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REVMED-4728; No. of Pages 3

La Revue de médecine interne xxx (2014) xxx–xxx

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Une cause rare de dysphonie Dysphonia of unusual cause L. Ferries , A. Devauchelle , H. Lévesque , I. Marie ∗ Département de médecine interne, CHU de Rouen, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Disponible sur Internet le xxx Mots clés : Amylose Amylose localisée Atteinte laryngée Diagnostic Traitement

Keywords: Amyloïdosis Localized amyloïdosis Laryngeal involvement Diagnosis Therapy

1. L’histoire Une femme, âgée de 49 ans, était hospitalisée pour une dysphonie associée à une toux sèche évoluant depuis un an et s’étant majorée au décours d’une surinfection bronchique il y a un mois. Ses antécédents médico-chirurgicaux étaient marqués par un adénocarcinome mammaire droit en 1988 (traité par tumorectomie et radiothérapie avec une récidive 10 ans plus tard traitée par mastectomie et chimiothérapie), une cardiopathie ischémique et un tabagisme actif. Son traitement comportait : simvastatine, aspirine et vérapamil. À l’admission, la patiente était apyrétique, le poids était à 58 kg et la taille à 1,62 m. L’examen clinique cardiovasculaire, pulmonaire, abdominal, cutané (absence de purpura, macroglossie) était normal. Le reste de l’examen clinique était sans particularité et notamment ne trouvait pas d’adénopathies périphériques ni de nodule mammaire. L’examen laryngé au miroir

montrait une mobilité laryngée normale et une tuméfaction de la bande ventriculaire gauche antérieure, recouvrant la corde vocale gauche. Les examens biologiques montraient une vitesse de sédimentation à 12 mm à la première heure et une CRP à 3 mg/L. Les autres examens biologiques (numération formule sanguine, ionogramme sanguin, tests hépatiques, électrophorèse des protides sériques, dosage pondéral des immunoglobulines, dosage des chaînes légères libres, immuno-électrophorèse des protides sériques et urinaires) étaient normaux. La bandelette urinaire était négative. Le bilan immunologique (anticorps antinucléaires, anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles) n’était pas contributif. De même, l’enquête infectieuse (sérologie VIH, intradermoréaction à la tuberculine) était négative. Le scanner cervico-thoracique objectivait un épaississement irrégulier laryngé non obstructif (Fig. 1).

2. Le diagnostic ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (I. Marie).

Une amylose laryngée.

0248-8663/$ – see front matter © 2014 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.01.004

Pour citer cet article : Ferries L, et http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.01.004

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Fig. 1. Scanner des tissus mous du cou : épaississement sus-glottique avec épaississement des bandes ventriculaires.

