Rev. E.E.G. NeurophysioL, 1979, 9, 2, 156-160.

156

A PROPOS DE TRACI~S DE C O M A S - S O M M E I L S

POST-TRAUMATIQUES

A. V E R D U R E - P O U S S I N et D. S A M S O N - D O L L F U S Service d'explorations neuro;ogiq.es, centre hospitalier universitaire, 76138 Rouen Cedex.

SUMMARY E E G sleep p a t t e r n s in p o s t - t r a u m a t i c coma. EEG sleep patterns were obserred in 44 cases o f cranial hzjuries examined within 24 hours o f the traumatic incident. Young people were invoh,ed, as more than h a l f o f these cases wcre noted ht patients umler 15 ),ears o f age. Two mzin types o f tracing were observed : EEG sleep pattern with slow waves were seen mainly in children ; but sleep patterns o f low amplitude appeared generally in adolescents and adults. There was usually a favourable outcome in this series, as there was only one death the day after the accident, in a patient with multiple injuries and only two cases" o f post-traumatic epilepsy.

Les figures caract6ristiques du > sont relativement frdquentes Iors des comas traumatiques. Eiles ont 6t6 d6crites par COORJON en 1961, et par CHATRIAN et aL en 1963. COURJON (1972) et COURJON et aL (1971) en ont donn6 des descriptions pr6cises, ainsi que BRtCOLO et TURELLA (1973). L'6volution dons le temps de ce typz de trac6 est particuli~rement bien mis~ en dvidence par l'6tude des > telle que l'ont prdconisde BRtCOLO et coll. (1978). Nous essaieron; d .~ voir ici quels p : u v e n t 6tre les diff6rents aspects de ces comas-sommeils posttraumatiques, et les aspzcts particuliers au sujet jeune de moins de 15 ans.

MATI~RIEL ET METHODES. 44 sujets ont 6t6 retenus parmi 72 traumatis6s du crane, comateux, ayant eu un Oectroene6phalogramme dans les premieres vingt-quatre heures apr6s le traumatisme. La clinique et surtout l'art6riographie ont permis d'61iminer un'. cause n~cessitant un aete neurochirurgical. Les 61ectroenc6phalogrammes ont 6t6 pratiqu6s h la demande des neurochirurgiens ou des p~:diatres, essentiellement dons le cadre d'un bilan pronostique.

Les examens ont 6t6 r6alis6s au lit du malade. 8 d6rivations E.E.G. sont enregistrdes simultan~ment (un montage longitudinal et un montage transversal h 11 61ectrodes). Habituellement, des 61corrodes aiguilles, parfois des ~leetrodes pastilles rrtaintenues par des bandes de caoutchouc sont utilis6es. La respiration et l'61ectrocardiogramme sont toujours enregistr6s. Chacun de ees sujets a eu un 61ectroenc6phalogramme au tours des premieres vingt-quatre heures. La plupart d'entre eux ont ensuite 6t6 enregistr6s deux ou trois lois, mais jamais de faqon syst6matique ou/L des dates pr6cises.

R F..SULTATS. Les 72 sujets examin6s sont jeunes : plus de ia moiti6 d'entre eux a moins de 20 ans et le plus fig6 a 53 ans. Parmi ces 72 sujets, 44 ont eu au premier examen, un trac6 de >. Parmi ces derniers, plus de la moiti6 a moins de 15 ans et seulement 2 ont plus de 25 ans (fig. 1).

A. Description des trac~s de fond. Un point est commun/~ tous ces trac6s : l'existence des rythmes sigma survenant en bouff6es. Mais divers aspects peuvent ~.tre rencontr6s.

Communication pr6sent6e ~ la Socidtd d'E.E.G, et de neurophysiologie clinique de langtte fran~aise le 5-12-1978 texte remis le 5-12-1978 ; d6finitivement accept6 le 1'6-3-1979. Tirds-d-part : D. $AMSON-DoLLFUS,h l'adresse indiqu6e ci-dessus.

