Presse Med. 2015; 44: 89–95

Dossier thématique

L'angioedème héréditaire en pédiatrie : enjeux diagnostique et thérapeutique

Mise au point

ANGIŒD EME

en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.com

Anne Pagnier

Disponible sur internet le : 12 décembre 2014

CHU de Grenoble, hôpital couple enfants, clinique universitaire de pédiatrie, Centre national de référence des angioedèmes (CREAK), boulevard de la Chantourne, 38043 Grenoble cedex 09, France

[email protected]

Points essentiels L'angiœdème héréditaire est une pathologie rare dont le diagnostic positif au décours d'un œdème laryngé ou devant des douleurs abdominales récurrentes est difficile en milieu pédiatrique, les diagnostics différentiels à cet âge étant beaucoup plus fréquents. Il n'existe pas chez l'enfant de facteurs biologiques validés pour le diagnostic des formes d'angiœdème à C1 inhibiteur normal, sans mutation du facteur XII, le diagnostic reste clinique. La reconnaissance et la prise en charge précoces des crises d'angiœdème, et l'éducation thérapeutique pourraient néanmoins diminuer la morbidité et le retentissement à moyen et long terme sur la qualité de vie, notamment dans les formes abdominales, source d'absentéisme scolaire. Il n'y a actuellement pas de médicament injectable par voie sous-cutanée pour les crises ayant l'AMM chez l'enfant, les études pharmacocinétiques sont en cours. Il convient donc à cet âge de définir un circuit d'urgence optimal pour injection intraveineuse des concentrés de C1 inhibiteur.

Key points Hereditary angioedema in childhood. Diagnosis and therapeutic challenges

tome 44 > n81 > janvier 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.07.018 © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Hereditary angioedema is a rare disease. In case of laryngeal edema or chronic abdominal pains, diagnosis is difficult in childhood because numerous differential diagnoses possibilities are to be considered. The diagnosis of hereditary angioedema with normal C1Inh (type III) is also a challenge because it is based only on clinical features. Important school absenteeism can be due to recurrent abdominal attacks. Early diagnosis, specific management, and therapeutic education are necessary for improvement of quality of life. Actually, subcutaneous treatment is not yet available for children. Studies are going on. In the meantime, C1Inh concentrate intravenous administration must be available for children quickly and safely.

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A. Pagnier

L'

angiœdème à bradykinine est une pathologie rare qui reste méconnue chez l'enfant. Les données cliniques et thérapeutiques concernant les patients pédiatriques inclus dans des cohortes mixtes adultes/enfants sont rarement analysées de façon individualisée, en dehors de quelques séries prospectives récentes et de consensus nationaux, sans que les niveaux de preuve suffisants et les données pharmacocinétiques soient toujours formelles. Peu de données épidémiologiques sont disponibles en France, ceci étant en partie rendu difficile par une filière de soins complexe pour les enfants atteints d'angiœdème, se répartissant entre spécialistes adultes de la pathologie et pédiatres hospitaliers [1,2]. Il n'existe actuellement pas de critères diagnostiques spécifiquement pédiatriques. L'enjeu dans cette population est la précocité du diagnostic, la mise en place d'une filière de soins d'urgence et d'outils d'éducation thérapeutique adaptés à l'âge. En dehors du risque vital des épisodes d'œdème des voies aériennes supérieures, le retentissement sur la scolarité et la qualité de vie et la morbidité des douleurs abdominales récurrentes peuvent s'avérer importants en cas de prise en charge inadaptée des formes symptomatiques dès la petite enfance.

Le diagnostic précoce : un enjeu majeur pour les pédiatres Pathogénie Chez l'enfant, les angiœdèmes à bradykinine se répartissent en :  angiœdème par déficit en C1 inhibiteur, de transmission autosomique dominante, de type I par déficit pondéral en C1

