˆles de la croissance repre´sentaient 40,9 % des examens entre 32 et 34 SA, 57,6 % entre 34 et 36 SA, et 45,3 % apre`s 36 SA.

giques de la grossesse (Tableau 3) et 51,9 % des examens non morphologiques du troisie`me trimestre. 3.8. Les e´chographies cervicales Les examens comportant une e´chographie du col (que cette dernie`re soit isole´e ou qu’elle s’inte`gre a` un autre examen) repre´sentaient 19,3 % de l’ensemble des e´chographies de l’e´tude. Sur l’ensemble de ces examens comportant une e´chographie du col, cette dernie`re e´tait pratique´e sans autre exploration e´chographique (c’est-a`-dire sans examen fœtal, sans biome´trie, sans quantification du liquide amniotique) dans 2,9 % des cas. Les examens comportant une mesure de la longueur du col repre´sentaient 25,2 % des e´chographies du troisie`me trimestre et 18,5 % des e´chographies non morphologiques du troisie`me trimestre.

3.7. Le controˆle de la croissance 3.9. Les autres types d’e´chographies non morphologiques Les e´chographies de controˆle de la croissance repre´sentaient 11,6 % de l’ensemble des e´chographies de l’e´tude et 21,9 % des e´chographies du troisie`me trimestre. Ces examens biome´triques constituaient 41,3 % de l’ensemble des examens non morpholo-

La cate´gorie des « autres e´chographies » repre´sentait 5,5 % de l’ensemble des e´chographies de la grossesse et 19,7 % des e´chographies non morphologiques. Dans ce groupe des « autres

Tableau 3 Type d’e´chographie obste´tricale. Type d’e´chographies

Nombre d’e´chographies

Pourcentage

E´chographies morphologiques Comportant un examen de de´pistage Comportant un examen de controˆle de de´pistage

1077 942 135

71,9* 87,5 12,5

421 77 174 77 46 79 48

28,1* 18,3 41,3 18,3 10,9 18,8 11,4

E´chographies non morphologiques Datation Comportant un controˆle de la croissance Comportant une e´chographie cervicale E´chographie cervicale sans autre exploration Autre# E´chographie a` terme

Les pourcentages sont exprime´s par rapport a` l’ensemble des e´chographies morphologiques ou par rapport a` l’ensemble des e´chographies non morphologiques sauf les pourcentages note´s (*) qui sont rapporte´s a` l’ensemble des examens e´chographiques de la grossesse. Certaines e´chographies pouvaient combiner plusieurs types d’examen. La cate´gorie « autre » (#) est de´finie dans le chapitre Me´thode.