COMAS-SOMMEILS POST-TRA UMA TIQUE$

| 57

13/17 11/15 9/13

m

7/13

2/3

1

2/3

5

!0

15

20

25

30

35

40

45

50

55

FJo. 1. - - Les traumatismes sont plus fr6quents chez les sujets jeunes. Les ¢omas-sommeils (hachur6s) pr6dominent chez les enfants de moins de 15 ans. Inj~sries are seen more frequently in young people. E E G sleep patterns'(cross-hatched) predominate in children

tinder 15 ),ears of age.

I. 31 cos comportent des ondes lentes, irr6guli~res, des ondes sigma de 12 b. 14 c/s, essentiellement rolandiques, diffusant un peu aux r~gions temporales. Ce type de trac6 est tout h fait comparable /t celui du stade II ou II/III du sommeil physiologique (fig. 2). Tous les enfants de moins de ! 5 ans, sauf un appartenaient h ce groupe. Ils 6taient tous dans le coma puisque malgr~ les stimulations vari6es, ils ne reprenaient pas conscience. 2. 11 trac6s sont de faible amplitude et comportent des rythmes en fuseaux plus diffus (fig. 3) : c'est l'aspect classique d6crit par COURJON (1972). Plus de la moiti6 des sujets de plus de 15 ans (10 sur 18) appartient ~tce groupe, alors qu'on ne le trouve qu'une lois sur 26 chez les enfants de moins de 15 ans. 3. 4 cas ont des rytlunes en fuseauxtrop lents. Deux d'entre eux appartiennent, par aiileurs, ~t l'un des deux groupes pr6c6dents.

4. 26 des trac6s pr~c6dents sont globalement asym6triques, plus amples d'un c6t6. 6 ont des alt6rations ]entes plus nettement localis6es et deux ont des pointes lentes localis6es.

B. Rdactivit$. Quel que soit le type de la r6activit6 E.E.G., le caract~re commun est son extreme bri~vet& Elle n'excEde jamais une vingtaine de secondes, m~me pour des stimulations douloureuses. L'aspect de coma-sorameil avec ses activit6s -~ 12-14 c/s r6apparait toujours en moins d'une minute. L'6veil n'est jamais obtenu et c'est pourquoi on dolt parler de >, mEme lorsque l'asp,~ct E.E.G. est celui du sommeii. On a observ6 plusieurs aspects de r6activit6 61ectrique : 1. 32 lois on observe des ondes tr6s lentes, monomorphes, pouvant durer une vingtaine de secondes ; 2. 6 lois la r6activit6 se traduit par une diminution d'amplitude ; 3. 4 lois on observe des bouff6es de th~ta de 7 8 c/s, pouvant donner un aspect d'~veil prochain, mais celui-ci ne se produit pas ; 4. 3 lois ce sont des complexes K ;

1 58

A. VEROURE-POUSSII'I El" D. SAMSON-DOLLFUS

F0.Fg,

Comme le souligne COURJON (1971), l'amdlioration est lentement progressive. Nous avons constat5 une normalisation ~lectrique assez lente, succ~dant parfois h de brSves p6riodes d'aggravation (ralentissement du tracd ou diminution de la rdactivit6). Sur 38 cas ~'evus dans le topis suivant le traumatisme, seul un cas avait un E.E.G. absolument normal. Par contre, au delh de 6 topis, sur les 12 cas qui ont pu 8tre revus d'un point de rue E.E.G., un seui trac6 est encore perturb6 : il s'agit de pointes-ondes diffuses. Jusqu'h ce trac6, le sujet avait toujours eu depuis le premier E.E.G. des alt(~rations lentes, temporales gauches. Ces ait6rations 5taient en rapport avec une comiti~lit6 clinique post-traumatique. Un autre sujet a fait une crise 6 semaines aprSs le traumatisme. Lui aussi fait partie des trac6s ayant prdsent6 des anomalies localisdes : ddments pointus, rythmiques, po~tdrieurs droits. DISCUSSION

_._...1

2B,(F.L~

1

!

I

I

/

!

