Ne´phrologie & The´rapeutique 10 (2014) 471–474

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Cas clinique

Syndrome de Fanconi chez un patient de 22 ans d’origine africaine Fanconi syndrome in a 22-year-old African patient Morgane Wetzstein a,*, Maı¨te´ Jaure´guy a, Jean-Philippe Lanoix b, Coralie Poulain a, Claire Berrou a, Marianne Renou a, Carole Cordonnier c, Gabriel Choukroun a,d a

Service de ne´phrologie-me´decine interne-dialyse-transplantation-re´animation, CHU d’Amiens, avenue Rene´-Lae¨nnec, 80054 Amiens cedex 01, France Service des maladies infectieuses, CHU d’Amiens, avenue Rene´-Lae¨nnec, 80054 Amiens cedex 01, France c Service d’anatomopathologie, CHU d’Amiens, avenue Rene´-Lae¨nnec, 80054 Amiens cedex 01, France d Inserm UMR 1088, CHU d’Amiens, avenue Rene´-Lae¨nnec, 80054 Amiens cedex 01, France b

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 20 janvier 2014 Accepte´ le 6 juin 2014

Un syndrome de Fanconi acquis peut survenir chez les patients pre´sentant une gammapathie monoclonale ou apre`s exposition a` certains me´taux lourds ou agents me´dicamenteux comme l’ifosfamide et certains antire´troviraux. Il est caracte´rise´ par un dysfonctionnement tubulaire proximal responsable, dans sa forme comple`te, d’une polyurie, d’une hypokalie´mie, d’une glycosurie, d’un diabe`te phosphate´ et d’une prote´inurie de faible poids mole´culaire. Nous rapportons ici le cas d’un patient aˆge´ de 22 ans, pre´sentant une insuffisance re´nale aigue¨ secondaire a` une ne´phrite tubulo-interstitielle associe´e a` un syndrome de Fanconi complet, survenue dans un contexte d’alte´ration de l’e´tat ge´ne´ral fe´brile. La de´marche diagnostique est de´crite et les hypothe`ses de´taille´es. ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Mots cle´s : Insuffisance re´nale aigue¨ Ne´phrite tubulo-interstitielle Syndrome de Fanconi

A B S T R A C T

Keywords: Acute renal failure Fanconi syndrome Tubulo-interstitial nephritis

Acquired Fanconi syndrome can occur in patients with monoclonal gammopathy or after exposure to heavy metals or drug agents such as ifosfamide, and some antiretroviral therapies. Fanconi syndrome is characterized by a dysfunctional of the proximal tubular responsible in its complete form for polyuria, hypokalemia, glycosuria, hypophosphatemia and low molecular weight proteinuria. We report the case of a 22-year-old patient hospitalized with an acute renal failure secondary to a tubulo-interstitial nephritis associated with a complete Fanconi syndrome in a context of a poor general condition and fever. We described and analyzed the process leading to the diagnosis. ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. Introduction Le syndrome de Fanconi est une affection d’origine ge´ne´tique ou acquise secondaire a` un dysfonctionnement complet ou incomplet des fonctions tubulaires proximales. Le tableau clinico-biologique associe une polyurie, une acidose tubulaire par de´faut de re´absorption des ions bicarbonates filtre´s, une glycosurie sans hyperglyce´mie, un diabe`te phosphate´, une hypokalie´mie, une amino-acidurie et une prote´inurie constitue´e de prote´ines de faible poids mole´culaire [1]. L’affection a e´te´ de´crite il y a 80 ans environ * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. Wetzstein).

