Synthèse ´ Ann Biol Clin 2013 ; 71 (special 1) : 19-26

Hépatite B : intérêt clinique de la quantification de l’AgHBs Hepatitis B: clinical application of HBsAg quantification Michelle Martinot-Peignoux Patrick Marcellin Tarik Asselah Centre de recherche biomédicale Bichat-Beaujon (CRB3), Inserm U-773, Université Paris-Diderot ; Service d’hépatologie, Hôpital Beaujon, Clichy, France

Résumé. Depuis sa découverte par Blumberg en 1965, l’antigène virus de l’hépatite B (Ag HBs) est utilisé comme l’empreinte d’une infection par le virus de l’hépatite B (VHB). Ce marqueur important indique non seulement une infection active, mais permet également d’évaluer la probabilité de réponse au traitement. Le titre de l’AgHBs est le reflet de l’activité transcriptionnelle de ADNccc. Aujourd’hui les tests de quantification de l’AgHBs sont entièrement automatisés et fiables. Le titre est plus élevé chez les patients antigène HBe positif [AgHBe(+)] que chez les patients AgHBe (-). Il est corrélé négativement avec la fibrose hépatique chez les patients AgHBe (+). Chez les patients AgHBe (-), un titre AgHBs 200 000 UI/mL. Dans le cadre d’un traitement par analogues nucléos[t]iques [NA(s)] le rôle de la quantification AgHBs doit être clarifié. En pratique clinique, la quantification de l’AgHBs est un outil simple et reproductible qui peut être utilisé en association avec l’ADNVHB pour : classer les patients au cours des différentes phases de l’histoire naturelle de l’hépatite B et ainsi améliorer leurs prises en charge ; optimiser le suivi des patients pendant un traitement.

doi:10.1684/abc.2013.0898

Mots clés : médecine personnalisée, prédiction, IFN-PEG, analogues nucléos[t]iques, outils VHB, pronostic

Tirés à part : M. Martinot-Peignoux

Abstract. Since its discovery by Blumberg in 1965, hepatitis B virus antigen (HBsAg) is used as the fingerprint of hepatitis B infection. HBsAg level reflects the transcriptional activity of the cccDNA. It is an important marker that might not only indicate active hepatitis B infection, but may also predict clinical and treatment outcomes. Assays for HBsAg quantification are fully automated with a high output capacity. HBsAg titer is higher in HBe antigen (HBeAg) positive chronic hepatitis B than in HBeAg negative patients and is negatively correlated with liver fibrosis in HBeAg positive patients. In HBeAg negative chronic hepatitis B, an HBsAg level < 1 000 IU/mL and an HBV DNA titer < 2 000 IU/mL allow the accurate identification of inactive carriers. On pegylated-interferon (PEG-IFN) treatment, HBsAg quantification allows identifying, as early as week 12 PEG-IFN therapy, patients that will not benefit from therapy and thus stop or switch treatment “week 12 stopping rule”. Genotype A and D: stop at week 12 if no HBsAg decrease; Genotype B and C: stop at week 12 if titer > 20 000 UI/mL. With regards to nucleos[t]ides analogues therapy the role of HBsAg quantification remains to be clarified. Several studies indicate that baseline and on-treatment HBsAg levels might allow identifying patients

Pour citer cet article : Martinot-Peignoux M, Marcellin P, Asselah T. Hépatite B : intérêt clinique de la quantification de l’AgHBs. Ann Biol Clin 2013 ; 71(sp´ecial 1) : 19-26 doi:10.1684/abc.2013.0898

19

Synthèse that can end up with treatment with no subsequent risk of reactivation. In clinical practice, HBsAg quantification is a simple and reproducible worthwhile tool that can be used in association with HBV DNA to classify patients during HBV infection and to monitor therapy. Key words: personalized medicine, prediction, PEG-IFN, analogues, HBV tools, prognosis

Le virus de l’hépatite B (VHB) est un petit virus à ADN. Dès son entrée dans la cellule, après s’être libéré de son enveloppe et son manteau de chlatrine, son génome partiellement double brin est transporté dans le noyau de l’hépatocyte où il est transformé en un double brin d’ADN circulaire fermé de manière covalente (ADNccc). L’ADNccc réside dans le noyau des hépatocytes infectés où il agit comme une matrice pour la transcription du gène viral (mini chromosome), il y est recyclé afin de renouveler le réservoir nécessaire pour maintenir la chronicité [1, 2]. L’ADNccc est le reflet le plus exact du nombre d’hépatocytes infectés. La quantification de l’ADNccc nécessite une biopsie hépatique. Les protéines virales d’importance clinique comprennent la protéine d’enveloppe « AgHBs » dont la synthèse au cours du cycle de vie du VHB est complexe. Sa production est supérieure à la quantité nécessaire pour l’assemblage du virion, l’excès est lié de manière covalente pour être sécrété sous forme de particules vides, non-infectieuses, filamenteuses ou sphériques [3]. Le titre d’AgHBs sérique mesure la combinaison de ces protéines (particules complètes, filamenteuses et sphériques), Le titre de l’AgHBs sérique semble corrélé à l’activité transcriptionelle de l’ADNccc, il est considéré comme un marqueur substitutif de l’ADNccc. Il a été montré que son titre varie de fac¸on important au cours de l’évolution de l’hépatite chronique B, qu’il est inversement corrélé au contrôle immunitaire, indiquant que le titre de l’AgHBs reflète l’interaction complexe entre virus et système immunitaire fournissant ainsi des informations complémentaires à la charge virale VHB [3-7].

