Presse Med. 2015; 44: e92–e99

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Représentations et ressentis des médecins généralistes sur les normes de pratiques médicales auxquelles ils sont confrontés Alain Jami 1, Samir Saidj 1, Irène François-Purssell 2, Olivier Saint-Lary 1

Reçu le 23 janvier 2014 Accepté le 22 septembre 2014 Disponible sur internet le : 7 février 2015

1. Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, UFR des sciences de la santé Simone-Veil, département de médecine générale, 78180 Montigny-LeBretonneux, France 2. Université Paris Descartes, département de médecine légale, 75006 Paris, France

Correspondance : Olivier Saint-Lary, Université Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, UFR des sciences de la santé Simone-Veil, département de médecine générale, 2, avenue de la Source de la Bièvre, 78180 Montigny-Le-Bretonneux, France. [email protected]

Résumé

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Contexte > Depuis le début des années 1990, les institutions sanitaires, dont l'Assurance maladie, incitent les médecins à se conformer à des référentiels de bonne pratique consacrant ces derniers en normes de pratiques médicales. L'objectif de ce travail était d'explorer les représentations et ressentis des médecins généralistes sur les normes de pratiques médicales dans un contexte général de normalisation. Méthodes > Entretiens qualitatifs individuels semi-dirigés auprès de 16 médecins généralistes d'Île-de-France. Résultats > L'analyse thématique de 16 entretiens a mis en évidence que les médecins avaient l'impression d'être confrontés à de multiples normes de pratiques médicales provenant de diverses sources. Ils ont dit considérer ces normes comme des repères indicatifs et non comme des impératifs auxquels ils devaient se conformer. Une normalisation stricte des pratiques ne leur semblait pas compatible avec leur profession étant donné le caractère singulier et complexe de chaque situation et de la nécessaire prise en charge globale de leurs patients. Ils ont opposé des arguments éthiques à toute normalisation insistante. Des normes obligatoires leur ont semblé néfastes pour la qualité des soins. Les médecins ont dit mieux accepter les normes scientifiques que les normes de l'Assurance maladie qui leur ont semblé orientées par des considérations économiques. Ils ont dit également ressentir une pression normative importante provenant de l'Assurance maladie. Discussion > Les médecins généralistes avaient repéré un renforcement des normes encadrant leurs pratiques. Ils n'étaient pas opposés au fait qu'elles puissent être des repères indicatifs à condition qu'ils soient non impératifs.

tome 44 > n84 > avril 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.09.018 © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Summary General practitioners' representations and perceptions about the medical practice standards they are facing Background > Since the early 1990s, national health institutions including the national health insurance increase the incentives for physicians to comply with standards of good practice dedicating these standards in medical practices. The objective of this study was to explore GP's on standards of medical practice in a context of standardization. Method > Individual semi-structured qualitative interviews with 16 GPs in Île-de-France. Results > Thematic analysis of 16 interviews has highlighted that doctors had the impression of being confronted with multiple medical practice guidelines from various sources. They said they consider these standards as indicative benchmarks and not as imperatives to comply. Strict standardization of practices did not seem compatible with their profession given the singular and complex nature of each situation and the necessary comprehensive care to their patients. They opposed ethical arguments insistent standardization. Mandatory standards appeared detrimental to their quality of care. Doctors have said it better accept scientific guidelines than standards of health insurance that seemed directed to them by economic considerations. They said also to experience a significant normative pressure from health insurance. Discussion > GPs had spotted increasing standards governing their practices. They were not opposed to the fact that they may be indicative targets provided they are not mandatory.

