Rec¸u le : 22 mai 2012 Accepte´ le : 11 mars 2013 Disponible en ligne 17 avril 2013

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Cas clinique

Pneumoparotide : une e´tiologie rare de tume´faction parotidienne re´cidivante Pneumoparotid: A rare cause of recurrent parotid swelling R. Nicota,*,b, L. Myona,b, S. Konopnickia,b, J. Ferria,b,c,d, G. Raoula,b,c,d a Service de chirurgie maxillo-faciale et stomatologie, hoˆpital Roger Salengro, 2, avenue Oscar-Lambret, 59037 Lille cedex, France b Universite´ de Lille Nord de France, UDSL, 59000 Lille, France c Inserm U 1008, Controlled Drug Delivery Systems and Biomaterials, 59000 Lille, France d International Association of Oral and Maxillofacial Medicine (IAOMM), 7, bis rue de la Cre´ativite´, 59650 Villeneuve-d’Ascq, France

Summary Introduction. Pneumoparotid is a rare cause of recurrent parotid swelling. It is often fortuitous, caused by an action inducing intraoral pressure, increased or self-induced. Observation. An 8-year-old boy presented with recurrent right unilateral parotid swelling for 2 years. A CT-scan was performed, outside of the acute phase, which revealed the presence of intraparotid air bubbles. Discussion. Pneumoparotitis results from air flowing back into Stensen’s duct, due to an anatomical abnormality and a significant increase of intraoral pressure. The diagnosis is made on clinical examination, often completed by a morphological examination (cervicofacial CT-scan or parotid ultrasound investigation). The outcome is most often favorable, with symptomatic treatment, and sometimes antibiotic prophylaxis. Patient education is the best means to prevent recurrence. ß 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Re´sume´ Introduction. La pneumoparotide est une e´tiologie rare de tume´faction parotidienne re´cidivante. Elle peut survenir de manie`re fortuite, lors d’activite´s occasionnant une augmentation de la pression intra-orale ou eˆtre auto-induite Observation. Un jeune garc¸on de huit ans pre´sentait une tume´faction parotidienne unilate´rale droite re´cidivante depuis environ deux ans. Le scanner re´alise´ lors du bilan e´tiologique et en dehors de la phase aigue¨ montrait des bulles d’air intraparotidiennes. Discussion. La pneumoparotide re´sulte d’un afflux re´trograde d’air dans le canal de Ste´non, cause´e par une anomalie anatomique et une forte augmentation de la pression intra-orale. Le diagnostic est clinique, souvent comple´te´ d’un examen morphologique (scanner cervicofacial ou e´chographie parotidienne). L’e´volution est le plus souvent favorable avec un traitement symptomatique comprenant parfois une antibioprophylaxie. L’e´ducation du patient est essentielle pour e´viter les re´cidives. ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Keywords: Parotitis, Pneumoparotitis, Parotid gland, Stensen’s duct Mots cle´s : Parotidite, Pneumoparotidite, Glande parotide, Canal de Ste´non

Introduction Les tume´factions parotidiennes re´cidivantes sont fre´quentes chez l’enfant et l’adulte jeune. On recense des e´tiologies infectieuses (virales ou bacte´riennes), me´taboliques (diabe`te, * Auteur correspondant. e-mail : [email protected] (R. Nicot).

maladie de Cushing, hypothyroı¨die), syste´miques (maladie de Wegener, sarcoı¨dose), ne´oplasiques ou obstructives. La pneumoparotide (ou pneumoparotidite) est une e´tiologie rare de tume´faction parotidienne re´cidivante. Elle se de´finit par la pre´sence d’air au sein de la glande parotide ou du canal de Ste´non [1]. La physiopathologie retrouve une incompe´tence des syste`mes antireflux (ostium du canal de Ste´non, contraction musculaire du buccinateur) en cas d’augmentation de la

2213-6533/$ - see front matter ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. http://dx.doi.org/10.1016/j.revsto.2013.03.005 Rev Stomatol Chir Maxillofac Chir Oral 2013;115:111-113

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R. Nicot et al.

