Pour citer cet article : Chopard G et al., Diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer : l’arbre qui cache la forêt ?, Presse Med (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.03.011. en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.com

Éditorial

Presse Med. 2014; //: /// ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer : l’arbre qui cache la forêt ? [ illes[TD$FIRSNAME.] [TD$SURNAME]Chopard[1,2,3 TD$FIRSNAME]G TD$SURNAME.] , [TD$FIRSNAME]Matthieu[TD$FIRSNAME.] [TD$SURNAME]Bereau[1TD$SURNAME.] , [TD$FIRSNAME]Frédéric[TD$FIRSNAME.] TD$SURNAME]M [ auny[TD$SURNAME.]4, [TD$FIRSNAME]François[TD$FIRSNAME.] [TD$SURNAME]Baudier[5TD$SURNAME.] , [TD$FIRSNAME]Jean-Luc[TD$FIRSNAME.] [TD$SURNAME]Griesmann[TD$SURNAME.]3,6, [TD$FIRSNAME]Pierre[TD$FIRSNAME.] [TD$SURNAME]Vandel[TD$SURNAME.]1,2,3, [TD$FIRSNAME]Jean[TD$FIRSNAME.] TD$SURNAME]G [ almiche[TD$SURNAME.]1,3

1. CHU Jean-Minjoz, centre de mémoire ressources et recherche, service de neurologie, 25030 Besançon cedex, France 2. CHU Jean-Minjoz, service de psychiatrie, 25030 Besançon cedex, France 3. Association pour le développement de la neuropsychologie appliquée, 25000 Besançon cedex, France 4. CHRU, centre de méthodologie clinique, 25030 Besançon cedex, France 5. Agence régionale de santé de Franche-Comté, 25044 Besançon cedex, France 6. Union régionale des professionnels de santé, 25000 Besançon cedex, France

Correspondance : Disponible sur internet le :

Jean Galmiche, ADNA, 26, rue de Vesoul, 25000 Besançon, France. [email protected]

Early diagnosis of Alzheimer’s disease: Are we too close to the tree to see the forest?

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es notions de diagnostic précoce et de dépistage de la maladie d’Alzheimer (MA) restent encore trop souvent liées [1]. Cet amalgame peut expliquer que le dépistage de la MA fasse encore débat comme lors de la dernière conférence internationale de l’association Alzheimer organisée à Boston en juillet 2013, ou encore dans la lettre adressée au premier ministre anglais publiée dans le British Medical Journal [2]. Pourtant, le dépistage systématique de la MA n’est recommandé ni par les sociétés savantes internationales ni par la Haute Autorité de santé (HAS). De même, les différents plans Alzheimer qui se sont succédé (2001–2005, 2005–2007 et 2008– 2012) [3] ne le recommandent pas non plus. En effet, le dépistage est défini par l’Organisation mondiale de la santé comme un moyen permettant de rechercher une maladie encore asymptomatique afin de modifier son pronostic, et n’est donc pas approprié dans le cas de la MA car il n’existe actuellement aucun traitement curatif. Si la HAS ne préconise pas le dépistage de la MA, elle en recommande le diagnostic précoce dès le stade de troubles cognitifs légers (TCL). Cette position a été critiquée par le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) qui, dans un communiqué de presse paru en septembre 2011, souligne que « en l’absence de traitement curatif, il n’est pas justifie´ de de´pister la maladie d’Alzheimer et les maladies apparente´es en population ge´ne´rale, et a fortiori les troubles cognitifs le´gers » [4]. Dans ce communiqué, l’utilisation du terme dépistage à la fois pour une maladie (la MA) et pour un

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Pour citer cet article : Chopard G et al., Diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer : l’arbre qui cache la forêt ?, Presse Med (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.03.011.