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médecins des informations qui leur permettent de se situer par rapport à des données moyennes locales. Par ailleurs, sur la base de la loi de santé publique du 13 août 2004 qui avait prévu la promotion des bonnes pratiques médicales, l'Assurance maladie a mis en place des contacts directs de sensibilisation par des délégués de l'Assurance maladie auprès des professionnels libéraux [4]. Dans le même temps, au travers de la publication des recommandations de bonnes pratiques cliniques, les pouvoirs publics fournissaient à chaque médecin, un référentiel des « règles de l'art ». Cette normalisation des pratiques médicales a pu être assimilée à une volonté de contrôle socio-économique qui constituerait une menace pour l'autonomie des médecins et une perte du caractère individualisé des soins [5]. En 2009, l'Assurance maladie a institué le contrat d'amélioration des pratiques individuelles (CAPI) [6] qui a introduit une rémunération à la performance à partir d'indicateurs de qualité et d'efficience économique. Ceux-ci provenaient des recommandations émanant d'agences de santé françaises (HAS, Afssaps) et/ou internationales. La convention médicale de 2011 [7] a repris ce principe de rémunération à la performance et l'a étendu à de nouveaux indicateurs qui concernaient l'organisation et la qualité de service. Ce dispositif de rémunération à la performance consacrait les pratiques jugées de qualité en normes. Elles avaient pour caractéristique essentielle de prescrire, en référence à un jugement de valeur, ce qu'il convenait de faire. La médecine générale, caractérisée par une prise en charge globale des patients [8], pourrait sembler, a priori, peu compatible avec la notion de normes de pratiques. Il existe un écart

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L

a normalisation des soins médicaux a été initiée en France dans les années 1990 avec pour objectif d'améliorer la qualité des pratiques cliniques. Elle a été facilitée par l'émergence, à cette époque, de l'evidence-based medicine (EBM) [1]. Au début des années 1990, dans un contexte financier déficitaire, l'Assurance maladie a souhaité optimiser les pratiques médicales jugées très hétérogènes [2]. Cette variabilité était liée pour partie à l'absence de consensus spontané de ce que pourraient être les meilleures pratiques. Une politique de maîtrise médicalisée, basée sur des éléments référentiels issus des publications et travaux des agences gouvernementales et scientifiques, a été mise en place. Ces référentiels normatifs ont structurés un certain nombre de mesures visant à faire coïncider les pratiques médicales avec des « règles de l'art ». La convention médicale de 1993, avec le concept de références médicales opposables (RMO), injonctions « de ne pas faire », a introduit une première mesure normative [3]. Les RMO ont été abandonnées en 1999. Au début des années 2000, les pouvoirs publics ont mis en place les accords de bon usage des soins (AcBUS), les contrats de bonne pratique et les contrats de santé publique. En 2004, l'évaluation des pratiques professionnelles (EPP) a été rendue obligatoire. Des référentiels spécifiques ont été rédigés par l'Anaes. L'EPP partait de l'hypothèse que dès lors que les médecins étaient conscients de l'écart entre leurs pratiques réelles et la pratique attendue (en termes d'efficacité et de sécurité au regard des données de la science), celles-ci s'amélioreraient. L'Assurance maladie a mis en place une sensibilisation directe et individuelle des médecins. Le relevé individuel d'activité et de prescriptions (RIAP) trimestriel apporte aux

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important entre les pratiques réelles des médecins généralistes et celles promues et souhaitées par l'Assurance maladie et les pouvoirs publics. Avant sa mise en place, ce mode de rémunération a suscité en France des controverses. C'est en fondant sa position sur le fait que ce système de paiement entrait en conflit avec les principes de la médecine libérale que l'Ordre national des médecins [9] a manifesté son opposition à la mise en place de ce programme. Les syndicats de médecins s'inquiétaient plutôt de la non-inclusion du dispositif CAPI dans le cadre de la convention médicale nationale avant d'accepter le principe du paiement à la performance, une fois celui-ci inclus dans la convention. Un panel de 1000 médecins généralistes français avait été interrogé en 2012 pour mieux comprendre les raisons de la non-adhésion des médecins au CAPI [10]. L'absence d'information des patients concernant l'adhésion de leur médecin au P4P (Payment For Performance), la survenue potentielle de nouveaux conflits d'intérêts et la possibilité d'exclusion des patients les plus précaires étaient les principales raisons évoquées. Cependant, ce travail n'explorait pas leur ressenti vis-à-vis de la notion de la norme médicale. Une étude s'y était intéressé en 2006 [11] et posait les bases du rapport des médecins aux recommandations : les médecins avaient bien connaissance de leur existence, en revanche, ils disaient avoir des difficultés à les appliquer scrupuleusement car elles répondaient mal à leurs besoins en pratique quotidienne. Mais il ne s'agissait alors pas de repères normatifs opposables source, de surcroît, d'incitation financière. Dans ce contexte insistant de sollicitation à la pratique normalisée, à l'origine depuis peu d'une prime financière, nous avons voulu savoir quelles étaient les représentations et ressentis des médecins généralistes face aux normes de pratiques médicales auxquelles ils étaient confrontés.

