Annales de pathologie (2015) 34, 482—484

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CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur rare de l’angle pontocérébelleux A rare tumor of the cerebellopontine angle Manel Mellouli a,∗, Ibticem Bahri a, Najla Abid a, Adib Boudawara b, Naourez Gouiaa a, Tahya Boudawara a a

Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Habib-Bourguiba, 3029 Sfax, Tunisie b Service de neurochirurgie, hôpital Habib-Bourguiba, 3029 Sfax, Tunisie Accepté pour publication le 24 septembre 2014 Disponible sur Internet le 10 novembre 2014

Observation Une patiente âgée de 37 ans, sans antécédents pathologiques, était hospitalisée pour exploration de céphalées évoluant depuis trois mois associées à une hypoacousie gauche et des troubles visuels. L’examen neurologique montrait une déviation des index et un signe de Romberg positif. Aucun signe urinaire ou abdominal n’a été retrouvé à l’interrogatoire ni à l’examen clinique. La tomodensitométrie cérébrale montrait un processus tissulaire expansif au niveau de l’angle pontocérébelleux gauche mesurant 44 × 33 mm à double composante solide et kystique. Une résection chirurgicale totale de la tumeur a été réalisée. À l’histologie, la tumeur était formée par une prolifération faite surtout de nappes séparées de bandes de fibrose avec présence de boules hyalines. Les cellules tumorales étaient polygonales à cytoplasme clarifié et à noyau rond à chromatine fine, peu atypique. Des ébauches d’enroulements cellulaires étaient notées. Les mitoses étaient exceptionnelles (1 mitose/10 CFG). La coloration de PAS était positive et sensible à la diastase (Fig. 1). Par ailleurs, la tumeur comportait un contingent minoritaire représentant 20 % de la surface tumorale et formé de cellules à cytoplasme éosinophile et à noyau rond ou allongé régulier. À l’étude immuno-histochimique, les cellules tumorales étaient positives pour l’anticorps anti-vimentine et anti-antigène de membrane épithéliale (EMA) et négatives pour l’anticorps anti-CD10 (Fig. 2). L’index de prolifération MIB-1 (Ki-67) était évalué à 15 %. L’évolution de notre patiente était favorable sans récidive tumorale avec un recul court de 6 mois.



Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. Mellouli).

http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2014.09.006 0242-6498/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Une tumeur rare de l’angle pontocérébelleux

Figure 1. Plages de cellules claires séparées par des septa fibreux (HES, grossissement × 100). Encart : contenu intracytoplasmique ) (HES, grossissement × 400). PAS positif ( Sheets of clear cells separated by fibrous septa. (HES, × 100); inset: ) (× 400). intracytoplasmic PAS positivity (

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Figure 2. Immunomarquage positif pour ment × 400). Positive immunostaining for EMA (× 400).

EMA

(grossisse-

Quel est votre diagnostic ?

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Diagnostic : méningiome à cellules claires de l’angle pontocérébelleux Le méningiome à cellules claires (MCC) est une tumeur rare représentant 0,2 à 0,8 % des méningiomes [1]. En 2010, 75 cas ont été rapportés dans la littérature [1]. Il s’agit d’une tumeur de grade II selon la classification de l’OMS. Classiquement, le MCC atteint les sujets jeunes de sexe féminin et il est de localisation médullaire ou pontocérébelleuse [1]. Histologiquement, il est formé par une prolifération monomorphe de cellules polygonales à cytoplasme clair assez abondant coloré par le PAS. Cette coloration est sensible à la diastase traduisant la présence de glycogène. Les plages de cellules tumorales sont séparées par des septa fibrohyalins. Les noyaux sont généralement ronds à chromatine fine, parfois légèrement atypiques. Les images d’enroulements cellulaires sont assez fréquentes contrairement aux psammomes [2,3]. De petits foyers de nécrose peuvent être notés. Dans notre cas, il n’y avait pas de nécrose tumorale. Des secteurs de méningiome méningothélial, sécrétoire, à cellules fusiformes ou à cellules éosinophiles peuvent s’associer [2,3]. Les différents auteurs n’ont pas précisé la proportion de la composante à cellules claires permettant de porter le diagnostic de MCC. Seuls Perry et al. détaillent qu’ils ne considèrent comme MCC que les cas comportant plus de 50 % de cellules claires [4]. Dans notre cas, un contingent à cellules éosinophiles représentait environ 20 % de la surface examinée. Les MCC expriment la vimentine et l’EMA. Les index de prolifération sont variables selon les auteurs. Zorludemir et al. ont rapporté un index de prolifération en moyenne de 13,3 % en cas de récidive et 7,4 % dans les MCC n’ayant pas récidivé [3]. Dans notre cas, l’index de prolifération était évalué à 15 % et il n’y a pas de récidive avec un recul de 6 mois. Le diagnostic différentiel des MCC peut se poser avec un épendymome à cellules claires, un hémangioblastome ou avec une métastase d’un carcinome à cellules claires du rein [5]. Cependant, l’épendymome à cellules claires est caractérisé par la prédominance d’une architecture papillaire et la présence de pseudo-rosettes périvasculaires avec une expression de la GFAP. Les hémangioblastomes sont formés par des cellules stromales claires

M. Mellouli et al. à cytoplasme microvacuolaire, mais la présence d’une prolifération vasculaire associée et l’absence d’expression de l’EMA les distinguent du MCC. Des métastases intracrâniennes de carcinome à cellules claires du rein ont été rapportées dans la littérature. Cependant, dans ces cas, les cellules tumorales sont plus atypiques que dans le MCC. De plus, le profil immunohistochimique caractéristique du carcinome à cellules claires du rein (coexpression de kératine, vimentine et CD 10) permet de résoudre facilement le problème de diagnostic. La chirurgie est le traitement de choix des MCC [1]. Il semble qu’il n’y ait pas de consensus sur la radiothérapie postopératoire [1]. Les MCC ont un potentiel de récidive plus élevé que les méningiomes de grade I de l’ordre de 46 à 80 % [2]. Ces récidives peuvent survenir précocement dans l’année suivant l’opération ou parfois à distance soit cinq à six ans après l’exérèse chirurgicale [1].

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Références [1] Rousselot C, Francois P, Michel Jan A-M, Bergemer. Étude de sept cas de méningiomes à cellules claires et revue de la littérature. Ann Pathol 2010;30:73—82. [2] Tena-Suck ML, Salinas-Lara C, Gomez C, Bojorquez DR. Frontotemporal clear cell meningioma: report of three cases. Ann Diagn Pathol 2007;11:182—9. [3] Zorludemir S, Scheithauer BW, Hirose T, Van Houten C, Miller G, Meyer FB. Clear cell meningioma. A clinicopathologic study of a potentially aggressive variant of meningioma. Am J Surg Pathol 1995;19:493—505. [4] Perry A, Giannini C, Raghavan R, et al. Aggressive phenotypic and genotypic features in pediatric and NF2-associated meningiomas: a clinicopathologic study of 53 cases. J Neuropathol Exp Neurol 2001;60:994—1003. [5] Tong-tong W, Li-juan B, Zhi L, Yang L, Bo-ning L, Huang Q. Clear cell meningioma with anaplastic features: case report and review of literature. Pathol Res Pract 2010;206:349—54.

[A rare tumor of the cerebellopontine angle].

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