vement sanguin. Des tests quantitatifs automatisés, fiables, spécifiques et sensibles (0,05 à 0,1 UI/mL) ont été développés. Ce marqueur est robuste, mesuré de fac¸on équivalente avec les différents tests disponibles [9]. Les tests plus fréquemment utilisés en Europe sont, HBsAg II quant Cobas (Roche Diagnostics GmbH Mannheim, Allemagne), Architecte HBsAg QT assay (Abbott, Chicago, IL États-Unis), ETI-MAK-1 assay (Diasorin, Turin, Italie) et Monolisa HBs Ag ULTRA assay (Bio-Rad Laboratories Redmond, WA, USA).

Applications cliniques Une séroconversion HBs (perte de l’AgHBs et de développement des anticorps anti-HBs) est associée à un pronostic favorable ; celle-ci est rarement observée au cours de l’évolution naturelle de l’infection chronique à VHB. C’est le but ultime de la thérapie. L’intérêt pour la quantification de l’AgHBs a été illustré par l’étude de Werlé-Lapostole et al. [3], montrant une forte association entre la décroissance de l’ADNccc et le titre de l’AgHBs sérique, chez des patients recevant un traitement par adéfovir (ADV). Cette étude rapporte que l’AgHBs sérique pourrait être un marqueur suppléant de l’ADNccc en permettant d‘évaluer de fac¸on indirecte le nombre d’hépatocytes infectés. La quantification de l’AgHBs est aujourd’hui reconnue comme étant un support important pour le suivi des patients au cours de l’histoire naturelle de l’hépatite chronique et pour prédire la réponse au traitement [10-12]. Intérêt de la quantification de l’AgHBs au cours de l’histoire naturelle

Techniques de quantification de l’AgHBs Depuis sa découverte en 1967 par Blumberg [8], la détection qualitative de l’AgHBs a été largement utilisée à des fins diagnostiques. L’intérêt pour la quantification de l’AgHBs repose sur l’étude princeps [3] montrant une association positive avec le ADNccc. La mesure de l’ADNccc est une technique invasive nécessitant une biopsie hépatique. À l’inverse la quantification de l’AgHBs se fait sur un prélè20

Deux études, l’une européenne et l’autre asiatique, ont rapporté que le titre de l’AgHBs variait au cours de l’histoire naturelle [6, 7] (figure 1). Elles montrent que le titre de l’AgHBs est plus élevé durant la phase d’immuno-tolérance que pendant la phase d’immuno-clairance, et que le titre est plus élevé chez les patients AgHbe (+) que chez les patients AgHBe (-). L’étude européenne [7] rapporte un titre de 4,96 vs 4,37 log UI/mL chez les sujets durant la phase d’immuno-tolérance vs la phase de clairance immunitaire, respectivement, alors que l’étude asiatique [6] rapporte un ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

Quantification de l’AgHBs

AgHBE positif

AgHBE négatif

p = 0.007

p = 0.003

HBsAg log10 U/mL

6 5 4 3 2 1 0 Immuno-tolérance

Immuno-clairance

Porteurs inactifs

Hépatite chronique AgHBe négatif

Figure 1. Titre de l’AgHBs au cours de l’histoire naturelle de l’hépatite chronique B. Le titre est plus élevé chez les patients AgHBe positif que chez les patients AgHBe négatif. Chez les patients AgHBe positif le titre est plus élevé durant la phase d’immunocompétence que durant la phase d’immuno-clairance. Chez les patients AgHBe négatif le titre est plus élevé chez les patients avec une hépatite chronique avec activité fluctuante que chez les porteurs inactifs.