Méthodes Type d'étude Enquête qualitative par entretiens individuels semi-directifs [12].

Recrutement des participants

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Le recrutement des participants était raisonné sur des critères d'âge, de genre, de lieu d'installation et de conventionnement (secteur I et II). Il s'est effectué sur l'ensemble de l'Île-de-France à partir de l'annuaire en ligne « Portail-Médical.com ». Un logiciel informatique a permis d'effectuer une sélection aléatoire. Les médecins tirés au sort ont été contactés par téléphone. Lorsqu'un médecin refusait de participer, un nouveau tirage au sort était effectué pour le remplacer. L'objectif était d'obtenir une grande diversité de médecins. Le nombre d'entretiens n'était pas fixé à l'avance. Notre but était d'atteindre la saturation des données. Celle-ci était définie dans notre étude par l'absence de nouvelle thématique lors de trois entretiens successifs. Le consentement pour l'enregistrement était

systématiquement recherché et les participants étaient informés de la possibilité d'interrompre l'entretien à tout moment. Le Comité de protection des personnes n'a pas été contacté, du fait, qu'au regard des lois de bio éthique de 2004, les études qualitatives par entretiens auprès de médecins ne le justifiaient pas. Nous avons veillé au strict respect de l'anonymat. Les enregistrements ont été détruits après retranscription.

Management des entretiens Les entretiens se sont déroulés du 7 avril au 24 mai 2012 et ont été animés par un interne en médecine générale (S.S.). Ils ont été réalisés au sein des cabinets des praticiens. Ils ont été guidés par une grille d'entretien préalablement établie (encadré 1), volontairement peu détaillée afin de faciliter l'expression. Les questions étaient ouvertes, pour induire le moins de biais possibles liés aux opinions des chercheurs sur le sujet [13]. Des relances étaient prévues mais peu nombreuses.

Analyse des données Une analyse inductive de contenu thématique avec construction de catégories a été faite à partir de l'analyse des propos des participants. Plusieurs étapes ont été suivies. Chaque entretien

Encadre 1 Guide d'entretien Ce qu'est une norme en général. Évocation du champ d'exploration  Que vous évoque la notion de normes ? Norme et éléments spécifiques à la pratique de la médecine  Y a-t-il des spécificités de la norme à votre champ d'activité ?  Avez-vous l'impression d'y être confronté professionnellement ? Comment ?  Quels freins voyez-vous à l'application de normes en médecine générale ?  Qu'est-ce qui dans votre pratique relève de l'application de normes ?  Qui sont à l'origine de l'édiction des normes ? Assurance maladie (AM) et normes  Avez-vous le sentiment que l'AM incite à l'observation de normes de pratiques médicales ?  Avez-vous des exemples de mesures allant dans ce sens ?  Quel est selon vous l'objectif de l'AM lorsqu'elle incite à l'observance de normes de pratiques ? Opinion sur une pratique médicale basée sur des normes  Que pensez-vous d'une pratique basée sur des normes ? – Par rapport aux missions spécifiques de la médecine générale (prise en charge globale, continuité des soins, rôle dans la santé publique. . .) ? – Pour la qualité des soins ? – Pour vous-même ? Conclusion  Avez-vous d'autres réflexions sur la notion de norme ?

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individuel a fait l'objet d'un enregistrement audio qui a été intégralement retranscrit sur un fichier informatique (Microsoft Word 2007). La retranscription des verbatim a été lue à plusieurs reprises, avec un choix des unités de sens, une identification des thèmes généraux, catégorisation et classification. Une triangulation a ensuite été effectuée entre deux chercheurs (A.J., S.S.) pour optimiser la conformité des données.

que les transgressions pouvaient être sanctionnées. Elles constituaient une aide et balisaient le champ des prises en charge. La HAS et l'Afssaps étaient les principaux pourvoyeurs des normes citées. L'Assurance maladie a également été citée tout comme les formations médicales initiales et continues. Les avis de spécialistes, le discours des laboratoires et les patients euxmêmes avaient un rôle normatif référentiel.