Rev Stomatol Chir Maxillofac Chir Oral 2014;115:111-113

pression intra-orale [2]. Elle peut eˆtre uni- ou bilate´rale. Plusieurs activite´s et circonstances favorisantes ont e´te´ de´crites : souffleurs de verre, pratique d’un instrument a` vent [3], pathomimie [4], toux, de´compression rapide chez les plongeurs. Des e´tiologies plus rares, telles que le port d’un appareil orthodontique [5], ont e´galement e´te´ incrimine´es. Une surinfection bacte´rienne ascendante peut la compliquer, alors responsable d’une parotidite bacte´rienne. Nous rapportons ici un cas de pneumoparotide unilate´rale droite, re´ve´le´e par une tume´faction parotidienne re´cidivante homolate´rale.

Observation Un garc¸on de huit ans s’est pre´sente´ dans le de´partement de chirurgie maxillofaciale et stomatologie du CHRU de Lille en fe´vrier 2012 pour la prise en charge d’une tume´faction parotidienne unilate´rale droite, re´cidivante depuis environ deux ans. Lors des pre´ce´dentes consultations aux urgences pour la prise en charge d’une tume´faction parotidienne droite aigue ¨, le bilan clinique retrouvait un patient apyre´tique, sans signes inflammatoires locore´gionaux, ni de pus a` l’issue du canal de Ste´non. Le bilan biologique ne mettait pas en e´vidence de syndrome inflammatoire. Lors d’une pre´ce´dente hospitalisation en pe´diatrie, un bilan paraclinique biologique avait e´te´ re´alise´. Les diffe´rentes se´rologies (VIH1 et 2, viroses respiratoires de type grippe A et B, ente´rovirus) e´taient ne´gatives. On retrouvait des arguments pour une immunisation ancienne a` cytome´galovirus et au virus ourlien. La plombe´mie affichait un taux infe´rieur au seuil de toxicite´. Lors de notre examen clinique, l’anamne`se retrouvait une tume´faction parotidienne droite re´cidivant tous les trois mois, non rythme´e par les repas, de re´solution spontane´e en deux a` trois jours. On notait la pratique re´gulie`re de la natation avec se´ances de plonge´e en apne´e et la mastication re´gulie`re de chewing-gum, sans que ces habitus ne puissent eˆtre formellement relie´s aux symptoˆmes pre´sente´s. Le patient e´tait apyre´tique. On ne notait pas de tume´faction parotidienne, d’ade´nopathies cervicoparotidiennes, d’emphyse`me sous-cutane´ en regard ou de paralysie faciale a` l’examen physique. L’examen endobuccal re´ve´lait un e´coulement salivaire clair au Ste´non, sans inflammation de la papille parotidienne. Le scanner re´alise´ en dehors d’une phase aigue ¨ ne retrouvait pas d’obstacle intra- ou extracanalaire, ni de masse intraparotidienne. On notait cependant la pre´sence de bulles d’air intraparotidiennes permettant de faire le diagnostic positif de pneumoparotide (fig. 1). Le patient s’est spontane´ment pre´sente´ a` notre consultation quelques semaines plus tard, le lendemain de la survenue d’un e´pisode de tume´faction. On retrouvait une tume´faction parotidienne droite mode´re´e, indolore, sans signes inflammatoires, ni emphyse`me (fig. 2). Le reste de l’examen n’e´tait pas modifie´. La prise en charge a consiste´ en une information du patient et de ses parents,

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Figure 1. TDM cervicofaciale avec injection de produit de contraste mettant en e´vidence des bulles d’air au sein de la glande parotide (fle`che blanche) et du canal de Ste´non.

associe´e a` une modification des habitus (arreˆt de la plonge´e en apne´e lors des se´ances de natation, diminution de la consommation de chewing-gum). Il n’a pas e´te´ prescrit d’antibiothe´rapie ou de traitement symptomatique.