titre de 4,53 vs 4,03 log UI/mL chez les sujets durant la phase d’immuno-tolérance vs la phase de clairance immunitaire, respectivement (figure 1). L’observation d’un titre plus bas chez les patients asiatiques est peut-être liée à une différente expression de l’AgHBs en fonction du génotype. En effet, chez les patients européens les génotypes A et D sont les plus fréquemment rencontrés, alors que les génotypes B et C sont prévalents en Asie. Prédiction de la séroconversion HBs La perte de l’AgHBs est l’indicateur le plus fiable pour mesurer la guérison d’une hépatite B. Chez les patients AgHbe (+), il a été rapporté qu’après séroconversion HBe la décroissance de l’ADN VHB était prédictive de la perte de l’AgHBs [13]. Plus récemment, la même équipe a montré que la valeur prédictive, pour la perte de l’AgHBs à 5 et 10 ans, était plus exacte avec la combinaison du titre de l’AgHBs et de la charge virale VHB [14]. Enfin, un seuil de décroissance annuelle de l’AgHBs de 0,3 log UI/mL permettrait d’identifier les patients avec forte probabilité de perte de l’AgHBs avec une valeur prédictive négative (VPN) 95 % et une valeur prédictive positive (VPP) 85 % [15]. Identification des porteurs inactifs Chez les patients AgHBe (-) deux profils sont rencontrés : patient avec une hépatite chronique avec activité fluctuante (phases de rémission avec ALT normales et charge virale VHB < 20 000 UI/mL) (figure 2) et le porteur inactif de l’AgHBs défini par : présence de AgHBs, absence AgHBe/présence anti-HBe, ALT normal de fac¸on persis´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

tante (> 1 an) et ADN VHB < 2 000 UI/mL [15]. Il est important de différencier le vrai porteur inactif d’un patient en phase de rémission, car ce dernier a un risque d’évolution vers la cirrhose, et est donc candidat au traitement. La combinaison d’une seule mesure de l’AgHBs et de l’ADN VHB permettrait de différencier le vrai porteur inactif d’un patient en phase de rémission. Un titre d’AgHBs < 3 162 UI/mL et d’ADN VHB < 6 130 UI/mL permettrait l’identification des porteurs inactifs avec 86 % de VPP et 96 % de spécificité. Plus important, un titre d’AgHBs > 1 000 UI/mL et d’ADN VHB > 200 UI/mL permettrait l’identification des patients avec fort risque de réactivation avec 96 % de VPN et 92 % de sensibilité [15-17]. HBsAg et histologie du foie Deux études rapportent une corrélation négative entre le stade de fibrose et le titre de l’AgHBs chez les patients avec une hépatite chronique AgHBe (+) (figure 3A) [18, 19]. Cette corrélation n’est pas observée chez les patients avec une hépatite chronique AgHBe (-) (figure 3B). Chez les patients, de génotypes B ou C (très fréquemment rencontrés en Asie) un seuil d’AgHBs de 3,85 log UI/mL pourrait permettre d’identifier les patients avec fibrose minime (≤ F1) de ceux avec fibrose modérée ou sévère (≥ F2), avec une VPN de 91 % [19]. Le titre de l’AgHBs en combinaison avec la charge virale VHB serait fortement prédictif du risque de développement d’un carcinome hépatocellulaire (CHC). Une récente étude asiatique rapporte que chez les patients AgHBe (-), avec un ADN VHB < 2 000 UI/mL, l’incidence du CHC à 20 ans est de 2 % si le titre de l’AgHBs est < 1 000 UI/mL ; ce 21

Synthèse

A

B 6

6 5

5

4

4

10

10

9

9

8

8

7

7

6

6

5

5

4

4

3

3

2

2

1

1

3

3

2

2

1

1 0

0 10 ans

0

11

11

0

Porteur Inactif

0 10 ans

0

Hépatite chronique B AgHBe négatif

AgHBs log UI/mL

ADN VHB log UI/mL

ALT (xN)

Figure 2. Cinétique de l’AgHBs, ADN VHB et ALT (A) patient, naïf AgHBe négatif ALT normales de fac¸on persistante, (B) patient avec un profil de porteur inactif (ALT normales, ADN VHB < 2 000 UI/mL), présentant plusieurs épisodes de réactivation sévère (ALT > 2 x normales et ADN HVB > 20 000 UI/mL), au cours de suivi, alors que le titre de l’AgHBs reste stable durant toute cette période.

AgHBs log UI/mL

A

B

AgHBe positif 6

6

5

5

4 3

AgHBe négatif

4 4.95 ± 0.7

3 4.60 ± 0.56

2

2 4.19 ± 0.91

1

3.71 ± 0.48

3.51 ± 1.08

1

3.83 ± 0.75

p< 0.01

3.75 ± 0.92

3.34 ± 1.12

0

0

ns

3.55 ± 0.85

-1

2.96 ± 135

-1 F0

F1

F2

F3

F4

F0

F1

F2

F3

F4

Figure 3. Titre de l’AgHBs en fonction de stade de fibrose. (A) Il existe une forte corrélation inverse entre le stade de fibrose et le titre de l’AgHBs chez les patients AgHBe postif. (B) Cette corrélation n’est pas retrouvée chez les patients AgHBe négatif.