Résultats

Les normes : une simplification systématique de la réalité ?

Nous avons interrogé 16 médecins, 10 hommes et 6 femmes, âgés de 39 à 68 ans. L'âge moyen était de 55 ans. Dix médecins avaient une activité urbaine et sept une activité semi-rurale ou rurale. Neuf généralistes exerçaient en cabinet de groupe et sept en cabinet individuel. Deux médecins avaient pour particularité d'être maître de stage auprès d'une faculté de médecine. Les caractéristiques des médecins sont récapitulées dans le tableau I.

Un relatif consensus autour de la définition des normes médicales Pour les médecins interrogés, les normes de pratiques médicales délimitaient un « espace » dans lequel les pratiques effectives devraient se situer. La notion de cadre était restrictive et souvent exprimée sous forme de métaphores. M9 : « les barrières entre lesquelles notre pratique doit se maintenir ». Ces restrictions ont souvent relevé de l'imagerie routière, M8 : « des bornes qu'il ne faut pas dépasser », ce qui sous-entendait

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Représentations et ressentis des médecins généralistes sur les normes de pratiques médicales auxquelles ils sont confrontés

Bien que la pression normative ait été parfaitement ressentie pour de nombreux champs de la pratique, il apparaissait clairement que tout n'était pas et ne pouvait pas être normé. M1 : « Tout ne peut pas rentrer dans des normes, la palpation d'un abdomen, une auscultation, une impression générale. . . ». Globalement, les normes ne donnaient pas le sentiment d'être réellement établies dans un souci d'applicabilité. De fait, elles suscitaient une certaine défiance. Elles seraient le fruit d'une démarche intellectuelle désincarnée, loin du terrain, pensées pour des conditions théoriques de mises en œuvre. Elles seraient basées sur des critères d'efficacité essentiellement biomédicaux. Elles ne prendraient pas en compte la réalité du processus de prise de décision. M9 : « On est là pour pondérer,. . . tout ça c'est fait sur du papier ». Les normes scientifiques seraient schématiques voire caricaturales. Elles réduisaient la complexité réelle des situations. Elles induiraient des conduites à tenir stéréotypées.

TABLEAU I Caractéristiques des participants Sexe

Âge (ans)

Localisation géographique

Département

Cabinet de groupe ou individuel

M1

H

45

Semi-rural

91

Groupe

M2

F

53

Urbain

95

Groupe

M3

H

63

Urbain

93

Groupe

M4

H

55

Rural

77

Individuel

M5

F

59

Semi-rural

77

Groupe

M6

H

68

Urbain

91

Individuel

M7

H

42

Urbain

95

Groupe

M8

H

62

Urbain

92

Groupe

M9

H

66

Urbain

78

Groupe

M10

H

63

Urbain

75

Groupe

M11

F

44

Semi-rural

78

Individuel

M12

F

58

Urbain

92

Individuel

M13

H

58

Semi-rural

78

Individuel

M14

H

48

Urbain

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Groupe

M15

F

39

Rural

77

Individuel

M16

F

53

Urbain

75

Individuel

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Particularités

Maître de stage

Maître de stage

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Participants

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A. Jami, S. Saidj, I. François-Purssell, O. Saint-Lary

M7 : « C'est parfois pas aussi simple. . . ». Les médecins ont reconnu que les recommandations étaient globalement bien faites et ils ne remettaient pas en cause leur existence. Leur lecture devait néanmoins être critique. Elles devaient être soumises à la réflexion et à la discussion entre confrères. Tout de même, certaines recommandations étaient parfois discutables. M13 : « Ce n'est quand même pas la bible ». Des erreurs pouvaient exister. Des biais liés à des conflits d'intérêts pouvaient même aboutir à leurs retraits. L'extrapolation à l'exercice de ville, à partir d'études menées à l'hôpital, pouvait être excessive. Elles pouvaient être rapidement obsolètes. La complexité de certaines situations cliniques rendrait dangereuse une application systématique sans réflexion. M7 : « On ne peut pas systématiquement appliquer à la lettre ce que voudraient les normes scientifiques ». La nature statistique des essais cliniques qui présidaient à l'élaboration des normes scientifiques justifiait l'adaptation des pratiques à la réalité des spécificités rencontrées. M13 : « Il y a donc toujours des patients qui échappent à ces schémas établis ». Les bénéfices attendus à l'échelle d'une population ne le seraient pas forcement pour un individu donné. La prise en compte de la situation sociale du patient, de ses contraintes, de ses attentes, pouvait conduire les médecins à une prise de distance relative avec les normes scientifiques. Ils ont opposé le modèle holistique, biopsychosocial, à l'efficacité biomédicale des normes scientifiques. Ils justifiaient ainsi les transgressions dans l'intérêt des patients. M4 : « Nous, on veut d'abord soigner les gens ».

