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L’Encéphale (2014) xxx, xxx—xxx

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CLINIQUE

Trouble bipolaire type I et qualité de vie : étude transversale auprès de 104 patients tunisiens Bipolar disorder and quality of life: A cross-sectional study including 104 Tunisian patients I. Marrag ∗, K. Hajji , M. Hadj Ammar , L. Zarrouk , R. Kachouri , M. Nasr Service de psychiatrie, EPS Tahar Sfar, 5111 Mahdia, Tunisie Rec ¸u le 5 juin 2013 ; accepté le 7 f´ evrier 2014

MOTS CLÉS Trouble bipolaire ; Qualité de vie ; SF-36 ; Évaluation ; Facteurs de risque



Résumé Ce travail avait pour objectifs d’évaluer la qualité de vie des patients présentant un trouble bipolaire type I et d’identifier les facteurs de risque quant à l’origine de cette altération. Cette étude transversale réalisée à la consultation de psychiatrie de l’EPS de Mahdia durant une période de quatre mois a concerné 104 patients bipolaires type I. Les variables étudiées portaient sur les caractéristiques générales des patients, les caractéristiques cliniques et évolutives du trouble bipolaire type I et les données concernant la prise en charge. L’échelle générique de qualité de vie, la SF-36, (Short Form) a été utilisée pour l’évaluation. Une standardisation des scores moyens initiaux a été effectuée. Le score moyen global (SMG) à la SF-36 était de 52,2 et 78,8 % des patients avaient une qualité de vie altérée. Une standardisation a révélé une composante mentale particulièrement plus altérée que celle physique. Les régressions logistiques ont permis d’identifier que la survenue d’une altération de la qualité de vie était en rapport avec des paramètres sociodémographiques et thérapeutiques. La mesure de la qualité de vie permet de concevoir toute personne souffrant de trouble bipolaire dans sa vie entière et non pas seulement sous le seul angle de la maladie. © L’Encéphale, Paris, 2014.

Auteur correspondant. Adresse e-mail : ilyes [email protected] (I. Marrag).

http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.06.002 0013-7006/© L’Encéphale, Paris, 2014.

Pour citer cet article : Marrag I, et al. Trouble bipolaire type I et qualité de vie : étude transversale auprès de 104 patients tunisiens. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.06.002

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I. Marrag et al.

KEYWORDS Bipolar disorder; Quality of life; SF-36; Assessment; Risk factors

Summary Introduction. — Bipolar disorder affects many psychosocial and functional aspects, leading to a real social handicap and an alteration in quality of life. Aim of the study. — To evaluate bipolar patients’ quality of life and to identify the risk factors responsible for a deterioration. Design. — Our cross-sectional study lasted for four months and included 104 bipolar patients treated at the psychiatry consultation of the university hospital in Mahdia. The data were collected through a questionnaire composed of 52 items exploring the general characteristics of subjects, the clinical and evolutional characteristics of bipolar disorder and providing information on the treatment. Quality of life was measured using the SF-36 (Short form) generic scale. A global average score was calculated and it was considered that quality of life was altered if the score was less than 66.7, according to the threshold value of Léan. Moreover, an average score was calculated for each dimension, thus permitting us to identify those most affected. We standardized initial average scores. Results. — The assessment of quality of life revealed a global average of 52.2 and an alteration in 78.8% of patients. The study of the dimensional average scores revealed that all dimensions were affected. The standardization also revealed deterioration in all dimensions, the mental component being particularly more affected than the physical component with respectively estimated scores of 31.7 and 40.5. The analytic approach concerned the relationship between qualitative and quantitative variables and the occurrence of an alteration in quality of life. For this effect, a bivariate study displayed a statistically significant correlation between the eight dimensions of the SF-36 and 8 variables. In order to take into account the relationships that link each variable to the others, and to avoid the bias of the bivariate study, a logistic regression analysis was performed. Only 4 variables with discriminating weight emerged from this analysis. According to the number of dimensions affected, the following factors were classified in decreasing order: absence of leisure activities, lack of stable budgetary resources, absence of professional activity and the association of a psychotropic medication. Conclusion. — This clinimetric approach permitted us to consider the global life of each patient suffering from bipolar disorder. © L’Encéphale, Paris, 2014.