risque est de 8 % si le titre de l’AgHBs est > 1 000 UI/mL. Cette association titre AgHBs et CHC n’est pas observée si l’ADN HVB > 2 000 UI/mL [20]. Intérêt de la quantification de l’AgHBs et traitement Schématiquement, on peut distinguer deux stratégies : l’interféron ou un analogue. Les avantages de l’interféron sont : une durée de traitement limitée (48 semaines de traitement), la possibilité d’une 22

réponse prolongée après arrêt du traitement, un taux relativement élevé de séroconversion HBe à court terme et de séroconversion HBs à long terme, l’absence de résistance. Les inconvénients de l’interféron sont l’administration sous-cutanée et la fréquence des effets secondaires. Toutefois, on observe une meilleure tolérance chez les malades traités par l’interféron pégylé pour hépatite B que chez les malades traités pour hépatite C. Les avantages des analogues sont la rapidité et la puissance de l’effet antiviral après un an de traitement, une charge virale indétectable chez 70 % et 90 % des malades ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

Quantification de l’AgHBs

respectivement AgHBe (+) et AgHBe (-), la prise orale et l’excellente tolérance. Les inconvénients sont la nécessité d’une durée indéfinie du traitement chez la plupart des patients et le risque de résistance à long terme. En outre, la tolérance à très long terme n’est pas connue. Une régression de la fibrose a été observée à long terme [21, 22]. AgHBs et traitement par interféron pégylé Un traitement par interféron pégylé est de durée limitée à 48 semaines. C’est le seul traitement qui permet d’obtenir une séroconversion de l’AgHBs, chez 10 % des patients ayant une charge virale négative, dans les 3 années après l’arrêt du traitement. Patients AgHBe positif Les données actuelles indiquent que la quantification AgHBs pourrait aider à identifier les patients, soit avec une forte probabilité de réponse virologique soutenue (RVS) soit non-répondeurs [23-29]. Il a été rapporté que le titre de l’AgHBs avant l’initiation d’un traitement était prédictif d’une séroconversion HBe [objectif du traitement des patients HBe (+)]. Cependant la majorité des études montrent que la décroissance de l’AgHBs au cours du traitement est le meilleur indicateur de réponse. À la 24e semaine de traitement, un titre d’AgHBs ≤ 300 UI/mL ou > 300 UI/mL est associé à une RVS chez 62 % ou 11 % des patients, respectivement [24]. Selon d’autres auteurs, à 12 ou 24 semaines de traitement un titre d’AgHBs < 1 500 UI/mL est associé à une forte probabilité de séroconver-

Patients AgHBe négatif Une réponse virologique soutenue est plus rarement observée chez les patients AgHBe (-) [29-33]. Le suivi de ces patients est difficile, la plupart d’entre eux sont répondeurs (ADN-VHB non-détectable) à la fin du traitement, mais rechutent après l’arrêt du traitement [31-33]. La quantification de l’AgHBs est le seul marqueur qui permet au cours d’un traitement d’en prédire son issue. En effet comme illustré sur la figure 4, au cours du traitement l’ADN VHB décroît de fac¸on équivalente chez les patients qui rechutent à l’arrêt du traitement et chez les patients avec RVS (figure 4A), alors qu’une décroissance de l’AgHBs est observée uniquement chez les patients avec RVS (figure 4B) [34]. Une étude montre que la prédiction de la réponse peut être optimisée par la combinaison d’une décroissance de l’AgHBs et de l’ADN VHB à la 12e semaine de traitement.

B 8

4

7

3,5

Serum HBsAg (Log IU/mL)

Serum HBV DNA (Log copies/mL)

A

sion HBe (45 %), alors qu’une séroconversion HBe est rarement observée (6 %) chez les patients avec un titre > 20 000 UI/mL [26, 27]. Tous ces auteurs proposent un arrêt du traitement à 12 semaines chez les patients avec un titre d’AgHBs supérieur à 20 000 UI/mL. Plus récemment, des auteurs ont rapporté que la « règle d’arrêt » devrait être génotypes spécifiques à la semaine 12, génotypes A et D : arrêt si absence de décroissance, génotypes B et C : arrêt si titre d’AgHBs > 200 000 UI/mL. Le traitement devrait être arrêté chez tous les patients avec un titre d’AgHBs > 20 000 UI/mL à la semaine 24 quel que soit le génotype [30].