inhibiteur ou de type II avec taux normal de la protéine C1 inhibiteur non fonctionnelle ;  angiœdème à C1 inhibiteur normal. Dans ce dernier groupe, on identifie les enfants nés de parents atteints d'AO héréditaire avec mutation du facteur XII Hageman. Le suivi prospectif, récent dans ce sous-groupe, permettra de préciser les caractéristiques cliniques, notamment l'âge de révélation des premières manifestations, décrites comme plus tardives voire inexistantes dans la littérature avant l'adolescence [3]. Il existe, dans la cohorte nationale du CREAK, des cas index pédiatriques d'angiœdème à bradykinine avec C1 inhibiteur normal sans mutation identifiée, mais il convient de rester prudent dans ces cas précis. En effet, les critères diagnostiques ont été établis chez l'adulte, avec, pour ceux de 2012, un début identifié des manifestations à la deuxième ou troisième décade. En l'absence de marqueurs biologiques validés et de cohorte publiée avec des critères fiables de crise d'AOH typique, l'épidémiologie réelle de l'angioedème à bradykinine idiopathique, sans mutation du facteur Hageman, reste hypothétique chez l'enfant [3–5]. Néanmoins, des crises abdominales typiques ont pu être observées dans la cohorte du centre de référence avant l'âge de 10 ans (figure 1). Il existe également dans la littérature des cas d'angioedème aux IEC hors anomalie de C1 inhibiteur [6,7]. Le risque est le diagnostic par excès, non sans conséquences psychologiques et médico-économiques, par confusion notamment avec des angiœdèmes histaminiques, avec ou sans urticaire. Leur prise en charge diagnostique et thérapeutique est

Figure 1

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Crise d'angioedème abdominale (angioedème familial à C1 inhibiteur normal)

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ANGIŒD EME

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L'angioedème héréditaire en pédiatrie : enjeux diagnostique et thérapeutique

différente. Dans une série prospective récente d'angioedème sans urticaire de 95 patients âgés de 0,7 à 17 ans, aucun cas de déficit en C1 inhibiteur n'a été observé, l'étiologie retenue était une infection dans 21 % des cas, une allergie dans 14 % des cas, une thyroïdite auto-immune dans 8 % des cas, une hypersensibilité aux anti-inflammatoires non stéroïdiens dans 6 % des cas et la cause n'a pas été identifiée dans 51 % des cas [8]. L'enjeu est de caractériser les anomalies biologiques impliquées dans ces formes, avec études prospectives clinico-biologiques.

Âge de révélation La moyenne d'âge de révélation est variable selon les études et tend à diminuer dans les dernières publications, entre 5 et 11 ans, mais des crises précoces à l'âge préscolaire et chez des nourrissons d'un an ont été rapportées. La maladie se révèle avant la puberté dans 50 % des cas. L'apparition de crises précoces avant 5 ans apparaît comme un facteur pronostique défavorable en termes de score de sévérité. La variabilité interindividuelle entre les crises est importante, avec souvent une aggravation entre 3 et 6 ans et à la puberté [1,9,10–13].

Figure 2 Rash réticulé chez une adolescente

Clinique

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médian 12,6 ans) et 17 % des lycéens (âge médian 15,6 ans) ont des crises douloureuses abdominales hebdomadaires [18]. Les signes cliniques peuvent apparaître très peu spécifiques, par rapport aux autres causes classiques de syndrome douloureux abdominal aigu ou récurrent en pédiatrie. Les critères diagnostiques discriminants nécessitent d'être affinés par des études pédiatriques prospectives incluant les nourrissons. Certains éléments peuvent orienter :  à l'interrogatoire : – antécédents familiaux et/ou personnels de « crises similaires » identifiées par l'enfant, – facteurs déclenchants classiques précédant la crise qui peut survenir de façon assez brutale au décours : traumatisme physique, stress, soins dentaires, émotion positive (spectacle, concert, fête de famille. . .), cycles menstruels chez l'adolescente ;  sur le plan clinique : – rash réticulé ou serpigineux, pouvant précéder la crise et possiblement plus fréquent chez l'enfant, dans 42 à 58 % des cas [13,19] (figure 2), – signes d'hypovolémie, – météorisme abdominal important, – ascite, plus rarement épanchement pleural, – durée de la crise de 24 à 72 h, avec résolution progressive des symptômes sans traitement spécifique. Dans les douleurs abdominales, souvent intenses avec nausées, vomissements et arrêt du transit possible, une prise en charge