Introduction En tant que concept, la qualité de vie (QdV) liée à la santé suscite depuis quelques années beaucoup d’intérêt pour les essais cliniques et thérapeutiques en psychiatrie et est considérée actuellement comme un critère incontournable dans l’évaluation des politiques de santé. Son évaluation prend toute sa place dès qu’il s’agit de pathologies chroniques en particulier psychiatriques. Certes, la dimension clinique reste au cœur de la maladie bipolaire, néanmoins, la morbidité des troubles bipolaires (TB) ne se résume pas aux seules modifications affectives, elle atteint aussi de nombreux aspects fonctionnels et psychosociaux pouvant aboutir à un véritable handicap social et une altération de la QdV [1,2]. Nos objectifs étaient essentiellement d’évaluer la QdV des patients présentant un trouble bipolaire type I et d’identifier certains paramètres pouvant l’altérer.

Patients et méthodes C’est une étude transversale, réalisée à la consultation de psychiatrie de l’EPS de Mahdia, durant une période de quatre mois. Elle a concerné 104 patients bipolaires type I. Les critères d’inclusion étaient un diagnostic de TB type I selon

le DSM-IV-TR [3], un âge compris entre 18 et 65 ans, une durée d’évolution du trouble supérieure à deux ans, une hospitalisation au moins une fois pour un épisode psychopathologique rentrant dans le cadre du TB type I, une stabilité clinique définie par un score à l’échelle d’impression clinique globale (CGI) égale à 1 : normal, pas du tout malade [4] et un accord préalable du patient. Les critères d’exclusion étaient la présence de cycles rapides, de retard mental ou de démences, d’une affection organique sévère décompensée ou d’une grossesse en cours. Les données ont été recueillies à l’aide d’un questionnaire pré-établi de 52 items permettant d’explorer les caractéristiques générales des patients, les caractéristiques cliniques et évolutives du TB type I et les données concernant la prise en charge. La mesure de la QdV a été réalisée à l’aide de l’échelle générique la SF-36 (Short Form), validée en arabe littéraire [5—7], en considérant ses avantages et sa pertinence. Ce choix n’était pas justifié seulement pour ses qualités psychométriques (spécificité = 84,6 %, sensibilité = 68,85 %, valeur globale d’efficience = 74,76 % et coefficient alpha de Cronbach = 0,82) mais aussi pour la possibilité de standardisation de nos résultats et leur comparaison avec ceux d’autres études utilisant la même échelle ou l’une de ses dérivées (SF-12, SF-20). Elle comporte 36 items répartis en huit dimensions (D1 : activité physique, D2 : limitations

Pour citer cet article : Marrag I, et al. Trouble bipolaire type I et qualité de vie : étude transversale auprès de 104 patients tunisiens. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.06.002

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Trouble bipolaire type I et qualité de vie dues à l’état physique, D3 : douleurs physiques, D4 : santé perc ¸ue, D5 : vitalité, D6 : vie et relations avec les autres, D7 : limitations dues à l’état psychique, D8 : santé psychique). Les réponses aux questions sont cotées de 0 à 100. Un score moyen global (SMG) est obtenu par le calcul de la moyenne des cotations. En se référant à la valeur seuil de Léan et al. [8], on admet qu’un SMG de moins de 66,7 signifie une altération de la QdV. Par ailleurs, un score moyen est calculé pour chaque dimension (SMD) permettant d’identifier les dimensions les plus touchées. Afin de mieux interpréter nos résultats, une standardisation des scores moyens initiaux conformément à l’étude « USA 98 » a été optée avec répartition des dimensions en deux composantes principales, physique et mentale [9]. Les analyses statistiques ont été effectuées en utilisant le logiciel Epi Info 7. Les SMD ont fait l’objet d’une analyse bivariée en utilisant le test Chi2 , puis d’une analyse multivariée. Les coefficients de régression multiple ␤ et R2 ainsi que les significations statistiques correspondantes ont été utilisés pour déterminer les paramètres les plus impliqués dans l’altération de la QdV. L’intervalle de confiance accepté était de 95 % et le seuil de p < 0,05 a été considéré comme significatif.

Résultats Étude descriptive Notre étude a révélé essentiellement une moyenne d’âge de 39 ans, une prédominance masculine avec un sex-ratio (H/F) de 1,41, une absence d’activités de loisirs chez 55,8 % des patients, une présence de pathologies organiques chroniques dans 25 % des cas et de tentatives de suicide chez 21,2 % des cas parmi lesquels un tiers a récidivé. Cette étude a révélé une moyenne d’âge au début du trouble de 25,2 ans, une durée d’évolution du trouble variant de 2 à 38 ans avec une moyenne de 13,8 ans et un nombre total d’épisodes thymiques variant de 1 à 13 avec une moyenne de 4,3. Notre travail a révélé un nombre total d’hospitalisations variant de 1 à 12 avec une moyenne de 3,8 et une association de psychotropes dans 86,5 % des cas correspondant à un thymorégulateur combiné à un antipsychotique classique (79,5 %), à un antipsychotique atypique (6,7 %) et à une benzodiazépine (8,7 %) (Tableau 1).