par De Toni, Debre´ et Fanconi, qui a laisse´ son nom a` ce de´sordre. La cystinose, le syndrome de Lowe et le syndrome de Dent sont les trois affections he´re´ditaires le plus fre´quemment en cause, mais les formes acquises sont maintenant les plus fre´quentes, d’origine toxique (me´taux lourds ou me´dicamenteuses) ou expression d’une maladie ge´ne´rale (mye´lome ou syndrome de Sjo¨gren notamment) [2,3]. L’alte´ration des fonctions du tubule proximal est en grande partie lie´e au de´faut de gradient e´lectrochimique du sodium entre les poˆles baso-late´raux et apicaux de la cellule, gradient ne´cessaire au bon fonctionnement des co-transports proximaux sodiumde´pendants [4]. Nous rapportons un cas de ne´phrite tubulointerstitielle aigue¨ avec syndrome de Fanconi complet chez un patient aˆge´ de 22 ans, d’origine africaine.

http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2014.06.004 1769-7255/ß 2014 Association Socie´te´ de ne´phrologie. Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

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2. Observation Le patient, originaire de Kinshasa, aˆge´ de 22 ans, est hospitalise´ dans le service de ne´phrologie pour une alte´ration de l’e´tat ge´ne´ral associant une perte de poids d’environ 20 kg en 6 mois, une fie`vre et un syndrome polyuro-polydipsique e´voluant depuis quelques semaines. Il n’a pas d’ante´ce´dent me´dical hormis une hospitalisation trois mois auparavant pour une pneumopathie basale droite, dont l’e´volution a e´te´ rapidement favorable sous amoxicilline, il ne prenait aucun traitement. Sa fonction re´nale e´tait alors normale (de´bit de filtration glome´rulaire estime´ [DFGe] 105 mL/min/ 1,73 m2), les parame`tres biochimiques plasmatiques l’e´taient e´galement. Son dernier se´jour en Re´publique de´mocratique du Congo remonte a` 2009. 2.1. Clinique L’examen clinique retrouve un patient fatigue´, nause´eux, amaigri (52 kg pour 1,76 m ; indice de masse corporelle [IMC] 16,8 kg/m2), pre´sentant manifestement une de´shydratation extracellulaire. Sa pression arte´rielle est a` 115/65 mmHg, et sa tempe´rature a` 38,5 8C. Aucune anomalie n’est note´e a` l’examen cardiovasculaire et l’auscultation pulmonaire est normale. L’abdomen est souple, sans he´pato-sple´nome´galie. Il existe des ade´nopathies supra-centime´triques late´ro-cervicale gauche, axillaire gauche et sous-mandibulaires. 2.2. Biologie et diagnostic Sur le plan biologique, il existe un syndrome inflammatoire (prote´ine C re´active [CRP] 83 mg/L), une ane´mie microcytaire, are´ge´ne´rative (he´moglobine [Hb] 9,2 g/dL, volume globulaire moyen [VGM] 76 m3) et une insuffisance re´nale caracte´rise´e par une cre´atinine plasmatique a` 297 mmol/L, une ure´e a` 13,8 mmol/L (DFGe 24 mL/min/1,73 m2) associe´e a` une hypokalie´mie (2,8 mmol/L), une hypophosphate´mie profonde (0,41 mmol/L), une hypocalce´mie (2,02 mmol/L, protide´mie 70 g/L) lie´e au moins en partie a` une carence en vitamine D (1,25(OH)2 Vit D 5 ng/mL), une chlore´mie a` 111 mmol/L et une diminution du taux de bicarbonates plasmatiques a` 18,0 mmol/L. L’urice´mie qui, classiquement, est diminue´e dans le Fanconi, est normale, peut-eˆtre du fait de la de´shydratation et de l’insuffisance re´nale aigue¨. La natre´mie, les bilans he´patique et thyroı¨dien, la cortisole´mie et la glyce´mie sont dans les limites de la normale. L’analyse des urines sur une diure`se de plus de 7000 mL les premie`res 24 heures retrouve une prote´inurie tubulaire de 3018 mg/24 h (425 mg/L ; 32 % d’albumine), avec une kaliure`se (99 mmol/24 h) et une phosphaturie (17,1 mmol/24 h) inadapte´es a` l’hypokalie´mie et a` l’hypophosphaturie. La calciurie est a` 1,23 mmol/24 h, la natriure`se a` 355 mmol/24 h, et la glycosurie a` 13 mmol/24 h. Le taux de re´absorption des phosphates calcule´ est a` 23 %. Cependant, l’interpre´tation de certains de ces re´sultats reste de´licate en raison de l’insuffisance re´nale aigue¨. La chromatographie des acides amine´s urinaires retrouve une augmentation de l’acide aspartique, l’aspargine, la citrulline, l’isoleucine et la phe´nylalanine. Il n’y a ni leucocyturie, ni he´maturie, ni ce´tonurie, ni infection urinaire. Ce patient pre´sente donc une insuffisance re´nale aigue¨ associe´e a` un syndrome de Fanconi, dans un contexte d’alte´ration de l’e´tat ge´ne´ral fe´brile. 2.3. Examens comple´mentaires Les explorations comple´mentaires suivantes ont e´te´ re´alise´es a` la recherche d’une e´tiologie :