1

I

F.$K.G,I

FIG. 2. --- Enfant de 10 ans. Coma post-traumatique grave d'embl6e et devant durer 3 semaines. E.E.G. fair b. la 18 c heure et montrant un aspect de coma-sommeil trds proche de l'aspect E.E.G. habituel du sommeil (6chell6 de temps : I s ; 6chelle d'amplitude 100p.V). A child aged 10 ),ears. Severe intmediate posttraumatic coata lasting 3 weeks. The E E G was recorded at the 18 th hour and showed EEG patterns very similar to the E E G daring sleep (time : i s, amplitude : 100~.V).

5. Cette r6activit6 peut 8tre sym6trique ou asym~trique. Dans ce cas, elle confirme habituellement une asymb.trie du trac6 de fond. C, l~vohttion. L'6volution de ces comas est habituellement favorable. Darts cette s6rie, un seul d6c~s a 6t6 observ6. I1 est survenu le lendemain de l'accident, chez un polytraumatis6 dans un 6tat de collapsus cardiovasculaire. T o u s l e s autres cas ont eu une 6volution favorable.

1. Le pronostic relalivement favorable, d~j~ soulign6 par COURJON et coil. (1971) et par BRICOLO et TURELLA (I973) semble s'~tre encore am61ior6 ces derni6res ann~es, probablemenf en raison d ' u n e am61ioration des conditions de r6animation~ Ce fait est /~ rapprocher des conditions exp6rimentales d'isch~mie c~r~brale chez le lapin, rapportdes p a r SAtNIO et PUTKONEN(1975), qui s•rrtblent avoir observ6 un stade de sommeil inhabituel avec abundance de fuseaux chez les lapins qui r~cup~rent le mieux. 2. Meme en tenant compte du fait que les traumatis6s sont toujours des sujets jeunes, il semble important d'observer q u e les aspects de coma-sommeil ne spat pas !es m~mes chez les enfants et les adultes jeunes. En effet, le h o m b r e d e tracfs rappelant r6ellemerit le stade II avec prides lentes est i m p o r t a n t darts la s6rie pr6sertt6e ici, alors que COURJON (1972) consid6re que l'aspect le plus fr6quent est urt trac6 de faible amplitude : d a n s son groupe de sujets, les adultes sont plus nombreux. I1 est int~ressant de rioter que tousles trac6s de faible amplitude que nous avons observ6s, saul un, Oaient de jeunes adultes et n o n pas des enfants. Chez ceux-ci, il est remarquable d'observer que ce type clinique de coma incontestable s'accompagne d ' u n trac6 qui a pratiquement t o u s l e s caract6res du sommeil physiologique, mais

COMAS-SOMMEILS POST-TRAUMATIQUES

] 59

T.O.D.

R.O.D.

F.R,B. R,O.5.

F,T.G,

FIG. 3. ~ Tract de coma-sommeil de faible amplitude enregistr~ chez une jeune adulte de 19 ans. La r~activit6 h l'appel du nora se l,ait par des ondes lentes (6chelle de temps 1 s ; ~chelle d'amplitude 100 ~V). EEG sleep patterns o f Io w amplitude from a young 19 year-old adult. Reacth, ity after calling his name occu,'s as slow waves (time : 1 s, amplitude : 100 p.V).

fait capital, quel que soit le type de r6activit6, il n ' a jamais 6t6 observ6, darts les cas pr6sent6s, de passage b~ l'6tat de veille. 3. Nous avons volontairement inclus darts ces observations 4 cas particuliers dont les rythmes sigma 6talent lents. I1 est en e f f e t vraisemblable que ces bouff6.es de rythmes h 6 ou 7 c/s 6taient des harmoniques des rythmes sigma habituellement/t 13-14 c/s. 4. L'ensemble des auteurs s'accordent /t penser que ces trac6s c o r r e s p o n d e n t / t des 16sions du tronc c~r6bral. S'agit-il d'une 16sion sp~cil,ique et fonctionn e l l e ? FERGOSON et B~N~Tr ( 1 9 7 4 ) o n t observ6 des perturbations semblables chez un sujet de 37 ans ayant eu une 16sion isch6mique du pont et chez lequel on avait observ6 une inversion des cycles veillesommeil. Cette h y p o t h 6 s e d'inversion des cycles veille'-sommeil chez l'enfant darts le coma a 6t6 propos6e par STERN~ERO et coll. (1973) darts des cas de