G Chopard, M Bereau, F Mauny, F Baudier, J-L Griesmann, P Vandel, J Galmiche

symptôme (TCL) peut entraîner une confusion car elle peut laisser sous-entendre qu’un TCL est obligatoirement une phase prodromale de la MA. Une telle simplification permet alors d’expliquer la position du CNGE en juin 2012 qui se prononce également contre l’intérêt de réaliser « un diagnostic pre´coce par le me´decin ge´ne´raliste traitant, notamment en cas de troubles de la me´moire, qui peuvent eˆtre des symptoˆmes de la phase de TCL ou de de´mence » [4]. Ces positions ont été largement relayées dans la presse grand public. Si certains patients avec TCL sont susceptibles d’évoluer vers une MA, pour d’autres l’état cognitif sera stable voire réversible [5]. Il est surtout important de rappeler que les TCL peuvent être aussi la conséquence de multiples étiologies (troubles anxieux, dépression, perturbations du sommeil, éthylisme, iatrogénie médicamenteuse, troubles vasculaires, diabète, pathologies métaboliques) pour lesquelles nous disposons de traitements curatifs ou de moyens de prévention. Les données de l’activité des consultations mémoire en Franche-Comté (2003–2012) [6], formalisées dans le cadre des différents plans Alzheimer, indiquent que moins d’un tiers des patients consultants pour une plainte cognitive avaient une MA. Ce pourcentage est comparable au dernier recensement diffusé par la banque nationale Alzheimer qui collige toutes les données des consultations mémoire en France. Cela renforce donc la notion qu’un trouble cognitif n’est pas obligatoirement lié à une MA et que la recherche d’une pathologie potentiellement curable est nécessaire. Il y a donc une focalisation sur le diagnostic précoce de la MA. Ce débat de société actuel sur la légitimité ou non d’un diagnostic précoce a peut-être été rendu confus par les ambiguïtés sémantiques, comme celles d’utiliser le même terme de dépistage pour une maladie ou des symptômes [4] ou encore le terme de dépistage précoce de la MA [1]. Il nous paraît donc

souhaitable d’utiliser un autre terme que celui de dépistage pour la mise en évidence des TCL. Face à une plainte cognitive, le panel des syndromes est multiple et celui de leurs étiologies tout autant. La mise en évidence de TCL chez un sujet plaintif ne doit donc pas préjuger dans un premier temps de leur étiologie. Les termes de détection ou encore de repérage de ces TCL pourraient être plus adaptés comme cela est proposé dans le rapport Gallez [3]. Comme nous avons pu le constater dans notre région [6], le médecin généraliste est le mieux à même, une fois formé, d’effectuer ce repérage, car il connaît bien les habitudes de son patient, ses antécédents et les médicaments qu’il prend. Pour cela, il est nécessaire de lui proposer un outil rapide (moins de 5 min), simple à utiliser, non focalisé sur la mémoire mais couvrant plus largement les fonctions cognitives [7]. Cette démarche permet ainsi au médecin généraliste de ne pas adresser d’emblée toute personne ayant une plainte cognitive vers une consultation mémoire. C’est dans un deuxième temps que, devant un trouble cognitif ainsi repéré, les pathologies curables prises en charge, le patient pourra alors être adressé à une consultation mémoire. C’est dans le cadre de cette consultation spécialisée qu’un diagnostic précoce de MA pourra éventuellement être réalisé. Ce diagnostic précoce renvoie à des problèmes éthiques, et en particulier celui de respecter le droit de savoir mais aussi de ne pas savoir pour chacun de ces patients plaintifs [8]. Cette crainte d’un diagnostic précoce de la MA face à un TCL ne doit donc pas justifier la non-prise en charge des nombreuses autres pathologies, potentiellement curables, qui génèrent elles aussi des troubles cognitifs. Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Références [1]

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Jouanny P, Zmudka J, Serot JM. Dépistage de la maladie d’Alzheimer. Les entretiens de Bichat 2011;95-7. Brunet MD, McCartney M, Tomlinson J, Cosgrove J, Deveson P, Marciano SA et al. There is no evidence base for proposed dementia screening. BMJ 2012;345: e8588. Ministères des Affaires Sociales et de la Santé. Les plans Alzheimer 2001-2005 et 2004-2007; 2009, (http://www.sante.gouv.fr/archives-les-plans-2001-2005-et2004-2007.html [Accès le 14/04/2014]).

[4]

[5]

[6]

CNGE. Maladies d’Alzheimer et apparentées : des recommandations à préciser; 2012, (http://www.cnge.fr/ conseil_scientifique/productions_du_conseil_scientifique/maladies_dalzheimer_et_apparentees_des_recommandat/ [Accès le 14/04/2014]). Visser PJ, Kester A, Jolles J, Verhey F. Tenyear risk of dementia in subjects with mild cognitive impairment. Neurology 2006;67:1201-7. Berreau M. Bilan de 10 ans de consultations mémoire en Franche-Comté.([thèse de

[7]

[8]

médecine]) Besançon, France: Université de Franche-Comté; 2013. Chopard G, Vanholsbeeck G, Tio G, Pitard A, Binetruy M, Rumbach L et al. Rapid screening of cognitive change in patients with questionable dementia using the Memory Impairment Screen and the Isaacs Set Test. J Am Geriatr Soc 2009;57:703-8. Université d’été. Alzheimer, éthique et société; 2013, (http://www.leciss.org/agenda/evenements-et-manifestations-externes-au-ciss/ universite-ete-alzheimer-ethique-et-societe2013 [Accès le 14/04/2014]).

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