 anticorps anti-nucle´aires : faiblement positifs (1/160) ;  fractions C3 et C4 du comple´ment : mode´re´ment augmente´es ;  e´lectrophore`se et immuno-e´le´ctrophore`se des prote´ines se´riques : normales ;  recherche d’anticorps anti-cytoplasme des polynucle´aires (ANCA) et cryoglobuline : ne´gatives ;  se´rologies VIH 1 et 2, VHC, VHB : ne´gatives ;  se´rologies CMV et EBV te´moignant d’une infection ancienne, he´mocultures incluant la recherche de mycobacte´ries et de champignons : ne´gatives.

La radiographie de thorax retrouve de multiples images micronodulaires lobaires supe´rieures droites et infe´rieures gauches, et le scanner thoraco-abdomino-pelvien re´ve`le plusieurs opacite´s thoraciques apicales dont certaines excave´es. La tomographie par e´mission de positons retrouve de nombreux foyers hyper-me´taboliques ganglionnaires, de l’apex droit et pe´riintestinaux. Une fibroscopie bronchique avec lavage bronchoalve´olaire est re´alise´e, et la recherche de bacilles acido-alcoolore´sistants (BAAR) au direct est ne´gative. L’analyse cytologique retrouve 520 e´le´ments/mm3 dont 80 % de macrophages, 15 % de lymphocytes et 5 % de polynucle´aires, des cellules ge´antes multinucle´e´es et des cellules e´pithe´lioı¨des. L’intradermo-re´action a` la tuberculine est fortement positive. L’examen direct des crachats a` la recherche de BAAR ne peut eˆtre re´alise´. Le test QuantiFERON1-TB Gold (Cellestis, Paris, France) revient positif. Une biopsie re´nale est effectue´e. L’e´tude porte sur 9 glome´rules, tous sont normaux. L’interstitium est abondant, fibreux et œde´mateux. Il existe un infiltrat inflammatoire polymorphe et l’analyse immuno-histochimique montre qu’il est compose´ de macrophages (CD 68), ainsi que de lymphocytes a` pre´dominance T (CD3 et CD5) et plus rarement B (CD20). Une cellule ge´ante avec microcalcifications en son centre est observe´e. Les tubules sont souvent dilate´s et l’e´pithe´lium tubulaire alte´re´, desquamant parfois dans la lumie`re, certains tubes ont un reveˆtement microvacuolise´ avec augmentation des mitoses (Fig. 1). Il n’est pas observe´ de granulome. Il n’y a aucun de´poˆt en immunofluorescence. La coloration par le rouge Congo est ne´gative et la coloration de Ziehl n’est pas re´alise´e. Cependant, dans notre expe´rience et dans la litte´rature, celle-ci ne permet que tre`s rarement la mise en e´vidence d’une mycobacte´rie au sein du parenchyme re´nal. Enfin, la biopsie d’un ganglion axillaire est re´alise´e. L’analyse histopathologique met en e´vidence une lymphade´nite avec granulome ne´crotique, sans ne´crose case´euse. Une tuberculeuse pulmonaire, ganglionnaire et re´nale, responsable d’une ne´phrite interstitielle aigue¨ et d’un syndrome de Fanconi, est suspecte´e. 2.4. The´rapeutique et e´volution A` la suite des re´sultats de la biopsie ganglionnaire, un traitement antituberculeux associant rifampicine, isoniazide, pyrazinamide et e´thambutol est de´bute´, paralle`lement a` une corticothe´rapie orale a` la dose de 0,5 mg/kg/j prescrite pendant 30 jours. Finalement, apre`s 22 jours d’incubation, 15 colonies de BAAR sont mises en e´vidence dans le lavage broncho-alve´olaire et 100 colonies dans la biopsie axillaire. L’hybridation mole´culaire et la PCR permettent ensuite d’identifier le Mycobacterium tuberculosis (Mtb) multi-sensible sur ces 2 pre´le`vements. Six jours apre`s le de´but du traitement, une ame´lioration franche de la fonction re´nale est observe´e et la diure`se est 4 fois moins importante. Un mois apre`s, le patient est moins asthe´nique, et a repris 3 kg. Le syndrome inflammatoire a partiellement re´gresse´, la cre´atinine plasmatique est a` 125 mmol/L et le DFGe a` 66 mL/min/ 1,73 m2, le bilan ionique est presque normalise´ (natre´mie a`