L'application de normes scientifiques : jugée légitime et nécessaire Elles permettraient aux médecins de progresser et de ne pas rester isolés. Les études scientifiques mettraient en évidence les pratiques les plus efficaces et les plus bénéfiques aux patients. M16 : « Elles sont quand même bien pratiques pour nous ». L'impression de tirer de sa propre expérience ou de ses intuitions des éléments référentiels de pratique a pu paraître utile mais cependant insuffisant pour assurer des soins efficaces. Les normes de pratiques permettraient aux patients d'avoir des soins de qualité, quel que soit le médecin consulté. Les médecins avaient le sentiment d'appliquer les référentiels qui leurs étaient proposés, mais en les adaptant. Ils ont expliqué que la liberté d'exercice et la pratique solitaire de la médecine générale rendaient possible l'apparition de pratiques inadéquates. L'existence de normes permettrait de recadrer les demandes jugées infondées de certains patients et d'avoir une valeur juridique en cas d'éventuels litiges. Le caractère informatif non absolu des normes serait reconnu par ceux-là même qui les édictent mais pourrait servir de base à l'évaluation des pratiques.

Des freins identifiés pour leur application en pratique quotidienne

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Le respect des normes résistait peu aux convictions acquises par la pratique. De nombreux freins ont été repérés.

Les patients ne seraient pas de simples mécaniques aux réactions prévisibles. M15 : « On a à gérer des personnes et pas des chiffres ou des organes ». Ils auraient leur mot à dire « Je ne suis pas tout seul à décider » et seraient influencés par différents média. M13 : « Dans Elle ou Cosmopolitan, tel professeur a dit que. . . ». Les habitudes des médecins pouvaient également s'opposer au suivi des normes scientifiques, d'autant plus que le bénéfice escompté de leur mise en application était minime. Les bonnes pratiques pouvaient ne pas être suivies par défaut d'équipement. M11 : « On n'a pas forcément accès rapidement et à proximité à toute la technologie. . . ». De même, les traitements initiés par des médecins spécialistes, pas toujours conformes aux normes des agences de santé, paraissaient difficiles à modifier sans perte de crédibilité. De par leur statut, les spécialistes auraient plus de latitude pour transgresser. Leurs capacités de discernement seraient plus affutées et leur permettraient une meilleure approche des situations. L'existence de documents normatifs permettrait au généraliste de se hisser au même niveau de connaissances que le spécialiste, qui se trouverait réduit à un rôle d'effecteur technique beaucoup moins créatif. La diversité des champs d'action de la médecine générale est présentée comme un obstacle à connaissance par chaque médecin généraliste de toutes les recommandations. Les médecins interrogés pensaient que cette connaissance était plus facile à acquérir pour les spécialistes, leur domaine paraissant mieux limité. Le manque de clarté dans l'énoncé de certaines recommandations et leur évolution rapide seraient une entrave à leur mémorisation. Des synthèses accessibles et régulières étaient souhaitées.

Place des institutions dans la normalisation des pratiques L'Assurance maladie serait une source directe d'incitation à l'application des normes de pratique car elle aurait un intérêt direct. M13 : « On sent bien derrière la multiplication de ces recommandations qu'il y a une volonté de normer notre pratique et pour une maîtrise comptable ». De même, l'Afssaps a été jugée partiale et non transparente. Il a été regretté que les généralistes ne soient pas consultés lors de l'élaboration des normes scientifiques, surtout quand ils reçoivent sans justifications ni explications de nouvelles injonctions, et en particulier lorsque celles-ci aboutissent à des restrictions d'utilisation de médicaments voire à leur suppression. Les médecins de l'Assurance maladie, n'ayant pas d'activité de terrain, contribueraient à créer des normes théoriques. La participation d'économistes ne serait pas un gage de pertinence. M12 : « Ils ont une vision un peu idéale et théorique des choses, ils sont un peu dans leur bulle ». Les médecins interrogés regrettaient le manque de participation des généralistes dans l'élaboration des normes. Cela favoriserait une approche dogmatique éloignée de la réalité. L'absence de concertation et de prise en compte de l'ensemble des facteurs