Qualité de vie L’évaluation de la QdV de l’ensemble des patients a révélé un SMG variant de 17,4 à 87,6 avec une moyenne de 52,2 et un écart-type de 16,25. La répartition des SMG a permis de retrouver que 78,8 % des patients avaient des scores inférieurs à la valeur seuil de Léan attestant une QdV altérée (Fig. 1). La standardisation des scores moyens initiaux a montré que l’activité physique s’avérait la seule dimension non touchée avec un score moyen de 75,6 et

3 Tableau 1 n = 104.

Caractéristiques générales de l’échantillon,

Données sociodémographiques

M ± ET ou n (%)

Âge

39 ± 11,59

Hommes/femmes

61 (58,7)/43 (41,3)

Situation maritale Célibataire

48 (46,2)

Niveau scolarité Aucun ou primaire

50 (48,1)

Activité professionnelle actuelle Absence

60 (57,7)

Ressources budgétaires stables Présence

62 (59,6)

Données cliniques et évolutives Âge au début du trouble Durée d’évolution du trouble Nombre total d’épisodes thymiques Guérison complète entre les épisodes Données concernant la prise en charge Retard de prescription d’un thymorégulateur Nombre total d’hospitalisations Association de psychotropes Présence d’effets secondaires Observance partielle

25,2 ± 8,66 13,8 ± 9,64 4,3 ± 2,55 93 (89,4)

2,9 ± 2,77 3,8 ± 2,37 90 (86,5) 59 (56,7) 51 (49)

M ± ET : moyenne ± écart-type ; n (%) : effectif (pourcentage).

une composante mentale particulièrement plus altérée que celle physique avec des scores estimés respectivement à 31,7 et 40,5 (Fig. 1).

Étude analytique Cette étude a concerné les liens entre les variables quantitatives et qualitatives et la survenue d’une altération de la QdV. L’étude bivariée menée à cet effet, a révélé des corrélations statistiquement significatives entre les huit dimensions de la SF-36 et 8 variables, il s’agissait de l’absence d’activité professionnelle, l’absence de ressources budgétaires stables, l’absence d’activité de loisirs, l’absence d’ami(e)s intimes, la présence d’antécédents familiaux psychiatriques, la présence d’antécédents personnels chirurgicaux, l’épisode le plus récent dépressif et l’association de psychotropes. Pour mieux préciser le réel poids discriminant de ces variables, nous avons effectué des régressions logistiques qui ont permis d’en émerger seulement 4 facteurs associés à une altération de la QdV (Tableau 2).

Pour citer cet article : Marrag I, et al. Trouble bipolaire type I et qualité de vie : étude transversale auprès de 104 patients tunisiens. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.06.002

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I. Marrag et al.

Figure 1

Variation des scores moyens par dimensions à la SF-36.

Tableau 2 Corrélation entre les variables étudiées et les scores moyens par dimension à la SF-36 des patients consultant pour trouble bipolaire. Score moyen par dimension SMD1

SMD2

SMD6

SMD7

6,9 −0,26 0,007

11 −0,33 0,001

10,5 −0,32 0,001

Absence de ressources budgétaires stables R2 6,2 3,4 4 ␤ −0,24 −0,18 −0,19 p 0,01 0,05 0,04

9,3 −0,3 0,002

14,2 −0,37 < 10−4

4,2 −0,2 0,03

8,2 −0,28 0,003

Absence d’activités de loisirs R2 8,5 9,5 ␤ −0,29 −0,3 p 0,003 0,001

7,3 −0,27 0,005

9,5 −0,3 0,001

7,2 −0,26 0,006

3,5 −0,18 0,05

5,1 −0,22 0,02

20,2 −0,44 < 10−4

6,3 −0,25 0,01

Absence d’activité professionnelle R2 9,1 6,3 ␤ −0,3 −0,25 p 0,002 0,01

Association de psychotropes R2 3,9 ␤ −0,19 p 0,04

SMD3

SMD4

4,5 −0,21 0,03

9,3 −0,28 0,003

SMD5

SMD8

5,2 −0,23 0,02

R2 : carré du coefficient de corrélation ; ␤ : coefficient de régression standardisé ; p : signification statistique.