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Fig. 1. Examen histologique d’un ganglion et du parenchyme re´nal. A. L’histologie ganglionnaire met en e´vidence une lymphade´nite granulomateuse ne´crosante. Au sein du granulome e´pithe´lioı¨de, des cellules ge´antes sont observe´es au pourtour des plages de ne´croses (100 et 200, coloration HES). B. Le parenchyme re´nal est le sie`ge d’une ne´phrite interstitielle aigue¨ sans re´action granulomateuse. Les glome´rules sont normaux. Le tissu interstitiel est abondant, un peu fibreux et œde´mateux. On observe un infiltrat inflammatoire polymorphe compose´ de macrophages et de lymphocytes a` pre´dominance T. Les tubules sont dilate´s et l’e´pithe´lium alte´re´, desquamant parfois dans la lumie`re. Une cellule ge´ante avec microcalcification en son centre a e´te´ observe´e (100 et 400, coloration au trichrome de Masson).

138 mmol/L, kalie´mie a` 3,8 mmol/L, chlore´mie a` 108 mmol/L, bicarbonates a` 28 mmol/L, calce´mie a` 2,16 mmol/L, phosphore´mie a` 0,6 mmol/L, natriure`se a` 45 mmol/L, kaliure`se a` 13 mmol/L, phosphaturie a` 2,2 mmol/L). Malheureusement, le patient ne se rend pas aux consultations ulte´rieures et est perdu de vu au 3e mois de traitement.

3. Discussion Le syndrome de Fanconi est un de´sordre rare du tubule proximal. A` l’aˆge adulte, l’affection est le plus souvent secondaire a` une maladie ge´ne´rale, a` la prise de me´dicaments ne´phrotoxiques ou en rapport avec l’exposition a` certains me´taux lourds [5]. Les me´dicaments le plus fre´quemment incrimine´s sont les agents anticance´reux, en particulier l’ifosfamide, certains antibiotiques et les antire´troviraux, surtout l’ade´fovir, le cidofovir et le te´nofovir [6]. Ce de´sordre a e´galement e´te´ de´crit chez des patients pre´sentant une glome´rulone´phrite extramembraneuse avec anticorps antimembrane basale tubulaire [7,8]. Enfin, un syndrome de Fanconi incomplet ou complet peut survenir au cours de certaines ne´phropathies tubulo-interstitielles aigue¨s ou chroniques. Cependant, il n’a jamais e´te´ de´crit au cours de la tuberculose. 3.1. La tuberculose La tuberculose est l’une des infections les plus meurtrie`res juste apre`s le VIH. Selon les donne´es de l’Organisation mondiale de la sante´ (OMS), en 2011, 8,7 millions de personnes ont e´te´ infecte´es et 1,4 million en sont mortes [9]. Chez les sujets bacillife`res, le risque de de´velopper la maladie au cours de l’existence est de 10 %. Les populations immunode´prime´es telles que les patients infecte´s par le VIH ou transplante´s et les diabe´tiques sont plus a` risque de de´velopper la maladie. Le nombre de personnes de´veloppant la tuberculose chaque anne´e en France est cependant en diminution et le taux de mortalite´ a chute´ de 41 % entre 1990 et 2010 [9].