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Discussion Dans un contexte de normalisation des pratiques médicales et de mise en place de la rémunération sur objectifs de santé

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publique, ce travail est à notre connaissance le premier à interroger directement les médecins généralistes sur le concept de « norme médicale ». Globalement, les médecins ont décrit un caractère prescriptif des normes de pratiques médicales. Le concept de norme est complexe. Il est difficile d'y attribuer un sens commun. Il est possible de s'y référer, de construire un raisonnement pertinent sans pour autant être sûr que tout le monde parle de la même chose. Canguilhem et Foucault ont eux-mêmes abordé la question de la norme par des approches très différentes et même s'ils ont pu se retrouver sur certains points forts, leurs conceptions ne pouvaient se confondre [14]. De fait, chacun se réfère à la norme de manière spécifique. Les experts des agences de santé et les sociétés savantes ont des préoccupations centrées sur l'efficacité biomédicale des soins. L'Assurance maladie a des impératifs économiques. Les patients souhaitent obtenir des soins efficaces et adaptés (modélisés par les relais d'information moderne). L'industrie pharmaceutique fournit aussi des informations normatives. Petit à petit, les normes se sont intégrées à la pratique médicale. Elles sont facilement repérées sans que leur présence ne soit forcément tout à fait consciente. La formation médicale initiale a été assimilée à une première introduction à leur utilisation. Les médecins n'ont pas formulé de rejet de principe à leur application. Ils ont simplement déclaré ne pouvoir se soumettre à aucune injonction extérieure sans en évaluer auparavant les conséquences pour la santé de leurs patients. Cette approche unanime a été présentée comme une grille de lecture universelle. Les considérations éthiques se sont élevées en pare-feu (valeur universelle de la santé, la confiance, principe de bienfaisance, la non-malfaisance. . .) [15] et ont structuré les déclarations. Elles ont été prises comme repères de cohérence et justifiaient le positionnement critique. Le patient restait au centre des préoccupations. Les prescriptions institutionnelles (Assurance maladie, HAS, Afssaps) étaient filtrées par des règles qui justifiaient les transgressions. La faible prise de risque, reconnue et implicite, confortait les attitudes. L'Assurance maladie a été mise au centre de l'action normative. Ses principales préoccupations étant financières, elle était suspecte. Les médecins prenaient en compte ses propositions mais elles n'étaient pas prioritaires. Les pressions ressenties étaient mal vécues et jugées incompatibles avec la pratique libérale et le devoir de bienfaisance. Le paiement à la performance n'a pas échappé à la lecture éthique [16]. Plusieurs travaux ont décrit les risques de dérives potentielles d'un encouragement financier à respecter des normes médicales [17,18]. Les médecins ont considéré immoral le principe de se voir octroyer une prime pour suivre des pratiques adaptées. Ils considéraient avoir le devoir d'assurer les meilleurs soins indépendamment de leur rémunération. En 2007, un manifeste a été publié pour mettre en garde devant les dérives potentielles du paiement à la performance et promouvoir les