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Si le diagnostic est aisé pour les cliniciens spécialistes de la pathologie et dans les familles identifiées, il est plus complexe dans les services d'urgence pédiatrique et les consultations de pédiatrie. En effet, la triade classique complète œdème laryngé, crises abdominales et œdèmes périphériques est assez rare chez l'enfant. Sur une cohorte locale de 27 enfants identifiés type I et II avec mutation de SERPING1, âgés de 6 mois à 17 ans et suivis de façon prospective, 4 sont restés asymptomatiques pendant la durée de l'étude. Pour 8 d'entre eux, des facteurs déclenchants des crises avaient pu être identifiés : traumatisme physique (4) ; stress (3) ; cycles menstruels (2) ; contraception (1) et fatigue (1). Les œdèmes périphériques, classiques et assez fréquents chez l'enfant, sont non prurigineux, non inflammatoires, sans urticaire associée [14]. Ils peuvent toucher le tronc, les extrémités, la face, la sphère génitale, et durent entre 2 et 4 jours. L'œdème laryngé, possible et potentiellement fatal, parfois inaugural, est plus rare que chez l'adulte (0,9 %). En revanche, l'obstruction des voies aériennes est plus rapide et précoce chez l'enfant du fait de l'étroitesse de la filière laryngée [11,13,15]. Les crises abdominales sont en revanche fréquentes et peuvent survenir très précocement, dès l'âge d'un an, avec une particulière gravité de l'hypovolémie chez le nourrisson. La problématique à l'âge pédiatrique est d'évoquer ce diagnostic devant une dyspnée laryngée ou des douleurs abdominales, les diagnostics différentiels étant beaucoup plus fréquents à cet âge [16,17]. Ainsi, dans une étude de prévalence des douleurs abdominales fonctionnelles récurrentes à l'adolescence, Hyams et al. rapportent les chiffres suivants : 13 % des collégiens (âge

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A. Pagnier

Figure 3 Crise abdominale chez un enfant de 3,5 ans ayant un déficit en C1inh, suite à un traumatisme facial en sport, tableau pseudochirurgical subocclusif, aspect de l'intestin en « pile d'assiettes »

protéine C1 inhibiteur atteignant les normes physiologiques en pondéral et en fonctionnel dès cet âge. On conseille un deuxième contrôle à l'âge d'un an. Dans le cadre d'un angiœdème par anomalie du C1 inhibiteur avec mutation de SERPING1 sur le chromosome 11 identifiée (75 % des cas), une consultation de conseil génétique doit être proposée afin d'optimiser le dépistage familial élargi. La recherche de la mutation SERPING1 est possible dès la naissance mais pas indispensable au diagnostic, l'intérêt du diagnostic anténatal est discutable [14]. Chez les enfants en bas âge, le dépistage avant l'apparition des premiers symptômes, dans l'optique d'améliorer la reconnaissance et le traitement précoce des crises, est très souhaitable. Pour l'angiœdème à bradykinine à C1 inhibiteur normal, les critères diagnostiques chez l'enfant restent avant tout cliniques, dans l'attente d'une caractérisation biologique et/ou génotypique, en dehors des cas de mutation du facteur XII Hageman qui représentent moins de 20 % des patients.

La prise en charge spécifique des enfants chirurgicale pour un diagnostic erroné d'appendicite ou de syndrome occlusif a été rapportée chez l'enfant, ainsi que des cas d'invagination intestinale aiguë [20,21]. L'échographie, facilement accessible en pédiatrie et peu invasive, est un outil pertinent pour le diagnostic des crises d'angiœdème abdominal chez l'enfant (figure 3), avec des signes très évocateurs pouvant potentiellement redresser le diagnostic d'urgence chirurgicale [22]. Langhurst et al., en 2012, ont démontré que la précocité du traitement de la crise réduisait rapidement l'intensité de la douleur, avec à l'inverse une cotation EVA à 9/10 pendant 48 h en cas de délai thérapeutique ou d'absence de traitement spécifique [23]. Hors, beaucoup d'enfants dont le diagnostic d'angioedème a été tardif ont eu des crises abdominales, avec dans certains cas de multiples explorations invasives [17,24]. L'enjeu semble particulièrement important pour ces enfants ayant exclusivement des crises abdominales, responsables d'un absentéisme scolaire important avec, dans certains cas, un équivalent de phobie scolaire. Le retentissement sur les activités quotidiennes et, à l'âge adulte, des douleurs abdominales récurrentes inexpliquées dans l'enfance a été démontré, avec augmentation des troubles anxieux, interactions sociales altérées, consommation accrue de médicaments psychotropes [25–28]. Le délai d'administration moyen du traitement par C1 inhibiteur, par rapport au début de la symptomatologie dans les crises abdominales, est une donnée peu étudiée sur la population pédiatrique, ainsi que les modalités optimales du traitement antalgique associé.