Les poumons, le syste`me lymphatique et les reins sont les principales localisations de la maladie. Une tuberculose re´nale n’entraıˆne que rarement une insuffisance re´nale. Lorsqu’une atteinte pulmonaire s’accompagne d’une alte´ration de la fonction re´nale, les diagnostics a` e´voquer sont avant tout une ne´phrite immuno-allergique me´dicamenteuse (rifampicine) si le traitement a de´ja` e´te´ instaure´, une ne´phrite tubulo-interstitielle tuberculeuse ou une amylose AA conse´cutive au syndrome inflammatoire [10– 12]. La tuberculose extra-pulmonaire survient dans 20 % des cas de tuberculose ave´re´e [13]. L’atteinte ge´nito-urinaire repre´sente 15 a` 30 % de tous les cas de tuberculose extra-pulmonaire [14]. L’insuffisance re´nale terminale est exceptionnelle. La tuberculose re´nale et urinaire peut eˆtre cause´e par les Mycobacterium tuberculosis, bovis, ou avium chez les patients infecte´s par le VIH, ou par les instillations de bacille de Calmette et Gue´rin (BCG) pour le traitement des cancers de la vessie. L’atteinte re´nale de la tuberculose est conse´cutive a` une colonisation par les bacilles de l’arbre urinaire chez la femme et du syste`me uroge´nital chez l’homme (colonisation par voie re´trograde), avec la possibilite´ d’infection de la prostate, des ve´sicules se´minales, du canal de´fe´rent et de l’e´pididyme. L’atteinte re´nale est bilate´rale et souvent asymptomatique. Parfois, les patients se plaignent de ˆ lures mictionnelles et l’analyse des urines peut retrouver une bru pyurie ste´rile (avec ou sans he´maturie). On peut exceptionnellement observer des ste´noses granulomateuses ure´te´rales a` l’origine d’une insuffisance re´nale obstructive [14]. La croissance du bacille de´pend de la teneur en oxyge`ne du tissu ou` il se trouve. Le rein est un organe richement vascularise´, il est donc particulie`rement propice a` son de´veloppement. Initialement, la disse´mination se limite au cortex re´nal, formant des granulomes contenant des cellules e´pithe´lioı¨des et gigantocellulaires. La recherche du bacille dans les urines est alors ne´gative. Ces granulomes confluent et aboutissent a` la formation de ne´crose case´euse, ils peuvent ensuite fistuliser dans les voies excre´trices, le Mtb peut donc eˆtre trouve´ dans les urines. En re´ponse a` cette agression, il existe une importante re´action inflammatoire se