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influençant les décisions médicales a été soulignée. M9 : « Ils n'interrogent pas les gens qui sont en contact avec la pratique ». Pour établir ces normes, l'Assurance maladie s'appuierait sur les données de la science dans le but d'améliorer la qualité des soins. Cependant, unanimement, l'objectif visé serait une réduction des dépenses de santé. M4 : « Leur objectif c'est de faire des économies ». L'impact de ces recommandations en termes de bénéfices de santé de la population serait discutable même si certaines étaient médicalement pertinentes. Ce désir de maîtrise des dépenses serait légitime. M3 : « C'est aussi à son honneur de faire attention à l'argent qu'on lui donne ». Le critère financier, bien qu'important, a été jugé secondaire. M16 : « D'abord je m'occupe de la santé des gens ». L'Assurance maladie était au cœur de l'entreprise de normalisation. Elle prendrait des mesures incitatives (CAPI, P4P, visites confraternelles. . .) pour qu'elles soient appliquées. Elles seraient plus contraignantes quand l'obtention de meilleures prestations en serait contingente. Les arguments scientifiques mis en avant par les délégués de l'Assurance maladie étaient discutables comme pouvaient l'être les demandes d'alignement régionales des fréquences de prescriptions. L'influence des patients en matière de respect des normes pouvait être importante (réticence pour la prescription de génériques, incitation à la délivrance d'arrêt de travail). Les normes promues par l'Assurance maladie constitueraient une intrusion illégitime dans le domaine de compétence des médecins. Cette surveillance était pesante. Les sanctions en cas de non-respect n'ont pas, du fait de leurs faibles fréquences, suscité d'anxiété particulière. Les médecins considéraient qu'ils demeuraient seuls maîtres de leurs choix. L'Assurance maladie aurait des arrière-pensées, M13 : « Je crois qu'ils essayent de nous acheter pour nous discréditer ». Le principe d'une rémunération supplémentaire pouvait être acceptable sauf quand elle allait à l'encontre de l'intérêt médical du patient, quelle que fût la prime octroyée. Les médecins ont déclaré que l'acceptation d'une prime n'entraînait pas de modification de leurs pratiques. Cependant, il persistait des réticences d'ordre moral. M9 : « Je pense que ce n'est pas très moral de recevoir des primes pour bien faire son travail ». Certains médecins ont souhaité que les normes ne leur soient pas opposables. La surveillance a été jugée superflue car implicite. Elle ne devrait pas être dévolue à l'Assurance maladie. Des normes en matière de coopération et de circulation des informations entre les différents acteurs de santé ont été jugées manquantes. Les médecins avaient le sentiment d'avoir des pratiques médicales de plus en plus normées. Cette tendance semblait devoir perdurer voire s'accentuer. Ils ont dit pouvoir s'en accommoder et, à défaut, s'y résigner malgré l'inconfort engendré. Les sanctions potentielles encourues étaient inquiétantes mais lointaines.

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soins centrés autour du patient et de sa singularité [19]. Cependant, 17 000 médecins généralistes sur 55 000, avaient, en 2011, avant la Convention actuelle, signé un CAPI. Ils ont accepté le principe d'une prime liée à l'atteinte d'objectifs préétablis mais ont affirmé ne pas avoir le souci de son optimisation. Comme dans un autre travail sur le paiement à la performance [20], il a été regretté que les médecins généralistes participent peu à l'élaboration des normes qui les concernent. La complexité des situations rencontrées, les spécificités individuelles qui ne se prêteraient pas à une normalisation stricte ne seraient aujourd'hui pas prises en compte. En l'état, les normes institutionnelles ne seraient qu'indicatives et n'auraient pas vocation à être appliquées de façon stricte. Les médecins ont semblé s'accommoder du concept de normes sans exprimer le besoin de le préciser. Ils avaient le sentiment qu'une normalisation stricte de leur pratique était impossible. Les normes devaient être des repères. La prise en compte de l'expertise clinique du médecin et des valeurs du patient était nécessaire. Le concept de l'EBM, sans être cité, a parfaitement été décrit. Les normes juridiques (Code de la santé publique ou pénal) n'ont pas été évoquées, alors que la loi du 4 mars 2002 peut apparaître comme très dirigiste en matière de relation médecin–patient. La fabrication concrète des normes restait également floue et n'est pas ressortie clairement dans les entretiens. Les critiques qui avaient déjà été adressées aux promoteurs de la médecine fondée sur les preuves ont été formulées à l'encontre de l'Assurance maladie. Les décisions médicales ne pouvaient n'être prises qu'en fonction de résultats d'essais cliniques randomisés en double aveugle et de méta-analyses agrégeant ces études [21]. Les théoriciens de l'EBM furent amenés à revoir sa définition et à donner une place à l'expertise clinique et aux préférences des patients [22]. Les médecins ont souligné le caractère scientifique de leur profession. Se référer à des connaissances fiables et actualisées serait une obligation à la fois légale et déontologique. Ils ont aussi revendiqué les spécificités de leur exercice. Ils se sont référés à l'approche holistique. La santé était considérée comme un phénomène complexe influencé par de nombreux facteurs biologiques mais aussi psycho-comportementaux et socio-environnementaux [23]. Ainsi, l'application obligatoire de norme, sans être exclue, n'était qu'une hypothèse. Elles nuiraient à la qualité des soins. Nous avons pu parfois constater une certaine ambivalence dans les propos des médecins. Tout en refusant l'idée de se voir imposer des choix de prise en charge par une pratique normée, ils en ont parfaitement décrit les intérêts. Ils se sont dits préoccupés par les enjeux économiques et le souci de baser leurs raisonnements sur les données actualisées de la science. Toute entreprise de normalisation nécessite une approche prudente et concertée. Le financement du système de santé, très préoccupant, nécessite une réflexion sur l'efficience effective des pratiques engagées. D'autres angles d'approches de la