Diagnostic biologique

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Le dosage de la protéine C1 inhibiteur et de la protéine C4, dans un laboratoire de référence, est possible dès l'âge de 3 mois, la

Elle se conçoit autour des deux problématiques différentes que sont le traitement rapide et adapté de la crise sévère, qui justifie l'identification d'un centre pédiatrique d'urgence de proximité, et la prise en charge de fond (figure 4). Idéalement, cette dernière doit être assurée par un centre de compétence disposant à la fois de ressources pédiatriques et de spécialistes de la pathologie. Conformément aux recommandations HAS (http://www.hassante.fr/portail/jcms/c_1194326/populations-specifiques), la spécificité de la coordination et de la continuité des soins en pédiatrie, ainsi que la spécificité de la recherche clinique chez l'enfant, doivent être prises en compte. Le phénotype clinique étant très variable entre les membres d'une même famille, l'éducation thérapeutique de l'entourage et de l'enfant, doit être mise en place avant l'apparition des premières manifestations pour les parents, et bien avant l'adolescence pour l'enfant s'il est resté peu ou asymptomatique. Ainsi, il n'est pas rare qu'un parent atteint, qui n'a expérimenté personnellement que des crises périphériques et laryngées, soit confronté à des crises abdominales récurrentes chez son enfant. La reconnaissance et la gestion adéquate de manifestations de la maladie, possiblement plus modérées chez l'enfant, avec identification précoce des facteurs déclenchants, permet souvent d'optimiser la prévention des crises. L'instauration de schémas de prophylaxie courte est dans ce cas idéale. Les circuits d'urgence apparaissent encore hétérogènes sur le territoire, il est donc important, dans le cadre des consultations de suivi familial, de sécuriser le parcours patient en cas de crise sévère. L'enfant doit disposer d'une carte de patient et d'un protocole de soins. L'administration des traitements injectables IV par les parents, comme pour l'hémophilie, est souvent complexe à mettre en

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L'angioedème héréditaire en pédiatrie : enjeux diagnostique et thérapeutique

Crises modérées

Crises sévères

Prophylaxie courte

Traitement de fond

Acide tranexamique (EXACYL®, SPOTOF®)

Concentrés de C1inh :

Intervenons mineures Danazol (DANATROL®) 2,5 à 10 mg /kg/j (maximum 600 mg/j), 5 j avant le geste jusqu’à 2 j après. Concentré C1 inh disponible pour le geste.

Crises fréquentes (1 ou plus /mois) ou ATCD crises sévères Acide tranexamique (EXACYL®, SPOTOF®) 20 à 40 mg/kg/j en 3 prises (maximum 3 g/j) avec évaluaon de l’efficacité, individuelle

Formes galéniques disponibles : ampoules buvables 1g/10 ml, comprimés 500 mg, ampoules injectables IV 500 mg/5 ml Posologie : 10 mg/kg/6h pendant 12 à 24 h (maximum 3 g) Le plus tôt possible dès les prodromes

BERINERT® Formes galéniques disponibles : flacons 500 UI Posologie : 15 à 30 UI/kg IVL (1500 UI audelà de 50 kg) CINRYZE® après 12 ans Formes galéniques disponibles : flacons 500 UI Posologie : 1000 UI

Intervenons à risque (face, cou, soins dentaires et intubaons) Concentré C1inh : BERINERT®15 à 30 UI/kg dans les 6 h précédant l’intervenon, avec deuxième dose disponible CINRYZE® après 12 ans 1000 UI dans les 24 h précédant l’intervenon

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Types I/II

ANGIŒD EME

e

En 2 intenon dans les formes sévères ne répondant pas à l’acide tranexamique et aux mesures prévenves, à valider en RCP Danazol (DANATROL®) 2,5 mg/kg (50 à 200 mg/maximum), dose minimale efficace à réduire si possible à 1j/2 jusqu’à 1 prise/7 j si efficace, à éviter chez la fille Adolescente pubère discuter traitement progestaf LUTERAN® ou LUTENYL® 21 j/mois Concentré de C1inh CINRYZE® après 12 ans 1000 UI tous les 3 à 4 j IVL

Si intervenon urgente BERINERT® 15 à 30 UI/kg

Angioedème à C1Inh normal Concentrés C1inh hors AMM pour types non I/II

Acide tranexamique (EXACYL®, SPOTOF®) Formes galéniques disponibles : Ampoules Buvables 1g/10 ml, comprimés 500 mg, ampoules injectables IV 500 mg/5 ml Posologie : 10 mg/kg/6h pendant 12 à 24 h (maximum 3g) Le plus tôt possible dès les prodromes