Pour citer cet article : Marrag I, et al. Trouble bipolaire type I et qualité de vie : étude transversale auprès de 104 patients tunisiens. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.06.002

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Trouble bipolaire type I et qualité de vie Tableau 3 bipolaire.

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Résultats d’études comparant l’évaluation de la qualité de vie à l’aide de la SF-36 des patients suivis pour un trouble

Dimension

Leidy et al. [14]

Arnold et al. [15]

Pastelis-Siotis et al. [17]

Have et al. [18]

Kebede et al. [19]

Piccinni et al. [20]

Notre étude

D1 : activité physique D2 : limitations dues à l’état physique D3 : douleur physique D4 : santé perc ¸ue D5 : vitalité D6 : vie et relations avec les autres D7 : limitations dues à l’état psychique D8 : santé psychique

84 86,2

78,8 63,1

80,4 41,2

89,6 77,6

85 60,5

86,7 60

75,6 28,8

59,6 70,9 52 73,2

64,9 61,9 43,6 57,9

68,5 66,6 39,4 58,1

74,1 62,6 58 73,6

69,6 44,1 57,7 53,4

62 64,4 55,8 68,9

60,6 47,8 36,3 28,7

76,2

38,6

17,6

69,5

32,4

55,5

33,6

69,2

55,3

52,4

62,3

58,1

64,3

56,7

Discussion

Résultats

La standardisation des SMD initiaux à la SF-36 de nos patients a montré une baisse attestant une altération de toutes les dimensions et une CM plus altérée que celle physique avec des scores estimés respectivement à 31,7 et 40,5. La comparaison après standardisation de nos résultats avec ceux retrouvés par plusieurs auteurs [14—20] qui ont utilisé la même échelle fait ressortir une altération marquée de la CM et une altération de moindre degré ou non-altération de la CP (Tableau 4). D’autres études évaluant la QdV des patients bipolaires euthymiques avec d’autres échelles sont arrivées aux mêmes conclusions. Ainsi, Gruber et al. [21] dans une étude évaluant la QdV de 2024 patients bipolaires en utilisant le Quality of Life Enjoyment and Satisfaction Questionner (QLES-Q) ont montré une altération de la QdV surtout dans la composante de la satisfaction globale corrélée aux troubles du sommeil. Dans l’étude d’Atkinson et al. [22] portant sur 141 patients évalués à l’aide de l’échelle Quality of Life Interview (QLI), la QdV des patients bipolaires était altérée et ceci en rapport avec un degré moindre de satisfaction personnel. Brissos et al. [23] de même évaluant la QdV de 53 patients bipolaires en remission à l’aide du Word Health Organization Quality of Life Measure-Abbreviated Version (WHOQOL-BREF) ont retrouvé une altération de la QdV dans toutes les dimensions surtout celle psychologique et cette constatation était plus marquée chez les patients présentant des troubles cognitifs.

Qualité de vie

Paramètres liés à l’altération de la qualité de vie

Sept études utilisant le même instrument de mesure que le nôtre (SF-36) et répondant au critère de stabilité clinique ont été recensées. Leur examen a mis en évidence que la QdV des patients bipolaires est altérée même lorsque normothymiques et que cette altération touchait différentes dimensions avec un nombre allant de 2 à 7. La comparaison a permis de constater que la dimension physique (D1) était préservée dans toutes les études et que les dimensions explorant la vitalité (D5) et la santé psychique (D8) étaient touchées dans toutes les études à l’exception de celle de Leidy et al. [14] où cette dernière était non altérée (Tableau 3).

Dans notre approche analytique, l’analyse multivariée a permis d’identifier quatre facteurs ayant des corrélations significatives à l’altération de la QdV des patients bipolaires parmi huit dégagées à l’étude bivariée. En fonction du nombre de dimensions touchées, il s’agissait par ordre d’importance décroissant de l’absence d’activité de loisirs liée à 8 dimensions, de l’absence de ressources budgétaires stables liée à 7 dimensions, de l’absence d’activité professionnelle liée à 6 dimensions et de l’association de psychotropes liée à 5 dimensions. Pour l’absence d’activités de loisirs et de ressources budgétaires stables, ces facteurs sont rarement rapportés dans la littérature et seuls