question de la normalisation des pratiques médicales pourraient être admis et enrichir la réflexion sur ce sujet. Le point de vue des patients, les tensions éthiques inévitablement induites par toute entreprise de normalisation, le statut des médecins, engendré par des pratiques standardisées, et l'attrait d'une profession avec de telles caractéristiques pourraient éclairer la question.

Limites de l'étude Le panel de médecins interrogés a été varié. Les profils ont été hétérogènes tant en termes de sexe, d'âge, de lieu d'exercice (rural ou urbain) que de type d'exercice (solitaire ou en groupe). Le risque d'obtenir des représentations ou ressentis liés à un profil particulier de médecin était ainsi réduit. Cependant, la multiplicité possible de ces profils empêchait l'exhaustivité. Les médecins ont été interrogés en veillant à ce que tous puissent s'exprimer largement et en essayant d'éviter les relances incitatives. De ce fait, certains points n'ont pas été abordés spontanément. Lors de la relecture des entretiens, il nous est apparu qu'à certains endroits des relances auraient pu être utiles pour permettre d'approfondir certaines idées ou les rendre plus claires. Nous aurions pu ainsi affiner l'analyse thématique. Par ailleurs, certaines relances faites au cours des entretiens ont pu nous apparaître, a posteriori, inductrices. Par ailleurs, nous avons conduit les entretiens jusqu'à l'obtention de la saturation des propos. Pour pallier la subjectivité d'un chercheur unique et pour permettre une focalisation sur les propos tenus sans en altérer le sens, nous avons triangulé l'analyse. Les résultats ainsi obtenus ont fait l'objet d'une discussion et d'une synthèse qui a permis de minimiser les biais d'interprétations pour se situer au plus près de la signification réelle des idées exprimées.

Perspectives L'Assurance maladie multiplie les mesures qui incitent les médecins à se conformer à des référentiels de bonne pratique dans le cadre de la politique de maîtrise médicalisée des dépenses de santé. Elle consacre ainsi ces référentiels en normes de pratiques médicales. Aucun travail ne s'était encore intéressé au ressenti des médecins après que les recommandations soient devenues des repères normatifs opposables et sources de sanctions financières. Nous avons montré que les médecins généralistes qui étaient incités à s'exprimer librement sur le sujet, avaient repéré ces normes, que l'existence de ces incitations était prise en compte et acceptée, que ces incitations étaient valorisées et intégrées à la pratique. Leurs transgressions dans des contextes spécifiques étaient érigées en comportement éthique. Cependant, ces repères indicatifs ne devaient pas être impératifs. Une normalisation trop stricte n'était pas compatible avec la profession et s'opposait clairement à la qualité des soins. Les décisions devaient être adaptées à la complexité des situations rencontrées et être évaluées dans l'optique de servir au mieux l'intérêt des patients. Les normes scientifiques étaient mieux acceptées que les normes de

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l'Assurance maladie qui leur ont semblé essentiellement justifiées par des considérations économiques. Les médecins généralistes, même s'ils ont affirmé ressentir une pression provenant de la sécurité sociale, ont semblé rester sereins. Une réévaluation au gré des différentes mesures normatives

mises en place pourrait être éclairante sur l'avenir de la profession médicale. Déclaration d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cet article.

Article original

Représentations et ressentis des médecins généralistes sur les normes de pratiques médicales auxquelles ils sont confrontés

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