12

E.G. Simon et al. / Gyne´cologie Obste´trique & Fertilite´ 42 (2014) 8–13

e´chographies », on trouvait 31,7 % de ve´rifications des mouvements actifs fœtaux, 18,3 % d’explorations de me´trorragies, 15,9 % de controˆles de la pre´sentation fœtale et 14,6 % de quantifications du liquide amniotique. Les e´chographies pour douleurs pelviennes, ve´rification de la position placentaire, explorations de cicatrices ute´rines, anomalies du rythme cardiaque fœtal, chute et Dopplers fœto-placentaires repre´sentaient chacune une part restreinte du groupe « autre e´chographie » (< 10 % de ce groupe). 3.10. Les e´chographies morphologiques Dans notre e´tude, 71,9 % de l’ensemble des examens comportaient une analyse morphologique du fœtus (Tableau 3). Sur l’ensemble de ces examens de de´pistage, 12,5 % e´taient des e´chographies de controˆle de la morphologie en raison d’une exploration pre´ce´dente incomple`te. Au troisie`me trimestre, 57,8 % des e´chographies comportaient un examen morphologique. 4. Discussion Par cette e´tude, nous proposons de distinguer les e´chographies morphologiques et les e´chographies non morphologiques. Cette distinction originale permet selon nous de remettre en perspective l’ensemble du suivi e´chographique de la grossesse et d’ouvrir une re´flexion sur nos objectifs dans ce domaine. La litte´rature sur l’e´chographie obste´tricale et les congre`s d’imagerie nous sugge`rent que le suivi e´chographique de la grossesse serait re´alise´ par des spe´cialistes des ultrasons et de la me´decine fœtale. Ces spe´cialistes exerceraient dans des salles d’e´chographie hospitalie`res ou dans des cabinets prive´s. Si cette affirmation est en partie exacte, nous ajoutons toutefois qu’il existe une « part cache´e » de l’activite´ e´chographique, rarement mise en valeur. Ce sont tous ces examens re´alise´s quotidiennement dans nos maternite´s par des internes ou par des sages-femmes qui ne sont pas des experts en imagerie. Ces examens n’ont pas pour objet le de´pistage des pathologies du fœtus mais re´pondent en ge´ne´ral a` une question ponctuelle. De telles e´chographies sont souvent re´alise´es aux urgences obste´tricales, et parfois au lit de la patiente. Notre e´tude souligne que le volume de cette activite´ est loin d’eˆtre ne´gligeable, meˆme pour des grossesses a` bas risque. Nous mettons en e´vidence qu’un grand nombre d’e´chographies sont re´alise´es au cours des grossesses a` bas risque. Contrairement aux ide´es rec¸ues, les femmes en bonne sante´ et sans facteur de risque ne be´ne´ficient pas de trois e´chographies mais plutoˆt de cinq e´chographies. Ce chiffre de cinq e´chographies semble d’autant plus robuste qu’il correspond a` la fois a` la moyenne et a` la me´diane du nombre total d’e´chographies. Ce re´sultat est superposable a` celui de l’Enqueˆte Nationale Pe´rinatale de 2010 [4], avec toutefois une nuance importante : nous n’avons e´tudie´ que les grossesses a` bas risque. On peut contester le fait que notre population soit ve´ritablement « a` bas risque » avec ses 7 % de patientes obe`ses et ses 7,3 % d’ute´rus cicatriciels. Les de´finitions du bas risque sont nombreuses et plus ou moins restrictives [5,6]. Nous avons fait le choix de conside´rer une de´finition pragmatique du bas risque essentiellement fonde´e sur l’issue favorable de la grossesse, plutoˆt qu’une de´finition trop exigeante. En effet, la se´lection des niveaux de risque les plus faibles nous aurait interdit toute extrapolation a` la population que nous rencontrons quotidiennement. Les cinq e´chographies par femme concernaient la population qui fre´quente usuellement nos maternite´s. Nous croyons qu’une telle e´tude me´riterait d’eˆtre renouvele´e dans d’autres re´gions franc¸aises afin de comple´ter les donne´es de l’Enqueˆte Nationale Pe´rinatale [4]. Cette dernie`re indiquait que 23,4 % des patientes de l’ouest du bassin parisien avaient be´ne´ficie´ d’au moins six e´chographies au cours de leur grossesse. Dans notre