Concentrés de C1inh : BERINERT® Formes galéniques disponibles : flacons 500 UI Posologie : 15 à 30 UI/kg IVL (1500 UI audelà de 50 kg) CINRYZE® après 12 ans Formes galéniques disponibles : flacons 500 UI Posologie : 1000 UI

Intervenons mineures Acide tranexamique (EXACYL®, SPOTOF®) Posologie 20 à 40 mg /kg/j en 2 à 3 prises, 5 j avant jusque 2 j après Intervenons à risque (face, cou, soins dentaires et intubaons) Concentré C1inh : BERINERT®15 à 30 UI/kg dans les 6 h précédant l’intervenon, avec deuxième dose disponible CINRYZE® après 12 ans 1000 UI dans les 24 h précédant l’intervenon Si intervenon urgente BERINERT® 15 à 30 UI/kg

Crises fréquentes 1 ou plus /mois ou ATCD crises sévères Acide tranexamique (EXACYL®, SPOTOF®) 20 à 40 mg/kg/j en 3 prises (maximum 3 g/j) avec évaluaon de l’efficacité, individuelle En 2° intenon dans les formes sévères ne répondant pas à l’acide tranexamique et aux mesures prévenves, à valider en RCP Adolescente pubère discuter traitement progestaf LUTERAN® ou LUTENYL® 21 j/mois Concentré de C1inh CINRYZE® après 12 ans 1000 UI tous les 3 à 4 j IVL Icabant ( FIRAZYR®) seringues de 30 mg, voie sous cutanée, ulisé préférenellement chez l’adulte aeint de type III, en cours d’étude pharmacocinéque pédiatrique, son ulisaon peut être considérée dans certaines situaons chez l’adolescent et doit faire l’objet d’une concertaon avec le centre de référence ou un centre de compétence des AOH et d’une traçabilité

Figure 4 Traitement de l'angioedème bradykinique chez l'enfant

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en milieu scolaire et périscolaire, dans le but de permettre aux enfants d'envisager la scolarité, les activités sportives et les loisirs avec le maximum de sécurité. La prise en charge doit être individualisée en fonction de l'âge, de la famille, des facteurs déclenchants identifiés, du lieu de vie et de scolarité et de l'accès aux soins en cas d'urgence vitale. Une réelle démarche d'évaluation des risques a priori doit être mise en œuvre, impliquant le médecin traitant, en restant vigilant sur le dialogue avec les enseignants, infirmier(s) et médecins scolaires

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œuvre, surtout dans les crises abdominales où l'enfant est douloureux et hypovolémique, et actuellement aucun traitement injectable par voie sous cutanée n'a obtenu l'AMM. Néanmoins, quand il peut être instauré, cela peut raccourcir le délai d'administration du concentré de C1 inhibiteur [29]. Tous les acteurs impliqués dans la prise en charge de l'enfant doivent être formés à la reconnaissance du diagnostic de crise d'angiœdème et disposer d'un numéro d'appel d'urgence. Cela justifie la mise en place d'un projet d'accueil individualisé (PAI)

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A. Pagnier

pour ne pas « médicaliser » l'enfant par excès et accroître son facteur stress. Il est également impératif de traiter le plus précocement possible les crises douloureuses abdominales, notamment quand l'enfant est pris en charge dans un service d'urgence où l'attente peut être longue, avec association à un traitement antalgique, techniques de réassurance et de gestion de la douleur. Dans la mesure du possible, les crises abdominales doivent être gérées à domicile avec administration du concentré de C1 inhibiteur par des soignants libéraux formés.

Traitement de la crise Les crises sévères comportent les manifestations se situant audessus des épaules, les œdèmes des voies aériennes supérieures et les crises abdominales avec EVA supérieure à 5. Seuls les concentrés de C1 inhibiteur ont l'AMM chez l'enfant en France. Les concentrés de C1 inhibiteur dérivés du plasma sont le Berinert® (CLS Behring), seul traitement ayant l'AMM avant 12 ans, à la dose de 20 UI/kg en IVL, et Cynrize® (Viropharma) chez l'adolescent après 12 ans à la dose de 1000 UI [30–33]. Le traitement est habituellement efficace en 15 à 60 minutes, avec résolution complète des symptômes plus rapide s'il est initié précocement, et en moins de 12 h dans les œdèmes des voies aériennes supérieures [30,31]. Le profil de tolérance est excellent, notamment en termes de risque de transmission d'agents infectieux viraux, les vaccinations contre les hépatites A et B sont néanmoins recommandées. Le traitement peut être administré par une infirmière à domicile pour les crises périphériques ou abdominales, et aucun effet indésirable notoire n'est rapporté dans les séries prospectives récentes. Le conestat alfa (Ruconest®) est un analogue recombinant de l'inhibiteur de la C1 estérase humain produit à partir de lapines transgéniques. Seuls les patients ayant des résultats négatifs de détection des AC antiIgE dirigés contre des allergènes de lapin peuvent être traités, et il n'y a pas d'information publiée chez l'enfant. L'écallantide (inhibiteur kallicréine) n'est pas disponible en France, il est utilisé aux États-Unis après 16 ans, avec des études réalisées dès 9 ans [34]. Enfin, l'icatibant (Firazyr®), antagoniste des récepteurs B2 de la bradykinine, administrable par voie sous cutanée, n'a pas l'AMM chez l'enfant (étude pharmacocinétique en cours).