6 5 4 3 2 1

3 2,5 2 1,5 1 0,5

0

0 BL

W12

W24

Treatment

W48

W72

W96

Follow-up

Relapsers

BL

W12

W24

Treatment

W48

W72

W96

Follow-up

Sustained responders

Figure 4. Cinétique de l’AgHBs et ADN VHB chez un patient AgHBe négatif ayant rec¸u 48 semaines d’un traitement par IFN PEG. (A) Pendant le traitement la décroissance de l’ADN VHB est équivalente chez les patients rechuteurs et les patients avec une réponse virologique soutenue. (B) Une décroissance de l’AgHBs est observée uniquement chez les patients avec réponse virologique soutenue. ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

23

Synthèse Tableau 1. Règle d’arrêt à 12 semaines. Semaine 12 versus initiation du traitement Décroissance AgHBs Décroissance ADN ≥ 2 log Non Non Non Oui Oui Non Oui Oui

Règle d’arrêt Semaine 12 La majorité des études ont rapporté qu’à 12 semaines de traitement la combinaison d’une absence de décroissance de l’AgHBs et d’une diminution de l’ADN VHB < 2 log UI/mL était associée à une VPN de 84 % -100 % pour la RVS. Des auteurs ont proposé un algorithme basé sur la combinaison de ces 2 marqueurs à la 12e semaine de traitement avec IFN-PEG [32] (tableau 1). AgHBs et traitement par nucléos(t)ides analogues En cas de traitement à long terme avec les nucléotis(t)ides analogues [NA(s)], l’objectif est une suppression virale. Les NA (s) inhibent la réplication virale en perturbant la synthèse de l’ADN viral. Les analogues de deuxième génération, l’entécavir (ETV) et le ténofovir (TDF), sont de puissants inhibiteurs du VHB et ils ont une haute barrière génétique de résistance. Les avantages du traitement sont la rapidité et la puissance de l’effet antiviral avec, après un an de traitement, une charge virale indétectable chez 70 % et 90 % des patients AgHBe (+) et AgHB(e-) respectivement. L’administration est orale, quotidienne, avec une excellente tolérance. Les inconvénients sont la nécessité d’une durée indéfinie du traitement chez la plupart des patients, leur arrêt étant généralement associé à une réactivation virale. Une séroconversion HBs est rarement observée. Les études montrent que la décroissance de l’AgHBs, avec un traitement par NA (s) est très lente comparativement à un 24

Recommandation Arrêt +++ Continuer + Continuer + Continuer +++

traitement par IFN-PEG, bien que la diminution de la charge virale VHB soit plus prononcée. Plusieurs études ont rapporté que le titre de l’AgHBs à l’initiation du traitement et/ou une décroissance pendant le traitement sont prédictifs d’une RVS [36-39]. Deux études pivots du TDF montrent, chez des patients recevant 3 ans de TDF, que la décroissance de l’AgHBs est plus marquée chez les patients AgHBe (+) que chez les patients AgHBe (-), et qu’une décroissance de l’AgHBs ≥ 2 log UI/mL à 24 semaines de traitement était associée à une perte de l’AgHBs uniquement chez les patients AgHBe (+) [40, 41]. Une étude, incluant des patients HBe (+) ou HBe (-), recevant 48 semaines de IFN-PEG ou ETV, montre que dans le groupe ETV, une décroissance de l’AgHBs est observée uniquement chez les patients HBe (+) et que cette décroissance est plus importante chez les patients recevant de l’IFN-PEG que chez les patients recevant un traitement par NA (s) (figure 5) [37]. Les recommandations de la Société d’hépatologie Asie Pacifique (APASL) (2012) suggèrent qu’un traitement par NA (s) puisse être interrompu chez les patients HBe (+) après séroconversion HBe et avec un ADN-VHB nondétectable pendant 12 mois [42]. Chez les patients HBe (-) celui-ci peut être interrompu si la durée est supérieure à 2 ans avec un ADN VHB non-détectable à 2 reprises sur une période de 6 mois [40]. En appliquant ces recommandations, des auteurs ont montré que le titre de l’AgHBs à l’arrêt

0

AgHBs Log UI/mL

Une absence de décroissance de l’AgHBs et une baisse d’ADN VHB < 2 log UI/mL ont une VPN de 100 % pour le RVS [32]. Une autre étude rapporte qu’une diminution de l’AgHBs ≥ 0.5 log UI/mL à la semaine 12 et l’absence de diminution ≥ 1 log IU/mL à la semaine 24 ont une VPP de 89 % et VPN de 92 %, respectivement [34]. Le titre de l’AgHBs en fin de traitement serait prédictif de la RVS et de la perte de AgHBs dans les 3 ans après l’arrêt de celui-ci. Une étude rapporte qu’un titre d’AgHBs ≤ 10 UI/mL à la fin d’un traitement est associé à 80 % de RVS et 52 % de perte de l’AgHBs pendant les 3 ans de suivi posttraitement. Si le titre d’AgHBs est > 10 UI/mL, une RVS n’est observée que chez 32 % des patients et une perte de l’AgHBs au cours du suivi chez seulement 2 % des patients [35].