Discussion Le pneumoparotide uni- ou bilate´rale est une affection rare et peu de´crite dans la litte´rature. Elle reste ne´anmoins un diagnostic a` savoir e´voquer devant une tume´faction parotidienne re´cidivante. L’anatomie du canal de Ste´non e´vite normalement un afflux re´trograde d’air au sein de la glande parotide. Le clapet muqueux recouvrant la papille parotidienne, le petit diame`tre de celle-ci et le passage au travers des muscles buccinateurs du canal de Ste´non sont des e´le´ments anatomiques prote´geant de cet afflux [2–4] re´trograde d’air au sein de la parotide et de son canal. Chez certains patients, une anomalie anatomique et une forte augmentation de la pression intra-orale [1–4] peuvent aboutir a` la pneumoparotide. Le diagnostic clinique est aise´ en cas d’emphyse`me sous-cutane´ associe´ a` une tume´faction parotidienne homolate´rale. La palpation peut alors re´ve´ler des cre´pitations. Une salive mousseuse est parfois observe´e a` l’orifice du canal de Ste´non. Des sensations de geˆnes ou de douleurs homolate´rales ont e´te´ rapporte´es. Une e´chographie peut eˆtre re´alise´e en premie`re intention lorsque les signes cliniques sont plus frustes et qu’une pneumoparotide est suspecte´e [6]. Dans notre cas, le diagnostic a e´te´ porte´ par l’examen tomodensitome´trique cervicofacial. Celui-ci re´ve´lait des bulles d’air au sein de la

Pneumoparotide : une e´tiologie rare de tume´faction parotidienne re´cidivante

Figure 2. Tume´faction parotidienne droite mode´re´e (fle`che blanche) vue de trois quarts (a` gauche) et de dessus (a` droite).

glande parotide et du canal de Ste´non, permettant de faire le diagnostic de la pathologie. Le scanner permet e´galement de rechercher une sialectasie, te´moin d’une chronicisation de la pathologie. Dans certains cas, le diagnostic positif peut ne´cessiter la re´alisation, lors de l’examen tomodensitome´trique, d’une manœuvre de Valsalva [7]. On reproduit une augmentation de la pression intrabuccale au-dela` du seuil de pression pathologique permettant de faire le diagnostic en dehors de la phase aigue ¨. La sialendoscopie permet de visualiser des bulles au sein du canal de Ste´non ou de la glande parotide. Elle permet e´galement de mettre en e´vidence certaines complications (la sialectasie), mais e´galement de poser des diagnostics diffe´rentiels tels que : lithiases radioclaires, ste´noses du Ste´non. Dans ce cas clinique, la sialendoscopie n’a pas e´te´ re´alise´e, le diagnostic ayant e´te´ porte´ lors de la re´alisation du scanner. Les pneumoparotides re´cidivantes se re´solvent de fac¸on spontane´e en un a` trois jours sans traitement spe´cifique [8]. La prise en charge rele`ve essentiellement d’une information sur la pathologie, afin de permettre l’e´viction des facteurs de´clenchants. On cherche a` diminuer les comportements a` l’origine d’une augmentation de la pression intrabuccale. L’identification des ces derniers est primordiale. Une prise en charge psychologique ou psychiatrique peut eˆtre ne´cessaire en cas de troubles obsessionnels compulsifs ou de pathologie psychiatrique associe´e. La pathomimie est une des e´tiologies connues et doit faire rechercher un be´ne´fice secondaire. Une antibioprophylaxie par amoxicilline peut se justifier afin d’e´viter la survenue d’une parotidite bacte´rienne ascendante a` cocci Gram+ lors de la phase aigue ¨ [8]. En cas de pneumoparotidite ave´re´e, une antibiothe´rapie curative est recommande´e. Il faut rassurer le patient sur sa pathologie et lui expliquer les mesures locales (massages parotidiens, hydratation abondante). Des sialogogues peuvent eˆtre associe´s a` la phase aigue ¨. Exceptionnellement, des traitements radicaux ont e´galement e´te´ propose´s dans les formes les plus se´ve`res et

re´cidivantes : parotidectomie totale conservatrice du nerf facial, transposition du canal de Ste´non dans la fosse amygdalienne ou ligature des canaux salivaires principaux [8–10].

De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

Re´fe´rences [1]

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[Pneumoparotid: a rare cause of recurrent parotid swelling].

Pneumoparotid is a rare cause of recurrent parotid swelling. It is often fortuitous, caused by an action inducing intraoral pressure, increased or sel...
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