Prophylaxie

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On dispose encore de peu d'études pédiatriques prospectives sur les modalités optimales du traitement prophylactique chez l'enfant, et les recommandations sont issues de conférences de consensus, tenant compte des données adultes et du profil de tolérance [32]. On distingue les prophylaxies courtes intermittentes en cas de geste invasif (intervention chirurgicale, soins dentaires. . .), de période à risque (examens et rentrées scolaires, classe verte, voyages. . .), et celles au long cours pour les enfants très

symptomatiques (crises sévères et/ou fréquentes, une ou plus par mois). Il est important de ne pas omettre les moyens préventifs non médicamenteux, quand des facteurs déclenchant précis sont identifiés par l'enfant et/ou ses parents, dans son environnement familial, scolaire ou de loisirs. Une sécurisation de l'enfant et une maîtrise adéquate du circuit d'urgence avec participation à des ateliers d'éducation thérapeutique, est dans notre expérience un facteur d'amélioration du score de sévérité. Les traitements disponibles [29,30,32,35] sont :  les antifibrinolytiques (acide tranexamique), 20 à 40 mg/kg/ jour en 2 à 3 prises (maximum 3 g/j), pour tous les types d'angiœdème héréditaire de l'enfant. Ils sont contre-indiqués en cas d'antécédents de thrombose ou de facteurs de thrombophilie connus. L'efficacité de l'acide tranexamique étant inconstante, son utilisation en prophylaxie (et dans les crises périphériques modérées) doit être soigneusement évaluée pour chaque patient (intensité et fréquence des crises) ;  le danazol, uniquement dans les types I et II, à doses minimales efficaces soit 2,5 à 10 mg/kg (maximum 200 mg/j), un jour sur deux voire un jour sur trois quand cela est possible. Il est recommandé essentiellement en prophylaxie courte et dans des indications très ciblées compte tenu des risques à long terme, avec outre la surveillance biologique hépatique, rénale et du profil lipidique, une évaluation staturo-pondérale, de la maturation osseuse et du développement pubertaire par un endocrinologue pédiatre ;  les concentrés de C1 inhibiteur sont les traitements de prophylaxie pour lesquels le niveau de preuve d'efficacité est le plus important, et Cynrize® a obtenu l'AMM en prophylaxie à partir de 12 ans. Les enfants n'ayant que des crises périphériques modérées et peu fréquentes justifient d'un traitement à la demande par acide tranexamique et concentré de C1 inhibiteur, avec réévaluation régulière.

Conclusion Reconnaître un angiœdème à bradykinique chez l'enfant dans un contexte d'œdème laryngé atypique et/ou de douleurs abdominales récurrentes reste complexe. La collaboration multidisciplinaire autour de l'évaluation de critères diagnostiques pédiatriques plus pertinents, notamment dans les formes abdominales pures, pourrait permettre de raccourcir les délais diagnostiques. L'optimisation du circuit de prise en charge de cette pathologie présentant des risques vitaux en aigu, et des risques d'altération importante de la qualité de vie dans le long terme, dès l'âge pédiatrique, est également un enjeu important.

Déclaration d'intérêts : l'auteur déclare ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cet article.

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L'angioedème héréditaire en pédiatrie : enjeux diagnostique et thérapeutique

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Références

Mise au point

ANGIŒD EME

[Hereditary angioedema in childhood. Diagnosis and therapeutic challenges].

Hereditary angioedema is a rare disease. In case of laryngeal edema or chronic abdominal pains, diagnosis is difficult in childhood because numerous d...
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