Méthodologie L’évaluation de la QdV des patients bipolaires a fait l’objet de plusieurs études à l’échelle internationale comportant tant la description des niveaux de fonctionnement que l’évaluation de l’effet des interventions thérapeutiques. Le manque de données probantes publiées en Tunisie sur ce sujet nous a incités à sortir du cadre nosographique habituel centré sur l’appréciation de la gravité clinique et à s’intéresser au vécu des patients bipolaires [10—12]. Lors de ce travail, nous étions confrontés essentiellement à deux problèmes. Le premier a concerné la stabilité thymique des patients bipolaires type I ; à ce propos, nous avons procédé à une évaluation grâce à l’échelle d’Impression Clinique Globale (CGI) [4] et un examen clinique minutieux. Le second a concerné le choix de l’instrument de mesure de QdV à utiliser. En raison de l’absence d’échelles spécifiques pour le trouble bipolaire [13], nous avons opté pour une échelle générique, en l’occurrence la SF-36, qui serait selon Michalak et al. [13], dans une revue de la littérature, l’échelle de mesure la plus recommandée dans l’évaluation de la QdV dans le TB.

Pour citer cet article : Marrag I, et al. Trouble bipolaire type I et qualité de vie : étude transversale auprès de 104 patients tunisiens. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.06.002

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I. Marrag et al. Tableau 4 Résultats des scores moyens par dimension à la SF-36 standardisés des études portant sur la qualité de vie des patients bipolaires.

Leidy et al. [14] Arnold et al. [15] Revicki et al. [16] Pastelis-Siotis et al. [17] Have et al. [18] Kebede et al. [19] Piccinni et al. [20] Notre étude

D1

D2

D3

D4

D5

D6

D7

D8

CP

CM

50,4 48,3 48,1 48,9 52,8 50,9 51,6 46,9

52,3 45,8 46,4 39,6 49,9 45,1 44,9 36,1

45,4 47,7 49,0 49,3 51,7 49,7 46,4 45,9

50,4 46,2 45,2 48,4 46,5 37,8 47,3 39,6

47,6 43,7 42,6 41,7 50,5 50,3 49,4 40,2

45,5 38,9 37,0 38,9 45,7 36,9 43,6 26,2

47,8 35,9 36,5 29,3 45,7 34,0 41,3 34,4

46,6 38,6 37,6 37,0 42,7 40,3 43,8 39,5

50,8 51,5 51,6 51,9 53,3 50,8 50,2 40,5

45,7 35,1 34,0 31,4 42,8 35,5 42,0 31,7

Hirschfeld et al. [24] ont noté que la perturbation de la vie émotionnelle en particulier dans le domaine de loisirs est à l’origine d’une altération de la QdV avec des répercussions importantes sur les plans social et professionnel. Par contre, en ce qui concerne ces répercussions en tant que facteurs altérant également la QdV, plusieurs auteurs rejoignent nos résultats. En effet, Sierra et al. [25] et Wallace et al. [26] confirment que l’absence d’activité professionnelle altère sérieusement la QdV des patients bipolaires. Cette altération serait en rapport avec l’âge précoce au début du trouble, le sexe masculin, le nombre élevé d’épisodes thymiques, la présence de symptômes psychotiques, l’existence d’une personnalité pathologique pré-morbide et la présence de comorbidités somatiques et/ou psychiatriques et d’effets indésirables du traitement. Quant à l’association de psychotropes, les données de la littérature sont divergentes à cet égard. Certaines études [27—29] ont retrouvé des résultats comparables aux nôtres et affirment que l’association de psychotropes est à l’origine d’une altération de la QdV et serait expliquée entre autres par l’influence négative sur l’observance thérapeutique et aussi sur la tolérance. D’autres auteurs [30—33] et après comparaison des scores des différents domaines de la QdV des groupes de patients recevant un thymorégulateur seul et d’autres bénéficiant d’une association d’un thymorégulateur et d’un antipsychotique atypique (Olanzapine), affirment le contraire autrement dit une amélioration du fonctionnement global et de la QdV.

Conclusion En définitive, nos résultats confirment que, même en phase de stabilité clinique, la QdV des patients bipolaires est souvent altérée. Des facteurs tels que l’absence d’activité de loisirs, de ressources financières stables, le chômage et la polymédication sont souvent incriminés. L’amélioration de la QdV revient à considérer ces facteurs dans la prise en charge des patients souffrant de trouble bipolaire.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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Pour citer cet article : Marrag I, et al. Trouble bipolaire type I et qualité de vie : étude transversale auprès de 104 patients tunisiens. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.06.002

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Pour citer cet article : Marrag I, et al. Trouble bipolaire type I et qualité de vie : étude transversale auprès de 104 patients tunisiens. Encéphale (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2014.06.002

[Bipolar disorder and quality of life: A cross-sectional study including 104 Tunisian patients].

Bipolar disorder affects many psychosocial and functional aspects, leading to a real social handicap and an alteration in quality of life...
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