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manifestant par une ne´phrite interstitielle se´ve`re [13]. Chez notre patient, le diagnostic de tuberculose re´nale a e´te´ e´tabli devant l’association d’une ne´phrite interstitielle aigue¨ avec cellules ge´antes mais sans granulome, et une tuberculose pulmonaire et ganglionnaire prouve´e sur le plan bacte´riologique. 3.2. Diagnostic microbiologique Le diagnostic microbiologique est base´ sur l’isolement de bacilles tuberculeux soit dans les urines, soit sur la biopsie re´nale. L’histologie de la biopsie peut sugge´rer le diagnostic en re´ve´lant en ge´ne´ral une ne´phrite tubulo-interstitielle avec des granulomes et, souvent, de la ne´crose case´euse [13]. La mise en e´vidence de BAAR dans les urines est l’examen cle´ du diagnostic, sa spe´cificite´ est de 100 %, mais sa sensibilite´ varie de 30 a` 90 % selon le nombre d’e´chantillons teste´s [13,14]. L’incubation peut prendre 6 a` 8 semaines. Le traitement de la tuberculose re´nale, selon les recommandations de l’OMS [9], comporte une quadrithe´rapie pendant 2 mois associant rifampicine (10 mg/kg), isoniazide (4 a` 5 mg/kg), pyrazinamide (20 a` 30 mg/kg) et e´thambutol (15 a` 20 mg/kg), suivi d’un traitement d’entretien de 4 mois par rifampicine (10 mg/ kg) et isoniazide (4 a` 5 mg/kg) [15]. Chez le patient insuffisant re´nal avec un DFG < 30 mL/min, il est recommande´ de re´duire la posologie d’e´thambutol (7–10 mg/kg), du pyrazinamide (15 mg/ kg) et de l’isoniazide (3–4 mg/kg). Chez le patient dialyse´, il est recommande´ d’administrer le traitement 3 fois par semaine, apre`s chaque se´ance de dialyse. L’e´thambutol ne sera utilise´ que chez les sujets bacillife`res a` la posologie de 10 mg/kg apre`s chaque se´ance de dialyse. La posologie de rifampicine et de pyrazinamide est inchange´e, la posologie d’isoniazide est de 3–4 mg/kg. Il est recommande´ de re´aliser des dosages se´riques pour ajuster la posologie des me´dicaments. Une corticothe´rapie, associe´e au traitement antituberculeux, est recommande´e pour diminuer la re´action inflammatoire locale en cas de pe´ricardite (recommandation de grade A), me´ningite (avis d’experts), miliaire hypoxe´miante (avis d’experts) et de tuberculome ce´re´bral (avis d’experts). Elle n’est pas recommande´e dans les autres cas [16]. Pour la tuberculose re´nale, aucun consensus n’est e´tabli pour l’utilisation de corticoı¨des, mais les re´sultats des premie`res e´tudes sont encourageants [12,14], comme en te´moigne l’ame´lioration rapide de la fonction re´nale et du de´sordre tubulaire chez notre patient, quelques jours seulement apre`s le de´but du traitement. Cette ame´lioration aura pu e´galement s’observer en cas de ne´phrite interstitielle aigue¨ d’origine me´dicamenteuse, ou secondaire a` une sarcoı¨dose, mais ce diagnostic ne peut eˆtre retenu du fait de la concomitance de la tuberculose pulmonaire et ganglionnaire. 4. Conclusion Le syndrome de Fanconi est un de´sordre rare dont les causes sont multiples. En dehors des formes he´re´ditaires, cette affection

est le plus souvent d’origine toxique ou induite par la re´absorption de fortes quantite´s de chaıˆnes le´ge`res par le tubule proximal au cours des gammapathies monoclonales. Il s’agit ici du premier cas, a` notre connaissance, de syndrome de Fanconi survenant au cours d’une tuberculose re´nale. L’atteinte re´nale au cours de la tuberculose est cependant probablement encore sous-diagnostique´e. La place de la corticothe´rapie dans le traitement de cette atteinte reste a` de´finir. Chez notre patient, elle a manifestement e´te´ efficace.

ˆ ts De´claration d’inte´re Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

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[Fanconi syndrome in a 22-year-old African patient].

Acquired Fanconi syndrome can occur in patients with monoclonal gammopathy or after exposure to heavy metals or drug agents such as ifosfamide, and so...
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