Probabilité RVS Aucune Faible Faible Forte

1

2 0

12

24

48

IFN-PEG HBe+

Entécavir HBe+

IFN-PEG HBe-

Entécavir HBe-

Semaines

Figure 5. Cinétique de l’AgHBs chez des patients AgHBe (+) ou AgHBe (-) traités 48 semaines par IFN PEG ou ETV. La décroissance de l’AgHBs est toujours plus marquée chez les patients ayant rec¸u un traitement par IFN PEG que chez les patients ayant rec¸u un traitement par ETV, cela quel que soit leur statut AgHBe. ´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

Quantification de l’AgHBs

du traitement était très fortement prédictif de la rechute. Ils rapportent une rechute chez 9 %, 40 % et 73 % chez les patients avec un titre AgHBs en fin de traitement < 2 log UI/mL, 2-3 log UI/mL et > 3 log UI/mL, respectivement [43].

Conclusion De nombreuses études confirment l’importance clinique de la quantification de l’AgHBs, pour suivre, d’une part, l’histoire naturelle de l’hépatite B chronique et, d’autre part, pour permettre un meilleur suivi des patients pendant un traitement. En effet, le titre est plus élevé chez les patients antigène HBe positif [AgHBe (+)] que chez les patients AgHBe (-). Il est corrélé négativement avec la fibrose hépatique chez les patients AgHBe (+). Chez les patients AgHBe (-), un titre AgHBs < 1 000 UI/mL et un ADN-VHB < 2 000 UI/mL identifient avec précision les porteurs inactifs. La mesure du titre d’AgHBs au cours d’un traitement par interféronpégylé permet d’identifier, dès la semaine 12, les patients qui ne bénéficieront pas du traitement, et de l’arrêter pour ce sous-groupe de patients. Génotypes A et D : arrêt si absence de décroissance, génotypes B et C : arrêt si titre d’AgHBs > 200 000 UI/mL. Dans le cadre d’un traitement par analogues nucléos[t]iques le rôle de la quantification AgHBs doit être clarifié. Plusieurs études montrent que le titre de l’AgHBs permettrait d’identifier les patients pouvant arrêter le traitement sans risque ultérieur de réactivation. Ces observations devraient permettre le développement de nouvelles stratégies de suivi des patients et d’algorithme de réponse guidée. Liens d’intérêts :

aucun.

Références 1. Ganem D, Prince AM. Hepatitis B virus infection-natural history and clinical consequences. N Engl J Med 2004 ; 350 : 118-29. 2. McMahon BJ. The natural history of chronic hepatitis B virus infection. Hepatology 2009 ; 49 : S45-55. 3. Werle-Lapostolle B, Bowden S, Locarnini S, Wursthorn K, Petersen J, Lau G, et al. Persistence of cccDNA during the natural history of chronic hepatitis B and decline during adefovir dipivoxil therapy. Gastroenterology 2004 ; 126 : 1750-8.

6. Nguyen T, Thompson AJ, Bowden S, Croagh C, Bel S, Desmond PV, et al. Hepatitis B surface antigen levels during the natural history of chronic hepatitis B : a perspective on Asia. J Hepatol 2010 ; 52 : 508-13. 7. Jaroszewicz J, Calle Serrano B, Wursthorn K, Deterding K, Schlue S, Raupach R, et al. Hepatitis B surface antigen [HBsAg] levels in the natural history of hepatitis B virus [HBV]-infection : a European perspective. J Hepatol 2010 ; 52 : 514-22. 8. Blumberg BS, Gerstley BJ, Hungerford DA, London WT, Sutnick AI. A serum antigen [Australia antigen] in Down’s symdrome, leukemia, and hepatitis. Ann Intern Med 1967 ; 66 : 924-31. 9. Jia JD, Hong M, Wei L, Zhang XX, Mao YL, Wang LL, et al. Multicentre evaluation of Elecsys hepatitis B surface antigen II assay for detection of HBsAg in comparison with other commercially available assyas. Med Microbiol Immunol 2009 ; 198 : 263-9. 10. Liaw YF. Clinical utility of hepatitis B surface antigen quantification in patients with chronic hepatitis B : a review. Hepatology 2011 ; 53 : 21219. 11. Chan HL, Wong GL, Wong VW. A review of the natural history of chronic hepatitis B in the era of transient elastography. Antivir Ther 2009 ; 14 : 489-99. 12. Martinot-Peignoux M, Lapalus M, Asselah T, Marcellin P. The roleof HBsAg quantification for monitoring natural histoty and treatment outcome. Liver International 2013 ; 33 : 125-32. 13. Lui J, Yang HI, Lee MH, Lu Sh MH, Jen CL, Wang Ly CL, et al. Incidence and determinants of spontaneous hepatitis B surface antigen seroclearance : a community-based follow-up study. Gastroenterology 2012 ; 139 : 474-82. 14. Lui J, Lee MH, Batrla-Utermann R, Jen CL, Iloeje UH, Lu SN, et al. A predictive scoring system for the seroclearance of HBsAg in HBeAgseronegative chronic hepatitis B patients with genotype B or C infection. J Hepatol 2013 ; 58 : 845-60. 15. Martinot-Peignoux M, Lapalus M, Laouénan C, Lada O, Ana Carolina Ferreira Netto-Cardoso O, et al. Prediction of disease reactivation in asymptomatic hepatitis B e antigen-negative chronic hepatitis B patients using baseline serum measurements of HBsAg and HBV-DNA. J Clin Virol 2013 ; 58 : 401-7. 16. EASL clinical practice guidelines : management of chronic hepatitis B. European Association for the study of the liver. J Hepatol 2012 ; 50 : 227-42. 17. Brunetto MR, Oliveri F, Colombatto P, Moriconi F, Ciccorossi P, Coco B, et al. Hepatitis B surface antigen serum levels help to distinguish active from inactive hepatitis B virus genotype D carriers. Gastroenterology 2010 ; 139 : 483-90. 18. Seto WK, Wnog DKH, Fung J, Ip PPC, Yuen JCH, Hing IFN, et al. High hepatitis B surface antigen levels predict insignificant fibrosis in hepatitis B e antigen positive chronic hepatitis B. PLOS one 2012 ; 7 : e43087.