coma-sommeil d'origine diverse, non traumatiques observ6s chez l'enl,ant. Cette hypoth~se est reprise par BILLIARD et coll. (1978) /t propos des comas traumatiques. Habitueilement les atteintes vasculaires du tronc c6r6bral~donnent des trac6s >qui sont d ' u n pronostic beaucoup plus sgv~re. La persistance des rythmes ~ 12-14 c/s, figures physiologiques dans le somn~teil e t a fortiori des ondes lentes rappelant le stade II, serait en faveur d ' u n e 16sion fonctionnelle, rgversible, se situant au niveau du tronc c~r6bral et respectant Ic cortex (saul' peut6tre dans le cas d'ondes lentes ou depointeS localis~es, surajou't6es au trac6 de fond). BIBLIOGRAPHIE BILLIARD (IV[.), BALDY-MoULINIER (M.), NEGRE (Ch.), BESSeT (A.), ROQUEFI~UIL (B.) ct PASSOUANT (P.). Organisation du sommeil au d~cours des traumatismes graves avec atteinte du tronc ¢6r6brai, 1978 (communication orale).

I60

A. VERDURE-POUSSIN Ei' D. SAMSON-DOLLFU$

BRICOLO (A.) and TURELLA (G.). Electroencephalographic patterns of acute traumatic coma : diagnostic et prognostic value. J. neurosurg. Sci., 1973, 17, 278-285. BRICOLO (A.), TURAZZi (S.), FACCIOLI (F.), ODORlZZI (F.), SCIARRETTA(G.) and ERCLILANI(P.). Clinical application of compressed spectral array in longterm EEG monitoring of comatose palients. Electroenceph, clin. Neurophysiol., 1978, 4.5, 211-225. CHA'rRIAN (G. E.). WmT~ (J.) and DALY (D.). EEG patterns resembling those of sleep in certain comatose states after injuries to the head. Electroenceph~ clin. Neuroph)'siol., 1963, 15, 272-280. COURJON (J.). Apport de I'E.E.G. en traumatologie cr~nienne. In : P. Wertheimer et J. Descotes, Traumatologie crdnienne, Masson, Paris, 1961, 361 p. COURJON (J.). Traumatic disorder. /n : A. R~mond,

tlandbook of Electroencephalography and Clinical Neurophysiology, vol. 14 B, Elsevier, Amsterdam, 1972, p. 23-25.

COURJON U.), NAQU£T (R.), BAURAND (C.), C H A M A N T (J.), CHOUX (M.), GERIN (P.), LANG (M.), R~VOL (M.) et VZGOUROUX (R. P.). Valeur diagnostique et pronostique de I'E.E.G. duns les suites imm6diates des traumatismes cr~niens. Rev. E.E.G. Neurophysiol., 1971, 1, 133-150. FERGUSON (J. M.) and B~:NNE't-r (D. R.). Sleep in a patient w':th a pontine infarction. Electroenceph. clin. Neuroph),siol., 1974, 36, 210-211. SAIN~O(K.) and PUTKONEN(P. T. S.). Sleep-waking cycle in rabbits after cerebral ischemia. Electroenceph. clin. NeurophysioL, 1975, 39, 663-666. STERNBERG (B.), PLOUIN (P.), LER1QuE-KO~CHLIN(A.') et MisEs (J.). Aspects de sommeii E.E.G. au cours de comas chez l°enfant. Rev. E.E.G. NeurophysicL, 1973, 2, 246-249.

[EEG sleep patterns in post-traumatic coma (author's transl)].

Rev. E.E.G. NeurophysioL, 1979, 9, 2, 156-160. 156 A PROPOS DE TRACI~S DE C O M A S - S O M M E I L S POST-TRAUMATIQUES A. V E R D U R E - P O U S...
312KB Sizes 0 Downloads 0 Views