e´tude mene´e en re´gion Centre, cette proportion de femmes ayant be´ne´ficie´ d’au moins six e´chographies s’e´levait a` 33,6 % alors que notre analyse portait sur la seule population a` bas risque. Par ailleurs, ce recours fre´quent a` l’e´chographie est en rapport avec nos pratiques franc¸aises. Le suivi de grossesse diffe`re beaucoup d’un pays a` l’autre. Aux E´tats-Unis, les patientes a` bas risque ne be´ne´ficiaient que de 2,1 e´chographies au cours de leur grossesse (en 2005–2006) [8]. Ce chiffre e´tait toutefois en augmentation par rapport a` 1995. De plus nous pensons que les re´sultats de notre e´tude sousestimaient probablement le nombre re´el d’e´chographies. En effet il est possible que certains examens ne soient pas rapporte´s dans les dossiers me´dicaux. C’est le cas de toutes les e´chographies juge´es « anodines » (a` tort) et qui ne font pas toujours l’objet d’un compterendu. Citons par exemple la ve´rification d’une pre´sentation au cours d’une consultation, une e´chographie du col en cas de doute au toucher vaginal, ou encore le controˆle de la position fœtale en salle d’accouchement. Ces e´chographies supple´mentaires ne correspondaient pas a` des e´tudes de´taille´es du fœtus. Ainsi 28,1 % de l’ensemble des e´chographies e´taient en re´alite´ des e´chographies non morphologiques. Ces e´chographies non morphologiques repre´sentaient une proportion conside´rable (42,2 %) des examens re´alise´s au 3e trimestre de la grossesse. Par ailleurs, ce recours important a` l’e´chographie ne s’expliquait pas par les difficulte´s rencontre´es au cours du de´pistage : seules 9 % des e´chographies de notre e´tude e´taient des ve´rifications de la morphologie fœtale. Nos re´sultats doivent eˆtre interpre´te´s avec prudence. Ce grand nombre d’examens peut sembler excessif chez des patientes qui donnaient finalement naissance a` des enfants eutrophes et en bonne sante´. Parmi ces examens on observait une grande part de controˆles biome´triques. Ces controˆles e´taient-ils toujours indique´s ? Il est vrai qu’on ne dispose pas de re`gle pre´cise pour guider la prescription d’un controˆle biome´trique. A` partir de quand ce dernier devient-il le´gitime ? La probabilite´ d’observer un parame`tre biome´trique infe´rieur au 10e percentile lors de l’e´chographie du 3e trimestre est par de´finition de 10 %, mais la probabilite´ d’observer au moins un des cinq parame`tres biome´triques (diame`tre biparie´tal, pe´rime`tre ce´phalique, diame`tre abdominal transverse, pe´rime`tre abdominal ou longueur fe´morale) infe´rieur au 10e percentile est tre`s supe´rieur a` 10 %. Dans une telle situation on peut supposer que la prescription d’un controˆle biome´trique au 3e trimestre est variable d’un prescripteur a` l’autre et de´pend de son degre´ d’anxie´te´. A` cela il faut ajouter la dimension me´dicole´gale de cet examen pour un praticien qui a le sentiment de se « prote´ger ». Pourtant les 11,6 % d’e´chographies exclusivement biome´triques n’ont jamais permis de de´pister des retards de croissance intra-ute´rins dans notre e´tude. Ce recours fre´quent a` l’e´chographie est-il pour autant toujours ne´gatif ? Lorsque la pre´sentation du fœtus est incertaine, le praticien ne doit pas s’interdire de ve´rifier celle-ci par e´chographie. Le be´ne´fice d’un tel examen n’est pas e´valuable par l’observation des indicateurs de sante´ pe´rinatale mais rele`ve plutoˆt de l’e´vidence. C’est e´galement le cas de la ve´rification e´chographique de la position fœtale avant de re´aliser un forceps. Le grand nombre d’e´chographies par femme illustre selon nous un changement de paradigme en matie`re de suivi de la grossesse, avec le passage « de l’e´chographie obste´tricale a` l’obste´trique e´chographique » (formule que nous empruntons a` Yves Ville) [9]. Cette e´volution est ine´luctable avec l’ave`nement d’appareils e´chographiques de plus en plus sophistique´s et de plus en plus compacts. Ainsi il est de´sormais possible de calculer un index de liquide amniotique au lit de la patiente hospitalise´e. De la meˆme fac¸on, les services des urgences obste´tricales sont souvent e´quipe´s d’appareils portatifs, si bien qu’il est de moins en moins ne´cessaire

E.G. Simon et al. / Gyne´cologie Obste´trique & Fertilite´ 42 (2014) 8–13

de transfe´rer les patientes vers des salles d’e´chographie traditionnelles. L’acce`s aux technologies les plus avance´es s’est conside´rablement de´mocratise´, et l’on compte de plus en plus de professionnels forme´s a` l’e´chographie. Ceci est atteste´ par le succe`s constant des diploˆmes universitaires d’e´chographie, et par la multiplication des formations continues dans ce domaine. Cette croissance de la compe´tence e´chographique est observable chez les me´decins gyne´cologues obste´triciens (avec une formation initiale en e´chographie de plus en plus riche) mais e´galement chez les sages-femmes. Ces dernie`res sont de plus en plus nombreuses a` acque´rir une solide compe´tence en e´chographie de de´pistage. Hormis ces sages-femmes « e´chographistes », le recours a` l’e´chographie non morphologique entre progressivement dans les habitudes des sages-femmes « non e´chographistes » (qu’il s’agisse de la ve´rification d’une pre´sentation, de la ve´rification de la position du fœtus ou meˆme de l’e´chographie du col). Nous ne croyons pas qu’il faille ne´cessairement re´duire le nombre d’e´chographies pratique´es au cours de la grossesse, mais plutoˆt ame´liorer leur pertinence. Ainsi certains examens sont probablement inutiles. Parmi ces examens inutiles citons par exemple le controˆle syste´matique de l’e´chographie du col apre`s une hospitalisation pour une menace d’accouchement pre´mature´ [10], ou encore le controˆle syste´matique de toute mensuration fœtale au 10e percentile. De meˆme, la re´alisation syste´matique de Dopplers aux urgences obste´tricales est peu rentable (hormis les cas ave´re´s de retards de croissance intra-ute´rins). En revanche, d’autres parame`tres de surveillance e´chographique prendront peut-eˆtre davantage de place dans les anne´es a` venir. Citons par exemple la mesure du segment infe´rieur pour les ute´rus cicatriciels [11] ou l’angle de progression de la teˆte fœtale en salle de naissance [12]. Qu’on le veuille ou non, le recours a` l’e´chographie non morphologique sera de plus en plus fre´quent dans les anne´es a` venir. Cette e´volution croissante ne doit pas eˆtre diabolise´e mais au contraire encourage´e si on l’accompagne d’une re´flexion sur la pertinence de tous ces examens. Pour conclure, nous croyons que l’e´chographie est le prolongement de l’examen clinique et qu’a` ce titre elle doit re´pondre aux questions pose´es par chaque situation. L’e´chographie non morphologique ne doit pas s’inscrire dans une de´marche syste´matique