4. Madalinski K, Burczynska B, Heermann KH. Analysis of viral proteins in circulating immune complexes from chronic carriers of hepatitis B virus. Clin Exp Immunol 1991 ; 84 : 493-500.

19. Martinot-Peignoux M, Carvalho RJ, Lapalus M, Cardoso AC, Lada O, Bartla R, et al. Hepatitis B surface antigen serum level is associated with fibrosis severity in treatment-naive, e-antigen-positive patients. J Hepatol 2013 ; 58 : 1089-95.

5. Chan HL, Wong VW, Tse AM, Tse CH, Chim AHL, Chan HL, et al. Serum hepatitis B surface antigen quantitation can reflect hepatitis B virus in the liver and predict treatment response. Clin Gastroenterol Hepatol 2007 ; 5 : 1462-8.

20. Tseng TC, Liu CJ, Yang HC, SU TH, Wang CC, Chen Cl, et al. High levels of hepatitis B surface antigen increase risk of hepatocellular carcinoma in patients with low HCV load. Gastroenterology 2012 ; 142 : 1140-9.

´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

25

Synthèse 21. Chang TT, Liaw YF, Wu SS, Schiff E, Han KH, Lai CL, et al. Long term entecavir therapy results in the reversal of fibrosis/cirhosis and continued histological improvementin patients with chronic hepatitis B. Hepatology 2010 ; 52 : 886-93.

32. Rijckborst V, Hansen BE, Cakaloglu Y, Ferenci P, Tabak F, Akdogan M, et al. Early on-treatment prediction of response to peginterferon alfa2a for HBeAg-negative chronic hepatitis B using HBsAg and HBV DNA levels. Hepatology 2010 ; 52 : 454-61.

22. Marcellin P, Gane E, Buti M, Afdal N, Sievert W, Jacobson IM, et al. Regression of fibrosis during treatment with tenefovir disoproxil fumarate for chronic hepatitis B : a five years open label follow-up study. The Lancet 2013 ; 381 : 9-15.

33. Marcellin P, Bonino F, Lau GK, Farci P, Yurdayin C, Piratvisuth T, et al. Sustained response of hepatitis B e antigen-negative patients 3 years after treatment with peginterferon alpha-2a. Gastroenterology 2009 ; 136 : 2169-79.

23. Chan HL, Thompson A, Martinot-Peignoux Piratvisuth T, Cornberg M, Brunetto M, et al. Hepatitis B surface antigen quantification : why and how to use it in 2011-A core group report. J Hepatol 2011 ; 55 : 1121-31.

34. Moucari R, Mackiewicz V, Lada O, Ripault MP, Castelnau C, Martinot-Peignoux M, et al. Early serum HBsAg drop : a strong predictor of sustained virological response to pegylated interferon alfa-2a in HBeAg-negative patients. Hepatology 2009 ; 49 : 1151-7.

24. Chan HL, Wong VW, Chim AM, Chan GLH, Wong J, Sang JY. Serum HBsAg quantification to predict response to peginterferon therapy of e antigen positive chronic hepatitis B. Aliment Pharmacol Ther 2010 ; 32 : 1323-31.