3. Les commentaires Des biopsies laryngées au niveau de la zone épaissie montraient une substance amorphe éosinophilique colorée en rose pâle par le Periodic Acid Schiff (PAS), ainsi qu’une biréfringence verte à la coloration par le rouge congo en lumière polarisée et l’immunofluorescence révélait des dépôts de chaînes légères ␭. La bronchoscopie, le myélogramme, la biopsie de graisse cutanée péri-ombilicale et la biopsie des glandes salivaires accessoires étaient normaux. Les autres examens complémentaires, comprenant un électrocardiogramme, une échographie cardiaque et un électromyogramme des membres étaient également normaux. Le traitement comportait une résection de la lésion laryngée par vaporisation par laser CO2 . Les amyloses constituent des entités anatomo-cliniques liées à des dépôts extracellulaires anormaux de protéines fibrillaires agencées dans différents tissus et organes en feuillets plissés selon la configuration spatiale ␤ qui leur confère une insolubilité et une résistance aux protéases [1,2]. L’amylose ne correspond pas à une seule maladie et les dépôts de substance amyloïde résultent de différents mécanismes physiopathologiques, dont la composition est variable en fonction du type anatomo-clinique de la maladie [1,2]. Ainsi, il faut différencier les atteintes laryngées s’intégrant dans le cadre d’une amylose systémique, d’une amylose héréditaire ou d’une amylose laryngée localisée, comme dans notre observation [3–5]. L’amylose laryngée localisée est une affection rare, qui survient préférentiellement chez les sujets âgés de 40 à 60 ans [3–7]. En l’absence de spécificité des signes d’appel clinique (raucité de la voix, dysphonie, dyspnée, stridor, toux sèche persistante) de la maladie, le délai entre la survenue des premiers symptômes et le diagnostic est souvent long (1–14 ans) [3–7]. En effet, d’autres diagnostics plus fréquents sont, en règle générale, suspectés, ce d’autant que la laryngoscopie peut montrer des lésions évoquant parfois une néoplasie [3–7]. En outre, les aspects laryngoscopiques peuvent revêtir des aspects polymorphes, à type de lésions nodulaires ou d’infiltration plus ou moins étendue [3–7]. L’amylose laryngée localisée est due à des dépôts amyloïdes de type AL. Son composant spécifique protéique est la protéine amyloid light (AL) chain composée de fibrilles formées à partir du fragment N-terminal de chaînes Pour citer cet article : Ferries L, et http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2014.01.004

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légères d’immunoglobuline monoclonale de type ␬ ou ␭ (37,5 % et 62,5 % des cas, respectivement) synthétisées par un clone plasmocytaire laryngé [6]. De même, notre patiente présentait des dépôts amyloïdes et des chaînes légères ␭ à l’analyse histologique laryngée, en l’absence de prolifération plasmocytaire médullaire. Par ailleurs, l’accent doit être mis sur le fait qu’actuellement, le risque d’évolution de l’amylose laryngée localisée vers une forme systémique est difficile à estimer. De fait, si différents investigateurs n’ont pas relevé d’évolution vers une forme systémique [3–5,8,9], des observations, de patients porteurs d’amylose laryngée localisée et ayant développé une amylose systémique lors du suivi, ont été ponctuellement rapportées [7,10]. De même, dans une série de 11 patients avec d’amylose laryngée localisée, la progression vers une amylose systémique a été mentionnée dans 9 % des cas [7]. Enfin, une extension des lésions d’amylose laryngée à la trachée a également été décrite [6]. Dans notre observation, la patiente ne présentait pas d’amylose systémique lors du diagnostic initial et du suivi évolutif à 5 ans de la maladie. Néanmoins, elle a une surveillance annuelle avec un examen clinique afin de déceler des signes cutanés et extra-cutanés orientant vers une amylose systémique et un bilan biologique incluant une électrophorèse des protides sériques et un dosage des chaînes légères libres. Enfin, le traitement des lésions d’amylose laryngée localisée n’est, à l’heure actuelle, pas codifié. Le traitement de l’amylose laryngée localisée symptomatique repose en premier lieu sur la vaporisation par laser CO2 (comme chez notre patiente) mais une résection chirurgicale plus agressive (laryngectomie partielle) peut aussi être proposée [3–8]. Le risque de récidive est théoriquement faible lorsque le traitement endoscopique a permis une destruction complète des lésions laryngées. Cependant, l’exérèse complète des lésions amyloïdes n’est que rarement possible avec le traitement endoscopique, en raison de l’accessibilité difficile de la région sousglottique. Les récidives surviennent, dans la plupart des cas, durant les 5 ans suivant le traitement, mais elles peuvent être plus tardives [6]. Ainsi, notre patiente a présenté une récidive des lésions d’amylose laryngée localisée lors du suivi à 3 ans. Dans tous les cas, compte-tenu de la gravité potentielle de l’atteinte laryngée (hémorragie, sténose, ou obstruction laryngée) [4,5,11,12], un suivi prolongé est indispensable chez ces patients afin de dépister le plus précocement possible une récidive locale.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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