13

de´connecte´e du contexte clinique. Ainsi conside´re´e la multiplication des examens n’est pas par nature ille´gitime. De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Sureau C, Henrion R. Rapport du comite´ national technique de l’e´chographie de de´pistage pre´natal; 2005, Available from: URL: http://www.cngof.asso.fr/ D_TELE/050430_rapport_echo.pdf. [2] Lansac J. Rapport du comite´ national technique de l’e´chographie de de´pistage pre´natal; 2010, Available from: URL: http://www.cngof.asso.fr/D_TELE/ 100513_rapport_echo.pdf. [3] Vilain A, Peretti C, Herbert JB, Blondel B. La situation pe´rinatale en France en 2003. Premiers re´sultats de l’enqueˆte nationale pe´rinatale. E´tudes et re´sultats; 2005, 383. Available from: URL: http://www.drees.sante.gouv.fr/IMG/pdf/ er383.pdf. [4] Blondel B, Kermarrec M. Les naissances en 2010 et leur e´volution depuis 2003; 2010, Available from: URL: http://www.drees.sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_naissances2010.pdf. [5] Haute Autorite´ de Sante´. Suivi et orientation des femmes enceintes en fonction des situations a` risque identifie´es. Recommandations professionnelles; 2007, Available from: URL: http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/suivi_des_femmes_enceintes_-_recommandations_23-04-2008.pdf. [6] National Institute for Healthand Clinical Excellence. Routine care for the healthy pregnant women. NICE clinical guideline 62; 2008, Available from: URL: http://www.nice.org.uk/nicemedia/pdf/CG062NICEguideline.pdf. [7] Audipog. Estimation de la croissance fœtale et post-natale. Available from: URL: http://www.audipog.net/courbes_morpho.php. [8] Siddique J, Lauderdale DS, VanderWeele TJ, Lantos JD. Trends in prenatal ultrasound use in the United States: 1995 to 2006. Med Care 2009;47(11):1129–35. [9] Ville Y. De l’e´chographie obste´tricale a` l’obste´trique e´chographique. In: Bault JP, Coquel P, Ville Y, editors. Pratique de l’e´chographie obste´tricale au troisie`me trimestre. Montpellier: Sauramps Me´dical; 2009. p. 9–10. [10] Haute Autorite´ de sante´. Mesure de la longueur du canal cervical du col de l’ute´rus par e´chographie par voie vaginale. Inte´reˆt dans la pre´vision de l’accouchement pre´mature´ spontane´. Rapport d’e´valuation technologique; 2010, Available from: URL. http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/ application/pdf/2010-08/mesure_de_la_longueur_du_col_de_luterus_par_echographie_endovaginale_-_texte_court.pdf. [11] Stirnemann JJ, Chalouhi GE, Forner S, Saidji Y, Salomon LJ, Bernard JP, et al. First-trimester uterine scar assessment by transvaginal ultrasound. Am J Obstet Gynecol 2011;205(6):551 [e1–6]. [12] Fouche´ CJ, Simon EG, Potin J, Perrotin F. La surveillance e´chographique de la deuxie`me partie du travail. Gynecol Obstet Fertil 2012;40(11):658–65.

[How many ultrasound examinations for low-risk pregnancies monitoring?].

To assess the average number of ultrasounds per low-risk pregnancy and estimate the proportion of ultrasound scans without morphological examination o...
579KB Sizes 0 Downloads 0 Views