35. Brunetto MR, Moriconi F, Bononi F, Lau GKK, Farci P, Yurdayin C, et al. Hepatitis B virus surface antigen levels : a guide to sutained response to peginterferon alfa-2a in HBeAg-negative chronic hepatitis B. Hepatology 2009 ; 49 : 1141-50.

25. Tangkijvanich P, Komolmit P, Mahachai V, Sa-nguanmoo P, Theamboonler A, Poovorawany Y, et al. Low pretreatment serum HBsAg level and viral mutations as predictors of response to peginterferon alfa-2b therapy in chronic hepatitis B. J Clin Virol 2009 ; 46 : 117-23.

36. Reijnders JG, Rijckborst V, Sonneveld MJ, Scherbeijn SMJ, boucher SMJ, Hansen B, et al. Kinetics of hepatits B surface antigen differ between treatment with peginterferon and entecavir. J Hepatol 2011 ; 54 : 449-54.

26. Lau G, Marcellin P, Brunetto M. On treatment monitoring of HBsAg levels to predict response to peginterferon alfa-2a in patients with HBeAgpositive chronic hepatitis B. J Hepatol 2009 ; 50 : S333. 27. Gane E, Jia J, Han K, Tanwandee T, Chuang WL, Marcellin P, et al. NEPTUNE study ; on treatment HBs Ag level analysis confirms prediction of response observed in phase 3 study of peginterferon alfa-2a in HBeAg positive patients. J Hepatol 2011 ; 54 : abst 69. 28. Sonneveld MJ, Rijckborst V, Boucher CA, Hansen BE, Janssen HLA. Prediction of sustained response to peginterferon alfa-2b for hepatitis B e antigen-positive chronic hepatitis B using on-treatment hepatitis B surface antigen decline. Hepatology 2010 ; 52 : 1251-7. 29. Piratvisuth T, Marcellin P. Further analysis is required to identify an early stopping rule for peginterferon therapy that is valid for all HBeAgpositive patients. Hepatology 2011 ; 53 : 1054-5. 30. Sonneveld MJ, Hansen BE, Piratvisuth T, jia JD, Zeuzem S, Gane E, et al. Response guide peginterferon therapy in HBeAg-postive chronic hepatitis B using hepatitis B surface antigen levels. Hepatology 2013 ; 58 : 872-80. 31. Marcellin P, Lau GKK, Bonino F, Farci P, Hadzianinis S, Jin R, et al. Peginterferon alfa-2a, lamuvidine, and the two in combination for HBeAg-negative chronic hepatitis B. N Engl J Med 2004 ; 351 : 1206-17.

26

37. Lee MH, Lee DM, Kim SS, Cheong JY, Cho SW. Correlation of serum hepatitis B srface antigen level with response to entecavir in naive patients with chronic hepatitis B. J Med Virol 2011 ; 83 : 1178-86. 38. Lee JM, Ahn SH, Kim HS, Park H, Chang HY, Kim DY, et al. Quantitative hepatitis B surface antigen and hepatitis B e atigen titers in prediction of treatment response to entecavir. Hepatology 2010 ; 53 : 1486-93. 39. Zoulim F, Carosi G, Greenbloom S, Marzur W, Nguyen T, Jeffers L, et al. Quantification of HBsAg in nucleos[t]ides-naive patients treated for chronic hepatitis B with entecavir or entecavir plus tenofovir in the BE-LOW study. J Viral hepatitis 2012 ; 19 : O224. 40. Marcellin M, Heathcote EJ, Buti M, Gane E, de Man RA, Krastev Z, et al. Tenofovir disiproxil fumarate versus adefovir dipivoxil for chronic hepatitis B. N Engl J Med 2008 ; 359 : 2442-55. 41. Heathcote EJ, Marcellin M, Buti M, Gane E, de Man RA, Krastev Z, et al. Three years efficacy and safety of tenofovir disiproxil fumarate treatment for chronic hepatitis B. Gastroenterrology 2011 ; 140 : 132-43. 42. Liaw YF, Kao JH, Piratvisuth T, Chan HLY, Chen RN, Liu CJ, et al. Asian-Pacific consensus statement on the management of chronic hepatitis B : a 2012 update. Hepatol Int 2012 ; 6 : 561-92. 43. Liang Y, Jiang J, Su M, Liu Z, Guo W, Huang X, et al. Predictors of relapse in chronic hepatitis B after discontinuation of antiviral therapy. Aliment Pharmacol Ther 2011 ; 34 : 344-52.

´ Ann Biol Clin, vol. 71, special 1, novembre 2013

[Hepatitis B: clinical application of HBsAg quantification].

Since its discovery by Blumberg in 1965, hepatitis B virus antigen (HBsAg) is used as the fingerprint of hepatitis B infection. HBsAg level reflects t...
522KB Sizes 0 Downloads 0 Views